tw. sang

Les mains tremblantes, le regard encore humide, Winston commençait sérieusement à envisager la fuite pour ne pas de nouveau sauter au cou de son ami et réussir à le mordre cette fois. Pas que le vampélane soit contre l'idée de former un clan de jeunes vampires bg mais il préfèrerait que ça se fasse sur la base du volontariat (et il ne savait pas trop si il arriverait à s'arrêter avant de vider totalement sa proie de son sang). Il recula de quelques pas, regardant le sol pour y trouver sa gourde (on ne savait jamais) et surtout pour ne pas croiser les yeux de Jesse, incertain de ce qu'il allait y trouver. De l'horreur ? Du dégoût ? Tout le monde n'aimait pas les vampires, tout le monde n'appréciait pas non plus de se faire sauter à la gorge, par un ami qui plus est. Mais l'étaient-ils encore après ça ? Parce qu'il lui avait dit que tout allait bien mais tout n'allait pas bien du tout et que si, c'était grave de tenter de bouffer ses potes dans une période de semi-absence. Pourtant le sorcier ne se sauvait pas, au contraire, il donnait même des instructions avec un air plutôt rassurant. Un instant Winston eut l'impression d'avoir sa sœur face à lui (elle aussi était douée pour lui dire que ce n'était pas si grave que ça de vouloir croquer les gens qui respiraient à côté de lui) alors il hocha la tête avant de s'asseoir sagement sur le trottoir et d'observer Jesse avec de grands yeux.

Légère grimace en le voyant fouiller dans les poubelles, grimace tout court en voyant qu'il en sortait des trucs. Au moins, ça avait le mérite de couper l'appétit (un peu) et le parfum de Jesse n'était plus aussi attirant (Winston nota l'astuce). "Frère désolé j’ai pas mieux…" Qu'une canette de bière toute rouillée ? Il ne fallait pas se sous-estimer ainsi quand même et les neurones embrumés de Winston avaient du mal à déterminer où son ami voulait en venir. Rinçage du récipient, bruit de gargouillis (l'estomac de Winston était aussi bavard que son propriétaire), regard un rien perdu. "Ok, allez, let’s go" Ne pas se relever du trottoir pour fondre sur le bras ouvert, zieuter le spectacle de loin, mains crispées sur le bitume, nez empli de l'odeur du sang (groupe sanguin A, non ?). Winston était comme hypnotisé par le liquide carmin qui coulait - il n'y avait pas plus joli rouge - et eut l'air un rien déçu lorsque la source se tarit. "Tiens, j’espère que c’est assez, désolé faut juste que–" La canette fut quasiment arrachée des mains et le blond se jeta fébrilement sur le goulot, descendant quasiment tout d'une traite. "Juste que je m’assoie une petite minute." Winston s'essuya la bouche du revers de la main alors que ses idées se faisaient de nouveau claires. "Tu veux que..." Il regarda le bras blessé de Jesse et se dit que non, il n'allait pas proposer de le soigner parce que le sang sous son nez, là tout de suite maintenant, ce n'était pas une bonne idée. "Tu veux que j'aille te chercher à manger ou quoi ?" Il soupira, passant machinalement la main dans ses boucles qui étaient toujours aussi bien coiffées alors même que la situation avait été catastrophique il y avait cinq minutes de cela.

