cw depressive thoughts, mention of death

C'est la première fois qu'il monte dans une voiture, Conan.

Si le monde moldu ne lui est pas complètement inconnu (il s'est habitué au téléphone portable et autres gadgets du quotidien), la voiture est une toute nouvelle expérience pour lui. Elena et ses idées .. Elle arrive toujours à le convaincre de tout et n'importe quoi. Ou peut-être qu'il se laisse faire aussi, Conan, et que ça l'amuse dans le fond - ça fait des années que son esprit engourdi n'a plus fait de réelle distinction. Il se laisse emporter par le courant des caractères plus explosifs, plus grands ; parce que c'est tellement plus facile que de penser par soi-même. La fatigue s'insinue dans ses veines et gèle son sang en continu, si bien qu'il vit au ralenti ; le monde semble filer sous ses yeux à une vitesse astronomique, là où il peine à faire seulement quelques pas. Et pourtant, il s'accroche.
I'm more than this, qu'il se répète en continu. More than these tired bones, more than those ghosts. Chaque jour, il tente de faire taire les murmures des vagues dans son esprit. Come back home l'appelle maman, enveloppée dans sa robe d'écume et d'algues, sa peau de phoque sur le dos - mais maman est morte depuis des années, et il n'a aucune idée d'où est papa. Il le sait, maintenant, qu'il y a des gens qui l'attendent sur la terre ferme Après tout ce temps passé à essayer de se faire une place, à se demander si les tréfonds de l'océan ne seraient pas plus une maison qu'ici, il commence peut-être à changer d'idée. Entre deux lunes noires qui l'enfoncent un peu plus dans les méandres de son esprit malade.

Conan jette un regard à Elena, derrière le volant. Il s'enfonce un peu plus dans son siège alors qu'elle accélère - la voiture va vite, et elle fait un bruit bizarre. Il ne sait pas si c'est normal ; il n'est pas familier avec ce genre de technologie. Pourtant, elle avait l'air sûre d'elle quand elle est venu le chercher à Sweet River pour le faire sortir de force. Sans jamais le dire, il la soupçonne de garder secrètement un calendrier des phases lunaires pour savoir quand venir le chercher pour essayer de lui remonter le moral, ça l'étonnerait pas venant d'elle. Elena a toujours été derrière lui, à sa façon.
Que ce soit pour dégager ses bully d'un coup de pied énergique ou simplement lui tenir compagnie au bord du Lac Noir, alors qu'il l'introduisait aux Merrows habitant dans ce-dernier - Elena s'est frayé un passage dans sa vie avec la délicatesse d'un buffle. Et il l'a laissée faire, Conan, avec un presque sourir. Dans tous ses souvenirs, elle est là ; éclatante, flamboyante (et bruyante).

Ils savent, tous les deux, qu'un danger plane au-dessus de leurs têtes. L'Ordre se prépare pour une grande mission de sauvetage, tous les esprits sont enflammés et prêts à aller au combat ; eux y compris, bien évidemment. C'est peut-être pour ça qu'un léger silence s'est installé dans la voiture (le calme avant la tempête, comme on dit). Le moteur qui fait toujours un bruit d'enfer - et la voiture qui file vite, si vite qu'il sent son coeur rater un battement. Ses mains s'accrochent à la poignée, il glisse un regard vers Lena qui, elle, fixe la route (encore heureux). "Lena can you ..." Pause. Un animal non identifié traverse la route au dernier moment, ils manquent de l'écraser et Conan pousse un petit cri étouffé. ".. slow down, please ?" Il pose une main sur son coeur qui s'affole. Le ton est presque suppliant (mais y a une autre sensation qui monte à chaque kilomètre heure dépassé, celle d'être libre).

