tw: violence, sang

Leur existence se délitait morceau par morceau ; et Savage avait seulement pris conscience, avec effroi, que l'origine de leur déroute se trouvait être le mariage.
Cette attaque qu'elle avait planifiée, sans l'accord de Numa – elle avait dû lui arracher une vague approbation du bout des lèvres, abandonnée dans un soupir devant l'entêtement de la Halfer. Cette attaque dont elle avait été certaine de la réussite, rabâchant avec assurance ce plan frontal, dénué de véritable route de sortie – pas besoin, avec leur force et leur soif de vengeance –, inspirée par le cass fulgurant du sous-sol du Dancing Phoenix, et de l'incendie qui avait mis en déroute les Sangs-Purs bien pensants.

Sauf qu'Aoife et Chaghan avaient été englouti dans le tumulte – la morsure des yeux bleus de la Selkie l'avait poursuivie depuis qu'on lui avait rapporté qu'elle avait été prise. Une très mauvaise idée. Savage avait ravalé sa bile, et ordonné aux troupes de déménager dans l'heure ; elle avait tremblé à l'idée qu'on puisse les retrouver, et avait trouvé du réconfort dans celle qu'ils avaient échappé au radar du gouvernement, de l'Ordre et de leurs ennemis multiples combinés depuis de longues années. Même les Rosier n'avaient pas suffi à les mettre sur leur piste. Ce n'était pas maintenant qu'on allait flairer leur piste.

L'attaque avait éclaté au milieu de la nuit ; une explosion fulgurante avait retenti, et un sort avait manqué de cueillir Savage au sortir de sa tente.

Lorsqu'elle était sortie de sa transe, elle se trouvait de l'autre côté de la barrière, à des kilomètres de là, à rassembler les pans restants de leurs troupes. Rivage avait disparu, Egon était parti en fumée sous ses yeux, et Malee restait introuvable ; ils n'étaient que des miettes éparpillées, cette fois, que ses yeux égarés parcoururent à l'aube de la descente virulente de la Brigade (des brigades, les couleurs des uniformes s'étaient confondues dans le tumulte), s'éveillant seulement à la réalité des faits.

Ils étaient dans la merde. La moitié de leurs effectifs avait disparu dans la nuit et dans leur précipitation, ils n'avaient pu récupérer que quelques armes et potions, et durent par la suite fondre en territoire moldu, dans l'urgence, afin de récupérer les réserves nécessaires à leur survie.

Savage avait peur, marinant dans une anxiété qui se révélait à elle maintenant qu'ils disparaissaient un à un ; elle dormait peu, les nerfs tendus par l'angoisse qui la rongeait, et souffrant terriblement de la blessure qui lui brûlait le torse, plus vivace encore la nuit tombée, comme si elle attendait le moment propice pour se faire sentir. Elle était allée se coucher, une nuit, à même le sol de la tente de Numa – lorsqu'il lui avait demandé ce qu'elle fichait là, réveillé par son foutu sixième sens, ou ses foutues runes d'alerte, elle lui avait dit qu'elle se sentait seule. Le lendemain, elle était revenue – et cette fois Numa s'était décalé, l'invitant à s'allonger auprès de lui, refusant qu'elle dorme au sol, encore une fois. Savage avait franchi la barrière interdite, molletonnée de respect et d'admiration qui rendait Numa intouchable, mue par la peur qui transcendant jusque la tristesse d'avoir perdu ses proches, et s'était couchée au bord du matelas, le plus loin possible du leader.

Puis un soir, le cauchemar avait recommencé.

Savage s'était réveillée en sursaut, et dans l'obscurité, elle avait cherché, en panique, la silhouette de Numa à ses côtés ; ses deux yeux ouverts la cueillirent, et un pressentiment furieux fondit sur elle, dans le silence trompeur de la nuit. ”J'vais aller voi...” Et une explosion retentit violemment de l'autre côté de leur camp de fortune.