"Merci, j'te revaudrai ça" finit-il par dire, d'un ton grave, presque honteux d'avoir pris autant de plaisir à regarder un de ses meilleurs potes s'ouvrir les veines pour le nourrir. "Et ouais, vampire c'est peut-être un peu plus compliqué qu'ça..." Pas juste un changement de régime alimentaire - dire qu'à un moment il avait été quasiment végétarien -, pas juste une hybridité comme une autre (être descendant de vélane ne lui avait pas causé autant de problèmes). "Enfin sauf si l'but c'est de devenir la version 2.0 de Jack the Ripper, là c'est easy mais c'est pas trop mon but dans la vie." Rire un rien nerveux, Winston contempla la canette vide, il en avait même léché le sommet pour récupérer jusqu'à la dernière goutte de sang et pourtant, il savait que la faim resurgirait dans pas si longtemps que ça. "Paraît que ça se calme avec le temps, j'ai hâte. Puis j'ai un peu peur aussi. Genre toi et Kay seraient un couple de vieillards alors que moi j'serai toujours aussi beau, vous allez être trop jaloux !" Puis trop morts parce que l'espérance de vie des humains n'était pas la même que celle des vampires et ça le faisait un peu bader. Il soupira, tenta de viser la poubelle avec sa canette mais cette dernière ne fit que rebondir dessus dans un bruit métallique avant de rouler au sol. Nouveau soupir, il se leva pour la ramasser et la jeter correctement avant de retourner auprès de Jesse. "Avec tout ça, on a même pas parlé business." Pas comme si ça l'importait vraiment en ce moment de ramener des informations à l'Ordre, il avait d'autres préoccupations en tête.

”Tu veux que...” La voix de Winston tire un peu de Jesse du vertige qui l’a pris soudainement ; mais cela n’empêche pas un frisson glacial de courir le long de son échine, alors qu’il relève un oeil un peu terne vers son ami. ”Tu veux que j'aille te chercher à manger ou quoi ? – Non, non, t’inquiète, ça va passer en vrai. J’ai juste jamais trop kiffé les prises de sang”, ajoute-t-il avec un sourire en coin qui se veut rassurant. Il a un peu honte d’avoir fait une moitié de malaise pour ça, et surtout, il n’est pas particulièrement à l’aise de se trouver avec une plaie béante, dans un état certain de faiblesse, face à un vampire qui a tenté de lui sauter au cou quelques instants plus tôt. Fuck Jay, snap out of it, it’s Winston, it’s your friend. Pourtant, son cœur bat encore un rythme affolé, sa respiration est rapide, et son visage qu’il détourne vers sa blessure est blême. La tête lui tourne, et cette fois-ci non pas à cause du sang qu’il a vu couler de son bras, mais face à la réalisation de ce qu’il vient de se passer, avec un temps de retardement – ce n’est certainement pas ce qu’il avait prévu, en prenant rendez-vous avec Winnie, et il ne sait si le poids sur son coeur est dû à la peine qu’il a pour son ami, de se retrouver dans cette situation, ou dû à la peur de–

”Merci, j'te revaudrai ça.” Jesse relève la tête vers Winston, les sourcils légèrement arqués en constatant ce qui lui semble être de la tristesse sur les traits du sorcier – cette fois plus de doute, il sait à quoi est dû le battement manqué de son cœur. ”Et ouais, vampire c'est peut-être un peu plus compliqué qu'ça... – Mec t’inquiète, vraiment c’est pas grave”, répond-il en croyant que Winnie lui présente maladroitement des excuses pour ce qu’il vient de se passer. Mais il referme la bouche, et garde cette fois les lèvres scellées en comprenant que ce n’est pas exactement ce que cherche à lui dire Winston, qui poursuit : ”Enfin sauf si l'but c'est de devenir la version 2.0 de Jack the Ripper, là c'est easy mais c'est pas trop mon but dans la vie.” C’est probablement la première fois depuis longtemps que Jesse voit son ami ne pas chercher à minimiser quelque chose qui lui pèse, même s’il glisse dans sa confession une blague légère pour faire passer le tout. Et ça lui tord un peu plus le coeur, mais il n’y a rien qu’il puisse vraiment dire pour le rassurer – tout ira bien ? qu’est-ce qu’il en sait vraiment, de si tout ira bien ? ”Paraît que ça se calme avec le temps, j'ai hâte. Puis j'ai un peu peur aussi. Genre toi et Kay seraient un couple de vieillards alors que moi j'serai toujours aussi beau, vous allez être trop jaloux !” Jesse a une expiration amusée, qui ne l’est pas tant que ça, en réalité, et il secoue légèrement la tête : ”Même quand on sera vieux et moches et que toi tu seras toujours beau gosse on traînera ensemble, qu’est-ce que tu crois ? Ça change rien ok ?” Qu’il soit vampire ou loup-garou ou frappé d’une autre malédiction, ce n’est pas ce qui changera leur amitié de longue date ; mais Jesse sait parfaitement où Winston veut en venir, qu’il survivra certainement à tous ses amis, à toute sa famille – et il a lui-même du mal à imaginer ce fait, préfère l’ignorer pour le moment.

