BIENVENUE SUR SMOKE & MIRRORS. Un forum Harry Potter alternatif qui diverge du canon à partir du tome 5 où Harry est capturé par les Death Eaters lors de la bataille du Département des Mystères. L'action se situe 12 ans après, en 2008, dans un Royaume-Uni gouverné par Lord Voldemort.

Le forum a pour but d'être collaboratif et possède donc un système de collaboration participative où tous les membres peuvent proposer des nouvelles annexes, évènements, voire même des idées de personnages pour les futur.es joueur.euses !

Malgré son contexte sombre et mature, SM, c'est une communauté qui aime le drama et les rebondissements et qui a un Discord très actif sous l'égide du safe space et de la communauté bienveillante. Qu'attendez-vous pour nous rejoindre ?
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 Les Dieux ont soif — PV B. Bagshot

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Spoiler:
« Quelles conneries tu racontes encore?
— Je te le dis. Un d'ces jours, il va tout exploser.
— Ah ouais, et comment?
— Il va attendre que tous ceux de l'Ordre fassent que de la merde. Alors il les prendra par derrière, bien comme il faut, et bam. Plus personne.
— T'es con. Je te ressers la petite soeur?
— Allez ! »


Jeff n'avait jamais été un grand scientifique. Encore moins un fidèle et sûr devin. Au bout de la troisième bière, il commençait à gueuler partout. Les clients riaient bien, parce que pour eux, c'était habituel. Depuis que sa femme s'était taillée en France, avec leurs deux filles, il traînait dans ce même bar du chemin de Traverse. Un bar miteux, discrètement ouvert entre deux fermetures annoncées. Un bar où les plus seuls, les plus tristes et les plus fous se réunissaient tous les soirs pour cracher sur le zinc leurs malheurs communs. Et on ne s'occupait pas de ces quelques demeurés. On les laissait divaguer, tant qu'ils ne faisaient de mal à personne. Beaucoup prétendaient même qu'ici se cachaient quelques grands de quelques grandes mafias ; des rumeurs, on en bouffait, par ici. Alors tout ce qui pouvait glisser sous la dent, on le prenait, on s'en délectait et on ne laissait que les os.
Jeff était le produit de ce lieu. Quatre ans, maintenant, qu'elles étaient parties, ces connes ! Quatre ans qu'il était seul. Il avait rencontré deux trois nanas au passage et toutes étaient parties. Elles disent que je baise mal, qu'il disait. Tout le monde rigolait bien. Ce qu'il pouvait être con, ce Jeff. C'était même devenu une occupation hebdomadaire. Tous devaient le faire boire ; ils dépensaient chaque soir une petite fortune. Et chaque dimanche, on calculait. C'était à celui qui avait payé l'alcool le plus fort, et donc le moins de tournée possible, qui gagnait une tournée pour la semaine qui suivait. Un petit sport. Et tous adoraient voir Jeff s'en enfiler sans demander son reste et mettre en l'air son foie pour le rire transpirant de bêtise des autres.
Il semblait s'être habitué, avec sa calvitie bien avancée, sa barbe mal taillée et sa maigreur à être la risée de tous, celui qui faisait bien rire. Peu l'avouaient, mais ils avaient un peu pitié de cet être ; c'était pour eux comme l'incarnation même de la déchéance d'une vie. Ils étaient heureux que cela ne les concerne pas, qu'il ne soit pas eux. Il était ce qu'ils auraient pu tous devenir. En s'amusant avec lui, en l'épuisant, en le tuant à petit feu, ils évitaient de s'en prendre à eux-mêmes ; ils préservaient leur apparence à eux. Jeff était comme ce célèbre portrait d'un jeune et bel homme qui seul pouvait prendre les marques du mal et de la vieillesse alors que le bellâtre ne prenait pas une seule ride. Il était leur poupée de chiffon, leur jouet, leur miroir brisé qu'ils se passaient de mains en mains comme pour voir le reflet d'une vie définitivement terminée.

Et ce soir-là, comme beaucoup de soir, il parlait de la guerre civile. Eux ne voulaient pas trop en entendre parler. Ce n'était pas qu'ils avaient peur ; c'était juste que cela ne les regardait pas. Quelques fois, on lui répondait. « T'es définitivement con, Jeff ! Jamais l'Ordre ne gagnera ! Et on le sait tous ! Alors arrête de nous emmerder avec tes histoires. » qu'on lui disait. « Moi ma famille est clean, d'autres ne peuvent pas en dire autant... Regarde un peu les Morisot ! Ceux-là, j'te jure, sont bons à jeter ! » qu'on avait un jour entendu. Une toxico avait même dit à Jeff, qui prétendait, en hurlant, être le seul à penser à la guerre civile, que son père avait une fois refourgué une information aux résistants. « On a plus jamais entendu parlé d'elle ! ». On s'en était rendu compte, pas très longtemps, de cette disparition. « Elle était camée à mort ! Bill dit même qu'elle faisait le tapin ! Pas étonnant qu'elle se soit pris un mauvais coup, tu crois pas, Jeff? » Il avait dit, ouais. En ruminant. Etait-il tombé amoureux? On n'en avait plus jamais reparlé, de cette affaire-là.
On le laissait baragouiner ses obsessions tant qu'après il se laissait faire pour le jeu de la boisson. Et malheur alors s'il se remettait, une fois ivre, à reparler de la guerre. On n'en voulait pas de cette bête-là, par ici. Jeff semblait le savoir, puisqu'une fois imbibé, il ne disait plus rien, comme sonné par la violence humaine.
Et ce soir-là, c'était Franck qui avait réussi. Jeff avait un peu résistait, apparemment, puis il était tombé sous le dernier verre. Il s'était ramassé par terre, à même la terre. Il avait fallu l'attraper par la chemise pour le relever. Deux boutons avaient sauté, laissant apparaître son torse maigre et grêle. Pas un poil, mon vieux ! Elles doivent aimer ! qu'on lui avait même dit. Il avait soupiré, enfilé son manteau et était sorti. « Le prends pas comme ça, Jeff ! »
C'était tout.

Jeff tituba longtemps, dans le chemin de Traverse. Une prostituée lui proposa même ses services en montrant sa poitrine affamée par la misère qui s'était abattue sur les lieux.
Rien n'avait plus aucune saveur, ici. On le sentait. Le froid envahissait la rue principale et les chemins adjacents. Quelques uns passaient, de temps en temps. Il vit même un couple faire sa petite affaire ; lui devant, elle à genoux devant lui. Ses yeux exprimèrent ce qu'il pouvait  y avoir de plus froid, de plus glacial. Il détourna le regard. On aurait pu penser qu'il en était dégoûté. De la bestialité. Les êtres n'étaient finalement plus que des bêtes, en ces sombres temps.
Son corps, lui, semblait se tordre dans tous les sens, comme si l'alcool le dévorait de l'intérieur. Il lui arrivait de se prendre les pieds dans les pavés de la voie, au sol. Il râlait, crachait par terre, et continuait. D'autres plus habitués le voyaient passer, devant d'autres bars. On le connaissait bien, ce type, à qui on n'avait pourtant jamais vraiment parlé. Il rentrait ivre tous les soirs, et disparaissait. Un pauvre gars, disait-on. Une représentation vivante de la misère. Probablement un hybride, un de ces dégénérés homosexuels ; même un né-moldu passant entre les mailles du filet. Puis on s'allumait une cigarette et on l'oubliait. Le juste temps pour lui de disparaître.
Il continua à avancer. La lune, pleine, éclairait une rue devenue complètement déserte. Le dit Jeff se redressa. Il était grand. Lui qui semblait maigre avait plutôt l'air désormais fin. C'est fou ce qu'un homme droit aux épaules plates peut en imposer. Il passa une main sur ses cheveux qui eurent l'air mieux coiffés. Jeff, ou l'homme qui se faisait appeler Jeff ne semblait plus ivre du tout. Il tourna la tête. A gauche. Puis à droite. Son teint avait retrouvé une couleur normale et avait abandonné une couleur blanchâtre de soirées trop arrosées. C'était comme si, soudainement, plus une seule goutte d'alcool n'irriguait son sang. Il sortit sa baguette et, d'un geste lent, changea d'habits. Il arborait maintenant un costume noir, cintré.
Il transplana.

L'homme réapparut une seconde plus tard près d'un bosquet, en pleine campagne.
L'herbe, fraîchement coupée peu avant la nuit tombée, exhalait une odeur agréable. Les arbres du petit bois semblaient endormis. Hauts, ils cachaient un ciel clair et parsemé d'étoiles. Pendant un temps, il eut l'air de reprendre sa respiration. D'emplir ses poumons de cet air frais, revigorant, sentant la sève de l'herbe qui continuait à sortir de ses brindilles. Il attendit, sortit un papier qu'il lut rapidement et le replongea à l'intérieur de sa veste de costume.
L'homme tourna des talons et se mit en marche sur un chemin. Ses bottines martelaient un sol campagnard, silencieusement. Sa démarche donnait l'impression que son corps entier s'était accoutumé aux lieux. Ainsi, en l'espace de quelques secondes, il s'était fait au paysage ; il avait fait sien un environnement que, peu de temps avant, il ne connaissait pas. S'il ne portait pas ce costume, on aurait presque pu penser qu'il s'agissait-là d'un homme du pays, rentrant un peu tard après un dîner avec un ami, un voisin ou un parent. Il ne restait rien du dit Jeff, de cet alcoolique désespéré titubant dans les rues du Chemin de Traverse.
Au bout du chemin, un autre homme l'attendait. Grand, un peu plus que lui. Aussi mince que lui. C'était bien lui. « Prenez mon bras. » L'homme ne lui dit rien, prit son bras.
Ils avaient disparu.

Un crac sonore interrompit le calme humide et froid de la cave. Un peu de poussière vola, tandis que l'homme en noir et l'autre, le second arrivé, posèrent les pieds sur le sol désert.
A l'évidence, ils étaient sous terre. Une violente odeur de moisi vint prendre au nez l'homme au costume noir. « Suivez-moi », lâcha-t-il, d'une voix forte. Elle résonna dans une cave qui, plongée dans le noir, devait être bien plus grande qu'on pouvait le croire.
Les deux se mirent en marche vers un escalier en bois miteux qui risquait de craquer au moindre pas trop fort. Ils montèrent. L'air ne se réchauffait pas, mais l'odeur de moisi s'était mélangée à une forte odeur de lavande tandis qu'une faible lumière s’immisçait petit à petit dans la montée d'escaliers.
Une légère musique d'opéra vint aux oreilles de l'homme en noir. Il ne sembla pas s'en offusquer tandis que le second le suivait sans discuter. Si on avait su que ce même homme, habillé dans ce costume noir cintré, avait été quelques minutes plus tôt complètement ivre dans un bar miteux du Chemin de Traverse, on aurait pu croire à un mauvais maléfice. Mais c'était bien lui, qui montait, droit, sûr de lui, guidant l'autre homme.
La vie n'est peut-être faite que de maléfices.

Ils débouchèrent sur un couloir sombre. A gauche, une porte d'entrée et deux fenêtres, toutes les trois condamnées par des planches de bois clouées. La poussière jonchait un sol de bois abîmé ; le parquet semblait ne pas avoir été ciré depuis bien longtemps. Des pièces de tissu, de métal et quelques objets s'entassaient ici ou là. Le lieu semblait complètement abandonné. Un imposant escalier, en bois, annonçait un autre étage.
Une lumière blanche et bleue, filtrée par les planches clouée, éclairait de ci de là quelques lambeaux de papier peint. Y avait-il déjà eu des vies, par ici?
Les deux hommes avancèrent.
Une des pièces était faiblement allumée. La lumière emplissait à mesure que la musique se faisait plus forte. L'une des doubles-portes avait été sortie de ses gonds et gisait au sol. La douceur des lamentations d'une femme, qu'on entendait gémir par de magnifiques notes chantées d'opéra contrastait sérieusement avec ce décor abandonné.
Ils entrèrent.
Un petit homme gras, debout, ses mains dodues jointes derrière le dos, contemplait un feu de cheminée.

« Votre invité est arrivé, Monsieur le Directeur. »

Un vieil homme dodu se retourna alors.
Vêtu d'un costume trois pièces, le petit homme faisait tache dans un tel décor. Il portait une veste de velours marron, aux bordures apparentes. En dessous, un gilet de soie à motif prince-de-galles semblait lutter contre un ventre rond, tandis qu'une cravate de soie à épingle vert kaki entourait un cou gras et blanc.
Il s'avança alors vers les deux autres.
La lumière d'un petit chandelier fit apparaître sa face poudrée. Sur une tête ronde et grasse, une barbe rousse et blanche finement taillée encadrait un visage à l'expression joviale et bienveillante. Ses cheveux, bouclés et richement coiffés, arboraient les mêmes couleurs. Il se déplaça tel un danseur, avançant sa main potelée dans un élan qui fit ressortir une douceâtre odeur de lavande.

