Bernie devait avouer que lorsqu’il avait vu Anthea et Billy revenir en catastrophe, bras dessus bras dessous (enfin, au vu de leur atterrissage, c’était plutôt jambe dessus bras dessous coude juste là, bref), il avait craint quelques instants que la Mangemort ne règle son compte à l’infortuné vampire qui avait eu la fâcheuse idée de se trouver à moins de six mètres d’elle. Fort heureusement, l’humiliation pour la mage noire est de courte durée et on les libère promptement. Tandis que la capitaine est conduite dans les quartiers de soins, Bernie se précipite jusqu’à Billy pour lui venir en aide et vérifier qu’il n’est pas trop gravement blessé. Il profite d’ailleurs des quelques jours de battement pour rester à son côté, se remettant de ses émotions du fiasco de Los Pollos, et chemin faisant, lui montre l’amulette de dissimulation qu’il avait malencontreusement arraché à son propriétaire et la confie à Billy. "Je suis à peu près sûr que c’est illégal, mais ça ne t’a jamais vraiment dérangé, pas vrai?" susurre-t-il avec un petit sourire en coin intimidé.

Une nuit, la première pendant laquelle Bernie avait réussi à fermer l’œil plus de quelques minutes (il avait le chic pour toujours être malade ou se retrouver le nez dans les chaussettes sales d’un autre matelot) (vraiment, son appartement avait beau être minable, il était individuel, et Bernie avait perdu l’habitude des dortoirs, depuis Poudlard), un grondement retentit, suivi de près ou de loin par un tremblement dans le bois du navire. Pris de stupeur, Bernie tombe de son hamac, n’a pas le temps d’enfiler une chaussure qu’il claudique comme le reste de l’équipage tiré de son sommeil jusqu’au pont, baguette au poing serré contre sa poitrine.

Il s’arrête aussitôt à peine distingue-t-il l’immense silhouette ténébreuse du dragon, sa respiration coupée de stupeur. Lorsqu’il plisse les yeux pour comprendre à qui Anthea s’adresse (il la considérait comme folle, mais peut-être pas au point de faire la discussion à un dragon, ça, c’était plutôt le genre de folie qu’il pensait Rodolphus Lestrange capable -pas plus tard qu’hier, Bernie avait été persuadé de l’avoir vu monologuer en face d’un tonneau), il réalise avec ahurissement qu’une personne est juchée sur le dos du dragon. Bernie n’avait jamais vu ça, si ça n’était des années auparavant, dans de rocambolesques contes pour enfants.
En chuchotant, il s’adresse aussitôt à la personne à côté de lui: "Il faut faire quelque chose, non? Cette personne est en danger?? Vous croyez que le dragon la retient captive?? Est-ce que c’est réel? Nan parce que j’ai vu des spécimens de poissons magiques qui avaient développé des tumeurs externes qui prennent des formes humaines pour imiter les sirènes et leurrer les marins et—"

Spoiler:

Loin de la cale étrécie et hermétique dans laquelle une partie de l’équipage se repose, Billy roupille dehors et en hauteur - dans le nid de pie. Un œil paresseux s’ouvre mollement quand le navire se met à tanguer, puis un second, tandis que le ballotement général oblige ultimement le vampire à se tenir au rebord d’une main gourde. Il ramasse une jambe qu’il traîne et plie pour lui permettre de se redresser dans une posture plus ou moins assise. Ses breloques récemment acquises ou offertes brillent un instant dans le noir, absorbant le peu de lumière qui persiste sur le navire après l’atterrissage de…?!

Billy fronce ses gros sourcils et bascule un peu plus son torse vers l’avant, croyant un moment être resté dans son rêve psychédélique où Rowle lui sert gentiment des litres de sang dans sa tenue de mariée pendant que Donnachaidh lui fait de l’air avec son gros éventail en forme de carte et que Bernie lui cure les ongles - passons sous silence d’autres détails plus croustillants car ce n’est après tout pas le sujet. Quelques mètres sous lui, un dragon chevauché par une silhouette a priori humaine vient de se poser ; phénomène inouï s’il en est, que le vampire lorgne avec une curiosité d’abord enfantine, ensuite opportuniste. Il passe une main sur sa cicatrice abdominale quand il se penche davantage, ses chairs tirant douloureusement à mesure que sa curiosité enfle et que sa tête se penche depuis le nid de pie.

"Qui vient déranger l'Amaru et ses terres ?" Billy a un frisson de pure excitation. Son bpm pourtant bas et lent s’accélère et, entraîné par l’énergie qui l’habite soudain, il se relève, ses grosses mains agrippées au rebord. "Qui ose vaquer sur son fleuve ? Qui rêve de son trésor ?" Le mot trésor, évidemment, fait briller d’envie les grandes billes du scélérat. "Qui connait son histoire ? - Je m'appelle Anthea Rowle et je suis Capitaine. Nous sommes envoyés par le Seigneur des Ténèbres." Billy grimace, comme se rappelant de ce fait au moment où la Mangemort le prononce. "Et toi, qui es-tu ? Toi qui oses monter à bord de mon navire ?" Le regard du vampire revient observer l’individu, cherchant à percer les ténèbres l’entourant, avant de glisser sur la carrure de la créature qu’il monte. Un Dent-de-Vipère péruvien, dirait Billy, se fiant et à la couleur de ses écailles et à sa taille. Gaffe, capitaine, ils sont friands de chair humaine !, prévient le vampire, mais dans sa tête alors, oops, Rowle n’aura pas entendu. Un sourire pointu se dessine dans la nuit.