Ils ont besoin de vacances.
Enfin, de vacances – de quelques jours, même plutôt quelques heures, loin du tumulte sourd de la bataille à venir. Elena a fait le tour de ses connaissances ; ce n’était pas la peine de confisquer la voiture de Little Italy pour simplement déplacer le mouron à une petite centaine de kilomètres, alors elle a éliminé d’office tous les proches partageant de près ou de loin ses travaux et autres angoisses actuelles. Pas de Sinead, de Lee, ou de Rubén donc – tout s’est finalement joué entre Alexis, Nacho et Conan, mais puisqu’elle avait déjà réussi à traîner la première côté moldu et qu’elle voyait le second à une fréquence qu’elle estimait « plutôt régulière »… C’était le chiquito Lee qui avait raflé la mise, et qu’elle était venue chercher en klaxonnant gaiement au pied de Sweet River en fin de matinée. “Long time no sea, uh?”, qu’elle avait fièrement lancé depuis la fenêtre ouverte, côté passager. “Get it? Sea/see? Because we’re going to the sea, you know!” (S’en était suivi un petit quiproquo légèrement gênant mais qui, somehow, n’avait pas réussi à entacher sa bonne humeur du jour).

Et puis, la route.
Elena roule rarement plus d’une heure, le temps de rallier Le Théâtre depuis Little Italy ou inversement ; il y a donc un véritable goût de vacances dans la Ford Escort qui file toutes fenêtres ouvertes sur un air de Manu Chao (c’est la deuxième fois déjà qu’elle leur repasse tout Esperanza, bon, c’est que la discographie est limitée aussi). Puis bon, qui file… Lena s’est lancée au volant avec son entrain habituel, comme lorsqu’elle part en vadrouille avec Herrera ou même Leonor, d’abord peu sensible à la main de Conan obstinément crispée sur la poignée d’appui – mais à terme elle a pris peur qu’il rende son petit-déjeuner sur le tableau de bord, et ils roulent donc depuis près de vingt minutes à moins de vingt kilomètres heure. Elle pianote des doigts sur le volant, petit jeu de patience en plus des fredonnements qui ne se meurent pas ; c’est que, quand même, ils se traînent. (Mais si c’est que Conanito veut… Ce sont ses vacances à lui aussi, après tout, et c’est même d’ailleurs plutôt pour lui qu’ils vont à la mer, parce qu’Elena et l’eau ça a plutôt tendance à faire huit, déjà qu’elle est malade sur le Tempest… Au moins il devrait y avoir du soleil et ça c’est bien).

La route suit les courbes escarpées des côtes, alors Elena ralentit encore un peu pour apaiser son petit protégé, même si un broutement désagréable monte alors du moteur en guise de protestation. Ils sont presque à l’arrêt par Merlin – il faut vraiment qu’elle l’apprécie pour contenir le soupir vaguement désespéré qui lui monte aux lèvres par automatisme. Un silence, en plus, s’est installé dans l’habitacle depuis quelques minutes ; Lena sent déjà se recréer cette épaisse bulle de faux calme, d’anxiété ankylosante au point de passer pour de la sérénité. Elle tend donc la main pour monter un peu le volume de l’autoradio quand… "Lena can you ..." Et bam, un lapin (anormalement volumineux), sorti de nulle part, manque de passer sous les roues de la voiture (si du moins on en croit le petit cri étouffé que laisse échapper Conan). Dans les faits, Elena écrase effectivement un peu fort les freins, mais la vitesse minimale du véhicule entraîne un arrêt relativement normal, ou à défaut parfaitement maîtrisé. ".. slow down, please ?" Elle enclenche à nouveau la première vitesse, dans un calme qui ne lui ressemble que très peu, se retient même d’attraper une des mains de Conan pour le rassurer (au contraire, elle s’applique à garder les siennes bien consciencieusement sur le volant).

"I’m sorry." Ça aussi, ça contraste un peu avec ses manières de brute, d’autant plus qu’elle ne se considère pas foncièrement en tort cette fois-là. Mais c’est Conan, l’une des personnes les plus anormalement douces de son entourage, de celles qu’elle apprend encore à ne pas égratigner trop fort de ces gros sabots. Ces gens-là (Blue ou Alex par exemple), elle les secoue un peu parfois, parce qu’elle est horripilée par l’idée qu’on puisse leur marcher dessus ou profiter de leur quasi-pureté ; mais parfois, aussi, elle cherche à s’inspirer de leur calme, leur élégance, leur réserve (tout ce qu’elle n’est pas). Ça ne marche pas toujours (rarement), mais elle essaye, quand même, vraiment, d’être moins brusque.