« Merci. Vous pouvez disposer, F. Les mots du vieil homme semblaient enrobées de miel. Monsieur Bagshot, quel honneur ! Soyez certain de ma déconvenue face aux manières quelque peu discrètes de votre entrée en scène. C'est que nous sommes en guerre ! La face du vieil homme sembla s'obscurcir soudainement, comme celle d'un acteur tragique annonçant l'inéluctable fin de la pièce. Nous devons nous prémunir de tout risque, n'est-il pas? Un large sourire mielleux vint briser la face molle et contrie du vieil homme. Installez-vous, mon garçon, je vous en prie ! »

Il désignait de sa main dodue deux fauteuils à l'armature en or et aux tissus rouge sang. Un tel ameublement paraissait étrange dans une pièce aussi délabrée.
Un petit guéridon proposait, sur un plateau en argent, deux verres à vin et une caraffe remplie. Dans un coin de la pièce, un gramophone, posé sur une commode, diffusait un air d'opéra.
Le vieux et dodu bonhomme s'installa à son tour.

« Je suis sincèrement ravi que ayez bien reçu mon petit mot. Vous avez dû avoir peur, mon garçon, après l'étrange rencontre avec vous avez faite juste devant chez vous, l'autre jour. La nuit a-t-elle été agréable? Le petit homme, en une seconde, sortit de sa veste de velours une fine cigarette plantée dans un porte-cigarette argenté. Il enfonça délicatement le bâton entre ses lèvres épaisses et rose. Une fumée s'échappa du bout. Il fut soudainement pris d'une stupeur. Quel impoli animal je fais ! Je ne me suis même pas présenté ! Il tendit son autre main enrobée de lavande à son invité. Ferdinand Yaxley. Tout l'honneur est pour moi, soyez-en assuré. Mais peut-être nous sommes nous déjà croisé dans les sombres couloirs labyrinthiques du Ministère? »


Dernière édition par Ferdinand L. Yaxley le Dim 19 Jan - 16:57, édité 1 fois
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Boris Bagshot
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« Décroche, you son of a banshee ! » que tu siffles en jetant presque la boule de cristal au sol. De l’autre côté des ondes, tu restais sans réponse du sale bourgeois sang-mêlé qui avait décidé du jour au lendemain de ne plus continuer à te voir dans le dos de sa femme. Sans explication, ni aucune excuse, une fois de plus. Décidément, ça devenait une mode de te laisser tomber, ces temps-ci. La dernière en date, Sienna, s’était fait la malle pendant l’attaque des Détraqueurs sans se préoccuper de ton sort. Même ton Handler, Ulrike avait l’air ailleurs -tu étais certains qu’elle avait des vues sur quelqu’un, et certainement pas sur le Prewett de fiancé qu’on lui avait dégoté. (Wolfram avait décidément plus de jugeote en termes de choix vestimentaires que de moitiés pour ses marmots.)
Et bien, puisque c’est comme ça, le prochain qui aurait recours à tes services, tu t’y plongerais corps et âme, peu importe si ça pouvait porter atteinte à tous ces lâches.

« Maman ! Je t’avais dit de pas rentrer dans ma ch- » Tu t’interromps avant d’alerter ta mère. Un parchemin est posé sur un rebord de fenêtre. Tu le déroules, découvrant un message, très succinct, te donnant rendez-vous tu ne sais où au beau milieu de la cambrousse, en pleine nuit.
La dernière fois qu’on t’avait fait parvenir une missive personnelle, on sait tous comment ça s’était fini. Il fallait donc être au moins aussi stupide que désoeuvré pour se rendre à ce genre de rendez-vous douteux.

Après avoir imaginé tous les scénarii possibles et imaginables (Wolfram qui décide de te reprendre, Fenrir qui veut régler ses comptes, Johanna qui te rend enfin la cape que tu lui avais galamment prêté, il y a deux semaines), tu t’es demandé si ça n’était pas plutôt en lien avec tes récentes déconvenues, du genre, les fois où tu avais fricoté avec un rebelle, ou pire encore, quand tu avais fait dormir un né-moldu sous ton toit sans être foutu de le mettre aux fers.
Tu n’as plus rien à perdre, puisque tu as déjà raté sur tous les plans possibles, c’est pour ça que tu vas y aller. Dans le pire des cas, tu seras en danger et ça fera les pieds à tous ceux qui t’avaient tourné le dos.

Le jour du rendez-vous, tu inventes une habituelle mission de nuit, sans éveiller le moindre soupçon auprès de ta mère qui s’était accoutumée à ta vie nocturne. Tu transplanes jusqu’à un village paumé, dont tu t’éloignes discrètement, à mesure que tu t’enfonces dans la campagne profonde. Le silence de la nuit n’est perturbé que par tes gémissements lorsque tes chaussures vernies clapotent dans la gadoue.
Tu n’as pas à attendre longtemps avant qu’un homme n’arrive, grand, mince, habillé en noir, avec le genre de visage que tu vas oublier aussitôt qu’il ne sera plus dans ton champ de vision. Pas comme le tien, en somme.
Tu es quasiment sûr de trois choses : ce type est trop propre sur lui pour appartenir aux rebelles. Pourtant, tu ne l’as pas non plus croisé au ministère. Et il ne sent pas le vampire. Le mystère s’épaissit. Ce n’est pas pour autant que tu lui refuses ton bras, interdit. Vous disparaissez.

L’odeur de cave te prend à ton bec surdéveloppé, tu te pinces le nez avec force manière. « Et bien, on n’a pas idée d’amener quelqu’un comme moi dans un bouge de la sorte ! » Si ça n’avait tenu qu’à toi, tu aurais bien aimé qu’il te conduise là-haut en te prenant de nouveau le bras ; ça te faisait sentir un peu grand. Tu es sur ses talons, sans présenter aucun mal à voir dans la pénombre, la baguette collée contre ta cuisse. Tu pèses à peine dans l’escalier souffrant qui ne gémit à ton passage que parce que tes talons le fendillent encore un peu plus. Tu ressers ta cape noire autour de tes épaules frissonnantes. « Dites, très cher, c’est bien joli de jouer la prudence, mais il va falloir dire à vos amis que la musique, ce n’est définitivement pas ce qu’on fait de plus discret... » ironises-tu.

Toujours sans prendre le temps de te répondre, il te conduit dans une pièce un poil plus éclairée et habitée par un individu singulier.
« Bye, Eff... » que tu chuchotes sur son chemin.
Te voilà maintenant seul à seul avec l’étrange et enjoué énergumène. Tu n’as plus l’habitude qu’on t’accueille avec autant de déférence, et tu trouverais ça suspect, si tu n’étais pas autant blessé dans ta fierté. Aussi, te prenant au jeu, ta poitrine se redresse, enorgueillie, tandis que ton obligé se confond en excuses.
Il était aussi petit et dodu que tu étais grand et mince. Coincé dans un costume de velours tandis que tu étais cintré dans du cuir. On eût dit la rencontre incongrue entre un chérubin avec de la bouteille et un diable tout juste sorti de sa boîte. Ceci dit, c’est dans les manières que vous vous retrouviez. Il n’avait pas l’air de souffrir de son poids, à tournicoter des bras et du derrière, jusqu’à s’asseoir à tes côtés. Cassé en deux dans ton fauteuil, tu te vautres sur l’accoudoir le plus proche de lui, comme une grande actrice croulant sous les bouquets de fleurs de ses admirateurs, ta cape comme une cascade sur l’assise et jusqu’au parquet poussiéreux.

« L’étrange rencontre ? » Généralement, tu ne faisais pas d’étrange rencontre ; c’était toi, l’étrange rencontre. Pour faire allusion à une chose pareille, dont tu n’avais parlé à personne, il devait s’agir de quelque chose de très embarrassant pour ta pomme.
Tu fais tout ton possible pour ne pas laisser paraître l’agitation que suscite une telle remarque, voulue anodine. « Je ne vous le fais pas dire ; c’est bien le seul moment de la journée où je n’ai pas à me tartiner d’onguents pour me protéger du soleil. » Tu tends le cou pour que ton profil prenne parfaitement la lumière de la chandelle. « Vous devez savoir ce que c’est... » Tu fais allusion à la poudre blanche dont l’homme s’enfarine pour quelques douteuses raisons anti-âge - une préoccupation que tu n’aurais plus à avoir pendant des siècles.

Pour ainsi dire, tu ne t’étais pas offusqué de l’absence d’introduction, puisqu’il avait l’air de savoir à qui il avait à faire, et tu savais de qui il s’agissait. Tu lui sers néanmoins la main, du bout de tes doigts trop glacés pour être encore totalement vivants. « Je vous connais. » mais tu ignores pour autant pourquoi tu es là. « Au Ministère, je ne sais pas... » C’est plutôt ta mère qu’il avait dû croiser, du temps où elle se battait bec et ongles pour conserver votre titre de sang-pur. En vain. « … Mais vous avez été mon professeur, à Poudlard... »
Tu caresses les dorures des bras du fauteuil, le regard légèrement froncé de réflexion. « Vous ne m’avez pas fait venir jusqu’ici pour parler de mes brillants résultats en histoire de la magie à mes ASPICs, n’est-ce pas ? » Tu marques un temps à la fin de ta question avant de relever les yeux vers lui. « Parce qu’à vous entendre, vous semblez savoir déjà pas mal de trucs sur moi… »
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La fumée claire et blanche de la fine cigarette dessinait dans l'air des arabesques en volutes délicates. En fond, l'air d'opéra apportait autant de chaleur que le feu de cheminée qui faisait crépiter le vieux bois qui y avait été mis. C'était comme si tout ce décor venait redonner de la chaleur à un lieu qui n'en avait aucune. Il n'était ainsi pas impossible de sentir des courants d'air passer entre les jambes ou de voir quelques insectes se précipiter dans la plinthe boisée d'un coin plus chaud de la pièce, faisant tout leur possible pour éviter de croiser les individus.
En somme, si la chaleur s'était rapidement imposée et que les deux somptueux fauteuils apportaient tout le confort nécessaire, on ne pouvait en dire autant de l'imposante antichambre dans laquelle ils se trouvaient. La pièce respirait ce que quiconque connaissait de Ferdinand Yaxley pouvait dire ; un mélange de chaleur extrême à une sensation désagréable de mort et de froideur. Un lieu qui ne faisait que comprendre aux inconnus qu'il n'y avait aucune raison de se sentir à l'aise, encore moins le bienvenu.
Le vieil homme, pourtant, semblait avoir confortablement bien installé son corps gras dans le fauteuil, manipulant tel un peintre son bâton de tabac et la parole. Il donnait l'impression d'être chez lui. Son visage était comme coupé par un masque en diptyque ; d'une part, la lumière jaune et chaude de la cheminée en éclairait une partie, laissant voir les derniers reflets roux de sa barbe, les derniers vestiges de son sang Yaxley ; d'autre part, c'était la froide lumière de la lune qui transperçait les planches de bois clouées au fenêtre qui donnait à voir une partie froide et presque sans vie de son visage. Mais Yaxley ne s'en offusquait pas, il continuer à fumer, écoutant comme une vieille grand-mère les paroles de son jeune invité.

Depuis le début de la conversation, les deux yeux noirs de Ferdinand n'avaient pas lâché son invité. Comme l'araignée surveillant sa proie, seuls ne bougeaient que ses deux yeux et un de ses bras, pour fumer.
On n'en était qu'au milieu de la partie, commencée bien avant que Boris Bagshot ne s'en rende compte ; pion d'un jeu qu'il n'avait guère entrepris et qu'il n'aimerait probablement pas, tous les jours, continuer. Yaxley l'avait repéré ; ou plutôt était-ce l'un de ses petits oiseaux qui l'avait suivi, pendant plusieurs semaines. Un hybride employé comme hound au sein de la Brigade de Défense des Valeurs Sorcières. Une police bien utile depuis la prise de pouvoir des Puristes qui collaborait très régulièrement avec le Bureau des Archives, ses Archives, comme il aimait à le rappeler mielleusement quand il s'agissait d'en parler. La généalogie avait parlé et Yaxley avait pu retracer le parcours de ce singulier individu qui ne s'était pas caché d'appartenir à une sous-race ; un rejet même de la société.
Les petits oiseaux de Yaxley avaient eu ordre de le pister. C'était ainsi qu'il procédait à chaque fois, pour en obtenir un de plus. Telle une grand-mère collectionneuse de babioles hors-de-prix, il prenait des soins de collectionneur exigeant pour s'approcher de ses objets, de ses jouets. Avec la minutie d'un enfant obsédé par l'amusement, il tournait autour de sa proie et l'entourait finement de tous les fils de soie possibles, aussi discrets et inodores qu'on pouvait l'être. Puis le piège se refermait et la mouche n'avait plus d'autre choix que de se livrer elle-même entre les pattes velues de l'araignée.
Et choyé par une mère étouffante, rejeté par une Handler vénérablement méprisante, en quête constante d'une goutte de sang pour survivre, Boris Bagshot était le pathétique pantin rêvé pour l'Araignée ; le désuet personnage d'une tragédie qu'il construisait, actes par actes, scènes par scènes, depuis maintenant une trentaine d'années.
Et tandis que le jeune homme bavassait, évoquant Poudlard, Ferdinand Yaxley ne le quittait pas des yeux.

