freakonomics

What kind of ugly are they talking about? It's just straight up cold evil. What kind of nonsense are they going on about? Do they suffer from the fever? Nothing's gonna satisfy them till it all goes Chernobyl. No, nothing's ever really gonna satisfy them until the virus goes mobile.

- avril 2008 -
Amycus est appuyé contre le mur, les bras croisés, dans son manteau épais, long, et d’une bien meilleure facture le gardant du froid humide - une acquisition aussi récente que sa possession totale, sorte de petit cadeau à lui-même. Il regarde distraitement les Pinkies charger et décharger le pawnshop de caisses illégales. Leur manège l’amuse. Son sourire veule se fend quelques fois quand il change son cure-dent de place, allant d’un extrême à l’autre de ses commissures. Il s’en serait bien grillée une mais il paraît que c’est interdit, maintenant, et autant 'ses' activités criminelles sont plus ou moins discrètes, autant cloper en plein milieu de Knockturn Alley risque d’attirer sur lui l’attention des poulets - ça aussi, c’est tentant, voilà bien longtemps qu’il n’a pas dérouillé des agents de l’ordre, mais il paraîtrait là encore qu’ils sont maintenant dans le même camp et puis, de toute façon, il a besoin de tout sauf d’atterrir une seconde fois à la Brigade - entre les mains moites et nerveuses de ce rat qu’est Corban.

De l’autre côté de la rue, son voisin de commerce l’observe depuis sa vieille vitrine crade et poussiéreuse. Vingt minutes qu’il le fixe de manière suspicieuse en se pensant subtil. Vingt minutes d’Amycus le surveille dans son champ de vision. Sûr, ça doit lui faire tout drôle, au gonze, de voir du mouvement dans le pawnshop de Falk. Le suédois n’est pas connu pour être un commerçant actif ni même très manifeste - une aubaine pour Amycus, qui n’a pas à faire semblant de connaître untel ou unetelle pour sauver les apparences, même au sein des Black Hands britanniques pour qui Swall est un type patibulaire qu’on n’a pas tellement envie d’approcher. Au terme de quelques minutes supplémentaires - pour le sensationnalisme de la chose - Amycus tourne cependant sa tête et cela de manière rapide, prenant de court son voisin qui sursaute derrière la vitre. Amycus élargit son sourire, d’une manière si naturelle et sympathique que le doute est permis quant à ses intentions. Il faudrait être assez proche de lui pour voir que ses yeux sont morts et creux de toute faveur. Le commerçant n’en demeure pas moins agacé d’avoir été ainsi surpris. Il se renfrogne et se laisse absorber par la pénombre régnant dans sa propre boutique.

Le sourire d’Amycus flanche un peu.
Il faudra qu’il aille lui rendre visite, à l’occasion.

Un mouvement différent de la procession de Pinkies réaligne sa nuque dans le bon axe. Une silhouette s’est approchée de lui avec, semble-t-il, la ferme intention de l’aborder. Amycus regarde immédiatement la plastique agréable de la brune, et seulement après son visage. Sa tête lui dit quelque chose. Il fouille rapidement dans les souvenirs de Göran, quand même très nébuleux et brouillons de là où il se tient, pour savoir à qui il à affaire. Lui viennent en tête des noms comme Spider, Acromantaula, autant de sobriquets stupides qui rejoignent celui de Swall dans le panier de mauvais-goût qu’on cultive chez les Black Hands. Amycus retrouve son grand sourire. Malgré les picotements anormaux qu’il sent pulser au bout de ses doigts et dans sa mâchoire, il se pare d’une nonchalance accueillante. Cette nana est une proche de Göran. Il le sent dans toutes les fibres de ce corps qui n’est pas le sien. Il va, cette fois, bel et bien devoir s’y coller.

"Well, well, look what the cat dragged up…!" Amycus tire sur son sourire. L’accent suédois reste crédible avec aussi peu de mots et sa voix n’est après tout pas si différente de celle de Göran, mais il a oublié de lancer un sort de métamorphose pour que ses yeux se couvrent de bleu. L’agacement durcit son rictus. Il se sent comme le petit boutiquier qu’il a fait fuir : pris par surprise.