"I’m afraid we cannot really go slower, though, cariño."

Elle le fait remarquer le plus poliment possible, désignant même du menton le compteur de vitesse (même si elle n’est pas certaine que Conan comprenne grand-chose à celui-ci. Est-ce qu’elle aurait dû prendre le temps de lui enseigner les rudiments de la mécanique automobile au lieu de l’embarquer à grands coups de klaxons enthousiastes ?). "But, uhm, we should be close by now", poursuit-elle sur le même ton qui se veut à la fois patient et rassurant (et est peut-être un échec dans les deux cas).
Elena jette un coup d’œil dans le rétroviseur (toujours), s’efforce de reporter aussitôt son attention sur la route pour ne pas inquiéter Conan. Elle a momentanément arrêté de chantonner, tout pour se donner un air plus concentré que de raison ; tout pour (r)acheter la confiance de son passager. Le lapin a disparu et ils ont repris leur lente progression sur la petite route zigzaguant à travers la lande – vraiment, sur le principe, tout va bien.

"Do you think you could maybe… check on this box? It should tell us the time at which we’re supposed to arrive." Le faire participer, en voilà une bonne idée pour occuper l’esprit d’un petit sorcier découvrant les technologies moldues ; d’un autre côté, l’activité connait rapidement ses limites, et Elena s’en rend compte avant même d’avoir fini sa phrase. Elle a un petit sourire, qu’elle veut toujours sécurisant, pointe quand même en direction du TomTom collé au parebrise par une épaisse ventouse (clairement une de ses plus grandes fiertés dans cette voiture, ce qui n’est pas peu dire, parce que certes elle siffle un peu, mais elle roule quand même drôlement bien). Sur le petit écran, la voiture semble faire du surplace – son sourire se crispe un peu quand elle s’en rend compte du coin de l’œil. "You know what, nevermind. We can just park where it’s pretty." Cette fois-ci, ses intonations sont vraiment confiantes ; un avantage considérable d’être une sorcière conduisant une voiture (essentiellement) moldue, c’est tout de même de pouvoir garer celle-ci partout parce que pof, un petit sortilège et aucun flic moldu ne saurait jamais qu’une auto était stationnée en plein travers de sa plage.

La mine espiègle qui vient compléter ses propos signale un lent mais sûr retour du naturel. Elena lâche le volant de sa main droite, s’en sert pour venir claquer amicalement la cuisse du petit. "Come on, please, don’t be sulky with me." Elle parle un peu comme Conan quand il la supplie de ralentir, mais la moquerie se veut gentillette, n’est pas un reproche en soit. Plutôt, elle révèle un début d’inquiétude. "I’m getting enough grumpy faces on the daily, and I’m like… this super great driver, right?" Lena est une grande pilote, elle le sait, seuls les rageux en mal de conduite diront le contraire ; mais aussi, effectivement, Lena a eu tendance à se heurter à des mines essentiellement contrariées ces dernières semaines et aimerait éviter de continuer en ce sens, même si l’air marin rend sûrement ça plus sympa. D’ailleurs… "LOOK!" Sa main libre est venue désigner l’horizon avec une excitation non dissimulée. Après quelques dizaines de minutes à sentir les premiers embruns, puis entendre des reflux de vagues, la mer se dessine enfin devant eux – même une terrestre comme elle ne peut s’empêcher de trépigner d’enthousiasme (c’est quand même plus sympa que Saint James). Parce qu’elle tourne la tête vers Conan pour vérifier que l’engouement est commun à tous les occupants de la voiture, Elena daigne finalement replacer ses deux mains sur le volant ; et, pour la première fois en plusieurs jours, elle a un petit rire sincère. "Cool beans, yeah?"