Un déjà-vu sourd l'assaillit sitôt qu'elle sortit de la tente : les flammes et les filets blancs, une dizaine de silhouettes fondant sur les tentes gauchement érigées – mais ceux-ci n'avaient pas l'uniforme, ni l'unité entraînée des brigades sorcières, et Savage sentit les effluves prenantes d'hybrides inconnus. ”Dégagez bordel !” Et elle jeta l'une des précieuses bombes Inferno (l'une des dernières, que l'on avait refabriqué en catastrophe dans leur fuite) sur un duo d'hybrides s'en prenant à un troisième – who the fuck are they?

Un sort l'atteint en plein buste, la projetant en arrière ; et Savage, la respiration coupée, se traîna sur un mètre, suffoquant, en alerte, s'appuyant difficilement sur le sol pour se remettre sur pieds. ”On peut pas transplaner !” L'écho de la voix résonna durement à ses tympans – fucking shit, fuck, fucking fucker, ils allaient y passer si elle ne se dégageait pas d'ici (si elle et Numa ne dégageaient pas d'ici). ”Boss”, sa gorge était sèche, écorchant sa voix qui peinait à se faire un chemin hors de ses poumons. Savage passa un bras dans le dos du leader pour l'aider à se lever du lit. ”Il faut qu'on dégage”, siffla-t-elle difficilement, attrapant son poignet opposé pour le soutenir convenablement – sa peau craquelée et brûlante, sur l'épaule où s'appuyait Numa, lui fit serrer les dents pour retenir un cri de douleur.

Il y eut d'autres cris, à l'extérieur ; Savage se sentait vulnérable, impuissante, dépouillée de ses précieuses bombes et potions – elle jeta un fumigène au visage d'un uniforme et pressa le pas en direction de la forêt.
Un uniforme ; le nombre d'assaillants avait doublé, et la Halfer tiqua violemment sur la salve de sorciers déboulant sur eux.

Son cœur battait à cent à l'heure, et lorsqu'elle vit fondre sur eux un des Hounds de la VB, elle repoussa Numa et envoya son pied dans le plexus du vampire – et lorsqu'elle se retourna un autre l'attendait, son odeur familière l'enveloppant avec une vague de soulagement presque brutale, au milieu de l'adrénaline. ”Baruch”, fit-elle de sa voix sifflante, et elle se tut pour désigner les bois, s'économisant la douleur que parler lui infligeant. ”Emmène-le”, et alors qu'elle leur adressait un regard, une lourde masse s'abattit violemment dans son dos, la projetant face à terre.

Elle se retourna en ruant, et donna un autre coup de pied au Hound, son coude s'écrasant contre son visage blanc – un craquement douloureux retentit lorsqu'il la bloqua et lui envoya un prodigieux direct du droit sur le nez.

Non, non – non. Ce ne pouvait pas être la fin, pas pour elle, pas pour eux.

Savage recracha du sang et de la poussière, cherchant à agripper le col du vampire, ses jambes bloquées par les siennes ; puis il y eut un nouveau coup, en plein sur son cœur, là où la brûlure la dévorait le plus – la douleur manqua de la faire tourner de l'oeil, et d'autres mains agrippèrent ses cheveux, la tirant en arrière, l'entraînant sur cette pente vertigineuse qui donnait droit sur un gouffre.

tw: violence, sang

Aoife a disparu, absorbée par la confusion de l’attaque du mariage Travers-Abbott, les craintes du lycanthrope matérialisées en un éclair, ne lui laissant aucune marge de manœuvre pour réagir ou empêcher cet inévitable.

Aoife a disparu, et la colère de Sofiane a explosé dans sa chair de façon autrement plus violente et soudaine, ravageant la multitude d’efforts fournis par une vie à rester en contrôle. Par des mois à marmonner que la violence pure et dure ne résoudrait rien, la soif de vengeance de ses compagnons de fortune jugée à distance par ses yeux sombres.

Aoife a disparu, et la colère de Sofiane a explosé, et Sofiane n’a personne envers qui rediriger cette colère. Blâmer Savage serait d’une injustice dont il ne sait faire preuve ; car chacun était parfaitement conscient des risques encourus, lui le premier, malgré ses réticences évidentes - et gronder un told you so à la cheffe par intérim du groupe d’hybrides ne ramènerait pas la demi-Selkie, ni le reste des disparus de la NSFW. Blâmer ceux qui ont enlevés les leurs, la solution la plus logique, reviendrait à hurler face au vent jusqu’à l’épuisement : un effort qui le consumerait autant que le reste de ses compagnons. Se blâmer lui-même, d’avoir laissé glisser entre ses doigts sa seule ancre ne ferait que le ronger un peu plus de l’intérieur - là où il n’y a plus rien qu’un grondement assourdissant grattant à la surface de sa peau.

