Piotr attend patiemment dans la petite pièce, résistant difficilement à l'envie de réhausser un peu son pantalon sur ses chevilles pour plus confortablement s'installer sur sa chaise, les pieds posés sur la table en métal à laquelle il est accoudée. Si il a d'abord posé un regard curieux à son environnement pourtant bien ennuyeux, il est désormais en train de se tourner les pouces, littéralement, les regardant jouer ensemble comme si c'était le spectacle le plus fascinant de tous les temps. Il a bien des défauts, mais il n'est pas impatient, au contraire. Les choses se passent à leur rythme et Piotr les attend fermement.

Enfin, la porte s'ouvre et il se redresse légèrement, un sourire chaleureux venant aussitôt gracier ses lèvres. Même si il apprécie grandement faire l'idiot qui ne parle pas un mot d'anglais, il préfère encore que le passage de la frontière se fasse un peu plus rapidement qu'habituellement: il doit après tout retrouver sa femme au plus vite pour lui faire payer sa dernière tentative de meurtre. "Good evening." Et aussitôt il se lève, reboutonnant sa veste comme si il s'apprêtait à partir, tendant la main en direction de l'employé éberlué de l'OP qui arque les sourcils. "What's your name?" L'homme ferme la porte derrière lui et s'empare, l'air hésitant, de la main offerte. "I'm officer Aitchison. I'm the head of the Portkey Office. - Well, that's just great to meet you, officer. Please." Piotr lui désigne la chaise en face de la sienne comme si il était ici chez lui et se rassied en déboutonnant sa veste.
Aitchison lui offre un sourire sans joie - Piotr ne le trouve pas très sympathique - en s'asseyant, ouvrant un dossier gris clair sur la table en face lui. Piotr ne cache pas sa curiosité à essayer de voir ce qu'il y est écrit - en vain, un sortilège semble brouiller le parchemin quand il y jette un coup d'oeil. "May I inquire why you are visiting the United Kingdom, mister..." Piotr lui offre un sourire poli en attendant la suite et fin de sa phrase. "...Shklyarov. - Shklyarov," le corrige-t-il d'un ton sec. "I'm visiting my wife, Feodora Dolohova. I'm sure you've heard of her or her family, I hear her cousin... Anton... is pretty popular here." Aitchison relève ses lunettes sur son nez en hochant la tête. "That, he is." Le sourire de Piotr s'approfondit.

Cela fait presque deux heures qu'il a été gentiment amené dans cette petite pièce et deux heures qu'il a souffert les interrogations interminables d'un sous-fifre après avoir passé le teste Von quelque chose. Il a admirablement feint la surprise en apprenant que son arbre était plus fourni que prévu (si il n'ignorait pas l'existence d'un bâtard sur le territoire anglais, et de quelques autres en Egypte et aux Etats-Unis, les trois qui sont apparus comme si de rien n'était en Chine, en Russie et en Thaïlande (of all places) (au moins y'en a qu'un seul, s'est-il dit pour se rassurer, un exploit vu le temps qu'il y a passé à courir la pute)), a répondu à toutes les questions avec un air sincère et légèrement anxieux comme si il n'avait pas vécu cette situation mille fois, mais ça n'a pas suffi.
"The reason you're here is because our mages have found that your briefcase has quite a few spells applied to it." Piotr et Aitchison jettent de concert un regard vers l'attaché-case à côté de la chaise de Piotr. Ce dernier feint une moue ennuyée. "Indeed. - And you've refused to let us take a look at it." La moue de Piotr s'approfondit. "You see, this briefcase carries very sensitive information about my job that I don't feel comfortable sharing it with you." Il a l'air si désolé et piteux, en cet instant précis, mais ses jolis yeux n'arrivent pas à attendrir Aitchison qui secoue légèrement la tête. "I'm sorry, M. Shklyarov, but I'm afraid that, for security reasons, we won't be able to let you through before a thorough examination of all and any magical item that you may be carrying with you." Piotr soupire. "Then we're going to have a problem."