(Dans la ferveur, peut-être bien qu’elle en profite un peu pour réaccélérer juste ce qu’il faut).

cw depressive thoughts
Peut-être qu'il exagère. Beaucoup. Il ne sait pas - c'est la première fois qu'il met les pieds dans une voiture et il a l'impression d'être lâché au beau milieu d'un nouveau monde (c'est exagéré comme sensation, ça aussi ?). C'est différent de voir le monde depuis l'intérieur d'une voiture - tout a l'air d'aller cent fois plus vite. Ou alors, c'est la panique qui lui donne cette impression. "I’m sorry." Il secoue la tête, prend quelques secondes pour apaiser les battements de son coeur. "No I'm sorry for screaming." Il n'aurait pas dû se laisser surprendre comme ça, Lena sait ce qu'elle fait - c'est sûrement une des personnes en qui il a le plus confiance, ici. Alors, il peut bien faire un effort, pas vrai ? "I'm just .. not used to it." qu'il termine dans un murmure en jetant un regard vers la fenêtre - le gros lapin est en train de détaler. C'est lui qui a eu la plus grosse frayeur, ici - et c'est lui qui devrait crier. Pas Conan. Il est ridicule. "I’m afraid we cannot really go slower, though, cariño." Le selkie fixe le paysage à travers la fenêtre pendant un court instant avant de laisser échapper un simple "Okay .." digne des plus grands soupirants du cinéma noir et blanc moldu. I'm definitely overreacting.
Depuis le siège conducteur, Lena désigne du menton une boîte moldue - il n'a aucune idée de ce dont il s'agit, aussi, il se penche légèrement pour l'observer avec l'intérêt d'un enfant. "But, uhm, we should be close by now" Les informations données par la boîte lui sont aussi claires qu'une langue étrangère - Conan a envie de lui demander comment elle sait, et comment fonctionne cet objet, mais il n'ose pas. Du coup, il hoche de la tête, essaye de se détendre. Regarder Lena conduire le détend un peu - et il se surprend même à penser qu'elle est cool. Il l'a toujours pensé, depuis leur première rencontre : et aujourd'hui encore plus. "Do you think you could maybe… check on this box? It should tell us the time at which we’re supposed to arrive." Ca le prend de court qu'elle lui demande - il a même pas confiance en ses propres capacités. Mais si Lena lui fait confiance, maybe he's trustworthy - il a plus confiance en elle qu'en sa propre personne. Son cerveau lui répète en boucle qu'il n'est pas le genre de personne sur qui on peut compter, parce qu'il finira par décevoir tout le monde un jour ou l'autre ; c'est dur de se sortir de cet état d'esprit. "I don't understand what it says .. - You know what, nevermind. We can just park where it’s pretty." Conan hoche de la tête - il a hâte d'arriver. Ses nageoires imaginaires frétillent presque.

Son amie lui claque subitement la cuisse d'une main et le selkie sursaute brutalement, plus par le coup plutôt que par surprise - c'est comme ça qu'est Lena, il y est habitué depuis le temps. "Come on, please, don’t be sulky with me." Elle l'imite, il le comprend, mais ça ne le vexe pas comme on s'y attendrait - au contraire, y a l'ombre d'un presque sourire qui soulève sa lèvre supérieure. Ca fait quelques temps qu'il a recommencé à sourire, à croire que son visage s'est enfin tiré du sel dans lequel il s'était engourdi avec le temps. "I don't talk like that." Yes you do. "I’m getting enough grumpy faces on the daily, and I’m like… this super great driver, right? - Best driver the Order's got." qu'il répond en écho. Il évite de dire qu'elle est la seule conductrice qu'il connaît et qu'il a personne à qui la comparer, mais si ça fait plaisir à Lena d'entendre ces mots, il peut bien enjoliver un peu la réalité - lui aussi il veut lui remonter le moral, ou du moins essayer. "LOOK!" Cette fois, il ne sursaute pas mais se détend considérablement quand il suit sa main du regard.
L'odeur familière de la mer vient bien avant le reste, s'insinue dans ses narines et lui arrache un léger soupir d'aise. Son cœur s'allége dans sa poitrine, jusqu'ici lourde depuis plusieurs jours. Home qu'il pense, sans faire attention au fait que Lena n'a plus les deux mains sur le volant. "Cool beans, yeah? - It sure is." Un vrai sourire se dessine cette fois sur ses lèvres alors qu'il sonde l'horizon, comme à la recherche d'une réponse qu'il n'obtiendra jamais. Le rire de Lena le berce un peu, il s'autorise à sourire un peu plus, juste une fois. "Wish we could go more often." laisse-t-il échappe alors qu'ils passent à côté d'une nuée de mouettes qui s'envole à leur passage à grand cris de désapprobation. Si Lena accélère, il ne le remarque même pas ; son esprit est obnubilé par la mer, et les voix qui recommencent à l'appeler. Come back, come back - I'm coming.