Sofiane est en colère, et Sofiane n’a personne à mordre.

Sofiane est d’autant plus en colère qu’il s’est trouvé aussi impuissant qu’au mariage, lorsque les équipes de la Brigade sont venues les cueillir en pleine nuit, quelques jours à peine après leur échec cuisant. Même les coups qu’il a généreusement distribués dans confusion, satisfaisant la bête grognant sans retenue cette fois-ci, ne sont parvenus à faire taire cette rage insidieuse. Parce qu’ils n’ont rien pu faire, encore, parce qu’ils ont dû fuir, encore, parce qu’ils ont dû laisser derrière eux des frères et sœurs d’arme, encore. Parce que cette liberté bancale et instable retrouvée au cœur de l’Irlande du Nord s’est étiolée, avant de fondre comme neige au soleil. Il n’en reste plus qu’une flaque poisseuse et entêtante, dans laquelle se baigne le loup, y tournant en rond, sous la réalisation qu’il est désormais atteint par la même fureur courroucée que les hybrides dont il partage le quotidien depuis trois mois. Sofiane n’est pas si différent d’eux, il ne l’a jamais été - seulement, il en prend tout juste conscience, assommé et nerveux. Il aura fallu qu’il se voit dépouillé de la moitié de ses compagnons pour devenir un résistant de la NSFW.

Dormir sans garder un œil ouvert n’est plus une option, quand il est capable de trouver un peu de sommeil. Le reste du temps, Sofiane veille, tourne encore et toujours comme un lion en cage, réclamant des solutions qu’ils n’ont plus auprès des autres, animé avec un train de retard par cette soif de vengeance et d’action. Comme ce soir, à ruminer leur situation catastrophique, entre deux silences et grognements, auprès de Baruch, le vampire devenu un allié dans cette tumulte trop rapide et lente à la fois - peut-être parce qu’il était également un ami d’Aoife, peut-être parce qu’il est l’un des seuls hybrides restants dont la compagnie ne lui semble pas étouffante.

Ils n’ont pas besoin d’échanger le moindre mot, quand leurs sens affûtés, les instincts de leurs malédictions respectives, s’éveillent pour les alerter du danger approchant, encore - l’hémovore et le lycanthrope se levant en choeur après un bref échange de regards, avant qu’une détonation éloquente, à une vingtaine de mètres d’eux, ne fasse bondir le coeur de Sofiane dans sa poitrine. Se précipiter vers la source de l’explosion n’est pas une solution, alors que des silhouettes s’élancent déjà vers eux, baguettes à la main et crocs acérés ; et parmi cette foule inconnue, certains parfums se dégagent, précédant quelques traits familiers, des fantômes sortis tout droit du sous-sol sombre du Dancing Phoenix - d’une vie passée. Il n’est plus question de fuir, cette fois-ci, encore moins quand il reconnaît certains assaillants, éveillant en lui les restes éparpillés de Rabid - quitte à redevenir un monstre, quitte à rester en arrière pour permettre aux autres de s’en sortir.

Ils ne vont pas se faire prendre, encore.

Nerveux mais assuré, le poing de Sofiane échoue dans un craquement sur la mâchoire d’un vampire cherchant à lui porter un coup similaire ; son second assaut contré d’un sortilège qui l’envoie planner à quelques mètres, Sofiane se retourne pour esquiver de justesse un éclair rougeâtre déchirant la manche de sa veste, et, au passage, la chair tendue de son bras gauche. Fuck. Il peut sentir l’effluve ferreuse de son sang envahir ses narines, en même temps que l’odeur désagréable du soufre et de la magie s’élevant aux quatre coins du camp. C’est une évidence qu’il ne lui faut pas plus longtemps pour noter : ils sont encerclés, et incapables de transplaner, lui semble-t-il, quand il cherche à se déplacer en direction des tentes à l’autre bout de leur campement de fortune, et que le sol ne se dérobe pas sous ses pieds.