C'était peu dire que Ferdinand ressentait une forme de pitié pour les rejetés, lui qui en avait toujours fait les frais. Rejeté par une famille très longtemps, pion dispensable d'un échiquier dont les règles changeaient régulièrement sans qu'on prenne le soin de l'en avertir. Yaxley avait gardé une rancoeur à l'égard des siens qui prenait de multiples formes ; s'entourer, de temps en temps, de dégénérés, d'hybrides ou de parias en faisait largement partie. Lui-même n'était-il pas un paria, un à-part de la vie sociale? Sa maîtrise profonde des codes mondains en était la preuve ; il contrôlait un monde qui ne voulait pas de lui, s'assurant au moins de ne pas être le premier et principal élément à éliminer.
A voir ce jeune garçon ainsi élancé, ainsi grand, des souvenirs lui revinrent. Ceux d'une soirée, en quatrième année d'Université, à Londres, dans un salon mondain, où toute la jeunesse Puriste se pressait pour oublier la chute de Grindelwald. Alcoolisé, Ferdinand s'était installé sur une banquette, juste en-dessous d'une scène de chasse, Diane chasseresse, disait-on, l'emblème même de sa propre famille. La Chasse. Il était affalé là, déjà rondelet, toujours petit,  les joues imberbes mais les cheveux roux bouclés sur sa ronde tête de Yaxley. Il les observait tous, dans leurs robes, leurs costumes, danser, rire, fumer et discuter ; de ses yeux noirs, il voyait les corps se toucher, se frôler. Ici une jeune femme venait de chuchoter des mots à l'oreille d'un grand blond qui s'occuperait violemment d'elle dans une des chambres du manoir, plus tard. Là, un homme plus mûr, un grand-frère, peut-être, avalait son verre de whisky avant de repartir chasser, lui aussi. Un jeune homme s'était installé à côté de lui. Aussi grand que le jeune hybride qu'il recevait dans ce manoir miteux. Un homme, grand, mince, élancé, les cheveux longs attachés et une barbe noire bien fournie. Le regard noir, un verre de vin tenu entre ses fines mains qui laissaient apparaître ce qu'il fallait en poils. Ferdinand avait longtemps regardé les mains de ce grand jeune homme ; il s'était imaginé les touchant. Il avait senti la finesse des doigts, la virilité des poils, et une chaleur l'avait pris au bas ventre. Il le savait, il en avait honte ; il aimait ces poils, il aimait ce corps, cette barbe, ces longues et minces mains. Ses yeux noirs s'étaient ensuite perdus entre les jambes écartées de l'homme. Une bosse imposante affichait un membre viril probablement suffisamment imposant pour expliquer qu'à la minute d'après, une jeune fille s'était précipitée sur ses genoux. Yaxley, lui, s'était déjà imaginée les longues et musclées jambes poilues de l'homme, s'était imaginé caresser l'intérieure des cuisses tendues du jeune barbu aux cheveux longs, s'était imaginé remonter jusqu'à la bosse imposante et virile de l'homme. Mais une femme avait pris sa place, comme toujours.

Il ressentit une profonde colère et se rappela qu'il était désormais à un autre temps, bien des années plus tard. L'homme n'était pas le même ; trop blanc de peau, peu poilu, mais aussi grand, peut-être même aussi séduisant.
Dans un automatisme qui, pour quiconque avait un sens extrêmement aiguisé de l'observation, ressembla surtout à une pulsion névrotique, Yaxley se précipita sur la carafe de vin et s'en servit un verre. Il fit de même pour son invité.
Ses dodus doigts entourèrent fermement le froid cristal qui reposait là comme pour sentir la dureté irréductible d'un objet inaccessible. Le fin vin coula dans le verre et les yeux du vieil homme plongèrent en premier dans le robe rouge et soyeuse de l'alcool. Il prit le verre en vin, et but une gorgée. « Du vin d'elfe... Je ne peux résister ! » lâcha-t-il mielleusement, comme s'il était chargé d'en vendre plusieurs bouteilles à son invité.
Ses deux yeux noirs plongèrent à nouveau dans ceux de Boris. Il fit un large et grassouillet sourire. Chaque mouvement semblait emporter avec lui une douceâtre odeur de lavande.

« Poudlard... Voilà qui ne me rajeunit pas, mon garçon ! Ce n'est guère très poli de rappeler aux vieilles guenilles leurs faits héroïques des temps passés. Yaxley pouffa comme une vieille coquette qui cherche des compliments auprès d'une jeunesse inaccessible. Mais, et j'ose espérer que c'est là une leçon que vous retiendrez de votre scolarité, l'histoire est une vieille dame auprès de laquelle il faut apprendre à tendre délicatement l'oreille pour qu'elle nous murmure des choses. Il tira une nouvelle bouffée de cigarette, laissant la fine fumée blanche s'élever vers le plafond qui menaçait de s'écrouler. Et voyez-vous, mon cher, c'est que je suis bien trop habitué à ce que l'on me murmure des choses... »

Yaxley était connu, dans le milieu politique et Mangemort, pour être entouré de plusieurs espions.
On ignorait combien ils étaient ; certains prétendaient qu'ils ne représentaient qu'une relative menace puisque rattachés aux Archives et seulement affrétés pour découvrir les mensonges cachés de quelques familles ; d'autres, en revanche, se montraient plus inquiets. On racontait même que les espions n'étaient pas rémunérés par le Ministère, mais par Ferdinand Yaxley lui-même. Plusieurs discours qui amusaient le coquet et excentrique Directeur des Archives qui ne jugea d'ailleurs guère utile de rappeler sa fonction à son invité.
Il la découvrirait bien assez tôt.

Le vieux et politicien dandy se leva.
Sa petite personne équilibrait la taille par le poids. Yaxley était gras et, enrobé ainsi de soie et de velours, il ressemblait à un coquet personnage que l'on ne rencontre que tard dans la nuit, dans les plus chics et inaccessibles salons de la haute bourgeoisie. Ses mocassins de velours gris sombre contrastaient étrangement avec la poussière et la rugosité du bois du plancher.
Il s'avança vers le feu de cheminée et plongea quelques instants son noir regard dans les bûches qui se consumaient. Une ultime volute de fumée blanche indiqua qu'il venait de terminer de fumer. Il lança dans le feu la cigarette et rangea, dans la seconde même, son porte-cigarette d'argent.
Se retournant, il s'avança jusque derrière le jeune vampire, emportant avec lui une odeur de lavande. Ses doigts dodus se posèrent sur les épaules du jeune homme. Un temps, il eut envie de descendre ses grasses mains ; de toucher, enfin, ce torse, d'en sentir toute la virilité, toute la puissance mâle. Mais il n'y pensa qu'une seconde, à peine, et partit plutôt vers la nuque touchant de ses doigts dodus et froids le glyphe tatoué. « Et l'on m'a murmuré que vous avez fait bien des bêtises, mon garçon ! Mes petits oiseaux aiment tant me pépier de délicates chansons que seule une oreille avertie mais indulgente peut écouter. » La bouche dodue et rose de Yaxley s'approcha alors de l'oreille du vampire et se montra plus chuchotante, peut-être même plus froide. « Et méfiez-vous des oreilles plus rugueuses. Elles sont souvent le signe d'une barbarie sans nom. »
Yaxley partit.

Le Directeur des Archives savait qu'il était inutile d'en dire plus et espérait que le jeune homme l'avait bien compris. En faisant plus tôt mention de sa nuit passée avec un vagabond, et par ces dernières paroles plus que menaçantes, il avait fait comprendre qu'il savait. Il savait, et il valait mieux, pour l'un, comme pour l'autre, qu'on n'en dise guère plus.
Yaxley, depuis 2003, avait appris à faire de l'information sa principale arme. Il savait. Il savait des choses et jouait de l'ignorance des autres. De son poste de Directeur du Bureau des Archives, il contrôlait ce qu'il y avait à savoir. A savoir sur les généalogies, à savoir sur les secrets de famille, à savoir sur le mythe que chaque peuple aimait à se raconter. Il manipulait l'Histoire et les petites histoires, s'amusant ses rumeurs et faits. Ses espions, à sa solde, assuraient une sécurité au vieux dandy excentrique. On ne l'embêtait pas, d'ici à ce qu'il sorte de ses tiroirs du Ministère une information fatale sur une branche inconnue d'une famille ; une information pouvant tout faire tomber. Il contrôlait l'image, contrôlait la façade, et ne laissait voir qu'une partie policée de la vitrine. C'était au mieux, disait-on.
Le petit et vieil homme se réinstalla.

« Parlez-moi de vous, Monsieur Bagshot... Quelles intrépides aventures structurent donc vos journées? Les mots semblaient danser délicatement dans l'air. Yaxley les manipulait comme on enrobe de miel une alléchante pâtisserie. Je suis un indiscutable et indécrottable enfant quand il s'agit d'écouter des récits et des légendes ! »


Dernière édition par Ferdinand L. Yaxley le Dim 19 Jan - 16:59, édité 1 fois
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C’est fou comme tu peux te montrer intolérant face aux manières des autres, quand toi-même tu avais généralement l’air d’une adolescente effarouchée dès que la conversation partait un peu de travers. En effet, à ce moment-là, tu te demandes s’il s’avérait bien le même homme qui vous avait consciencieusement enseigné l’histoire de la magie. Il s’agissait alors de la seule matière dans laquelle tu versais un engouement des plus intéressés, puisque, d’un côté, ta famille avait fait ses armes dans ce domaine, et de l’autre, tu avais en tête de faire les yeux doux à cet intellectuel qui, à l’époque, faisait miroiter l’original et l’homme du monde que tu voulais devenir.
« Oh, je vous en prie, épargnez-moi le discours de votre vieille dame » que tu soupires avec suggestion. « On a littéralement étudié le bouquin écrit par Bathilda Bagshot ; alors autant vous dire que j’en ai soupé, de ses murmures, à l’ancêtre... » Un discours butor, loin des minauderies que tu avais pu rédiger dans tes devoirs, où tu passais la plus grande partie de ta rédaction à vanter les mérites de sa discipline, plutôt que lister de bêtes dates apprises par coeur. Un tel recul de ta réflexion occasionné tout simplement parce que tu avais du mal à imaginer que ça puisse avoir été mieux avant, parce qu’avant, tu n’étais pas .

Loin de faire ombrage des inepties immatures que tu lui servais du bout de tes lèvres en fleur, Yaxley bondit de son siège pour sautiller jusqu’à la cheminée. Tu l’observes tandis qu’il se dandine à contre jour devant l’âtre brûlant. Tu as tout le loisir de scrupuleusement inspecter sa courte échine, avec autant de discrétion qu’un écorché dans une crypte de vampires.
Tu épluches ce bouquet de lavande ambulant avec la critique d’un pédant et fin gourmet. Tu décortiques par-delà l’extraordinaire magie qui faisait tenir ses cheveux en l’air, par-delà les vêtements d’excellentes factures pour lesquels tu aurais pu tuer si tu ne t’étais pas lancé dans cette croisade vestimentaire de ne porter que du noir, par-delà cet insupportable parfum de lavande. Tu le mets à nu, non par jeu pervers (pour une fois), mais simplement pour te rappeler que, malgré tous les artifices, Ferdinand Yaxley a toujours été comme ça : un physique que tu juges personnellement d’ingrat, à devoir être à la pointe de la mode et de la galanterie pour s’attirer, au mieux, les amitiés des femmes qui ne devaient certainement pas être sa tasse de thé. L’éternel ami, le meilleur des confidents, mais un amant ? Difficile à imaginer. Tu n’avais peut-être pas un réseau aussi tentaculaire que le sien, mais tu participais aux commérages qui faisaient rage dans le Ministère. Ainsi, si ton obligé avait été allé voir ailleurs, tu aurais été au courant ; une moitié fidèle, dans un mariage de convenance était un phénomène rare, pour ne pas dire exceptionnel, surtout pour une personne de son sang et de son âge. Même l’aîné des Prewett, une famille moins prisée, faisait parler de lui dans le monde de l'infidélité, malgré sa bouteille, son porte-monnaie crevé et son haleine de sombral. Ton esprit étriqué se trompait peut-être sur toute la ligne, mais maintenant qu’il avait mis le grappin sur cette hypothèse, tu n’étais pas prêt à la lâcher.

