Pays de Galle – Juillet 2007.


Se pavaner avec un t-shirt dédicacé ? La suggestion ne manqua pas de l’amuser, mais elle se voyait totalement le faire. Elle inventerait bien sûr une histoire sur la façon dont elle aurait récupéré le vêtement, histoire qu’on ne vienne pas l’embêter, mais elle le porterait fièrement. En particulier les jours de matchs afin de supporter l’une des rares équipes de Quidditch qu’elle connaissait. « Un t-shirt de la célèbre Jules Doherty ? Wow, je vais faire des envieux avec ça, c’est sûr ! » Ou peut-être pas. Mais elle s’en fichait bien. « Je pourrais bientôt dire à tout le monde que ma meilleure amie est dans l’équipe nationale du Pays de Galle ! J’ai hâte !» Elle était fière de voir que malgré toutes les épreuves qu’elle avait dû traverser, Jules était parvenue à garder espoir et à s’accrocher à ses rêves. Tout ce travail avait payé et allait continuer de le faire. « Du coup tu as plutôt intérêt à être sélectionnée ! » fit-elle avant de faire diminuer le volume de sa bouteille de bière.

Et si la carrière de Jules avait de l’importance, la galloise en accordait également à la vie que menait Vanessa.  « Hm… J’essaye de me tenir au courant… Il n’y a pas un jour où je ne m’inquiète pas pour toi... » Jules ne devait pas entendre grand-chose ou rien de bien réjouissant en tout cas. Il fallait dire aussi que le gouvernement et son service de presse prenait un malin plaisir à salir l’image des membres de l’Ordre. Ils n’étaient à leurs yeux qu’une bande de criminels tout juste bons à enfermer derrière les murs d’Azkaban si on leur faisait l’honneur de les amener si loin. Voyant son sourire se faner, la brune essaya de rassurer son amie. « Ne t’en fais pas trop pour moi. » c’était facile à dire, elle le savait. C’était ce qu’elle avait écrit dans sa dernière lettre à ses parents presque dix ans plus tôt et elle osait à peine imaginer l’inquiétude qui avait dû et devait aujourd’hui encore les ronger. « Je te promets que je fais attention. Je ne prends pas de risques inutiles, enfin à part aujourd’hui. » Non, ce rôle ne lui revenait pas et quelque part elle en était bien contente. Elle, elle s’occupait plutôt de ceux qui le faisait. Elle partait rarement sur des missions de grande importance, préférant se cantonner aux missions de ravitaillement quand elle n’était pas occupée à St James. « Je soigne surtout ceux qui le font.» Chacun mettait ses compétences au service du groupe, alors, elle mettait à disposition ses connaissances en médicomagie pour aider ceux qui en avaient besoin. Tant que personne ne mettrait la main sur leur planque, il n’y avait pas de soucis à se faire. Ils étaient en sécurité.

Découvrir que sa meilleure amie avait aimé la comédie romantique sembla à peine la surprendre, elle la connaissait trop pour ne pas en jouer. « Hé oui, comme quoi tout arrive ! » C’était tellement prévisible. « Faut croire qu’un peu de douceur ça suffit à me faire fondre en ce moment. »  Le film dénotait clairement avec le genre de DVD que le trio du dernier étage regardait habituellement et avait fait taire un instant ses envies d’évasion et de liberté pour se plaire à imaginer vivre une belle histoire d’amour. Comme ils en faisaient dans les films. Mais dans la vraie vie, le scénario était bien différent et elles étaient bien placées pour le savoir. « Bon, y en a de très mignons, c’est vrai ! » Impossible de lui donner de noms, mais ça aurait été mentir que de dire le contraire. Elle pouvait cependant affirmer que certains visages ne l’avaient pas laissée indifférente.