”Bouge, vite !”, gronde Sofiane à une jeune louve de leur groupe qu’il relève par le col dans sa course, après avoir manqué de trébucher sur sa carcasse échouée au sol. Les explosions jaillissent partout où son regard se pose - qu’elles proviennent de ses mains s’agitant dans l’air, des projectiles lancés par les siens, des sorts de leurs assaillants. Les forces qui cherchent à les faucher sont trop nombreuses, désormais, rejointes par celles d’autres sorciers, d’autres hybrides ; et les leurs sont trop éparses, trop affaiblies.

Ils vont se faire prendre, encore.

Sofiane a perdu la trace des siens, même celle de la louve, se fraye difficilement un chemin jusqu’aux abords du campement en repoussant leurs ennemis de ses poings et de sa colère sourde éclatant magiquement au creux de ses paumes. Ce ne sera pas suffisant, il le sait, pourtant il continue de se battre et de serrer les dents quand sa peau se retrouve un peu plus écorchée par les offensives des Warlocks - et des Hounds, lui semble-t-il maintenant, à en juger par leurs uniformes.

Et en voyant, à la lisière de la forêt, se dessiner les silhouettes de Savage, Numa et Baruch, Sofiane prend une profonde inspiration et se retourne, un dernier demi-tour décidé : si au moins ces trois-là peuvent s’en sortir, il ne se sera pas battu pour rien - pour la première fois de sa vie, cette violence aura un sens. ”Oh, Sofiane. Hey.” Il n’a pas le temps de faire volte-face à cette voix familière, quand la vampire en uniforme lui décroche un chassé dans le creux du genou, l’obligeant à le ployer maladroitement et à prendre appui sur le sol - avant de s’y écraser dans un cri assourdissant. Le reste n’est que douleur, au sortilège impardonnable qui le touche de plein fouet, le laisse gémissant et convulsant à même la terre humide, incapable de lutter contre les mains qui se referment sur lui et l’éloignent, pour de bon, de ce qu’il reste de la NSFW.

Tout allait bien.
Tu avais mis ta meute dans la confidence. Ils n’allaient pas tarder à vous rejoindre. Numa avait accepté cette idée ; tu avais voulu comprendre que Sav aussi.
Alors tout allait bien.
Même si, à l’annonce de ton allégeance à la NSFW, ta meute s’était mise à souffler et à protester, jugeant ce « plan » (et ça y était allé avec les guillemets) inutile et irréfléchi.
Même si Numa se méfiait (à raison) de ce futur arrivage en masse de loups. Même si lui et Sav avaient accepté du bout des lèvres, seulement parce qu’ils étaient en manque de bras et de chair à canon.
Tout allait bien.
Même si la NSFW allait mal.
Tu n’avais pas réalisé que l’attentat du mariage allait avoir des conséquences aussi graves. A vrai dire, sur le coup, tu t’étais plutôt bien amusé, en compagnie de Baruch. Tu avais à peine remarqué qu’il en manquait, à votre retour. C’est pas comme si tu avais retenu leurs noms.

Maintenant, il ne te restait plus qu’à attendre que tes loups se débarrassent de leurs handlers, avec ton aide si besoin. Ça avait fonctionné pour Hoshi (même si elle avait vite déchanté à l’approche de son premier recensement raté) ; ça ne pouvait que marcher avec les deux autres… enfin, les trois autres.
Tout allait bien, même si Balls était revenu.

Tout allait bien jusqu’à ce que la Brigade débarque une première fois dans le camp. Tu te disais bien que l’air se remplissait du fumet de tes loups et de leurs foutus handlers pas encore morts. Comment vous avaient-ils découvert ? Tu te ferais une joie de soumettre la question aux deux chefs de pacotille, s’ils s’en sortaient vivants…
Sur le théâtre de la catastrophe, tu n’as pas fait long feu. Evitant de croiser le regard sidéré de tes loups encore hounds qui ne comprenaient clairement pas ce qui arrivaient à ton petit plan adoré et ta grande cause hybride, tu as préféré faire le mort, enfin pas pour de vrai, ça leur ferait trop plaisir.
Loin de jouer les héros (pour changer), tu as attrapé Hoshi balancée sur ton dos comme une poupée de chiffon, et vous avez décampé fissa.