Les pieds enfoncés dans des bottines qui la feraient se confondre avec une cowgirl, Tula clapote dans l’Allée des Embrumes ignorant le monde qui s’agite autour d’elle, insignifiant. Les Pinkies qui trottinent à la hâte sous sa grimace d’incompréhension ont attiré son intention. Elle reconnaît bien cette ruelle aux vapeurs qui sentent le fer. C’est effectivement là que s’est postée la vieille échoppe de Swall. Le rictus s’intensifie dans sa déformation à mesure qu’elle bat le pavé. Tula se stoppe nette quand elle aperçoit un défilé de Black Hands (qu’elle ne remet pas) transportant tout un tas de caisses de la boutique de prêteurs sur gage de Göran. La lèvre se retrousse, tremble. La lippe inférieure se fissure dans une coupure nette (tant due au froid de ce Londres qui ne connaît pas le printemps que de l’anxiété qui lui tiraille les chaires).
Elle n’a pas foutu les pieds dans ce coin depuis plusieurs mois ; sa culpabilité grandissante l’ayant judicieusement décidé à ne plus prendre de nouvelles de son ancien mentor.

La sensation de traque s’accentue de jour en jour chez la louve. Elle ne dort plus, de peur que Yaxley la trahisse et qu’elle finisse taillée en pièces par le suédois qui l’écraserait d’un seul coup de poing ou la pulvériserait d’un seul coup de baguette. Ses crocs creusent un peu plus la peau rosée de sa bouche. Elle reste immobile dans la pénombre à observer le manège sous ses yeux. Tula s’imagine alors que Swall a fini par apprendre la vérité et qu’il fout le camp avant de la pourchasser, lui réservant un sort pire que la mort.
Peut-être tous ces signaux d’alarmes ne signifient qu’une seule chose : le temps de la confession arrive bien plus rapidement que prévu. Elle serre le poing, secouant la tête, se forçant à reprendre ses esprits. Se convaincant qu’elle ne pouvait pas tout foutre en l’air pour de simples doutes (bien qu’ils fussent fondés au vue de sa mise à nue par Corban). Elle repense au marché passé avec lui, murmure qu’il ne la lui mettra jamais à l’envers, puis l’incertitude lui envahit aussitôt l’esprit. Si la Thumb pouvait se fracasser la tête contre le mur pour chasser l’image de Swall l’enfermant dans une cage, elle le ferait, mais elle n’était même pas certaine que cela la sortirait de ses tourments.

Quand les rayons du soleil percent enfin la brume, la sorcière reprend sa marche assurée. Elle aperçoit aussitôt Göran surveillant le bon déroulé des opérations. Son regard s’ouvre à nouveau, affichant cette mine éternellement insolente et agacée à la fois. Une flaque éclabousse son pantalon en cuir quand elle se poste devant le géant. Elle lève un œil méfiant vers lui. Il n’a pas l’air de vouloir l’étriper. Elle n’a même pas l’impression de se trouver devant Swall ; ou peut-être devant le Swall d’il y a quelques années, quand toute cette merde ne leur était pas encore tombée dessus. Il a l’air à la fois plus morbide et plus étincelant sans qu’elle ne puisse encore expliquer pourquoi.
Well, well, look what the cat dragged up …! Persé lui rend son sourire, affichant ses canines taillées en pointe. Elle glisse à sa droite (une vieille habitude), le regard fuyant malgré elle. I can see you succeed to exploit others Pinkies but not for your dirty work… Are you going somewhere ? se renseigne la vipère.

Les tambours qui se jouent dans son crâne la font poser sa main droite sur son front brûlant. Persé se sent nauséeuse. Son instinct la met en alerte, comme pour la prévenir que leur rencontre illustrait l’occasion tant attendue de confesser son crime, de s’enlever le poids du mensonge. Elle serre le poing à nouveau ; les ongles lui tiraillent la paume. Sa respiration se saccade. Elle s’agite. Sa main libre tapote la poche de son blouson, vérifiant que sa copine n’est pas loin, au cas où elle doive s’en servir pour achever Swall avant qu’il ne l’attrape.