Et puis le nom de Cedric apparu dans la conversation, un nom, une histoire qu’elle n’avait pas mentionné depuis un moment. Le tiroir qui renfermait les souvenirs relatifs à ses années à Poudlard avait été fermé depuis longtemps et elle ne prenait que rarement la peine de le rouvrir. « Ahh mais c’était pour ça ! Tu sais qu’on s’était toujours posés la question ? C’était LE plus gros mystère de l’année pour nous à ce moment-là. Ça et puis savoir comment Potter avait réussi à balancer son nom alors que clairement il n’avait rien à y faire. » Les hypothèses qu’Hadrian et elle avaient balancé sur la table avaient été nombreuses quant à ce froid qui avait duré quelques jours entre les deux sportifs, pourtant aucun des deux n’était parvenu à obtenir de réponse satisfaisante. Avec le recul, le motif était plutôt évident. « Je suis sûre que la prochaine sera très belle ! »

Le changement de sujet fut accueilli avec soulagement par les deux amies. « C’est clair que tu auras plus de réaction de la part d’un chien que de deux poissons rouges … » Les poissons étaient loin d’être connus pour leur côté vif. « Tu vas avoir une super team de pet sitter à disposition, ça je te le garantie ! Par contre le risque, c’est qu’on vienne juste pour la boule de poils.»  Elle s’imaginait bien devoir se battre contre Basil et Joseph pour venir s’occuper du potentiel futur compagnon de Jules. Enfin ce genre de conversation n’était pour le moment pas d’actualité pour elle. Les garçons devraient se disputer ce droit sans elle pour savoir qui prendrait la première garde. « Si quelqu’un venait à apprendre que des membres de la résistance sont passés chez toi, les choses redeviendraient compliquées. Même si ce n’est que moi de temps en temps. Tu n’as pas besoin de ça, ça ruinerait à coup sûr tes chances d’avoir une grande carrière. On ne sait pas ce qu’ils pourraient te faire. Ca pourrait même te conduire à Azkaban. » Trop de choses pouvaient lui arriver et Vanessa refusait qu’elle se mette en danger juste pour qu’elle puisse venir se prélasser sur un transat dans le jardin. Pourtant lorsque Jules lui proposa de rester, cette idée sembla bien vite s’envoler. Le bon sens lui aurait dit de partir, elle avait déjà passé beaucoup trop de temps dans le coin. Mais repartir alors qu’elle venait juste de retrouver sa meilleure amie lui brisait le cœur. Elle avait l'impression qu'elle venait tout juste d'arriver. Alors elle répondit : « Comment refuser une invitation pareille ! » avec un grand sourire. Elle contredisait en une phrase tout ce qu'elle avait essayé de lui dire en une dizaine d'autres. Seulement, elle ignorait combien de temps s’écoulerait avant qu’elle ne puisse revenir ici ou la croiser ailleurs, alors autant profiter de cette sortie tant qu’elle le pouvait.

( Pando )

Pays de Galle – Juillet 2007.

Être qualifiée de « maman du groupe » la fit sourire. Jules la connaissait trop bien.  Vanessa avait toujours été dans la retenue, à faire attention à bien suivre les règles, minimiser les risques au maximum. Plus d’une fois elle leur avait évité des heures de retenues inutiles, quand elle ne les avait tout simplement faites sauter en négociant avec ses collègues préfets ou professeurs. Elle avait toujours veillé sur les autres, pensé aux détails techniques de toutes leurs sorties. Une fois avoir rejoint les rangs de l’Ordre, elle avait continué à avancer sur le chemin de la prudence, elle avait toujours suivi les consignes de sécurité à la lettre. La peur d’être attrapée et conduite à Hadrian était trop forte. Un excès de précautions qui l’avaient conduite à éviter tout contact avec sa meilleure amie pendant bien trop longtemps. Jusqu’au jour où elle s’était décidée à lui écrire en passant par le courrier des fans. Une lettre suffisamment ordinaire pour passée inaperçue au milieu d’un milliers d’autres, mais avec un ou deux mots assez singuliers pour Jules puisse éventuellement en reconnaître l’auteur. « Non, ça, ça n’a pas changé. » Elle le reconnaissait parce que c’était la vérité, tout le monde lui avait assez fait remarquer ses petites habitudes pour qu’elle s’en aperçoive. Elle avait juste reporté ses petites habitudes sur d’autres, ses colocataires de la Tour principalement. Surtout ceux du dernier étage. Elle s’assurait que tout le monde se sente bien, mange bien, s’entende bien, quitte à les materner un peu trop.