C’est con, parce que tu aurais pu profiter de l’attaque pour défaire tes trois loups de leurs handlers… On va dire que tu avais été pris de court (pour changer, là aussi).

Bon, peut-être que tout n’allait pas si bien. Mais il y avait de la place pour une amélioration…
Tu n’avais pas remis les pieds dans aucun de tes campements de loups, afin de ne leur faire courir aucun risque (pour une fois). Le seul détour que tu avais pris, c’était un crochet par la piaule de Caleb, chez le petit vieux qui lui avait servi de descente de lit la nuit de sa morsure, afin d’y déposer Hoshi en sécurité. Peu de temps après ce qui serait la première attaque, si bien que les plaies n’avaient pas eu le temps de cicatriser, vous aviez retrouvé la poignée de survivants. Une vision pitoyable. Si elle t’a arraché une larmiche, c’est uniquement parce que tu ne te voyais pas introduire ta meute déjà bien échauffée par tes décisions brouillonnes à cette bande de bras cassées. Et d’ailleurs, en parlant de meute, tu allais devoir accélérer les présentations…
Sauf s’ils jugeaient bon de venir se présenter eux-mêmes, une seconde fois. Sidéré par ce karma de merde, tu t’es dit que, cette fois-ci, tu n’allais pas les louper.

Aussi, dans la mêlée, abandonnant complètement la poignée restante de NSFW, tu t’es chargé de délester tour à tour Balls, Fish et Loomis de leurs handlers. T’as manqué d’y laisser la peau de ton dos, et un bras, salement amoché (Wyvern allait te finir à la machette). « Le premier qui l’ouvre, il finit en méchoui » que t’avais grogné, enfiévré, sur le point de tourner de l'œil à cause de tes blessures. « On s’casse » et de te frayer un chemin loin de tout ce bousier, la tête la première dans la cible de tes loups sur les nerfs, mettant un terme à ce que tu allais par la suite appeler la NSFW first gen.

juin 2007
And the world went quiet
Time kept moving forward for the rest of the world. The rest of the world that wasn't waiting.

Pas besoin d'être lycanthrope pour sentir qu'ils avaient pas envie d'y aller, l'odeur d'appréhension piquait du nez. Même les débiles de la Police le lisaient clairement sur leur tête dépitée - une attaque, là, maintenant maintenant ? Inutile de regarder Fish les enfants elle aussi était pas au courant. Sa baguette tournait entre ses doigts comme la plume d'un gamin devant son interro surprise, c'est tout juste si elle en ronge pas le bout Sally sait pas quoi faire, Sally a la gerbe quand elle transplane avec le pire crossover du Ministère, son Handler, Balls et Loomis. La Hound sert à rien, et dans la débâcle générale, ça se remarque à peine. Les sorts loupent leur cible, et son nez est tendu, sentant de loin l'odeur de Fenrir et Hoshi, absents. L'attaque surprise sur la NSFW jouait aussi contre le plan suicide du pater - sachant que de base c'était déjà pas vraiment ça. Déjà dans l'idée, ils auraient dû se tailler avant de se retrouver littéralement face au camp qu'ils devaient intégrer. Jolie première impression, bravo, résultat des courses : plus de la moitié des petits résistants chopés.  


« Bon, très clairement, la prochaine fois c'est la dernière » Et par prochaine fois, elle voulait dire « Prochaine attaque surprise hein, parce qu'évidemment j'pense que s'ils préviennent les troupes ça sera pas nous.. » Ils auraient dû y penser, mais ils y ont pas pensé. Pas la première fois que le Ministère les prennait pour des cons et que ça marchait, mais face aux deux loups, Fish devait se montrer confiante. De toute manière, c'était ça où ils s'entretuaient. Malgré lui le plan de Fenrir avait ce côté très ultimatum qui le rendait infaillible.