Il se laisse retomber contre son siège et adresse un regard à Lena, sans se défaire de son sourire. Les pommettes se teintent doucement de rose alors que l'excitation monte petit à petit, effaçant presque les pensées morbides qui continuent de l'animer. "No more grumpy faces." Ce n'est pas réellement une promesse, car il ne peut pas se le permettre, pas dans sa situation ; mais plus un désir.  Conan ferme les yeux un instant et prendre une grande inspiration par son nez - quand il les rouvre, le regard se fait un peu plus mélancolique. "It smells like home." C'est un concept flou pour lui. Our home is by the sea lui soufflait parfois maman, avant de mourir - et il ne comprend totalement le sens de ces mots que maintenant. "When's the last time you went on a trip to the sea ?" Chassant ces souvenirs douloureux, il se penche pour regarder le ciel - il pointe ce-dernier à Lena. "Look, sun's out. You won't get cold." Le froid n'est pas une chose dont il se soucie, sang de selkie oblige - mais il sait que la mer sous un vent gelé n'est pas au goût de tout le monde, et encore moins pour Lena.

"No more grumpy faces." Conan sourit de son grand sourire d’enfant réjoui, les pommettes légèrement colorées, et Elena ne peut qu’en faire de même. Un nouveau rire lui échappe, sans raison particulière cette fois, et elle pince légèrement la joue de son copilote, dans un geste d’affection un chouïa trop maternel. "It smells like home." Elle a déjà remis les deux mains sur le volant pour ne pas charger inutilement le moment d’inquiétude, mais son propre sourire grandit encore un peu. "Now that’s the spirit, chicken." Elle a la mine franchement satisfaite maintenant, et le pied inconsciemment plus lourd sur l’accélérateur. Conan a raison, ils devraient venir plus souvent, parce qu’elle a le cœur qui palpite au moins autant d’excitation que de tranquillité ; c’est une sensation étrange, mais plus qu’agréable par les temps qui courent.

"When's the last time you went on a trip to the sea?" La question la prend un peu au dépourvu, mais ne suffit pas à faire vaciller son air réjoui – tout juste à la plonger dans un silence pensif de quelques instants. "Freak, I don’t even know… Ages ago, probably?" A bien y réfléchir, elle n’est même pas sûre d’avoir vraiment vu la mer depuis qu’elle est à l’Ordre, et ça lui fait réaliser à quel point elle n’a pas pris de véritable pause depuis trop longtemps ; certes il y a les escapades moldues avec Alexis, les occasionnelles entrevues avec Blue ou Jo, mais… Les vraies sorties, les vacances ?! "Damn, I think last time I actually went to a beach was with my parents." Le constat n’est pas si amer qu’il devrait l’être, et lui arrache même un nouveau petit rire – sans doute encore un coup des embruns. Elle se laisse aller à apprécier la sensation de chaleur dans sa poitrine, trop rare en ce moment, se promet de renouveler l’escapade avec Lee et peut-être Dennis ou Cat dès que possible. Avant cette foutue île. They need it and they deserve it.