Pendant que Winston est occupé à shooter dans sa canette et à rater sa cible, Jesse ouvre son sac pour en sortir un mouchoir et le presser sur sa plaie pour achever d’arrêter l'hémorragie, et ne pas la laisser à l’air libre (l’un de ses frères a déjà chopé une infection bêtement comme cela, et il se rappelle encore suffisamment de la tronche de sa blessure pour ne jamais vouloir que cela lui arrive). ”Avec tout ça, on a même pas parlé business.” Right. Jesse se redresse un peu, toujours assis à même le sol, son inconfort visible jusqu’à l’expression qu’il offre alors à Winston. ”Putain, c’est vrai.” Par où commencer ? Est-ce qu’il lui balance comme ça, sans préambule, qu’il a besoin de son aide, que son frère a disparu ? Est-ce qu’il y a la moindre chance que Winnie le connaisse ? Ça lui semble tellement improbable, tellement ridicule même, que Jesse se demande un instant s’il ferait mieux de ne pas laisser tomber. Mais il ne peut pas – il a cherché partout, il a interrogé tout Londres, en passant par les colocataires de Caliban, d’anciens camarades de classe. Winnie, et l’Ordre sont sa dernière chance, sa dernière piste, aussi mince soit-elle. ”Écoute je sais pas trop comment aborder le truc, mais j’ai besoin de toi”, lâche Jesse d’un air légèrement grave, terriblement sérieux, alors que son ventre se serre face à la possibilité qu’il ne reverra jamais son frère. Qu’il puisse peut-être même être m– ”Enfin, je sais même pas si tu pourras m’aider, j’en suis à un point où je sais vraiment plus quoi faire je t’avoue.” Son dernier réel recours, en vérité, étant d’aller voir la police, si ses recherches auprès de l’Ordre se montrent infructueuses, peu importe les risques qu’il pourrait encourir.

Alors, il prend une profonde inspiration avant de se lancer, car il n’y a pas un million de façons d’annoncer sa demande : ”Mon petit frère a disparu, depuis quelques mois, depuis hm, août à peu près, ou fin juillet.” Disparu – rien que de prononcer ce mot à voix haute lui donne la nausée. ”Au début je pensais que juste, je sais pas, il donnait pas de nouvelles, ou était resté chez des potes un petit moment. Mais là, même ses colocataires savent pas où il est passé, et ça fait quatre mois, alors…” Jesse sent sa gorge se serrer, qu’il dégage en se la raclant discrètement – ce n’est clairement pas le moment de se laisser aller à l’idée qu’il est arrivé quelque chose de grave à Caliban. ”J’ai cherché partout, j’ai demandé à tout le monde, et il est juste– il s’est juste volatilisé, mec”, sa voix tremble un peu sous cette frustration qui éclate dans ses mots, il se passe une main sur le visage pour essayer de se donner un minimum de contenance avant de relever son regard jusqu’à celui de Winston. ”Et je sais que c’est vraiment improbable, mais franchement t’es mon dernier espoir.” No pressure. ”Si jamais tu l’as vu, je sais pas… Il est un peu plus jeune que moi, à peu près la même taille, il a genre, hm, des dreadlocks et une espèce de moustache ? Caliban, Caliban Rosemond ?” C’est probablement la pire description qu’il puisse faire de son frère, et probablement un coup d’épée dans l’eau, mais c’est tout ce qu’il lui reste.