Deuxième attaque, deuxième surprise, mais elle faisait plus tourner sa baguette entre ses doigts. Elle était prête. Même si le camp faisait bien plus pitié que lors de la première attaque, Fenrir était là. Profitant de la pénombre, la sorcière se retourne rapidement contre les brigadiers. Contre son Handler, paralysée à la nuque, elle le voit s'écrouler avant d'être relâchée, Fish reprend son souffle, regarde autour la scène éclairée couleur sorts impardonables. D'autres formes tombent au sol, d'autres sont trainées, et puis, derrière elle, celle de l'Alpha et l'odeur du sang. Bientôt celle de la cendre quand ça se met à cramer les tentes de fortune, elle agrippe Loomis avec elle et suit le reste du plan, même s'il tourne de l'oeil. « Le premier qui l’ouvre, il finit en méchoui » Ils sont là, ils sont tous là. « On s’casse » A croire que c'était aussi facile que ça, pas vrai ? Bien sûr, ça l'était pas. C'était que le début, improvisé - mais ils s'en étaient tirés. Ils avançaient.

Il y a toujours un avant et un après. Parfois pour le meilleur, souvent pour le pire. Les après de Numa pouvaient se compter sur les doigts de ses mains, après 1998, après L'Ordre, après fucking Rosier, après le mariage. Après la première attaque. Une merde n'arrivant jamais seule - tout se faisait par trois dans son esprit malade - Numa savait qu'une troisième saloperie allait se fracasser sur leurs têtes. La question n'était donc pas si mais quand.

Depuis le mariage, il n'avait pas repris une seule fois les potions qui le maintenaient dans un état d'apathie. La douleur était devenue omniprésente, éclatante, écrasante. Mais au moins était-il réveillé. Il ne dormait plus vraiment, ce qui lui avait permi de repérer le corps de Sav s'introduisant dans sa tente une nuit, s'allongant sur le sol dur et inconfortable comme un chiot apeuré. Elle était revenue chaque soir, et il l'avait invité dans son lit. Il n'aimait pas les contacts, l'exception était nécessaire. Et pendant qu'elle plongeait dans les bras de Morphée, se tournant encore et encore à ses côtés, Numa gardait les yeux ouverts, immobile, dans l'attente de l'inévitable, de l'inéxorable, de l'inéluctable. Et il comptait non pas les manticores qui lui permettraient de trouver le sommeil mais les prénoms perdus remplaçant les Etats de son Amérique. Aoife, Dearborn, Douglas, Rivage. Aoife, Dearborn, Douglas, Rivage. Afoie, Dearborn, Douglas, Rivage. Ainsi, il gardait la tête froide au dessus de son corps brûlant. Ainsi, il attendait le prochain bouleverment, la prochaine catastrophe. Il attendait le prochain après.

C'est maintenant.

Un bruit, puis un long silence. C'est toujours de cette façon que cela se déroule. Un son tonitruant qui rompt le confort d'une illusion d'invincibilité fabriquée par l'esprit, et puis le silence bruyant qui suit le chambardement et précède le désastre. Death never comes alone. Ses yeux rougis par la fatigue croisent ceux de Sav. Une discussion silencieuse à la croisée de leurs regards et ils se mettent en action. Le soucis c'est qu'il se sait aussi inutile qu'un gamin, sans les potions, sa magie est balbutiante au mieux, dangereuse pour les siens au pire. Inexistante entre les deux. Elle doit le porter, il se laisse faire, n'a pas d'autre choix que de subir une énième fois ce cuisant échec, son corps fagrile l'emportant encore et toujours sur son esprit affûté.

Elle le soutient, il s'appuie et ils tentent d'avancer dans le brouillard de fumée, à travers l'odeur acre de chair carbonisée, de tissu s'effritant sous la caresse léthale des flammes. Des gouttes perles sur son visage. There is not one fucking thing he can do. Like before. Like always. Numa ne peut que contempler son Idéal tomber en cendres, impuissant à le protéger comme il l'a été à les guider, à les sauver. Aoife, Dearborn, Douglas, Rivage. Il y a des cris qui se mêlent au crépitement des feux, des sorts lancés aussi bien implacables qu'impardonnables, des cris de terreur, des hurlements d'agonie. Rien n'est aussi monstrueux que celui qui gonfle dans son torse mais refuse de sortir. Reste coincé avec l'amertume, la déception, la défaite.