"I’m not even sure I would still know how to swim…" ça la fait un peu moins rire, cette idée, et elle est déjà en train de se demander si on peut nager dans la Mersey (comme ça, Sinead viendrait la récupérer par la peau du cou au moindre problème). Conan, heureusement, semble ne plus se départir de son enthousiasme ; elle saute sur l’occasion. "Look, sun's out. You won't get cold." "Perfect. Sunbathing I can do." Son sourire revient aussitôt, et Elena contient de justesse une blague sur le fait qu’elle en a même besoin, de cette séance de bronzette, parce que les gens vont finir par penser qu’elle est blanche et franchement la honte quoi et… Soit. Elle entreprend de se tourner un peu plus vers Conan, sans départir pour autant son regard de la route (évidemment). "What about you chiquito, when was your last trip wherever? Seeing anyone out there? Please tell me you’re not staying all the damn time at Sweet River or I’ll have to come kidnap you on a weekly basis."

Elle lui serre encore un peu le genou, tactile qui a définitivement bien du mal à tenir en place, ou qui ne sait pas trop comment signifier autrement qu’elle le taquine. Lena le traîne dans toutes ses galères depuis quelques années, déjà ; mais quand même, elle essaye de ne jamais trop le bousculer trop fort. Et elle apprend au fur et à mesure, aussi ; faut dire que chez elle ça parlait vite et fort, ça se touchait tout le temps, et ça pleurait sans pudeur dès qu’il y avait besoin, donc la délicatesse et la mesure ce n’est pas ce qui lui vient le plus naturellement du monde. Mais elle apprend, grâce à Conan entre autres, puis avec quelques gosses de la Fawkes, les cracmols les plus traumatisés du Théâtre, ou son nouveau petit informateur.
Et en échange, elle leur apprend qu’on ne met jamais son pouce à l’intérieur de son poing quand on met une droite à quelqu’un. C’est un échange de bons procédés avant tout.

Ils ont continué à progresser, depuis le moment d’émerveillement de tout à l’heure, et Elena se redresse un peu sur son siège pour mieux distinguer les premiers petits sentiers descendant le long de la plage. Rubén l’a aidée à repérer un coin peu fréquenté mais scenic af (ses critères) ; elle sait que les accès conventionnels risquent de se compter sur les doigts d’une main tout au plus.
A quatre-cents mètres, elle entrevoit un chemin un peu plus large, où la Ford devrait pouvoir se faufiler – mais ça impliquerait de laisser la voiture sur le sable, et Elena se demande tout à coup si cela risquerait de compromettre un écosystème, ou même l’intégralité de la biologie locale, et elle ralentit un peu pour s’accorder le temps de la réflexion. Mieux, preuve qu’elle apprend : elle préfère bénéficier de l’expertise de son copilote avant de s’engager. "Do you think it’s fine if we just park on the beach? I don’t know, is it not seagulls’ territory or anything?"

Le sentier se rapproche lentement, le temps d’absorber les informations que lui fournit Conan, le tout avec les sourcils légèrement froncés dans l’espoir de rater le moins d’éléments possibles – écouter Conan parler de la faune marine, c’est un peu comme écouter Nachiquito déblatérer en espagnol à toute vitesse, ça demande un minimum de volonté et d’écoute active. "Alright champion, if you think that’s alright you’ll have to hang on, there’s a bit of a downhill going on here. (Elle préfère toujours anticiper, mieux vaut prévenir que guérir n’est-ce pas, voyez comme elle apprend.) -- No worries though, you’re with the best driver of the Order!" Mais quand même, elle sourit comme une gamine enfin arrivée à la plage ; à l’exception près que la gamine est au volant d’un véhicule d’une petite tonne, bon.