Ceci dit, tu avais beau mener cette réflexion pour déconstruire l’homme qui te faisait face et tenter de voir clair dans son jeu, tu n’en ressentais pas moins un malaise en sa présence. Tout le monde savait que le maître des archives manigançait, mais pour autant, personne ne savait ce qu’il manigançait. Aussi, dans le brouillard où tu te trouves, tu ne peux t’empêcher de penser qu’avec toi, cette fois-ci, c’était différent. Tu ne peux te résoudre à admettre que tu étais pris dans sa toile au moment même où tu avais lu le parchemin te convoquant ici. Et encore, c’était parce que tu n’avais aucune idée qu’il t’avait fait suivre depuis plus longtemps.
Et, à l’image de ce jeu qui avait commencé avant même que tu ne t’en aperçoives, le vieil homme a gambadé jusque derrière toi, ses petits doigts pianotant sur tes épaules osseuses, remontant jusqu’à ton affreuse glyphe. Malgré ta température corporelle proche de celle du souffle d’un détraqueur, cette atteinte t’arrache un frisson.
C’est qu’à force, tu t’étais accoutumé à la présence des brutasses de la Brigade. Certes, tu y laissais des bleus et toujours un peu plus de dignité, mais elles étaient bien plus faciles à cerner. Les balourds qui te faisaient désormais office de collègues (et tu devais l’admettre, de fréquentations, de manière plus générale) n’avaient qu’une chose en tête : inspirer la peur. A partir de là, c’était facile de leur donner ce dont elles se languissaient, à l’instar de l’oreille rugueuse de Fenrir Greyback, pour qui tu glanais toutes sortes d’informations, jusqu’à présent.

Les doigts tièdes quittent ta nuque, et tu découvres que tu avais retenu ta respiration lorsque tu te remets à souffler avec difficulté. Résidus d’un automatisme, tu bois aussitôt une gorgée du vin. Autrefois, tu te serais persuadé qu’il était excellent, pour plaire à l’aîné qui t’en avait servi. Désormais, tout le monde savait que l’alcool n’enivrait plus que difficilement les vampires.
« Rien de bien intrépide, j’en ai bien peur. J’ignore ce que je pourrais vous apprendre de plus que vous n’ayez déjà compulsé dans vos précieuses archives. »
Comme à chaque fois que tu avais peur, tu fais le beau, pas tant pour le séduire que pour qu’il te jalouse ce qu’il n’est pas et ne sera jamais. Croisant et décroisant tes interminables jambes au nez et à la barbe décolorée de ton hôte, comme on agiterait du sang de vélane sous le gosier d’un vampire assoiffé, ou une promesse de vie juste et meilleure à la figure d’un né-moldu.

« Par quoi voulez-vous que je commence ? Par l’époque dorée où l’alcool me faisait encore autant d’effet que le charisme d’un aîné ? Ou êtes-vous davantage friand des mésaventures d’un vampire de la Brigade, malmené, soit par une bande de lycans musculeux et puants, soit par le pudibond chasseur qui vous sert de famille ? Pardonnez mon franc-parler, mais je suppose que vous me croiriez difficilement si je prétendais apprécier vos neveux... » En évoquant Kalen, l’évidence t’avait frappé qu’ils faisaient partie de la même lignée. S’imaginer que ces trois-là puissent se côtoyer ne serait-ce que l’espace d’une minute dans la même pièce relevait des premières lignes d’une mauvaise blague. « C’est fou, vous n’avez rien à voir avec Kalen ou Corban... » Tu appuies cette familiarité impromptue et irrespectueuse envers tes supérieurs hiérarchiques en l’observant par-dessus ton verre, la lèvre animée d’un léger sourire mutin.
S’il n’avait rien à voir avec eux, peut-être qu’il était effectivement judicieux que ce soit à lui que tu confies tes déboires. Peut-être même que le mettre au courant te permettrait de t’attirer ses faveurs, et ainsi, une forteresse de poids dans ce système qui pouvait te faire disparaître d’un claquement de doigts. Le petit Général ne devait attendre que ça.  
« Qui me dit que vous n’allez pas leur répéter mes bêtises ? » que tu interroges, la moue circonspecte, comme si tu faisais semblant d’hésiter entre deux paires de chaussures, alors que ta décision était prise à l’instant même où tu étais entré dans la boutique.
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Les espions de Ferdinand Yaxley étaient célèbres, dans le milieu. Evidemment, personne ne pouvait prétendre en connaître un seul. L'Araignée s'amusait à jouer avec les ficelles du polynectar, bouleversant constamment l'apparence de ses petits oiseaux. Beaucoup prétendaient qu'il s'agissait de ses employés, aux Archives. Ceux-là même étaient des plus naïfs ; il suffisait de poser la questions aux célèbres archivistes et conservateurs qui n'en savaient guère plus que le peuple sur les activités d'espionnage de leur Directeur.
Yaxley trônait en haut des Archives qui, depuis l'avènement de Lord Voldemort, censurait tout, réécrivait tout, vérifiait tout. Et pour imposer aux siens ce qu'il imposait au autres, Ferdinand contrôlait tout aussi bien ses Archives, installées à l'aile ouest du niveau 1 du Ministère de la Magie. C'est lui qui apportait les informations à ses employés, comme l'araignée rentrant de chasse et nourrissant ses petits. Les parchemins pleuvaient puis s'enflammaient, pour ne laisser aucune trace. Il donnait des informations ; tous savaient bien que cela venait de ses informateurs. On ne discutait pas le contenu des rapports et on faisait son travail. Des branches généalogiques étaient supprimées, d'autres étrangement modifiées et voyaient des familles de Sang-mêlé honnêtes être reliées à un terroriste. Un excellent moyen pour Ferdinand de se débarrasser de tout le monde. Contrôler l'Histoire, contrôler le passé, c'était contrôler le présent. Et Ferdinand Yaxley était, pour cela, un excellent démiurge.
Ainsi entouré de ceux qui le protégeaient, Yaxley s'amusait des peurs de chacun. Il aimait à créer des rumeurs sur son propre compte que des employés et des hauts-placés se murmuraient, discrètement, pensant tenir des scoops. C'était une des nombreuses manières d'éloigner ses potentiels ennemis.

Bien-sûr qu'il répétait des choses. Il en inventait d'autres.
Les Archives constituaient une immense machine cachée du regard de tous. On avait été surpris de le découvrir ainsi. Jusqu'ici, ce n'était qu'un petit service discret du Ministère de la Magie. D'un mystère préservé, Ferdinand en avait fait une redoutable structure finement organisée pour servir la propagande du régime. Les Archives s'étaient ainsi rendues indispensables pour le Ministère de la Magie. Et la manière avec laquelle le politicien mielleux avait remodelé à son image les Archives poussait autant à l'admiration qu'à l'inquiétude.
Maître de l'apparence, Ferdinand jouait des peurs et des espoirs. Il cachait des noms, menaçant quelques familles avec d'autres ; de sombres événements disparaissaient tandis que des mensonges venaient en valoriser d'autres. Les uns, et les autres, se dénonçaient mutuellement pour protéger leurs propres familles et leurs deniers. Ainsi, en l'espace de trois, tous Britanniques avaient fini par avoir quelque chose à se reprocher, de près ou de loin. Les Archives représentaient un passé qu'ils souhaitaient oublier et le silence de son Directeur, cet homme mondain, excentrique et dodu, était comme une épée de Damoclès. A partir du moment où on avait le malheur de se prendre les pieds dans les tapis de Ferdinand Yaxley, il n'y avait pas d'autre choix que de prendre sa grasse et soyeuse main sentant la lavande pour se relever.
Et, à entendre les doutes de Boris Bagshot, il y avait tout à croire que le garçon ne prenait pas la pleine mesure de sa situation, ainsi face au Directeur des Archives.

Le vieil homme rit, en l'entendant. Ses deux yeux globuleux, froids, semblaient vouloir faire comprendre que la réplique de Boris avait tout d'une scène comique. « Répéter des bêtises... » On aurait presque dit que tout n'était qu'une boutade. Il ressemblait à une vieille grand-mère se tordant sur son fauteuil et prête à faire exploser sa robe passée d'âge.
Son rire, sans chaleur, dégoulinait de miel à en dégoûter les plus gourmands. Rien, en Ferdinand Yaxley ne semblait donner confiance et encore moins envie de rire. Il y avait plutôt même à s'inquiéter à le voir ainsi faire abattre ses deux grasses joues dans une exclamation douceâtre.
Le vieil homme but une nouvelle gorgée de vin qu'il prit le temps d'avaler délicatement, tandis que les bûches crépitaient sous le poids du feu. L'air s'alourdissait et l'odeur de lavande se mêlait à celle de moisi. Au loin, dans entrebâillement de la porte défoncée, il n'était pas rare de voir une ombre passer et filer. Un petit oiseau, probablement, sautant de branche en branche et s'assurant de la sécurité de l'Araignée.

« Mon tendre enfant ! Je n'aurais jamais assez de mercis pour une personne qui peut autant me faire rire. Bien que ses mots étaient doux, ses yeux avaient tout pour inquiéter. A la seconde même, si je le décidais, vous seriez emmené et exécuté dans cette cave qui vous faisait tellement trembler que vous en serriez le bras de mon petit oiseau il y a encore quelques minutes. Il ne resterait rien de vous. Je m'assurerais que mes services effacent des généalogies votre pathétique passage sur ce triste monde et il n'en serait plus rien de vos sinistres bêtises. »

Il eut un petit rire.
Un planche du plafond, là-haut, craqua.
La douceur du ton de Yaxley contrastait avec la violence de ses mots.
Ceux-ci semblaient toujours danser dans la langue imbibée de gourmandise, de sucre et d'alcool. Ils étaient des sortes de particules enrobées, des gourmandises ou de fines pâtisseries dont il prenait un soin particulier. Il aimait les manipuler, leur faire dire ce qu'ils avaient de plus horrible, de plus tentant, de plus subtil tout en en faisant ressortir les plus belles syllabes. Il chantait, lorsqu'il parlait, et dansait quand il se déplaçait.
Une telle grâce compliquait la tâche de ses ennemis ; ceux qui le pensaient vulnérable disparaissaient du jour au lendemain, et les plus dangereux de ses ennemis baissaient rapidement la garde en le voyant minauder et faire le précieux aux mots enrobés de douceurs. On ne pensait pas qu'un excentrique et vieux dandy du Ministère pouvait poser problème. On en oubliait même qu'il était un Mangemort, que le Seigneur des Ténèbres lui avait donné la direction d'un des plus influents services du Ministère. Derrière le mondain se cachait un monstre qui lorsqu'il lui fallait rappeler son pouvoir de nuisance savait se montrer menaçant.

Aux yeux de Yaxley, Boris Bagshot n'était rien. Un vampire, un hybride. Il était même de la race de ceux que les Yaxley avaient toujours chassés ; ceux-là même qui avaient permis aux chasseurs d'ériger leur nom dans la société, de construire un mythe autour de leur capacité à attraper leur proie.
On ne pouvait s'y tromper. Quand bien même Euan Yaxley n'appréciait pas son frère cadet, Ferdinand Yaxley faisait bien partie de la même famille. A l'instant même, il avait à son tour chassé un vampire ; chassé à sa manière, avec délicatesse, miellerie et élégance. Mais il en restait que Boris était ici entre ses griffes poudrées et sucrées. Le chasseur avait eu sa proie.
Probablement d'ailleurs le garçon n'avait été déjà rien, à Poudlard. Yaxley était de ces êtres de passage qui sont toujours à moitié là. Ceux qui communiquent parce qu'ils le doivent mais se satisfont d'eux-mêmes et de leur seule compagnie. Il était un solitaire, et déjà à Poudlard, on le voyait comme un aristocrate à-part à qui on avait confié une mission d'enseignement. Ce que des professeurs se reprochaient entre-eux, dans l'ancien antre de Dumbledore, ne venait jamais aux oreilles de Ferdinand. On le laissait tranquille, avec ses manières, ses méthodes et ses objectifs. Au Ministère, c'était toujours le cas. Il n'avait nulle autre semblable et n'était la pâle copie de personne. Et c'était au mieux.
Aux yeux donc du Directeur des Archives, Boris était un pantin. Un pantin sur lequel on pouvait s'apitoyer, lorsqu'on se sentait un peu exclu, mais jamais trop longtemps.
Les parias rappellent aux parias cachés leur véritable condition.