Ses yeux ne ratent rien de ce spectacle cruel, alors que Numa ne peut en être que spectateur. Un moment il est dans la tente, avec Sav. L'instant d'après, elle le repousse dans les bras de Baruch, un vulgaire paquet que l'on considère précieux alors qu'il se sait vidé de tous ses trésors et que l'on se trimballe de mains en mains. Un instant, il y a Sav, et juste après il ne la voit plus. Alors qu'il s'accroche au vampire. Hésite à se lancer dans une bataille qui aura sa perte. Mourir dignement. Mourir dans le feu de l'action. Mourir en se battant. Les visages des siens apparaissent dans les flammes Aoife, Dearborn, Douglas, Rivage. Il doit rester en vie. Et dans le brouillard de ses sens, une certitude domine, ce n'est pas fini. Le combat doit continuer. Always. You fight or you die, there's no in between.

Sa main valide attrape le tissu du vêtement de son protecteur et dans un grognement difficile à extirper de sa poitrine il lui parle. "On doit récupérer les cahiers d'Aoife, dans la tente des potions.." Faire perdurer leur mémoire en continuant la Lutte incessante des Faibles contre les Forts, des Petits contre les Grands auto-proclammés.

Numa le suit, loin de la bataille. Il a honte, il se hait. Et il regarde impuissant le campement s'effondrer. La liste s'aggrandit. Aoife, Dearborn, Douglas, Diana, Rivage, Sofiane. An end is a new beginning.

The mind says, if there's an after, there's still hope.

But in his chest, he hears only the breaking of his heart.

tw: violence, crude language

Le plan foireux de Fenrir, t'étais déjà pas une grande fan de base. Dès le départ, t'avais grondé, tournant autour du barbeuc' comme une louve en cage, armée de ta bouteille de Hen', le seul truc qui te permettait d'avancer, paradoxalement. T'en avais mare de ses idées de merde et de son inconscience chronique, à cause de laquelle vous crevez tous les uns après les autres. Ta confiance, il l'a perdue le jour où Nadja est morte par sa faute, et qu'il s'est tiré comme un gros lâche. Alors à la première attaque, t'es venue en traînant des pieds. Tu t'attendais pas à grand chose, et c'est presque avec un rictus que t'as regardé Fen' se barrer avec Hoshi sur le dos, vous laissant seuls au milieu du chaos.

Encore une fois.

Il a beau dire, Fenrir, il change pas. C'est un lâche. Un putain de lâche. Et quelque part, et ça t'fait sérieusement chier, t'as quand même un pincement au cœur en le voyant aussi protecteur avec Hoshi. Y a une époque, c'était toi sa fille. Heureusement y a encore Fish pour être de ton côté. Y a encore elle et Balls, bizarrement, qui sont censés.

Alors pour la deuxième attaque, t'y croyais pas plus. Tu crois plus en grand chose, toi, de toute façon. A quoi bon ? T'as refusé d'y croire, au départ, quand Nadja t'a embrassée. T'as refusé d'y croire pendant si longtemps, par habitude, pour te protéger. Mais t'as fini par cédé, et t'y as cru. T'y as cru tellement fort que ça fait mal. T'y as cru jusqu'à ce que tout s'arrête dans la violence. Alors maintenant, tu refuses de croire en quoi que ce soit.

Mais s'il y a bien un truc que tu tires de tout ça, c'est peut-être l'opportunité d'une vengeance. C'est ce qui t'a fait dire oui. C'est ce qui t'a fait fermer la gueule pour quelques temps. C'est pas pour les beaux yeux vitreux de Fenrir que t'as fait ça. C'est pour lui. Pour ton handler. Pour celui qui, avec un sourire narquois, t'as retenue alors qu'on exécutait l'amour de ta vie sous tes yeux.

Dans la tumulte, dans le chaos, tu ignores les impardonnables qui fusent de tous les côtés. Tu ignores ta propre douleur qui vient t'assaillir alors qu'un doloris te frappe de plein fouet. Tu ignores ta propre raison alors que tu profites de l'effet de surprise pour te jeter son ton handler. Fen' a à peine le temps de retenir le sorcier avant qu'il n'active ton glyphe, et tu regardes son corps inerte tomber lamentablement dans la boue. Tu t'attendais à un doux sentiment de satisfaction, mais la réalité est toute autre. La soif de vengeance fait place au vide. Tu ressens rien. Il est mort et tu ressens rien.