Tula, poussée davantage par son instinct de survie que par le sens de l’honneur, ouvre enfin le bal des hostilités dans un souffle assourdissant. Tell them all to leave. Now. I need to talk to you and I don’t want them to take the risk of dying. Aussitôt, elle tourne le dos à Swall, s’enfonçant dans les méandres de sa boutique, bazardant les deux chaises qui se trouvent sur son chemin. Persé se plante à côté de la porte principale, préférant s’assurer une sortie en cas de réaction trop virulente de Göran. Le pieu qu’elle a dans le cœur s’agite à tout rompre. Elle est sur le point d’exploser.

"I can see you succeed to exploit others Pinkies but not for your dirty work… Are you going somewhere ?" Le grognement d’un rire lui répond. Wouldn't you like to know. Amycus épie la brune en coin, sa nervosité apparente et ses airs félins - appréciables mais naturellement médiocres. Elle n’est pas très difficile à lire ; elle ne sera pas difficile à tromper. Il resserre un peu plus ses bras, les biceps épais et gras tirant sur le manteau en peau de dragon. "Just a regular transaction." Amycus reporte son regard sur le va-et-vient des pinkies. Son sourire s’étiole sans pour autant que les chicots de son hôte ne disparaissent du paysage qu’est sa gueule. "Don't you worry, I'm not going anywhere." Il a ronronné sa promesse comme on menace ou on aime ; comme si elle n’était pas adressée à son interlocutrice. Au terme de quelques secondes supplémentaires et un silence vraisemblablement tendu, il reconduit ses billes en direction du profil de la sorcière.

Il espère qu’elle ne restera pas longtemps. Sa seule présence a l’air de réveiller la conscience malheureuse et pitoyable de Falk qu’il étouffe sous la sienne.

"Tell them all to leave. Now." Amycus ne prend pas d’ordres. Et certainement pas d’une cul-terreuse vomie par la lie criminelle. Amycus est très tenté de lui planter sa baguette entre les côtes sans même user de magie, et touiller là-dedans pour voir si elle pisse autre chose que de la boue. Mais Amycus a une promesse à tenir ; son âme sœur à hanter. Alors et pour le moment, il daigne faire preuve de pondération - franchement pas le genre de retour fanfaronnant qu’il s’imaginait faire en revenant d’entre les morts ! il se rattrapera… "I need to talk to you and I don’t want them to take the risk of dying." Nouveau grognement de rire. "How sweet of you." Décidément, tout les partis font des efforts. Amycus l’observe tourner les talons et pénétrer sans qu’on l’y invite dans le pawnshop, un rictus indéchiffrable sur le coin de la tronche - un regard, lui limpide, jeté bien plus en bas que les épaules de la black hand.

"You seem preoccupied", dit-il alors qu’il entre à son tour, fermant la porte derrière eux après avoir adressé quelques ordres succincts aux larbins dont celui de ne pas les déranger. Tout compte fait, Amycus trouve un certain intérêt à ce conciliabule soudain : il n’y a aucun témoin. Il approche de la vitrine et la couvre en tirant d’une petit coup sec sur le store épais et poussiéreux enroulé au-dessus. La pénombre s’abat comme le voile d’une éclipse. Moins de choses pourront être vues. Moins de choses pourront être perçues. Il repasse devant la sorcière qui trépigne à vue d’œil, puis s’éloigne de quelques pas en direction d’une des torches flottantes qu’il fait mine de vouloir rallumer. Une simple excuse pour tirer sa baguette. Tula est nerveuse. Tula vient-elle régler des comptes avec le vieux Falk ? Possible. Amycus se tient prêt à répliquer. N’attend en vérité que ça depuis que la porte s’est refermée sur leur passage. A moins que la sorcière ne vienne en amie, quérir l’aide du suédois ? Peu probable, mais pas moins possible. Göran et elle ont un passif. Il le sent de plus en plus. Et les couilles ne mentent jamais. "Well then; talk to me, Tula", ajoute-t-il d’un regard en biais, tandis qu’il termine d’apporter un modicum de lumière.