Le vieil homme se réinstalla, bien comme il fallait.
A le voir ainsi confortablement assis dans son fauteuil probablement issu de son mobilier personnel et familial, il ressemblait à un aristocrate précieux s'entretenant des nouvelles économiques du jour. Ferdinand Yaxley jouait parfaitement son rôle ; celui d'un vieux dandy extravagant s'entretenant avec un écorché de l'existence.
Boris Baghot n'était finalement pas totalement différent. Lui aussi chaque journée était une pièce de théâtre à mener ; une pierre à rouler en haut d'une montagne avant qu'elle ne la redescende de l'autre côté de la pente. Lui aussi connaissait le prix de l'absurdité de vivre et tâchait, comme il pouvait, de donner un sens à ce qui lui semblait être tragiquement imposé. Il connaissait les codes du jeu pervers théâtral qui veut que des êtres ne se rapprochent que par instinct physique et sexuel, celui-là la même qui les meut et les pousse à gouverner et soumettre.
Mais à la différence du Directeur des Archives, il ressentait. Il ressentait de la peine, de la terreur, de la rancune ; il s'était intéressé à ce jeune né-moldu puisqu'il avait bouleversé son contrôle de lui-même pour cet inconnu. Cela lui en avait valu un sacré tour.
Ferdinand, lui, était de ceux qui s'étaient modelés sur l'absence à eux-mêmes. Il était un éloigné de l'âme qu'il ne percevait plus que comme un tombeau éternel l'obligeant à sourire et à sembler respirer l'air putride recraché par les poumons hypocrites des autres. Ferdinand contrôlait les codes parce que c'était sa seule raison de vivre ; montrer aux autres leurs lâchetés, faire de leurs peurs un poison de vie, de leurs faux-semblants un spectacle permanent. Depuis bien longtemps, il ne ressentait plus rien.
Donc tout, pour lui, n'était plus rien.

« Très cher, ce n'est pas votre histoire qui m'intéresse profondément, mais bien le récit que vous en ferez. Toutes nos histoires se ressemblent, après tout. La différence porte sur la manière avec laquelle nous les racontons. C'est le coup de pinceau qui révèle le peintre, n'est-il pas? Il semblait parler avec plus de douceur, encore, et plus de mystère. A votre tête, je devine bien que cela doit être succulent à entendre. Pensez bien que je sais déjà tout, ou presque, de vous. Il me manque peut-être encore une petite chose et comme tout enfant impatient devant sa friandise, je frétille à l'idée que vous me la révéliez. En effet, à l'instant même où il parlait, le vieux politicien s'était transformé en un petit enfant mû par la volonté de jouer. Sa voix semblait prise d'un entrain. Le monde est une pièce de théâtre, mon garçon. L'important, ce n'est pas qu'elle dure longtemps, mais qu'elle soit bien jouée. Quel donc a été votre rôle dans ce qui me semble être une tragédie? Parlez, parlez, nous sommes entre nous, après tout. »

Une nouvelle ombre passa, près de la porte.
Ferdinand n'eut guère l'air de s'en soucier. A le voir ainsi si bien habillé, avec son verre de vin en cristal, son fauteuil Louis XVI et son feu de cheminée, on avait tout pour oublier le lugubre cadre de la rencontre les deux hommes. La lumière du feu contrastait de plus en plus avec le gris des lieux ; les murs, le sol, les fenêtres, tout semblait n'avoir plus d'âge et d'être mis hors du temps. Probablement était-ce cela, l'enfer. Une illusion d'optique, un feu de cheminée et un vieux bonhomme gras sentant la lavande friand d'histoires et de contes de nourrice.
Ferdinand s'avança, posant ses deux grasses mains sur ses cuisses enveloppées de velours noir.

« Votre fin et singulier esprit est en mesure de le comprendre. Racontez, mon enfant. Sait-on jamais... Mon coeur serait si attristé de ne point vous entendre chanter les sombres vers de votre magnifique existence. Ne faites pas trop attention aux lieux ; les mouches et les araignées ne sont, après tout, que les fidèles compagnes de nos tombeaux. »

Le vieil homme sembla frissonner un instant, ou se donner l'air de frisonner un instant.
Il porta à nouveau ses charnues lèvres sur son verre de vin rouge. Il s'était réinstallé au fond de son fauteuil, une jambe par dessus l'autre, comme attendant qu'on le distraie.
Un roi sans divertissement est un roi plein de malheur.


Dernière édition par Ferdinand L. Yaxley le Dim 19 Jan - 17:03, édité 1 fois
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Pourquoi est-ce qu’il se marre, ce vieux schnock ? Ta moue de midinette se casse la figure lorsque Yaxley se met à rire. Interdit et passablement dégoûté, tu le regardes faire, le laisses finir son petit numéro. Il était tout bonnement impossible que ce que tu aies pu dire soit drôle ; tu ne disais jamais rien de drôle, même tes blagues étaient toujours trop méchantes. Et de fait, tu savais reconnaître quelqu’un qui jouait la comédie : Yaxley se forçait à se fendre la poire purement et simplement pour te ridiculiser. Allons bon. Ton visage blanc se tranche d’un sourire sardonique, étirant un peu trop exagérément tes lèvres épaisses, comme ta mère écoutant un professeur dire du mal de son enfant.

Tu aurais pu tenir longtemps comme ça, s’il n’avait pas eu la riche idée de t’expliquer pourquoi il riait tant.
Oh, donc en fait c’est comme ça que tu vas mourir.
Cette fois-ci, ton visage se décompose, à mesure que sa menace prend forme dans ton crâne de piaf. Tu ne prends réellement conscience que ta vie est menacée qu’une fois qu’on t’a exposé à quel point il serait facile de l’effacer ; logique et imparable. De toutes les manigances qu’on prêtait à l’archiviste, tu n’avais pas réalisé jusqu’où ça pouvait dégénérer. On avait déjà menacé de te buter, de te quitter, de te virer, de te couper les vivres, les mains ou les dents, mais jamais encore on avait menacé de t’effacer. C’est peut-être même ce qui était arrivé à ta superbe Lupa… Dans l’optique où Yaxley ponctionnait sur les têtes de linotte du Ministère.

La planche qui craque au-dessus de vos têtes te fait sursauter, ainsi que les ombres dans le couloir. De la sueur glaciale coule dans ton dos tout aussi glacial, la rendant presque brûlante. Ton coeur battant habituellement au ralenti a presque repris une cadence vivante, tant il cogne fort. Ton pantalon n’aurait pas coûté si cher que tu te serais pissé dessus de terreur. Et dire que tu pensais avoir tout subi, après l’attaque des Détraqueurs.
Tu ne pourrais définitivement pas te targuer d'avoir su dissimuler que tu as eu peur. Avec le temps, tu avais appris que, parfois, c’était nécessaire de le montrer. Ça abrégeait bien des souffrances, généralement, puisque la plupart des gens voulaient faire peur et, une fois qu’ils y étaient parvenus, passaient leur chemin (jusqu’à la prochaine fois). Ça en avait été ainsi depuis Poudlard ; tu avais donc eu tout le loisir de t’y faire, quitte à travailler ta figure pour, même là, apparaître sous ton meilleur jour.

Tu reposes le verre de vin qui trahit tes tremblements, ressers le col de ta cape sur tes épaules maigrichonnes, les bras croisés avec force manière. Tu rassembles un peu de contenance, passes le bout de tes doigts sur une mèche parfaitement laquée, sur tes cils démesurés.
A vrai dire, tu te fichais qu’il ne te laisse pas le choix ; après tout, cette triste affaire de né-moldu ne faisait que te mettre en face d’une incompétence qui n’était plus un secret pour personne. De tous, Yaxley avait choisi de soutirer ses confidences à un véritable crieur public, à la commère qui vendrait père, et surtout mère, pour être en couverture du premier canard people. Non, ce qui te posait problème, c’était de savoir ce qu’il allait faire de toi, après ça. Si tu n’avais pas été en train de trembler de tout ton saoul quelques minutes auparavant, tu aurais pu le faire languir des autres bombes à retardement que tu détenais ; Finnigan, Von Bäume et tout le reste… Cependant, rien n’aurait été plus certain qu’il te les arrache prématurément, comme l’enfant impatient qu’il se vantait d’être… Une drôle d’image pour un type qui avait le triple de ton âge.

Tu te composes une attitude moins renfermée, vendant ton comportement comme une capitulation, ouvrant avec difficulté jambes et bras, plantant tes griffes dans les accoudoirs du fauteuil, toi qui avais pour habitude de t’entortiller sur toi-même, comme pour ne révéler que tes meilleurs angles aux autres.
« Il y avait donc ce type, sur le pas de ma porte : un sans-abri, à n’en pas douter, au vu de l’odeur. J’avais initialement prévu de l’ignorer, comme ce que font tous les riches. » Jusque là, rien de surprenant. « Sauf que ma mère est intervenue, et je ne sais pas pourquoi, s’est aussitôt persuadée qu’il s’agissait d’un ex-camarade de classe. J’aurais pu lui dire que je ne le connaissais ni de Morgane ni de Merlin… mais elle avait l’air si contente de le rencontrer que… je l’ai laissée l’inviter. » Voilà à propos de quoi c’était ; elle voulait un nouveau fils et toi, tu te sentais tellement responsable de t’être laissé transformer, que t’y voyais pas plus d’inconvénient que ça. « Loin de moi l’idée de me plaindre, mais les choses entre nous sont… compliquées, depuis ma transformation... » qu’elle a orchestrée, d’ailleurs. Ça, pour sûr que le Yaxley l’avait pas répertorié dans ses petits bouquins. « Bref, là, je suis parti travailler. Et ce n’est qu’à mon retour, à la nuit tombée, que j’ai réalisé mon erreur. Malheureusement, il était trop tard, et le gamin avait déjà fui. » La réminiscence de cette odeur de magie si faiblarde t’arrache un frisson de dégoût. « J’ignore comment il a su, peut-être un genre d’instinct de proie… » Ou l’habituelle méfiance vis-à-vis des maudits dans ton genre, rien de nouveau à l’Ouest. « Mais peu importe ; comme je l’ai dit, c’était un gamin, il n’a pas pu aller bien loin. Avec vous tous, là, les Mangemorts, en vadrouille dans les rues, ça n’a dû être qu’une question de temps avant qu’il ne se fasse arrêter. Je parie qu’aujourd’hui, il n’est plus qu’une dizaine de poches entassées dans la banque du sang. » Bon ok, tu pouvais pas le piffrer, mais toujours est-il que depuis que tu étais vampire, c’était le seul qui avait eu le culot de t'envoyer chier comme si tu n’étais qu’un vulgaire sorcier.

« Ça fait que neuf mois que je suis vampire. Sur une existence de près de 300 ans, ça revient à n’être qu’au stade de foetus. J’ose espérer qu’au bout d’un temps, on arrête de s’encombrer de ce genre d’humeurs… »
En soi, ton initiative est correcte, celle d’extérioriser ce qui ne va pas. On n’y pense pas, mais tous les jeunes hybrides feraient bien de se faire suivre psychologiquement, parce que c’était quand même impensable de traverser ça tout seul. Alors ok, la nature voulait que dans chaque équipe, lycans comme vampires, le nouveau-maudit soit flanqué aux côtés d’une figure assimilable à celle d’un parent. Mais au vu de ta relation catastrophique avec ta mère, ton Sire n’aurait pas pu mieux s’en sortir qu’en t’ignorant (surtout avec la tronche qu’il avait, tu n’aurais pas attendu longtemps avant de lui servir un complexe d’Electre-roi). Le problème, c’était que tu avais choisi de te confier sans doute à l’être le moins enclin à te venir en aide, infiniment loin derrière Fenrir ou même Ulrike.

Ton regard papillonne, évite les recoins sombres de la pièce, le couloir fréquenté par les piafs à Yaxley. Bien entendu, ils ne se posent que furtivement sur ton interlocuteur, les cils frétillant comme des insectes qu’on coince à la lumière d’une lampe. « Je suis pas désolé pour lui, je me sens juste stupide d’avoir pu faire défaut à mon travail, simplement à cause de ma relation complètement niquée à ma mère. » Du pouce, tu te masses un peu les tempes, certain qu’ainsi, la lumière prenait parfaitement bien sur la ligne de ta machoire. « Je sais qu’on ne me garde que parce que je suis censé être bon à certaines choses, sentir la magie et toutes ces conneries ; et si jamais il s’avérait que je ne l’étais pas, je n’ai plus de raisons d’être là. C’est fou ce que la peur peut vous faire faire. » Tu immobilises enfin ton regard dans le sien, mort, comme si les paillettes rose bonbon qui y scintillaient n’étaient qu’un artifice. « Je suis très loyal quand j’ai peur. » Pas étonnant que la Brigade te refile aux pires énergumènes ; c’était à la sueur froide que tu carburais.