Alors quoi ?

Alors y a l'autre. Y a celui qui l'a tuée.

Et avec le reste de la meute, tu te barres pour plus revenir.

tw: violence, sang

“I let them take our child without doing anything. I won’t allow them to hurt you once again. This time they will pay the right price.” Parce que la peur qu’il arrive malheur à ton épouse te lancinait les entrailles, tu lui avais fait cette promesse vengeresse, sans plus différencier une subite attaque de détraqueurs d’un attentat savamment préparé par une horde d’hybrides enragés. La culpabilité d’avoir abandonné Freya à son triste sort après la perte de l’enfant qu’elle portait semblait te ronger en ton for intérieur, au point que tu veuilles aujourd’hui encore t’acharner sur le monde entier. Tu étais persuadé que rien ne s’achevait jamais complètement. Ni la haine, ni l’amour, ni même les regrets et les remords qui les accompagnent. Seule la NSFW était condamnée à disparaître, sans jamais renaître de ses cendres.

La première arrestation avait été célébrée comme le coup de filet du siècle, la Gazette n’avait pas tari d’éloges sur cette coopération jusqu’alors inédite entre la Values Brigade et tes propres armées. Mais toi, rien n’aurait pu t’arracher l’ombre d’un sourire alors que tu savais que certains hybrides étaient encore là, tapis dans l’obscurité de leur lâcheté nauséabonde. Il n’y avait pas eu une seule conférence de presse de la Brigade ou de l’ASAP durant laquelle tu n’avais pas réitéré ta promesse de les traquer tous jusqu’au dernier. La réussite de cette mission ne se rapportait plus seulement à tes fonctions auprès du Ministère ni même à ton statut de mangemort et membre de la Chambre. Elle symbolisait la concrétisation d’une vengeance personnelle, que rien n’aurait eu le pouvoir de réfréner.

Les cris qui déchirent le silence de la nuit, les sortilèges qui viennent fendre l’obscurité, la fumée qui s’élève des tentes réduites en cendre. Toute cette cohue te rappelle évidemment le chaos qui avait régné durant la cérémonie de ton second mariage. La différence, ce soir, résidait dans le fait que le sang qui souillait ton uniforme n’était pas le tien, et que cette fois, c’était bien toi qui te trouvais dans le camp de la terreur. Tu n’avais certainement jamais pris autant de plaisir à briser des os et transpercer des chairs comme tu le faisais là tout de suite à bout de sortilèges que l’on n’apprend pas dans les livres. Les éclairs de lumière verte qui s’échappent de temps à autres de l’extrémité de ta baguette magique révèlent le mince sourire qui étire tes lippes alors que tu t’approches du but ultime. Autour de toi, on arrête, on torture, on tue. Bien heureux de constater que toutes ces années de carrière au Ministère n’avaient su venir à bout de l’homme de terrain que tu étais, tu te complais à admirer le spectacle. Lorsque la puanteur si familière de Fenrir Greyback emplit enfin tes narines, tu songes que la victoire est proche. Tel un fauve blessé, tu scrutes nerveusement les environs tout en plissant les yeux pour tenter de discerner sa lourde silhouette à travers l’obscurité. Celui-là, tu ne l’achèveras pas, du moins pas ce soir; tu as bien d’autres projets pour le monstre qui a osé lever la main sur Freya.

Soudain, il est là devant toi, aux côtés de sa portée de louveteaux puants. Même l’innocente Sally se rallie à lui. Un rire satisfait s’échappe d’entre tes lèvres alors que tu te souviens de votre entrevue. Comme toujours, tu avais vu juste sur toute la ligne. Mais ce soir, ton sortilège n’atteindra pas sa cible, il ira se perdre dans le vide laissé par le transplanage de ton nouvel ennemi favori. Le champ de bataille redevient finalement silencieux à mesure que la nuit retire son manteau. L’aube se lève sur l’ultime défaite de la NSFW. Tu féliciteras ton équipe plus tard; pour l’heure, tu dois remonter la piste des Greyback.