cw bullying, mort, deuil
La réponse d'Elena ne vient pas tout de suite ; aussi, Conan laisse son regard errer sur le paysage avant de repoter son attention sur son amie, dont l'expression s'est faite pensive. When's the last time you went on a trip to the sea ? La question a franchi ses lèvres naturellement. "Freak, I don’t even know… Ages ago, probably?" Il cligne des yeux, Conan - c'est inconcevable pour lui. "That long ?" souffle-t-il en fixant son reflet dans un des rétroviseurs - parfois, il a du mal à se dire que tout le monde ne ressent pas les choses comme lui. La sensation d'être déchiré en deux lorsqu'il reste loin de la mer et de ses vagues pendant trop longtemps - que ses os commencent à réclamer l'écume. Mais ça fait sens, quelque part ; il assimile plus Elena au feu qu'à l'eau. Un véritable feu follet de couleurs et d'émotions - bien plus vivante qu'il ne le sera jamais. That's why I admire her so much. "Damn, I think last time I actually went to a beach was with my parents." Et elle rit, Elena. Conan ne dit rien, le regard (encore). Elle est jolie quand elle rit - il a presque envie d'oublier tous ses problèmes. Enfin, il a toujours trouvé Elena belle - dans sa façon d'être, dans sa façon de cogner les gens qui se mettent en travers de sa route, dans sa façon de protéger sa famille et ses amis. Elle brille, irradie - like the sun. Warm.
"I’m not even sure I would still know how to swim…" Le selkie jette un regard en coin vers son amie, puis glisse vers l'horizon. Hésite un instant - tapote son index contre la vitre (très propre, d'ailleurs) avant de murmurer. "I could teach you. That's kinda .. my thing." My thing est un euphémisme - la nage coule dans ses veines, littéralement. Look, sun's out. You won't get cold. Il pointe le ciel, change de sujet. "Perfect. Sunbathing I can do." Les commissures de ses lèvres s'arquent en un léger sourire - of course you do.

Elena tourne la tête vers lui. Il est à deux doigts de lui demander de garder un oeil sur la route, avant de remarque que c'est exactement ce qu'elle fait ; il triture alors nerveusement le pan de son tee-shirt. "What about you chiquito, when was your last trip wherever? Seeing anyone out there? Please tell me you’re not staying all the damn time at Sweet River or I’ll have to come kidnap you on a weekly basis." Un petit rire lui échappe - mort like a scoff. Conan secoue la tête, tapote doucement l'épaule de la brune sans départir son regard de la route en face d'eux. "You won't have to resort to those kind of things, don't worry." Il se fait ensuite pensif. The last time I was somewhere with someone ... Un visage lui vient immédiatement à l'esprit et il tourne légèrement la tête sur sa gauche pour masquer le rose qui lui picote doucement les joues, les colore. With Blue.
"It wasn't that long ago actually .. I've been reconnecting with a .. friend. I hadn't seen him in a long time." A friend. Really ? Le brun se mordill légèrement l'intérieur de la joue. Ce n'était pas des vacances à proprement parler ; à vrai dire, ça n'a été qu'un retour dans son cottage - mais Blue était là, aussi. Il y a des mots qui ont été soufflés, des promesses aussi. Et un tas de non-dits qui ont allégé l'air. "It felt nice .. seeing him again .." La voix s'adoucit un peu - il revoit Zayd sur la falaise, Zayd dans le cottage, Zayd qui fouille dans ses placards et lui prépare un thé. Would I be greedy if I wished for this to last ?"I care about him a lot." murmure-t-il en posant sa tête contre la vitre, un soupir filant entre ses lèvres entrouvertes. And I miss him all the time. Dans sa poitrine, son coeur s'enfonce un peu plus. Is he sleeping well ?

La main d'Elena se presse un peu plus contre son genoux, et il lui adresse un sourire. Il hésite quelques secondes avant de poser la sienne par-dessus avant de la retirer - too awkward, mais il apprécie le sentiment. Conan n'a jamais été friand de contacts physiques. Peut-être parce que c'est à cause des mauvais souvenirs, ou de l'armure de sel qu'il s'est construite auteur des années. Peut-être parce que chaque main inconnue sur son épaule le ramène à un temps où il finissait la tête dans le lavabo sous les rires de ses camarades. Peut-être parce que papa ne l'a jamais pris dans ses bras une fois après que maman soit morte.
Mais avec les années, il a fini par commencer à se sortir de tout ça ; à prendre conscience qu'il peut faire confiance, laisser certaines personne passer sa carapace. C'est pas toujours facile, ça demande du travail - but he's getting better.