Tes sourcils se froncent un peu, tes doigts moites dérapant de temps à autre sur les dorures du siège. A présent, la question qui fâche, ou plus exactement, qui devrait t'achever. « Maintenant que je vous ai raconté ce qui vous manquait... est-ce que je vais rejoindre les mouches et les araignées ? »
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Depuis très longtemps, maintenant, Ferdinand Yaxley ressentait une haine à l'égard de tout ce qu'il y avait d'anormal, de différent.
Cela le constituait au quotidien, depuis enfant. Cette peur de l'autre, ce rejet ; il en avait fait sa marque de fabrique. Elévé en dehors de la réalité, il avait toujours eu l'impression que cette dernière était une sorte d'alternative séparée de lui par un écran de verre. Si réaliste, si vraisemblable, mais intouchable, invivable. Les quelques fois où il avait cherché à être avec les autres, à être les autres, il s'était violemment cogné contre ce rempart transparent qui, pour le reste de ses jours, l'éloignait de la vie sensible. Aux premiers instants, il n'avait ressenti qu'une violente douleur de ne pouvoir toucher de ses jeunes doigts ce qui lui semblait si accessible. Puis, il s'était petit à petit livré à la fiction ; il en avait fait son domaine, son royaume. Il trônait en maître incontesté et incontestable. Elevé loin de son frère, il s'était façonné une citadelle intérieure où, seul, il se savait inatteignable.
Puis la littérature l'avait sorti de ce sentiment constant d'ennui et d'angoisse. Enfant, le monde lui semblait possible, c'était pour lui une donnée enviable et réalisable. Certaines nuits, il devenait un chevalier et sauvait des griffes d'un dragon une princesse en robe de mousseline ; d'autres fois, il accompagnait son père sur les vagues agitées d'une matinée de tempête, en Islande ; d'autres fois, il était un adolescent racontant sa persécution à cause de la Sorcellerie. En quelques années, Ferdinand Yaxley s'était identifié à tout ce qui ne pouvait exister ; à tout ce qui l'éloignait de la vie sensible et réelle. Il avait fait siennes toutes les fictions possibles du monde. Il en contrôlait les codes, se plongeait pas à pas dans l'esprit des quelques grands auteurs et de leurs narrateurs fictifs. Il quittait le monde pensant mieux le comprendre. Bien plus ému par la mort de ce jeune homme ayant gravi les échelons de la société dans un célèbre roman d'apprentissage que par la mort de son propre grand-père, il réajusta son rapport aux autres êtres de son espèce. Petit à petit, il s'en éloigna, jusqu'au jour où il comprit qu'il pouvait les manipuler pour mieux les éloigner de lui-même.
Depuis lors, Ferdinand Yaxley, éduqué dans l'idée que ceux dépourvus de magie peuvent le menacer, n'eut de cesse de s'enfermer dans sa fiction tout en tirant les ficelles de la réalité. Il lui était alors, depuis, impossible de ressentir la moindre compassion, le moindre remord, la moindre pitié. Tout devait être tenu soigneusement à distance ; et lui continuait à jouer son rôle.
Et quand bien même pensait-on l'avoir cerné, il savait déjouer les préjugés.

A la seconde même où le jeune vampire transpira, Ferdinand fixa toute son attention sur les mots qu'il prononçait.
La peur avait envahi son invité. Il n'avait donc pas fallu beaucoup de temps pour que la mouche s'enroule dans les fils de soie. Mais à se débattre violemment, il risquait de tout faire tomber. C'était désormais une autre étape qui débutait, probablement plus soudaine qu'il ne l'avait pensé. A l'idée d'être ainsi désarçonné dans son propre plan, Ferdinand Yaxley ressentit à nouveau une profonde colère qui l'obligea à se saisir de son verre de vin et à calmer son sang par le délicat alcool qui le saisit instantanément.
On ne pouvait fendre le masque mielleux du vieil homme. Ses gestes n'étaient que le résultat d'une fine et méticuleuse partition écrite bien avant la naissance de Boris Bagshot et améliorée de jour en jour. Tout ne se passait que dans l'esprit du vieil homme qui avait, depuis enfant, réussi à scinder ses gestes de ses pensées. Rien ne trahissait jamais ce que vivait profondément Ferdinand Yaxley. Aussi, la colère vécue à l'idée d'être déstabilisé sur son propre plateau de jeu disparaissait complètement derrière le velours de son costume et l'élégance de ses manières. Il était depuis bien trop longtemps habitué à faire du monde une scène de théâtre où il jouait, à chaque grand soir de son existence, toujours le même monologue.

L'alcool l'avait saisi dès qu'il avait quitté Poudlard, en 1951. Profondément troublé de la mort de Grindelwald, le jeune cadet des Yaxley avait progressivement laissé son temps se dérouler dans les plus chics soirées mondaines de la capitale. Il avait été de cette jeunesse brisée et sans responsabilité ; celle-là même qui n'avait pas à penser à l'héritage tenu par des grands-frère secs et froids, à l'image d'Euan. A nouveau, Ferdinand avait trouvé un antidote au réel ; il avait disparu du monde à travers la perte de lui-même. L'alcool soulagea ses peurs et ses angoisses ; le monde lui parut plus facile à manipuler de cette manière.
Le tragique destin de Boris Bagshot n'était guère différent du sien. A ceci près que le jeune vampire n'était probablement pas né à la bonne époque. Il aurait certainement trouvé en Ferdinand Yaxley et ses amis une compagnie agréable de débauche aristocratique, dans les années cinquante. Mais près de soixante ans avaient passé, et les soirées organisées par le Directeur des Archives avaient tout d'une arène de cirque mondaine où les fauves inassouvis montraient leurs crocs avant de dévorer leurs proies. L'insouciance avait été doucement sirotée par les responsabilités politiques et les amis d'antan se trahissaient, s'espionnaient et se manipulaient sans aucun scrupule.
Et, tout en buvant, Ferdinand ne lâchait pas du regard celui qui, comme tout enfant digne de ce nom, accusait sa mère.

« Je n'ai fait que murmurer des mots à d'autres, mon garçon. Je ne puis parier ensuite sur ce que ces mots sont devenus. La modestie. Influent, Yaxley aimait à jouer celui qui ne tenait aucune ficelle et laissait les gros dossiers aux gros puissants. Une façon peut-être d'inquiéter sur les affaires plus secrètes et sordides. Certains mots sont naturellement aptes à changer le monde, ils ont le sublime pouvoir de nous enserrer chaleureusement et de sécher nos larmes. Aux jours contraires, ils sont même ces cohortes de sauveteurs quand nous ne sommes ni vivants, ni morts. Le vieil homme marqua une pause. Sa voix, onctueuse, coulait vers son invité, comme si elle cherchait à rassurer. Les mots peuvent autant être des lames de poignards que des notes de violon. »

Ferdinand Yaxley, de ses pattes velues, dans sa toile, manipulait le présent pour s'assurer du passé. Le futur, il ne s'en occupait pas vraiment, laissant cette tâche à d'autres. Il jouait avec les mots, remplaçant des termes dans les archives, en faisant disparaître d'autres. Un mot, et une famille était soudainement privée de ses enfants ; un autre, et c'était une autre qui s'enrichissait d'une popularité éphémère. Il réécrivait l'Histoire, comme un dramaturge, redonnant la parole à ceux qui ne l'avaient jamais eu, jouant d'un décor factice et plaçant la lumière sur les personnes les plus intéressants.
Ce que ce né-moldu était devenu n'était pas de son ressors ; peut-être même aucun de ses petits oiseaux n'en avait réellement informé les services de la Justice Magique ; ou peut-être était-il mort à l'heure actuelle. Qu'importait. Aux Archives, il n'existait déjà plus. Il n'y avait plus de trace de lui, si ce n'était dans les listes secrètes destinées à la traque et à l'extermination des Bourbes. Il était un élément utile pour l'Araignée, un appât, probablement. Il servait, malgré lui, à attirer des proies.

Le Directeur des Archives déposa son verre de vin. Vide.
Il s'avança sur son siège et, en quelques secondes, alluma une cigarette qui laissa une délicate fumée.
Il prit un air sincèrement affecté, comme une vieille mère constamment inquiète pour son rejeton.

« Il est donc évident que vous avez lamentablement échoué, mon cher. Il prit une longue bouffée de cigarette, orchestrant sa prise de parole comme un cantor sur le point de faire sa dernière lamentation. Mais n'y voyez aucune sentence de ma part ! Le vieil homme que je suis ne pourrait suivre la vie de vous autres parias en quête d'existence. C'est bien trop d'aventures intrépides ! Mais qu'importe. Ni vous ni moi ne sommes là pour recenser les tribulations et les réussites de chacun. Nous serions bien surpris du résultat ! Toute vie a bien son petit secret. »

Il pouffa, tel un précieux aristocrate qu'il pouvait être. Ou pouvait donner l'impression d'être.
Ce qui l'intéressait, au-delà des gestes troubles, des gestes qui masquaient les pensées, c'était bien ceux qui les réalisaient. Distant des actions violentes, contrairement à son neveu, Corban, Ferdinand Yaxley aimait à chercher, dans le mouvement, les failles de ses ennemis et de ses amis. Il n'avait jamais été doué pour le combat physique, pour l'emportement impulsif, pour l'instinct violent de survie. Mais il aimait à découvrir celles et ceux qui étaient de cette trempe-là ; il aimait, dans le trouble de leurs gestes, piquer là où il fallait pour les rendre moins dangereux.
Et, par une chance impressionnante, Boris Bagshot côtoyait au quotidien ce type de personne.

« J'ai bien peur que vous ne soyez point le seul, Boris. Il y a fort à croire même que beaucoup échouent, voyez-vous, et qu'ils cachent en leur nom de sombres trésors. Nous avons grand besoin de purifier notre société, vous en avez tout à fait conscience. Aussi ai-je pour vous la solution possible à vos maux, mon enfant. J'ai, pour vous, ce qui peut vous rendre bon à autre chose. »

Très certainement, Boris était de ceux qui traquaient les autres pour s'oublier lui-même. C'était là la meilleure arme possible entre les mains d'un être tel que Ferdinand Yaxley qui n'avait guère besoin d'autre chose que d'une volonté de trouver un sens à l'existence.
Le Directeur des Archives aspira à nouveau une bouffée de cigarette. Chaque geste dégageait une odeur de lavande de plus en plus persistante. La chaleur du feu avait même de quoi endormir et engourdir n'importe qui.

« C'est donc à vous de décider ce que vous allez devenir. Yaxley s'avança et prit une voix plus sourde et chuchotante. Soit dit entre nous, le Ministère de la Magie regorge considérablement de petits défauts, de petites erreurs qu'il est bon de corriger avant qu'elles ne deviennent des problèmes. Il ne tient qu'à vous de me les faire connaître. De me les chuchoter. Alors, je ferai en sorte que vous restiez là, comme vous le dites. »

De sa main libre, le vieil homme fit un signe aux ombres passantes. C'était à peine perceptible. De l'autre, il continuait à fumer délicatement.
Il y eut du bruit, des pas, quelques souffles. Le tout était à peine perceptible et demandait à ce qu'on soit très attentif. Le regard du Directeur des Archives se perdait dans le vide, tandis que deux personnes pénétraient dans le salon. Un homme, grand, probablement doté d'une musculature impeccable, tenait dans sa main gantée une petite fille aux cheveux salis et à la peau livide. Des larmes coulaient encore.

« Le Département des Mystères mène quelques petites recherches. Vous le savez probablement. Cette... petite chose que vous voyez-là est une cracmole. Une tare familiale, somme toute. Yaxley se leva, tenant toujours sa cigarette enfoncée dans un manche argenté. Il s'avança vers l'enfant, entraînant avec lui sa fumée et sa lavande. La cheminée qui ne cessait pas de brûler des morceaux de bois alourdissait de plus en plus la température de la pièce. Elle doit disparaître, comme beaucoup de ceux de son espèce. Sa famille n'en veut plus et notre société Magique non plus. C'est tellement regrettable. Il s'approchait, lentement. Cette petite chose ne fait déjà plus partie de mes archives. Pauvre enfant... Le vieil homme passa sa main dodue dans les cheveux gras et abîmés de l'enfant. Voyez-vous, la magie de ses parents circule de toute part en elle, mais ne lui apporte rien. Je suis certain que vous pouvez la sentir d'où vous êtes, n'est-il pas? C'est terriblement cruel puisqu'elle ne peut s'en servir et ne le pourra jamais. »

La main potelée du Directeur des Archives passa près du cou de la petite. Elle n'eut à peine le temps d'entendre le mécanisme d'une des bagues du vieil homme s'activer. Trois filets de sang coulèrent, à l'endroit même où l'artère principale passait.
La petite fille tenta de retenir le sang qui coulait, avant de commencer à vaciller. Elle ne pouvait rien faire qu'attendre.