"Non, non, t’inquiète, ça va passer en vrai. J’ai juste jamais trop kiffé les prises de sang." Winston émit un petit rire nerveux. Oui, les prises de sang, c'était agréable pour personne et voilà quoi. Bien pire que de s'ouvrir le bras au-dessus d'une canette rouillée  dans une rue miteuse pour éviter de se retrouver avec deux crocs dans la carotide. Le vampélane se balançait d'un pied sur l'autre, ne sachant absolument pas où se mettre, quoi faire, quoi dire, à part s'excuser encore et encore. Merde, il avait failli saigner son ami quoi. "Mec t’inquiète, vraiment c’est pas grave." Pas grave. Winston en doutait. Une part de lui voulait que ça le soit même, pour qu'il n'ait pas le droit de recommencer sous couvert que tant qu'il n'y avait pas mort d'homme (juste tentative) ce n'était qu'un petit dérapage sans conséquence (il sentait encore la peur émaner de Jesse). Il y avait ça déjà, puis le reste. Lui jeune, les autres vieux. "Même quand on sera vieux et moches et que toi tu seras toujours beau gosse on traînera ensemble, qu’est-ce que tu crois ? Ça change rien ok ?" Hochement de tête, il n'osa pas dire à haute voix la suite de sa pensée. Lui jeune, les autres morts. Il préféra rater la poubelle de deux bon mètres, l'obligeant à aller ramasser la canette.

Il décréta sur le trajet qu'il fallait changer de sujet - maintenant qu'il était nourri, il avait les idées beaucoup plus claires - si bien que lorsqu'il revint vers Jesse, il était de nouveau sérieux. Pas sérieux je-viens-d'essayer-de-te-croquer, sérieux je-suis-investi-d'une-mission. Seulement boire des bières avec les potes restés dans la société, ça attendrait la fin de la guerre. "Putain, c’est vrai. - Et ouais, je sais, j'déconcentre souvent les gens !" Grand sourire aux dents blanches (et pointues), cela sonna quand même un peu faux alors il se dit que c'était encore trop tôt pour ce genre de blagues claquées. Surtout que son pote n'avait pas l'air du tout à l'aise et Winston se demandait s'il n'en était pas entièrement responsable (à raison). Il s'assit à son tour sur le trottoir, pas trop près de Jesse pou respecter la distance de sécurité (il ne voulait pas le faire fuir, il ne voulait plus sentir la légère odeur métallique mêlée au parfum de l'homme qui lui rappelait que dans l'absolu, il avait encore faim). "Écoute je sais pas trop comment aborder le truc, mais j’ai besoin de toi." Oh. finalement ce n'était peut-être pas le vampire le problème.

Les yeux bleus de Winston étaient fixés sur le visage de Jesse, attentifs, mi-curieux, mi-inquiets. "Enfin, je sais même pas si tu pourras m’aider, j’en suis à un point où je sais vraiment plus quoi faire je t’avoue. - Tout c'que tu voudras mec, je ferai au mieux !" Il lui devait bien ça (les amis, c'était fait pour ça aussi). "Mon petit frère a disparu, depuis quelques mois, depuis hm, août à peu près, ou fin juillet." Toute trace de sourire disparut du visage de Winston. Il en connaissait un rayon en disparition, la plupart avaient été justement résolues en fin juillet. "Au début je pensais que juste, je sais pas, il donnait pas de nouvelles, ou était resté chez des potes un petit moment. Mais là, même ses colocataires savent pas où il est passé, et ça fait quatre mois, alors…" Il se décala sur le trottoir pour se rapprocher et posa une main sur l'épaule du métamorphomage. "J’ai cherché partout, j’ai demandé à tout le monde, et il est juste– il s’est juste volatilisé, mec. - Je sais..." Enfin non, il ne savait pas pour le frère de Jesse mais il savait très précisément ce que ça faisait pour son ami. Il se revoyait encore un an plus tôt à aller voir jusqu'à la personne la plus insignifiante de la vie de sa sœur pour savoir si elle n'avait pas vu Perdita (la réponse avait été invariablement non). Winston tenta de se remémorer s'il savait quoique ce soit sur le disparu. S'il avait appartenu à l'Ordre, peut-être qu'il avait fait part à la libération des battues (et y était resté). S'il avait juste croisé le chemin d'un mangemort énervé par la fin des Battues, peut-être qu'il y était resté aussi.