Elena ralentit alors qu'ils arrivent vers un nouveau chemin. Conan lui jette un regard interrogateur, alors qu'elle tourne la tête vers lui. "Do you think it’s fine if we just park on the beach? I don’t know, is it not seagulls’ territory or anything?" Le selkie garde le silence quelques secondes - observe lesdites mouettes qui volent et chantent. Home. Finalement, le hoche doucement de la tête. "It should be fine as long as we stay far away from their nests. They're very territorial." Il sait de quoi il parle ; il en a vu, des passants se faire attaquer par des nuées de mouettes après s'être un peu trop approchés pour leur bien. Alors qu'ils s'engagent sur la route, Conan continue : "Did you know that seagulls are the only birds able to drink sea water ?" La faune, particulièrement marine, l'a toujours fasciné. Ce n'est pas réellement une surprise, en soi - il est magizoologiste, après tout. Et quand bien même il a dû mettre ses activités en suspens, il ne les a pas abandonnées pour autant ; il continue de se documenter, quand il peut. Re parcourre ses vieilles notes qu'il a emmenées avec lui. Observe ce qu'il peut depuis Sweet River - I love doing this. "The coolest is how they do it - they have glands above their eyes that reject the salt." Pause. "That's .. cool." Fascinating, même. "We can't do that, in case you were wondering." ajoute-t-il tout de même - parce qu'on lui en a déjà posé, des questions du genre, un peu ignorantes mais aussi vraiment curieuses.
Non pas qu'il assimile Elena à ce genre de personnes - mais les vieilles habitudes restent. Celles qui le poussent à anticiper les interrogations, parfois mal placée. Il se racle finalement la gorge, et reprend : "Also .. they're very intelligent. They teach each other how to hunt, those sort of things." Il ne sait pas si Elena l'écoute réellement ou si elle fait semblant (ce qui, de toute façon, ne le vexerait pas) et stoppe son exposé oral lorsque la route se fait un peu plus accidentée. "Alright champion, if you think that’s alright you’ll have to hang on, there’s a bit of a downhill going on here. -- No worries though, you’re with the best driver of the Order! - I'm not worried at all." ment-il ; la vérité, c'est que son coeur manque de bondir de sa poitrine à chaque nid de poule, bosse qui secoue la voiture. Ses phalanges tournent blanche tellement il s'accroche à la poignée à côté de lui (comme si ça allait le sauver, de toute façon). Mais Elena a la situation sur contrôle, elle n'arrête pas de lui dire de lui faire confiance ; et puis, il a plus confiance en elle qu'en ses propres capacités de survie.

"You shoud stop here. I think it's alright." fait-il lorsqu'ils arrivent à un endroit qu'il juge acceptable. Suffisamment éloigné pour qu'ils ne se retrouvent pas attaqués par une horde de mouettes enragées (ils pourraient bien y perdre un oeil - ces oiseaux sont de véritables gorgones aux pieds palmés). Avec une excitation qu'il ne parvient pas à masquer (à vrai dire, il n'essaye même pas : à quoi bond ?), il se jette presque dehors après avoir ouvert la portière dans la volée. Conan effectue quelques foulées et s'arrête, oublie même Elena pendant quelques secondes. I'm back, mom. Il lève la tête vers le ciel et hume l'air - comme dans ses souvenirs.
Le bruit des vagues, le grondement de l'écume s'insuffle dans sa trachée et il respire, Conan. L'envie de plonger revient immédiatement (come to me, my son, I've been waiting for you - let's leave together and never come back) mais il réprime cet appel. "It feels good to be back." fait-il, les mots immédiatement emportés par le vent. Conan tourne finalement la tête vers Elena, se rappelant subitement qu'elle est là - il sourit, lui tend la main pour qu'elle le rejoigne. Les yeux pétillent. "Come on !" Il n'a pas froid, malgré le vent qui claque - il n'a jamais froid, Conan. "Let's go see the waves from up close." De l'autre bras, il désigne la mer - le sourire adressé à Elena s'élargit un peu plus. Let's go.