Ferdinand Yaxley offrait à sa proie, Boris, l'occasion de rassasier sa peur transpirante.
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Boris Bagshot
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Boris Bagshot
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Loin de te rassurer sur le sort qu’il te réserve, Yaxley se lance de nouveau dans des explications sur l’art de manipuler la parole et les gens. Tu n’écoutes que d’une oreille méfiante, toujours figé dans ton fauteuil, le dos séchant dans tes habits noirs, hésitant sur l’utilisation du sort qui te permettrait de fuir, si jamais il en venait à vouloir te faire rejoindre les mouches et les araignées. Malgré ton teint transparent et ton rythme cardiaque réduit de moitié, on aurait pu croire qu’il s’agissait de là où tu venais, plus que de là où tu craignais de finir. Aux aguets comme tu es, tu en oublierais presque de te vexer lorsqu’il te confie que tu avais échoué à tu ne sais quelle épreuve d’orateur douteux. C’est dire que tu étais aussi mielleux qu’il était jeune et fringuant. Si, la plupart du temps, tu jouissais d’une répartie assez cinglante, puisque entraînée par bien des médisances, tu n’avais jamais vraiment brillé par la beauté de ton verbiage. Tu n’étais pas un grand lecteur, et encore moins un écrivain. A Poudlard, la seule fois où tu avais trempé une plume de toi-même dans un encrier avait été pour envoyer des lettres enflammées et anonymes à certains de tes professeurs. Aussi, Yaxley pouvait prêcher autant qu’il le voulait, tu n’en deviendrais pas un érudit pour autant. Et, au vu de ta tendance à manipuler les volontés les plus faiblardes à grand renfort de gueule d’ange et de costumes toujours plus seyants, ça n’était peut-être pas plus mal.

Tu retiens ta respiration, jusqu’à ce qu’enfin, tu comprennes qu’il avait d’autres projets pour toi. En réalité, ça n’était pas les cafards qu’il voulait que tu rejoignes, mais ses soi-disants oiseaux. Le soulagement est tel que tu te laisses aller au fond du fauteuil, relâchant un bruyant soupir d’aise. C’est comme si ton corps figé se remettait en branle, le coeur creusant ta poitrine, et la faim ton ventre. La panique avait été si viscérale que ton énergie y était passée. Bien entendu, tu avais dans ta poche de quoi te rassasier pour les temps à venir, sauf que Yaxley ne l’entendait pas de cette oreille, comme s’il savait que les jeunes vampires s’affamaient d’un rien.

Contrairement à n’importe quel autre sorcier, tu vois distinctement les deux arrivants pénétrer discrètement dans la pièce. Tu t’attardes tout d’abord sur l’homme, étudiant avec un coup d’oeil habitué le tour de ses épaules et de ses hanches. C’est en baissant les yeux que tu remarques la petite fille, et surtout, l’état dans lequel elle était. Tu tends le visage, reniflant l’air et la magie de chacun, devinant ainsi en même temps que l’archiviste ne t’explique et ne lève un jour implicite sur pourquoi ils te l’avaient amenée.

Quand le sang s’écoule dans son cou, tu bondis de ton fauteuil, comme pour t’éloigner de la source de cette odeur devenue soudain si forte. C’est fou à quel point quelque chose habituellement au-dedans pouvait sentir aussi fort au dehors. Bien entendu, il n’y avait que toi, le vampire, qui étais victime de cet assaut olfactif ; les deux autres hommes ne bronchaient pas. Tu comprends aussitôt ce que Yaxley attend de toi. La promptitude qu’il a à t’expliquer toutes les manières dont il pouvait te tuer ne laisse pas énormément de place à ton hésitation. Tu essaies en vain de soutenir son regard, comme pour y obtenir la certitude que c’était cet irréparable-là qu’il voulait que tu commettes. Puis tu vas chercher dans le regard loin du type qui avait amené la gamine ; pas plus de réponse, si ce n’est un mouvement de bras de l’homme qui avance l’enfant encore un peu plus dans ta direction, comme on jetterait avec désintérêt de la bidoche à un hippogriffe.

On te traite peut-être comme un fauve d’un cirque de monstres, bien que tu n’aies jamais mordu qui que ce soit. C’était interdit par la loi, et en plus de ça, tu trouvais cette pratique particulièrement repoussante. Tu n’avais assisté qu’une fois à une morsure, et ça s’était fait d’un vampire à un autre, à l’instar d’une humiliation publique. L’expérience s’était avérée douloureuse, mais désormais, ça ne ressemblait à rien de ce que tu allais être sur le point de commettre.
« Je suppose que vous savez pertinemment que je n’ai pas le droit de faire ça ?... » que tu demandes, sans conviction.

Le sang coule trop de sa gorge, qu’il imbibe son vêtement crasseux et que c’est tout autant de sang qui ne sera pas pour toi. La pauvre enfant était en tous les cas condamnée, alors autant que ce foutoir apporte quelque chose à quelqu’un.
En une foulée, tu es en face d’elle, tout sourire, même si tes yeux bleus de fou vont et viennent entre sa plaie et son visage. Dans ses yeux à elle, tu vois qu’elle sait ce qui va lui arriver mais qu’elle veut juste que tu lui dises un mensonge. Tu tends la main vers elle. « Fais pas ça, ça sert à rien... » Elle compresse son cou, dans le désespoir fou d’échapper à son sort. Elle tremble sur ses jambes, de peur, de douleur, de mort imminente, aussi, avant qu’elle ne s’affaisse, tu la retires à l’homme et la prends dans tes bras. « T’inquiète pas, tout va bien se passer » Elle hoquète, le souffle noyée par l’hémoglobine qui remonte dans sa gorge, gonfle la peau blême. Tu lui poses sa tête sur ton épaule, comme si tu allais la bercer, alors que tu dégages les cheveux dans son cou meurtri. « T’inquiète ; compte jusqu’à dix et ferme les yeux, si tu veux » Tu colles ta bouche assoiffée contre ses plaies, aspirant le sang tout tiède. Un. La petite se débat et tu resserres très fort ton étreinte autour d’elle, jusqu’à lui couper la force et l’espoir de s’en tirer. Deux, trois, quatre. Puis, lorsque le sang, faisant son effet, revigore tes forces et tes sens, tu sors davantage les dents, cinq, jusqu’à les planter, crevant la chair fragile. Son cou est si mince, le craquement est morbide, six, sept, huit, et si tu ne la tenais pas, neuf, sa tête pourrait rouler en arrière et se décrocher.
Le pire dans tout ça, c’est que tu te regardes faire, atterré, mais que tu sais pas si tu pourrais t’arrêter. Dix.

Tu ignores si tu la vides de son sang. Tu n’en es sans doute pas loin, lorsque le flot se tarit et que tu sembles reprendre tes esprits. Ta mâchoire se décontracte. Tu sens quelques bouts de chair coincés entre tes dents, et ravales une nausée. Tu rends la petite refroidie à l’oiseau baraqué, t’appuies un temps au bras de l’homme, chancelant comme une veuve ivre.
« Ils ont mauvais goût quand ils ont peur... » hasardes-tu, détournant le regard de l’enfant, comme si tu ne faisais que l’abandonner sur le pas d’un foyer moldu. Peut-être qu’il le fallait, après tout, que tu tues symboliquement la progéniture que tu ne pourrais plus jamais avoir. Il y avait tout un tas de types, dans de très vieilles histoires, qui avaient été condamnés à dévorer leurs mômes.  Exalté par la pitance, on ne voit pas à quel point tu trembles, sous le choc, cherchant désespérément une ânerie, une remarque provocante, ou simplement anodine, pour prétendre que tu pratiquais une telle barbarie au quotidien.
Tu rencontres enfin l’attention de Yaxley, le sourcil haussé et le menton, rouge, gouttant encore. « C’était quoi, au juste ; un test ? » Tu te plantes en face de lui, le dépassant sans ménagement, une main sur la hanche et l’autre, paume ouverte, tendue. « Vous avez un mouchoir ? » Dix.
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Le cours des choses humaines n'était constitué que de cette lutte entre l'humain et l'animal. C'en était même le fondement. Artémis, La Diane chasseresse, avait longtemps protégé les chasseurs de ce basculement dans la sauvagerie ; elle avait toujours assuré qu'ils ne se transforment pas en bêtes. Elle avait été la donnée de civilisation, celle qui marquait la ligne entre deux mondes. Les Grecs puis les Romains lui avaient confié leur peur intrinsèque et ancestrale de perdre ce qui faisait d'eux d'autres que des sauvages. L'Occident s'était construit autour de cette figure qui les rassurait, tant conscients de leur potentiel humain que du risque animal. La ligne semblait donc toujours être sur le point d'être franchie, l'Homme sur le point constant de basculer.
Pour beaucoup, cela se matérialisait par une angoisse diffuse régulièrement biaisée par des moyens d'oubli. On buvait, on achetait, on mangeait, on coïtait, on riait, on lisait, on aimait, ne serait-ce que pour, à chaque instant, s'éloigner de la part animale en soi. On se convainquait ainsi qu'on n'était pas de l'autre camp, qu'on acceptait les lois, celles des Hommes, ou celles des Dieux, afin simplement de se donner une contenance. Et, naturellement, on regardait de manière variable celles et ceux qui s'y refusaient ; pitié, mépris, haine, peur ou colère, tant de sentiments qui arrivaient naturellement quand il fallait se rassurer.
Mais la solitude finissait toujours pas rattraper l'Homme. A chaque instant d'ombre, à chaque détour du quotidien, à chaque interligne immense de la conscience suspendue, il pouvait prendre conscience qu'il n'était destiné qu'au pourrissement de la chair, la sienne ou celle des autres. Ainsi fait, il se reprenait et avançait avec, à tout instant, l'idée d'une nuit qui meurt tous les matins.

Et c'est dans la solitude que les deux êtres ici rassemblés se trouvaient.
Ferdinand Yaxley, repris d'humanité, regardait l'animalité de Boris Bagshot répandre le sang au sol de la vieille bâtisse. Plus le second se livrait à ses pulsions, plus le premier s'en éloignait, comme par un jeu de balance. Yaxley aimait ces moments où il pouvait se convaincre que, contrairement à d'autres, il était encore humain. Probablement n'avait-il pas conscient qu'il était le plus monstrueux des deux, lui qui assistait au spectacle d'une mise à mort meurtrière et violente. Il avait donné la chair humaine à un animal, s'était laissé aller à la vue du déchaînement. Il avait probablement perdu aussi le contrôle, comme toutes les bêtes du monde. Il était un animal endimanché, un animal monstrueusement bien serré dans ses habits de velours, un animal dont les dents acérées étaient cachées par une vague odeur douceâtre de lavande et une immonde barbe finement taillée. Ferdinand Yaxley tendait des pièges parce qu'il avait l'esprit suffisamment tordu pour les concevoir ; il concevait le monde comme une monstruosité et estimait normal de jouer selon des règles qu'il n'avait initialement pas comprises. Il était de ceux que la vie avait laissés de côté, ceux qui s'étaient épanouis par erreur dans une société qui, en réalité, ne voulait pas d'eux. C'était probablement lui qui avait dépassé la ligne, bien malgré lui, bien malgré les bêtes et les hommes.