Les dents de la garce manquent de se briser sous la pression qu’elle exerce sur sa mâchoire. Elle ne pensait pas voir ce jour arriver ; anciennement pleinement confiante dans la tournure que prendraient les évènements. Elle n’avait ni prévu que Swall se barre, ni que des personnes de son cercle restreint posent trop de questions.
La pénombre semble les entourer autant par le store baissé que par le constat désolant qu’est devenue leur relation passée, abimée par les trahisons et maintenant par la peur de la mort. Elle le toise durant toute sa marche vers l’échoppe, vers la vitre recouverte, puis vers le fond du taudis. Le silence lui donne envie de vomir. Lui avouer puis l’achever – lui avouer puis se rendre – fermer sa gueule encore un peu parce que finalement si elle avait dû être découverte, elle l’aurait été depuis longtemps ? Autant de pirouettes indésirables pour se sortir de ce merdier. Göran n’a pas l’air nerveux, en tout cas, pas autant que la furie qui tourne dans son mètre carré de protection comme un lion en cage.
t a l k to me tula. elle tremble mais ne baisse pas le regard pour autant. Sa main gauche se loge dans le bas de son propre dos, vérifiant que sa baguette est à porter de main si jamais le sorcier prenait mal la confession qu’elle s’apprêtait à faire (et c’était davantage probable que de lui porter des louanges).

Perséphone souffle, reste immobile. You know me since almost my childhood. I made myself et and you offered me opportunities to prove my value. I proved it. We were pretty closed at a time. I hope you remember that years. I think I lost myself. I think I lost myself because of you. Tula s’arrête. Elle n’avait jamais parlé aussi longtemps de toute sa vie. Surprise de ne pas bafouiller, elle continue de scruter les moindres faits et gestes de Swall, prête à parer une éventuelle attaque. [color:ae15=9900cc]I’ve always desired power. This is power that made me survive all this time. But the power at Malta was yours. You were a barrier to my future. I was your Pinkie but I wanted to be your Thumb. Ses phalanges s’agitent discrètement dans son dos. I cursed you Swall. conclut la sorcière, sa langue tournant sans cesse dans sa bouche. I’m sorry but I had to. Now I have le role I deserved. I’m a Black Hand’s child.
L'index et le pouce saisissent le bas de la baguette. Les paupières restent grandes ouvertes alors que la bombe vient de s’écraser sur le pawnshop.
Contrairement à ce qu’elle avait pensé pour se rassurer, la confession ne la fait pas se sentir plus légère. Elle pense à Corban, à son marché passé, au nouveau couteau dans le dos qu’elle s’apprêtait à lui planter avec ce bras tant convoité et aussi, dans l’immédiat, à la manière dont elle pouvait passer la nuit.

Elle souffle, reprend comme elle le peut le maigre sang froid qui lui reste et, d’un ton éternellement autoritaire, elle finit par conclure : I imagine how much you want to kill me or torture me or whatever right now for what I’ve done. I just remember you that I care about my life so I’m not offering myself to you for your revenge. If you want one, we can fix it now.
Tula serre à nouveau les dents. L’envie de lui cracher à la gueule que tout est de sa faute, que c’est lui qui a attisé son désir du pouvoir, qui s’est fait prendre à baiser cette femme dans leur lit, qui a fait naître en elle ce sentiment de haine et d’amour qu’elle n’a pas réussi à refreiner, lui prend aux tripes. Elle sent l’heure de son jugement dernier approcher à grands pas, alors, dans une réaction défensive et surtout désespérée, elle finit par empoigner sa baguette pour de bon, la levant en guise de défense. La guerre avec Göran était déclarée et elle n’allait certainement pas en sortir perdante ; peu importe les sentiments qui l’ont animée ou qui peut-être l’animent encore.