Quand ils ont compris que Piotr ne parlerait pas, ils ont essayé de le briser en le menaçant de le laisser dormir à la douane. Piotr n'a pas pu s'en empêcher: il leur a ri au nez. Il a dormi dans des endroits bien pire que la douane britannique - notamment, ces deux derniers mois, sur un lit de camp défoncé au fin fond d'une mine sibérienne -, y compris les douanes lybiennes et afghanes qui, à ce stade, ont un lit réservé pour lui tant il y a été arrêté.
Piotr s'en fiche bien des Rosbeefs et de leurs joues qui sont devenues rouges quand il leur a ri à la gueule, finissant par haussant les épaules avant de s'enquérir des installations. Il a un peu déchanté en apprenant qu'il devrait partager la douche et les toilettes. Quel pays de péquenauds.

Il a passé deux jours dans une petite pièce, n'ayant même pas l'occasion de sortir parce qu'apparemment, le pignouf aux commandes du pays a banni les cigarettes. Le manque de nicotine, et l'ennui, se font sincèrement sentir, mais Piotr n'en montre rien, se contentant de rester allongé au lit avec les mains croisées sur le ventre à obvserver le plafond comme si lui pouvait le transpercer de ses yeux et voir le ciel derrière.
Les nuits qu'il a passé dans son nuit de fortune lui ont foutu de la sueur froide, mais il refuse bien entendu d'ouvrir sa mallette alors qu'il se sait observé. Alors Piotr passe le temps en rêvassant et en sifflotant parfois, comme si de rien n'était.

A la fin du deuxième jour, il finit néanmoins par se lasser de la molesse de l'administration anglaise et demande un parchemin et une plume. Il écrit la missive en cinq minutes et demande à ce qu'elle soit envoyée à Moscou, au Kremlin sorcier. Il est un peu tard, il faudra attendre le lendemain. Peu importe, Piotr s'endort la tête légère.
On vient le chercher à neuf heures dix le lendemain, et il est déjà habillé. Il a déjà mis son chapeau, et a son attaché-case à la main quand Aitchison vient le voir d'un air embarrassé et ouvre la porte barrée de sa chambre. "Hm." Le grand sourire de Piotr est radieux. "How are you today, officer?" lui demande-t-il d'un air intéressé en sortant de la chambre, marchant avec lui dans le couloir avec aise. "I'm fine, uh... we've received word from the president." Piotr hoche la tête patiemment. "I'm... sorry..." Les mots sont hésitants, et Piotr ne doute pas une seule seconde que son supérieur lui a poliment demandé de lui dire ça. Il est un diplomate, maintenant, après tout: sa missive demandait gentiment au Président du Parti de bien vouloir lui accorder l'immunité diplomatique, afin qu'il puisse quitter cette satanée douane mal aérée.
Et se fumer une clope. "That's quite alright, officer." Piotr change son attaché-case de main et lui tapote gentiment l'épaule. "You've done your job admirably and for that, I'm very grateful. I feel very safe in your country, now!" fait-il gaiement en se laissant entraîner dans un autre couloir. "Uh. Thank you?" Piotr lui offre un sourire amusé. "You're most welcome."

Enfin, ils sortent de l'Office des Portoloins et Piotr lui serre la main, écrasant sans difficulté les doigts entre les siens, sans pour autant se départir de son grand sourire. "Well, officer Aitchison, I was very pleased to make your acquaintance. - Me too, mister ambadassor." Piotr ne laisse rien paraître de sa surprise, secoue sa main avant de la relâcher. C'est nouveau, ça, monsieur l'ambassadeur. Une promotion inopinée par rapport au simple poste de diplomate qu'il a demandé dans son courrier mais... pourquoi pas?
Ca foutra les boules à Feodora, ça, il en est sûr. "Very well, I'll see you, maybe," dit-il, toujours de ce ton enjoué et charmant qui le caractérise tant, avant de se détourner pour s'engager dans le Ministère de la Magie comme si il était là en son propre fief.