A voir le jeune homme ainsi pris par le plaisir de consommer, il fut quant à lui saisi d'une pulsion sexuelle. Celle des choses humaines ; le sexe destructeur, le sexe qui contrôle et régit tout, le sexe qui, si retiré, pousse aux êtres le désir de contrôler les autres.
Tandis que le sang coulait entre les dents de Boris, il s'évada par l'esprit, oublia la scène.
Il repensa à l'homme grand, aux cheveux longs attachés en chignon, à la barbe et aux poils du jeune homme. C'était à Londres, il s'en souvenait. Il se souvenait de cette jeune fille qui s'était installée sur les jambes longues et fines du jeune homme. Il s'était attendu à une relation, entre les deux, mais rien ; elle avait ri, puis était repartie. Alors l'homme, le jeune-homme, le grand-frère, peut-être, avait tourné ses yeux vers lui. Des yeux noirs, des yeux aussi doux que froids, qui pouvaient autant exprimer la colère que la séduction. Ils s'étaient regardé. Plus tard, Ferdinand avait erré dans les couloirs de la demeure et les yeux du vieil homme qu'il était aujourd'hui, la fraction d'une seconde, se levèrent vers le plafond de la demeure en ruine dans laquelle il se retrouvait aujourd'hui. Pendant que Boris dégustait le sang de la petite, il se rappelait les quelques rires, il revoyait les danses, ressentait le goût de l'alcool et de la cigarette, il ressentait à nouveau les aspirations passées. L'hôtel particulier avait été ensuite vendu, la famille préférant quitter l'Angleterre. Et Yaxley, comme pour préserver le souvenir de cette nuit, l'avait acheté ; une bouchée de pains. Depuis, rien n'avait bougé ; seule la poussière s'était posées sur les sols vides et les murs décharnés. Cinquante années s'étaient depuis écoulées. Cette nuit-là, il avait parcouru les couloirs et était entré dans une chambre, au hasard. Et il avait vu ce qu'il avait rêvé de voir. Le même jeune-homme était là, entièrement nu, étendu dans un lit à baldaquin. Sa longue silhouette prenait tout un axe du lit. Ses cheveux longs, détachés, contrastaient avec la pureté des draps de lit. Mince, il laissait apparaître des poils sur le torse, le ventre, autour d'un sexe aux mensurations conséquentes. Ses longues jambes semblaient dessiner d'antiques figures géométriques. Ferdinand s'était approché. Il avait posé une de ses mains imberbes, dodues, sur le mollet du grand jeune-homme. Il avait été comme fasciné de sentir le galbe du mince muscle, la douceur de la peau cachée par les poils. Il avait imaginé ces mêmes jambes, renversées, entremêlées avec celles d'une femme, plus fines, moins poilues. Il avait imaginé ce même jeune-homme barbu aux prises avec une femme. Ses yeux et ses mains étaient remontées vers le sexe viril endormi. « C’était quoi, au juste ; un test ? »

Le Directeur des Archives revint à lui.
Le jeune homme le regardait, tendant vers lui une main plus imberbe que celles dont il se souvenait quelques secondes plus tôt. Il baissa les yeux vers le cadavre de la petite et crut la voir, quelques instants, courir pieds nus dans l'herbe fraîchement coupée. Ses rires heurtaient encore son esprit.
Il releva sa tête grasse et dodue, sortit de sa poche un léger mouchoir de soie et approcha, à l'aide de ses potelés doigts, de la bouche du vampire. Délicatement, il essuya le sang encore chaud entourant ses lèvres. Comme une mère avec son enfant, il s'assura que plus rien n'apparaisse de la sauvagerie de Boris. Il sembla prendre un soin infini afin, surtout, de ne pas lui faire de mal, comme si le contact de ce tissu sur sa bouche pouvait l'irriter.
Une fois sa tâche terminée, il observa un temps les traces de sang laissées sur la soie ouvragée comme un symbole même de l'humanité et de l'animalité réunies. Etrangement, le sang n'avait pas pénétré l'ouvrage de soie tissé à la main ; aucun des deux, sauvagerie et culture, animalité et humanité, aucun des deux ne s'était réuni. La ligne ne pouvait être franchie.
Yaxley jeta le morceau de tissu dans la cheminée qui s'activa, de ses flammes, à la dévorer.

Il se détourna et partit de rasseoir.
Il avait à nouveau allumé une cigarette, avec autant de discrétion que de rapidité.
En peu de temps, il s'était repris. L'animalité de Boris l'avait poussé à ressentir quelque chose, comme par un effet d'écho et de ressemblance. Il avait, au comble de la sauvagerie du vampire, ressenti un peu de cette humanité qui lui restait. Et au moment même où il avait essuyé le sang du jeune-homme, il s'était souvenu que, lui aussi, il devait faire disparaître les taches que son être laissait sur lui que, seul, il voyait, mais qui risquaient sans cesse de le faire chuter.

« L'acte que vous avez commis est irréparable, Boris. Vous vous êtes laissé à la sauvagerie pariant sur ma compréhension, et ma discrétion. Je vous en suis infiniment reconnaissant. Et il semblait véritablement l'être. Mon garçon, nous sommes désormais liés. Et ceux qui me sont liés aiment à enrichir, cirer et assurer ce lien unique qui leur est offert. Il tira une bouffée de cigarette et se rapprocha. Rien ne pouvait être comme avant. J'attends désormais une réponse à ma proposition. »

Devenir un espion de Ferdinand Yaxley, c'était s'assurer de vivre dans l'ombre, mais protégé. C'était prendre le risque de dépendre de l'Araignée mais d'être certain d'être à jamais coupé du reste du monde.
Ferdinand fit un geste de la tête très discret, en direction de la porte d'entée. Probablement, Boris ne l'avait pas aperçu.
Yaxley avait ses habitudes, depuis qu'il était tombé dans cette arène que représentent les mondanités. Diriger les Archives, ce n'était que trouver un nid, éphémère, comme toutes les choses du monde. Un point d'appui, douillé, où se sentir protégé face à la violence des éléments qui le dépassaient bien malgré lui. Il s'y épanouissait, se renforçant sans cesse, grossissant son réseau et son influence. Peut-être l'expérience trouverait un jour une fin, qu'importait. Il n'en sortirait que plus fort, sa toile finement étendue autour de lui. Ses petits oiseaux en accueillaient sans cesse des nouveaux, le cercle s'étendait.

Un des ceux-ci entra, vêtu entièrement de noir, le visage statique, une large cicatrice marquant sa joue velue. Probablement une apparence due au polynectar. Ou probablement pas. Personne ne savait véritablement avec quels masques Ferdinand Yaxley, l'Araignée, jouait délicatement.

« Je suis un homme très pris, mon garçon. D'autres rendez-vous m'attendent encore avant la nuit n'agonise une fois encore et ne laisse sa place au jour triomphant. Le petit oiseau s'était approché et se trouvait juste derrière son maître, le Directeur des Archives. Je serais fort contrit d'interrompre notre rendez-vous aussi rapidement, sur des suppositions et des incertitudes. Ce ne sont ici que des calembredaines. Et... Il marqua une pause. Sa voix suave et sucrée devenait de plus en plus étouffante. Je n'apprécie guère les incertitudes. Il n'y a rien de plus éternel que les certitudes. J'aime les collectionner, voyez-vous, mon cher Boris. Et je peux me montrer vraiment capricieux lorsque l'on ne m'en donne pas. »

Le dernier acte de cette tragédie prenait forme.
C'était à Boris d'y déclamer son texte avant que ne sonne la fin de cette très longue nuit.
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Boris Bagshot
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Est-ce que quand tu tues quelqu’un, tu vois sa vie défiler devant tes yeux ? Ou est-ce que c’est juste toutes les possibilités de ce que cette vie, si prolongée, aurait pu devenir ? Est-ce que c’est la vie qu’elle n’a pas vécue que tu t’imagines, pour te trouver une excuse ? Sa scolarité chez les moldus, son envie grandissante de faire de la magie ; peut-être qu’elle serait devenue chercheuse et aurait trouvé une passerelle possible pour les cracmol d’apprendre enfin à faire de la magie. Non, pas sous ce régime. En vérité, tu lui avais fait une fleur ; parce que son avenir à elle, si tu ne le lui avais pas abrégé, aurait été semé de fuites et d’arrestations. Peut-être même que le Ministère aurait mené d’atroces expérimentations sur elle (si ça n’avait pas déjà été le cas). Peut-être qu’ils auraient trouvé un moyen de forcer la magie dans son sang, et que ça lui aurait fait si mal qu’elle en serait morte. Ou peut-être qu’elle serait morte de chagrin, de pas savoir où est sa famille. Elle serait morte, de toute façon, demain ou dans quatre-vingt ans.
Tu fermes les yeux.

Tu refuses de regarder dans la direction du cadavre. Tu te dis que, peut-être, si tu ne le regardes pas, il disparaîtra. La sensation des mèches de cheveux de la gamine sous ton nez disparaîtra, l’odeur tiède de sa peau sale en arrière-goût sur ta langue disparaîtra. Tu te dis que c’est pas de ta faute ; que c’est Yaxley qui t’a obligé à le faire. Et que si t’es allé voir Yaxley, c’est pas de ta faute non plus. T’es allé voir Yaxley pour tous ceux que tu n’avais plus le droit de voir ; parce qu’ils avaient eux-mêmes posé des barrières, ou simplement et plus dramatiquement parce qu’ils avaient disparu. Tu es la victime, dans cette histoire. C’est toi qui t’étais fait mordre, c’est toi qui avais été abandonné. C’est toi qui te vendais pour survivre, parce que chaque jour, ça ne ratait pas, il y en avait toujours un pour te rappeler que tu n’étais rien.
Peut-être que tu aurais pu ne pas la mordre jusqu’au bout, et qu’ainsi, elle serait devenue ton infant. Peut-être que ça aurait fait un petit oiseau de plus pour Yaxley, peut-être qu’il t’aurais laissé la garder. Et peut-être qu’ainsi, tu n’aurais plus jamais été seul.
A la place, tu le regardes la regarder, essayant de deviner à quel point il était dégoûté, à quel point il était déçu, mais surtout à quel point il avait gagné.

Le mouchoir passe par-delà ta main tendue. De toi-même, tu t’es penché vers l’avant pour qu’il puisse sans difficulté atteindre ton visage. Là où tu avais reçu ses caresses sur ton épaule avec dégoût quelques minutes auparavant, voilà maintenant que ton échine ployait au moindre de ses mouvements, comme un animal apprivoisé. Consciencieusement, il essuie chaque recoin, chaque commissure, à l’instar de ta mère, quand tu étais barbouillé de confiture ou de morve, mais avec bien plus de douceur que les coups francs et agacés de la mère à la ride soucieuse. Tu détestais qu’elle fasse ça, parce qu’au préalable, elle humidifiait toujours le mouchoir avec sa salive, avant de te l’écraser sur la bouche. Tu détestais l’odeur de sa salive, la moiteur de ce qui avait macéré dans sa bouche toute la journée. Tu avais alors l’impression qu’elle te forçait de l’embrasser sur la bouche. Tu avais l’impression qu’elle voulait te cracher dessus, par l’intermédiaire de ce mouchoir.

Venant de Yaxley, ce geste était sans aucun doute calculé depuis le début ; mais, au moins avait-il eu la décence, l’audace même, de ne pas porter le mouchoir à sa bouche. Et c’est cette audace que tu punis d’un regard froid, très froid, et un peu doux dans le fond, fébrile. Tes yeux l’affrontent enfin, sous couvert de la proximité de son geste. Et tu cherches, par-delà les couches d’onguents rendant sa peau trop rose et trop luisante, par-delà les milles variantes du roux au blanc dans sa barbe, par-delà ce regard morne, lascif et impérieux, d’un maître à sa vermine. Tu pourrais le mordre, mordre sa main, mordre son visage, et repeindre en rouge tout ce rose bonbon. Embrasser avec les dents sa chair grasse, à t’en écoeurer comme quand on mange trop de sucreries. Le pousser au sol, écraser son ventre rond du talon de ta chaussure, faire crever chaque rondeur de l’angle de tes coudes, de tes genoux et de tes hanches pointues. L’encastrer et le crever comme une pâte sous le joug de la lame de tes dents.

Et c’est sous ce regard de faim et de soif, bleu presque transparent, du fait de la rougeur de tes sclères et de tes joues, que Yaxley finit de t’essuyer la bouche. Tu retournes alors à tes manigances, ourlant tes lèvres comme dans un baiser imaginaire, y passant la langue pour les humidifier. On eût dit que tu venais simplement d’y repasser une couche de rouge à lèvres, dans les toilettes d’un grand restaurant, entre deux cocktails.

Le mouchoir est aussitôt jeté au feu et aussitôt le directeur des Archives est de nouveau dans son fauteuil. Tu restes debout, t’appuyant un instant sur le rebord de la cheminée, profitant de la lumière des flammes pour réajuster ta coiffure, pensivement, lui tournant le dos. Ta silhouette en noir se découpe parfaitement sur les flammes, la chaleur chauffant le cuir de tes jambes. Les yeux dans le vague, tu te demandes un instant si tu ne ferais pas mieux de mourir tout de suite. Dans un dernier élan de fierté, un soubresaut tout au fond de toi, parce que tu as honte de toi, de t’être laissé aller à pareil piège. Il n’avait pas fini de poser son bol de miel que tu y avais sauté à pieds joints, faisant semblant d’y avoir marché dedans par mégarde. Et puis cette dernière poussée de dignité s’éteint, sans demander son reste. Tu te ravises, parce que vu ta plastique ce serait une terrible perte. Tu refais deux pas dans sa direction, te penchant allègrement vers lui. Pas de grandes tirades de fin pour toi, il t’en savait pas capable. « Et bien je vous la donne. » A te voir ainsi alangui, on pouvait se demander de quoi tu parlais. « Ajoutez à votre collection la certitude que je travaillerais pour vous. » Appuyant ton regard dans le sien, à défaut de ton talon dans sa panse, tu te doutes bien qu’il ne se satisferait pas d’une telle promesse faite sur un lit de menaces. Et pourtant, jusqu’à ce que tu fasses tes preuves, il devrait s’en contenter. Qui sait, peut-être que si tu menais à bien cette tâche, te récompenserait-il d’ t’épargnerait-il un autre en-cas.
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