« Tu vas commencer à pleurer devant les teen-movies, attention à toi. »  Trop tard, mais ça, Jules devait certainement le savoir. Quelques larmes avaient déjà été versées devant des Disneys, à l’époque où elles pouvaient se permettre de se rendre au cinéma, alors des teen-movies ? des comédies romantiques ? C’était évident qu’elle avait déjà craqué devant l’un d’eux. « Oh merde, t’as raison, il va falloir que je fasse attention. Je deviens sentimentale ! » Comme si elle avait été capable de tenir longtemps le rôle de l’indifférente ou celui de la femme froide et distante … Nouveau sourire, mais plus timide lorsqu’elle laissa entendre qu’elle ne devait pas laisser indifférents les hommes de l’Ordre. Les compliments sur son sourire réconfortant ou sa douceur ne manquaient pas, en effet. Bien souvent, les rencontres avaient eu lieu à l’infirmerie – meilleur endroit pour rencontrer l’homme de sa vie, selon les dernières séries. « Personne ne résiste aux charmes de la douce médicomage, que veux-tu ! » Mais ses amourettes ne duraient jamais bien longtemps – comme celles des séries dont ils avaient récupéré les DVD, bizarrement. Elle espérait seulement qu’elle ne finirait pas comme les figures féminines de ces séries ou films …Clairement, elle espérait que son histoire à elle serait nettement meilleure. Si Bridget Jones avait eu son happy ending, elle avait bien toutes les chances pour le sien aussi, non ?

Jules quant à elle se projetait déjà à vivre avec un animal de compagnie, le projet de vie qui se tenait aussi. Il faudrait juste qu’elle accepte de partager l’attention avec une boule de poils. Elle y était bien parvenue avec ses poissons, l’adaptation ne devrait donc pas être bien compliquée. « Bon, on viendra peut-être un peu pour toi aussi. » ajouta-t-elle moqueuse. « Mais entre la mer au bout de terrain et le chien, clairement tu peux faire une croix sur les week-ends tranquilles à la maison ! » Tout cela ressemblait à un train de vie bien trop ordinaire pour la fugitive, le genre de quotidien qui lui manquait parfois, celui dont elle rêvait aussi. Celui la même qu’ils essayaient de recréer à leur façon dans les différentes planques disséminées ici et là sur le territoire britannique.

L’enthousiasme de la brunette retomba néanmoins lorsque les habitudes de Jules furent amenées sur la table. Elle ne pensait pas à mal, elle en était certaine, pourtant Vanessa ne put s’empêcher de répondre à ce point. « Personne ne souhaite te voir finir à Azkaban, moi la première. Venir te voir ici, c’était déjà délicat. J’ai toujours eu peur que tu sois sous surveillance ou bien avec du monde. J’imagine qu’aujourd’hui c’est une de ces rares journées où j’ai eu de la chance que ce ne soit pas le cas. Mais là-bas ? T'imagines ? » Impossible. Que l’un des membres de leur duo soit en cavale était déjà une complication conséquente dans leur amitié, mais si l’autre moitié finissait derrière les murs d’Azkaban, leurs chances de se revoir et de pouvoir profiter d’autres journées comme celle-ci disparaitraient aussitôt. « Profite de la vie, de ta liberté. Amuse-toi autant que tu le veux, mais ne te mets en danger inutilement, ça ne vaut pas le coût. » Son statut de joueuse de Quidditch lui laissait accès à bien des distractions, à une liberté de mouvements bien plus importante que la sienne. Est-ce que tout sacrifier quand elle faisait partie de ces « intouchables » était une chose raisonnable ? Elle en doutait. « Tu restes loin des problèmes et d’Azkaban, et je fais un effort pour venir plus souvent. Ça te semble raisonnable comme deal ? » Vanessa Devon en train de faire du chantage, ça faisait longtemps qu’elle ne s’était prêtée à l’exercice, elle espérait donc que l’argument avancé serait suffisant. « En plus, si tu adoptes un chien, tu peux pas finir à Azkaban, tu dois être responsable. » Ok, meilleur argument que le précédent, elle en était même plus satisfaite. Peut-être aurait-elle dû commencer par celui-ci ?

Vanessa aurait été bien incapable de refuser l’invitation, déjà parce que la séparation avec Jules avait été bien trop longue et ensuite parce que son estomac semblait d’avis que quitter le pays de Galle de sitôt aurait été de mauvais goût. « Ok, alors qu’est-ce-que tu proposes ? J’ai pas eu l’occasion de tester beaucoup de restaurants, encore moins dans le coin, ces derniers temps, donc je m’en remets à ton expertise. » Elle lui aurait même proposé une assiette de pâtes avec du jambon, qu’elle aurait accepté avec plaisir. Juste pour profiter un peu plus de cette bouffée d’air frais.

( Pando )