"Et je sais que c’est vraiment improbable, mais franchement t’es mon dernier espoir." Ricanement nerveux du blond. "Oh merde, tu sous-entends que j'suis ton Obi Wan Kenobi, je suis obligé de gérer maintenant !" Il ne voulait pas être le dernier espoir de ce genre de situations désespérées. "Si jamais tu l’as vu, je sais pas… Il est un peu plus jeune que moi, à peu près la même taille, il a genre, hm, des dreadlocks et une espèce de moustache ? Caliban, Caliban Rosemond ?" Rectification, il voulait bien être le dernier espoir des situations désespérées où il avait la réponse. Son visage s'illumina alors qu'il se relevait d'un bond. "Mec, mec, mec, attends ! Caliban comme Cal ?" Il ne devait pas y en avoir dix mille de Cal avec une moustache conceptuelle. "Genre un peu..." - il chercha la bonne manière de le dire - "... beaucoup perché ? Qui fait de la basse et qui aime les fléreurs ?" Le petit discours de présentation de Cal lui revint en tête, Winston s'était dit, avec du recul, qu'il avait été sans doute appris par cœur. Il éclata de rire tant cela lui parut improbable. Deux nouveaux colocataires à Sweet River, deux frères de sans qu'il ne le sache initialement. Il se retrouva alors suspendu aux lèvres de Jesse, attendant le verdict (si il s'était planté, ce serait un petit peu chaud).

Jesse n’y croit pas, n’y croit plus vraiment – il a déjà perdu espoir, sans s’autoriser à abandonner pour autant. La probabilité que Winston of all people connaisse son frère, un jeune sorcier parmi les milliers qui peuplent le Royaume-Uni, et même s’il sache où il se trouve depuis ces derniers mois est terriblement fine, si ce n’est pas franchement ridicule. Mais il se l’est promis : il n’y a pas une pierre qu’il ne retournerait pas avant d’avoir trouvé Caliban. Alors il y a une lueur d’espoir, au fond du regard qu’il lui adresse, un regard peu assuré, un peu chancelant, le regard d’espoir de celui qui n’en a plus vraiment. ”Mec, mec, mec, attends !” Le cœur de Jesse rate un battement vertigineux lorsque le visage de Winnie s’illumine et que sa voix bondit contre les murs de l’allée peu fréquentable dans laquelle ils se trouvent. Pendant un instant, il croit à une mauvaise blague de l’humour parfois un peu tordu de son ami. Si c’est le cas, il lui mettra probablement son poing dans la gueule, tellement il peut être sur les nerfs à ce sujet. Mais il reste suspendu à ses lèvres, sonde ses deux yeux grand ouverts, et– ”Caliban comme Cal?” Cette fois, Jay se redresse, pour ne pas dire qu’il se tient désormais droit et tendu comme un piquet en dévisageant Winston.

Winnie était son dernier espoir, il est vrai – mais Jesse réalise qu’il ne s’attendait à rien d’autre qu’une fausse piste. Il ne s’attendait tout simplement pas (plus) à retrouver Cal.

”Oui ?!”, répond-il d’une voix presque aiguë avec un entrain soudain, son sang battant lourdement jusque dans ses tympans. ”Genre un peu… beaucoup perché ?” Il ne relève même pas la façon un peu maladroite dont Winston parle de son frère ; tout ce que Jesse veut savoir est s’il s’agit bien de lui. Et à en juger par son large sourire satisfait et excité dévoilant deux longues canines blanches, il se pourrait bien que– ”Qui fait de la basse et qui aime les fléreurs ?” Fléreurs. Et dès que son ami prononce ce mot, le coeur de Jesse dégringole lourdement dans son torse ; il a l’impression qu’on vient de lui mettre un coup sur le plexus et que ses poumons se sont rétractés tant il peine à respirer et trouver les mots pour répondre à Winston, qui lui, est parti dans un fou rire hystérique.

Il n’y a qu’un seul Cal avec une moustache qui joue de la basse et qui aime les fléreurs au point qu’on le définisse par cela. ”Oui !”, s’exclame Jesse en bondissant presque sur son assise. Ses deux mains accrochent la veste de Winston, l'attirant un peu à lui en même temps qu’il se penche légèrement sur le vampire, comme pour le ramener à la raison et à leur sujet de leur conversation – Jay, lui, n’arrive pas encore totalement à rire, trop sous le choc par cette découverte si fraîche qu’il ne parvient pas à l’emmagasiner. ”Il a un fléreur qui s’appelle Mendo ?”, demande-t-il presque dans l’urgence comme s’il s’agissait de la caractéristique qui permettrait à Winston de reconnaître ou non Cal – comme si ce n’était pas déjà sûr, qu’il s’agit bien de Cal. ”Tu connais mon frère ? Tu sais où il est ?!”, enchaîne-t-il aussitôt. Et surtout : ”Est-ce qu’il va bien ?” C’est tout ce qui compte, plus encore que de pouvoir le voir de ses propres yeux.

Oh putain, il était Obi Wan Kenobi ! Avec un Jesse accroché à la veste, tellement proche que Winston en voyait la carotide pulsait dans son cou mais n'y prêtait pas trop attention à cause de la situation, préférant sourire en grand, au point que ça en faisait presque mal. "Il a un fléreur qui s’appelle Mendo ? - OUI !" triomphal. Il serait franchement parti en danse de la joie si Jesse avait été dans le même mood. Ce n'était pas le cas ce qui était à peu près compréhensible vu les montagnes russes émotionnelles qu'il se tapait depuis le début de leur entrevue. "Tu connais mon frère ? Tu sais où il est ?!" Deux hochements de tête frénétiques, regard pétillant de mec ravi d'être le vampélane de la situation (comme si il y était pour quelque chose, que ce n'était pas juste le hasard). "Est-ce qu’il va bien ?" Ok, pas exactement l'heure des réjouissances, plus celle à rassurer Jesse qui, si il n'avait pas eu de nouvelle depuis l'époque de la libération de Gracefield, ne devait pas être au courant de grand chose...

Winston secoua la tête pour chasser un peu de son allégresse (pour une fois que la faim ne lui embrumait pas l'esprit). Par où commencer ? "Il va bien." Enfin à peu près ? Mieux qu'à son arrivée  et grâce à son lit près de la fenêtre ? Au moins, lui ne se faisait pas attaquer par un vampire dans  une ruelle glauque. Il était tranquille à s'occuper de Mendo, des champs de Sweet River et de ses cours à la Fawkes. L'hybride jeta un œil aux alentours, s'assurant qu'ils étaient toujours seuls avant de se lancer dans les détails. "Cal était à la libération de Gracefield, là où y avait ma sœur et les autres prisonniers t'sais." D'ailleurs, que foutait-il là bas ? C'était toujours un peu flou pour Winston dont sa propre présence n'avait pas servi à grand chose non plus à part à récolter quelques cicatrices. "Et il a été blessé. Rien de trop grave hein ! T'inquiète pas ! Juste que bah du coup..."  Délicat à annoncer. Winston était déjà hybride de base alors une malédiction en plus, ça ne changeait pas grand chose mais Caliban...

Un instant il se demanda si Jesse allait bien le prendre avant de se dire que si il faisait la gueule pour un frère juste un petit peu moins humain, ce serait gonflé de sa part. "Du coup, c'est devenu un halfer alors il valait mieux qu'il reste dans l'Ordre et comme c'est un halfer, il a été assigné dans ma planque et c'est même mon coloc !" Il éclata de rire de nouveau tant ça lui semblait improbable de partager sa chambre avec le frère King et le frère Prince. "Bon j'peux pas te dire où il est bien sûr mais j'peux te dire ce qu'il a pris ce matin au p'tit-déj !" Et qu'il ne sentait pas très bon comme tous les plus ou moins lycanthropes mais qu'au moins ça atténuait l'odeur de Gabriel quand ils étaient tous les trois (un mal pour un bien donc). "J'peux lui passer un message ou quoi ! Puis si vous voulez vous voir, j'peux arranger le coup aussi ! Il est pas censé entrer en contact avec les indics mais tant que ça se sait pas !" Winston voyait bien des gens qu'il n'était pas censé rencontrer, style ceux de Manticore.