Sourire qui se transforme en grimace quand Bernie déboule et rejoint l’attroupement. Chaque pas supplémentaire l’approchant du dragon fait se crisper un autre doigt contre le rebord du nid de pie. "Il faut faire quelque chose, non? Cette personne est en danger?? Vous croyez que le dragon la retient captive?? Est-ce que c’est réel?" Billy baisse la tête, maugréant en silence. "Nan parce que j’ai vu des spécimens de poissons magiques qui avaient développé des tumeurs externes qui prennent des formes humaines pour imiter les sirènes et leurrer les marins et—" Et Billy relève la tête, dans un dépit flagrant, se préparant déjà à devoir sauter de son perchoir pour éviter au sorcier un coup de croc vexé.

tl;dr:

Hayes n'avait pas beaucoup dormi. Hayes n'avait pas envie de dormir. Hayes était entouré d'une aura d'excitation, malgré un léger froncement concentré sur son visage. Son regard ne cessait de bouger de la carte, à l'astrolabe et le ciel. Son regard pétillait depuis qu'ils étaient revenus de leur sortie au port. L'arrivé de la police avait déjà contribué à son euphorie, mais la fuite, le mystère de la carte et maintenant le silence ponctué par le choc de l'eau contre la coque, le murmure de l'air (et quelques fantômes), Hayes se sentait comme le roi du monde, un sentiment qu'il ne prenait pas la peine de dissimuler.

Au creux de son esprit, il y avait ce souhait égoïste que ce voyage ne s'arrête jamais, qu'ils voguent pendant des heures, à la découverte de l'Ucayali et ses affluents. La tentation de les perdre, de prendre un détour, pour gratter quelques jours, une semaine supplémentaire grandissait chaque jour. Qui s'en rendrait vraiment compte de toute façon ? Entre la carte, les étoiles et l'astrolable, Hayes était celui sur tout le monde comptait, il n'y avait peut-être Zephira, qui le connaissait bien qui pourrait bien lire sa poker face, et certainement Jamie qui était toujours dans ses pattes qui pourrait se douter de quelque chose, mais vraiment, Zephira pourrait saisir cette opportunité pour mettre la faute sur Anthea, et Jamie, Hayes la considérait plutôt dans sa team, celle des aventuriers qui étaient bien plus heureux en mer à la recherche de trésor, que coincé au port à attendre la suite. Ce voyage dans l'inconnu dépendant d'une carte, d'un astrolabe et les étoiles, cela n'avait rien d'effrayant comparé à l'idée d'attendre une nouvelle fois un an avant le prochain voyage.

S'il n'avait pas cette marque au bras, Hayes aurait déjà pris ses cliques et ses claques pour jouer les marins à temps plein. Trop tard pour regretter, c'était cette même marque qui avait fait de lui un pirate à l'origine. Il décrochait son regard du ciel pour le reposer sur la carte, dont les traits se faisaient plus précis et il imaginait un instant où pouvait mener les autres bras qui venaient se plonger dans le fleuve. S'il trouvait une petite excuse intéressante pour convaincre Athena et Rodolphus afin de prolonger leur voyage, peut-être qu'il n'aurait même pas à se perdre (et entacher sa réputation de navigateur tmtc). « Dis Hayes. - Hmm ? La voix de Jamie le sortait de ses réflexions et de ses notes, pour se poser sur la gamine, le sourcil se levait, elle est sympa ton truc, mais t'as pas l'impression que cette étoile a changé de position depuis 'taleur? - Tout à l'heure ? » Écho, dans un ton ne masquant guère une légère, Jamie le prenait pour qui ? Il venait de vérifier leur position à l'instant. Hayes regardait dans la direction du doigt, mais il ne voyait rien. Ou plutôt plus rien. « What th— » Il récupérait la carte dans une main, et posait l'autre sur la barre, prêt à réagir, alors que Jamie s'extasiait à ses côtés. Il ouvrait la bouche pour lui dire d'aller chercher le capitaine, le quartier-maître, de réveiller tout le monde, mais il n'avait pas le temps, la carte révélait une nouvelle voie, la brume s'estompait : ils étaient ailleurs.

Une ombre venant les survoler presque aussitôt pour un atterrissage qui avait certainement fait trembler le bois du navire. Cela eut l'effet que le navigateur recherchait, tout l'équipage qui sortit de leur repos, alerte, baguette au poing, diriger vers leur invité et sa monture. Les lumos disparaissent du bout des baguette, et la voix de l'étranger raisonnait, pour que tout le monde présent puisse l'entendre. Hayes est calme, voyant son capitaine s'approcher sans hésitation, fidèle à elle-même. Appuyé à la barre, un sourire amusé, le navigateur observait la scène, voyant Bernie s'agiter, Zephira non loin d'Anthea (tenter par l'idée de la balancer dans la gueule de l'animal à la moindre occasion ?). L'Amaru. Il avait potassé le sujet, mais il était curieux de savoir ce que l'homme souhaiter partager à propos de la créature et ses terres. Curieux de savoir si le cavalier serait un allié, qui trouvera leur audace amusante, ou un ennemi qu'il faudra affronté.

Résumé:

Spoiler: