tw: death mention, suicide ideation

Les premières Battues d’Aoife se rapprochent. On essaye de lui dire que ça va bien se passer, qu’elle va survivre - qu’elle doit survivre, le mythe étant que Zabini puisse ramener à la vie les plus récalcitrants des prisonniers, au besoin. Qu’elle va devoir courir, et souffrir, et se cacher, et hurler au cas où. Mais qu’ils vont survivre, ensemble. Et même, si elle se sent de se donner en spectacle, il est possible qu’elle tape dans l’oeil d’un riche sorcier et qu’il se mette en tête de la sponsoriser à coup de cadeaux bien pensés.

Wait… people watch this? For fun? On lui a répondu de quelques haussements d’épaule évasifs, des regards fuyants.

Elle s’est surprise elle-même à recommencer à prier, certains jours. C’est quelque chose qu’elle ne fait pas depuis des années, elle a perdu l’habitude et l’envie mais, de plus en plus, elle se retrouve à serrer entre ses doigts la croix qui a toujours pendu autour de son cou et à fermer les yeux. Aoife sait depuis des années que ça ne sert à rien de prier pour sa salvation et qu’elle ne viendra jamais - à la place, elle prie pour la sécurité de ses amis, pour Baruch, pour Numa, pour Atticus, pour Savage, pour Sofiane, pour… pour Rivage. Pour l’âme de Rivage.

C’est les pires nuits, celles-là, quand elle se permet à penser à son ami dont on ne pourra même pas enterrer le corps. Elle a déjà pleuré toutes les larmes de son corps, ça ne sert plus à rien maintenant; mais toujours elles coulent, silencieusement maintenant pour ne pas déranger personne, alors qu’elle se roule en boule sur sa couchette de fortune en serrant sa croix dans ses mains et en oubliant la dernière image qu’elle a de Riv gravée sur la rétine.

“Aoife?” Elle sursaute en entendant son prénom, quoique sciemment mal prononcé par Joy, qui s’approche d’elle. Ca lui arrive de plus en plus, comme avant: elle s’assied et s’abîme dans la contemplation des vagues qui s’échinent sur l’île, depuis le haut de la légère falaise qui constitue une partie de l’île. Souvent, elle se demande si ce serait si douloureux que ça de se jeter dans l’eau. Souvent, elle se demande si elle préférerait finir dans les vagues ou contre les rochers. “What’s wrong, Joy?” Elle se demande si les Battues vont commencer, si c’est pour ça qu’elle est venue la chercher. A la place son amie s’approche, pose une main sur son épaule. “New people came in and I think they were with you… you said you were with a group of hybrids, right?”

Elle a failli se casser en deux à cause de la vague de soulagement qui s’est abattue sur elle - voilà pourquoi elle ne pourra jamais clâmer une place au paradis. Certains de ses amis se sont fait prendre, peut-être torturer et elle est… rassurée? Soulagée? Contente, presque, hâtant le pas jusqu’au village même si son esprit bourdonne. Elle n’est pas seule, elle n’a plus à être seule. Riv est mort, Chaghan ne veut pas lui adresser la parole et peut-être… elle ignore qui elle voudrait voir, et se sent coupable à l’idée de seulement entretenir cette idée. Elle aurait préféré que ses amis s’échappent, bien sûr, que ses amis vivent mais… Mais…

Aoife sent son coeur s’arrêter quand elle reconnait la silhouette de Sofiane, et ses longs cheveux noirs battus par le vent peu clément d’Ecosse.

“Sofiane?” Elle en a le voix éteinte, en plus du souffle coupé, et ouvre de grands yeux en accélérant automatiquement, étrangère à Joy à côté d’elle qui la suit. “Sofiane!” répète-t-elle d’une voix qui porte un peu plus, et il se retourne et c’est lui.

Elle ne réfléchit même pas en courant les quelques mètres les séparant. Elle a l’impression de se débarrasser de quelque chose à chaque pas qu’elle fait dans sa direction - sa douleur, sa solitude, sa culpabilité, sa peur. Si bien qu’elle lui rentre dedans sans réfléchir, se sentant aussi légère que quand elle était pendue à ses lèvres. “Sofiane,” répète-t-elle sans y croire, refermant son bras valide autour de lui, enfonçant ses doigts dans ses épaules en le serrant contre elle - elle sent aussitôt les larmes monter et lui chauffer le visage, lui piquer le nez désagréablement. Mais elle n’a ni le temps d’avoir honte ou peur, parce qu’il est là, et qu’elle devrait terriblement s’en vouloir d’être ainsi heureuse, mais elle est tout simplement soulagée, se lovant dans ses bras et son odeur avec désespoir.

Découvrir Savage à ses côtés a été certainement aussi désagréable que la série de Crucio diffusée dans sa chair lors de l’assaut combiné des Warlocks et de la VB. Parce que cela signifie qu’il n’a pu leur donner assez de temps pour s’enfuir ; que même mettre au service de ceux qu’il a fini par considérer comme les siens, des années de violence expérimentée et de rage explosive, a été vain. Qu’il n’y a aucun bon outil pour lutter contre ce qui se referme progressivement sur les gens comme eux - et qui s’est définitivement enroulé autour de Sofiane et Savage, désormais. Il n’y a qu’eux deux, du petit groupe restreint de la NSFW qui avait échappé au mariage Travers-Abbott puis à la première attaque de la Brigade, dans ce qui semble être un manoir où ils ont été amenés après de (trop) longues sessions d’interrogatoires musclés.

Des années à glisser entre les mailles du filet avec agilité, à mener une vie qui n’en était pas vraiment une, pour voir ce qu’il redoutait le plus se dérouler devant ses yeux impuissants en quelques mois à peine. Mais Sofiane réalise, alors qu’il signe, le visage fermé et douloureux, une multitude de papiers qu’on l’enjoint à approuver, qu’il ne ressent aucune forme d’amertume envers lui-même. Pour la première fois de sa vie, il s’est battu, plutôt que de fuir ; et c’est vivant, qu’il est tombé au combat, vibrant d’une volonté, d’une hargne, d’une détermination, qui lui ont données l’impression d’être quelque chose, quelqu’un, au-delà de la violence et de son statut. Quand bien même il a échoué (en partie, du moins), il a échoué en luttant, à défaut de simplement glisser hors des radars. Alors, Sofiane a serré les dents, retenant avec peine quelques gémissements de douleur, quand on a marqué la peau de son visage d’un triangle marron qui l’a effrayé si longtemps. Il n’a plus peur, désormais, s’appropriant la souffrance qui se diffuse dans tout son visage, même quelques jours après la pose du tatouage magique.

On ne leur explique rien, ni en les menant au manoir, ni lorsqu’ils sont guidés, avec Savage et un petit groupe d’inconnus, jusqu’à un village de fortune érigé au milieu de l’île où ils semblent se trouver. Et Sofiane n’a pas besoin qu’on lui explique quoi que ce soit : il se doute bien qu’il ne s’agit pas là d’un camp de vacances, et qu’échapper à la prison ne signifie certainement pas se voir offrir l’opportunité de vivre en toute sérénité sur une île coupée du reste du monde. Il coule un regard en direction de la Halfer à ses côtés. ”Keep your head up”, lui adresse-t-il discrètement sur le chemin, plantant fermement ses pupilles dans les siennes. Il sait pertinemment que Savage n’a pas besoin de ses paroles, n’a pas besoin de lui de manière générale ; mais il peut presque sentir l’appréhension et la rage dans le parfum qu’elle dégage. Ils sont tout ce qui leur reste de leur meute, et son we’re in this together de loup, semblable à son museau cherchant à redresser le sien, l’enjoint à rester fière, à ses côtés, face à cette situation oppressante.

Leurs accompagnateurs disparaissent, les lâchant pour de bon au cœur de ce petit village, où ils sont accueillis par d'autres “captifs”, leur explique-t-on rapidement. Sofiane reste en retrait après de brèves et lourdes présentations, près de Savage, cherchant difficilement recoller les morceaux à travers les explications évasives de leurs hôtes, écoutant avec attention les questions posées par le reste du groupe - et accusant la foule d’émotions flottant dans l’air. Ses yeux ne cessent de revenir à Savage, au fur et à mesure que des mots trop flous leur sont abattus - élite, chassés, survie. ”Sofiane?” Le coeur du lycanthrope rate un battement furieux, bloquant un instant sa respiration en pensant reconnaître- ”Sofiane!”

En rencontrant le regard d’Aoife, une tempête explose dans sa chair, le laissant sans voix, peinant à croire que sa fatigue ne lui joue pas un tour cruel. Il lui faut une seconde pour refermer ses bras dans son dos lorsqu’elle se jette contre lui, ses mains s’accrochant de manière imprévisible à ses épaules, ses côtes, ses hanches, ses cheveux, tout ce qu’il peut trouver pour avoir une preuve qu’elle est bien réelle, tangible, contre lui. Il se détache tout juste d’elle pour glisser ses doigts jusqu’à ses joues, encadrant son visage pour le détailler de ses yeux sombres, récoltant chaque détail qu’il y trouve - ses cernes, ses yeux rougis, la marque bleue sous sa pommette, ses pupilles, ce même océan perdu il y a un mois de cela, dans lequel il peut plonger de nouveau sans retenue.

”Aoife, what...” Son ventre se tord, une sensation violente remplaçant le soulagement de la voir en vie de ses propres yeux, de la retrouver. Parce que, au fond de lui, il aurait préféré la savoir à l’abri dans une cellule que de la découvrir sur cette île d’où émane des effluves de danger et de mort. Il ne finit pourtant pas sa phrase, préférant la pression de nouveau contre lui en fermant les yeux contre son cou, y inspirant sa précieuse odeur. ”They got us too”, finit par grogner Sofiane dans ses cheveux, avant de s’éloigner de quelques centimètre, gardant ses bras en bas de son dos pour la garder près de lui - il ne la laissera plus jamais lui échapper, désormais. Son regard dérive jusqu’à Savage, la désignant faiblement du menton à Aoife. ”But we’re here now, we’re together, alright?” Tous les trois - les dernières miettes de leur meute éclatée.

tw: torture mention

Le reste n'avait été qu'une succession de battements de cœur furieux, de cris, de sortilèges brûlants à même sa peau, de douleur, d'humiliation cuisante, mêlée à cette peur vertigineuse d'être foutue et le maigre espoir qu'il y aurait encore une maille assez lâche, dans le filet resserré de son transfert, pour s'y faufiler et retrouver Numa.

Numa. Numa. Numa. Numa et les autres ; le dernier regard qu'il lui avait adressé, avant qu'elle n'en soit arrachée, la suivait comme une lueur d'espérance, l'ultime éclat de lumière auquel se raccrocher – Numa, Numa ; elle avait gardé les yeux rivés au plafond, s'aveuglant avec la lampe, comme pour y retrouver ses yeux noirs, déterminés, tandis qu'elle serrait les dents, retenant ses larmes de rage, bâillonnée par un sortilège qu'on lui avait administré pour l'empêcher de hurler, tandis qu'on la marquait au sein d'un bâtiment énorme, qu'elle avait identifié comme le Ministère.

La honte lui brûla la joue avec violence, ravivant le feu de peurs tues durant des années de cavale – se faire prendre, marquer comme du bétail, mettre en cage, perdre sa liberté, être une bête. Savage savait qu'allait mourir ; si ce n'était complètement, elle mourrait de l'intérieur, ainsi matée par un système qu'elle s'acharnait à déchiqueter avec une rage qui n'avait pas suffi.
On la força à parler, arrachant entre ses dents serrées la confession qu'elle assistait Numa, et qu'ils pouvaient aller se faire foutre. Numa, Numa, Numa ; Savage s'accrocha à son nom lorsque cette fois il ne lui resta plus que quatre de ses sens, la vue retirée par les impacts virulents des sortilèges d'interrogatoire, irradiant sa chair en lui tirant des glapissements de douleur.

On la sortit de la salle groggy, déphasée, le corps et l'esprit engourdis par les mots pressés à même son crâne, comme une voix collée entre ses synapses, une sensation aussi désagréable que la présence du tatouage sur son visage (le symbole d'un échec, et d'une autre forme de mort, en soi). ”Keep your head up.” Elle n'était pas seule – et ils n'étaient que deux, cette dure réalité frappée par la voix basse de Sofiane. ”Shut up.” De sa bouche pâteuse avait filé une réponse dénuée d'animosité, ses yeux récupérant lentement leur focus au fil de leurs pas ; elle se rendit compte qu'elle s'était ramassée sur elle-même, les mains liées par un sortilège crépitant sur ses poignets, et se rendit compte avec d'autant plus d'effroi qu'elle se foutait d'avoir l'échine courbée sous le regard de leurs geôliers.

Elle était marquée, elle avait perdu Numa, elle avait perdu les siens, elle n'était plus rien ; et pourtant, pourtant Savage sentait encore brûler en elle une rage mordante, au-delà de ses membres engourdis par les multiples chocs physiques reçus depuis des heures (la veille ? Elle n'avait aucune notion du temps). They'll never break you. Us. We'll carry on our legacy, and there's no one to stop us. Les paroles de Numa tournaient comme un mantra au sein de son crâne – puis il y eut un éclair vert, une odeur de suie, et Savage plissa les yeux sous la lumière blanche de l'extérieur, relevant la tête pour englober maladroitement sa première vision de Gracefield.

On libéra ses poignets, et les uniformes disparurent en des craquements sonores ; lorsque Savage tourna de nouveau son regard vers la place où on les avait lâchés, elle se sentit alerte, sur les nerfs, ses sens ravivés par la situation d'urgence que présentait ce retournement de situation inattendu, surprenant. Où étaient-ils ? On répondit à sa question avant qu'elle ne la pose ; des discours rodés, semblait-il, que Savage écouta, abasourdie par cet enchaînement brutal, insensé. Elle aurait dû croupir à Azkaban, être retenue des jours au Ministère, être exécutée – et son incompréhension éclata, comme toujours, par une rage intempestive. ”What the fuck is this? You're fucking shitting us?” ”I understand you may feel lost and confused...” ”Shut the fuck up with your psychowizard bullshit, what the fuck is this? Who the fucking shit are you? This is fucking nonsense, why aren't we in fucking jail?” ”Sofiane? Sofiane!” La voix familière fit crépiter sous sa peau un mélange d'appréhension et d'espoir – et lorsque les yeux de Savage tombèrent sur les cheveux blonds d'Aoife, lancée à toute vitesse dans leur direction, elle sentit un tumulte confus, de soulagement, de crainte, de peut-être.
Aoife était vivante ; et alors peut-être que Rivage, peut-être que Chaghan, peut-être que les autres étaient avec elle, qu'elle leur annoncerait bientôt que les disparus de la NSFW étaient avec elle.

”Fuck”, souffla-t-elle en regardant les hybrides s'étreindre de longues secondes, sentant son tatouage pulser à même sa joue ; elle s'était saigné la peau, à force de se gratter pour l'enlever, jusqu'à ce qu'on lui attache les mains. Puis le regard de Sofiane accrocha de nouveau le sien, et celui de Savage fila directement sur Aoife. ”But we’re here now, we’re together, alright?” Together? ”Are the others with you?” Sa respiration était courte, bondissant au rythme de son cœur éreinté par ce haut inespéré au milieu de la tempête d'absurdités dont on venait de les baigner ; elle planta son regard dans les yeux clairs d'Aoife, sans s'encombrer des retrouvailles entre les deux hybrides. ”Is this where everyone went? They're all here? Where's Riv?” Si elle avait d'abord cherché la réponse dans les yeux de la Selkie, elle tourna bien rapidement son regard vers le village et les maisons primaires, au parfum d'insalubre, qui constituaient le décor de ce paysage morose.

tw: death mention

Les mains de Sofiane qui s'accrochent à elle la reconstruisent bout par bout, réassemblent les morceaux qu'elle a perdu ces dernières semaines, alors qu'elle était seule, terriblement seule, véritablement seule, errant dans un monde inconnu, violent et dangereux sans savoir quoi y faire. Pendant un temps, elle est parvenue à garder un modicum d'espoir, grâce à Stephen, grâce à Riv et puis... et puis tout s'est écroulé. Et le pire, dans tout ça, c'est qu'il serait difficile de blâmer quiconque d'autre qu'elle-même pour sa négligence, son hubris. C'est elle qui a fauté, elle le sait. C'est de sa faute, et jamais elle ne se le pardonnera.

Mais pour la première fois depuis la nuit fatidique où elle a perdu son dernier ami sur terre, Aoife pense à autre chose. Pressée contre Sofiane comme si elle voulait se perdre dans son corps, hoquetant difficilement en sentant déjà des sanglots de soulagement et de confusion l'agiter toute entière, étranglée quand ils se détachent légèrement pour se regarder. Elle prend son visage entre ses mains elle aussi, glissent ses doigts dans sa barbe, menace d'effleurer la marque marron qui s'étale en triangle sur sa joue, comme la sienne, bleu clair. Il est si beau, même comme ça, même avec ses yeux nerveux et son air revêche, ses cernes qui témoignent qu'il n'a pas dû beaucoup dormir ces derniers jours. Il est si beau et il est là et Aoife s'en veut terriblement de ce soulagement intrusif qu'elle ressent, ce véritable contentement à l'idée qu'elle n'est plus seule.

La voix de sa mère lui souffle qu'elle n'est jamais seule: qu'elle porte son père avec elle, tout comme elle porte Douglas, tout comme elle porte Riv. Elle se demande si elle l'observe, de là où il est, si il lui en veut d'être restée en vie, et si il est rassuré de savoir qu'elle ne va pas mourir seule. Aoife sait que ces idées sont terriblement égoïstes et cruelles - deux défauts qu'on ne lui a jamais accordé, mais dont elle sait qu'elle a toujours souffert, en demi-teinte, derrière ses sourires placides et ses yeux humides. Comme si cette île de malheur faisait ressortir tous ces traits qu'elle déteste chez elle. D'après certains, c'est ce que Gracefield fait à tout le monde: chez Zabini, l'âme est mise à nu, dépouillée de toute humanité, et sacrifiée sur l'autel du divertissement.

”Aoife, what...” Les doigts d'Aoife s'accrochent à son cou et s'y enfoncent, et un sanglot lui échappe quand il la ramène contre lui et qu'elle ferme les yeux, bercée par ses bras et la force avec laquelle il la tient. "Sofiane, I'm- I'm..." Elle ne parvient pas à finir sa phrase, honteuse de ce déluge de sentiments paradoxaux qu'elle ressent et la font chavirer douloureusement. ”They got us too.” Un nouveau tremblement agite Aoife et elle enfonce ses doigts qui ont finit sur ses épaules, à travers sa veste. "I'm sorry," marmonne-t-elle contre son épaule, ayant du mal à se défaire de son étreinte - et étant parfaitement incapable de le lâcher, maintenant qu'elle l'a retrouvé, ses doigts à plat sur son torse. "I'm so sorry." Désolée qu'ils aient été rattrapés par la police; désolée de les trouver là; désolée d'être soulagée.  Aoife suit Sofiane du regard, et son coeur tombe dans sa poitrine en croisant les yeux sombres de Sav. ”But we’re here now, we’re together, alright?”

Aoife sent les larmes remonter aussi vite qu'elles se sont calmées silencieusement dans les bras de Sofiane, et elle en perd le souffle un bref instant. ”Are the others with you? - I... I..." Quand Sav la regarde comme ça, elle est incapable d'aligner deux pensées cohérentes, surtout qu'elle n'a pas besoin de l'entendre pour connaître la suite: ”Is this where everyone went? They're all here? Where's Riv?” Aoife sent quelque chose se fendre en elle, une valve qui a été maltraitée ces derniers jours depuis... depuis...

Ses doigts se crispent dans les épaules de Sofiane. Elle connait Sav depuis des années et pourtant, elle est incapable du moindre mouvement dans sa direction. Et si elle ressent une profonde tristesse à l'idée de la disparition violente de Riv, et si elle ressent une certaine compassion pour la chef démunie de la NSFW, elle réalise aussi qu'à ce cocktail déjà dangereux de sentiment s'est ajoutée une pointe d'amertume.

Aoife lui a dit que c'était une mauvaise idée. Et en plus de ne pas l'écouter, Sav l'a moquée, fait passer pour la dernière des idiotes, presque une lâche. C'est de sa faute si elle est là, de sa faute si Sofiane est là, de sa faute si elle a fini à Gracefield à aussi. De sa faute si Riv est mort. Tout est de la faute de son ego malmené par les bras de fer inhérents à la NSFW, ainsi que de la faute de sa soif de sang sourde et aveugle.

Les doigts d'Aoife s'enfoncent dans les épaules de Sofiane et elle détourne le regard. "He's gone." De sa voix ne sort qu'un gargouillis humide et plein de larmes et elle déglutit difficilement, s'éclaire la gorge. "Riv's gone," répète-t-elle d'une voix un peu plus forte, sentant déjà les larmes revenir lui piquer le nez et réchauffer ses joues. "He- I... I'm sorry, Riv's gone, he's dead, there was..." C'est de la faute de Sav, mais Aoife sait que c'est aussi de sa faute à elle, alors elle se tait, sa bouche se pinçant légèrement. Les yeux rivés sur ses propres mains tremblantes et pâles. Autour d'eux, le petit groupe qui a accueilli Sofiane et Sav reste silencieux, fort heureusement. Tout le monde a entendu parler de la mort de Rivage, Zabini en a fait tout un cirque, sans parvenir à trouver un coupable - la résistance sait que c'est Aoife, pourtant, tout le monde sait que c'est elle et Sav finira bien par l'apprendre... mais elle préfère être loin quand ce sera le cas. "Chaghan, he's the only one but he... I haven't spoken to him," marmonne-t-elle, en espérant que Sav ne l'entende pas, ses yeux toujours baissés et baignant de larmes brûlantes qui, bizarrement, ne semblent pas vouloir couler.

tw: death mention, crude language,
slight violence

Il y avait un souci - un énorme souci détecta Savage en voyant Aoife détourner le regard à sa question, son instinct la prenant au ventre, s'ajoutant aux douleurs ravageant son torse et sa joue encore fraîche du tatouage, où elle porta ses ongles courts pour l'y gratter (l'enlever, putain, quelle merde - elle n'allait pas devoir porté ces menottes à vie ?). "He's gone." La voix larmoyante de la Selkie fit froncer les sourcils de la Halfer, dont les traits se tirèrent en sentant sa peau résister sous les assauts de ses ongles, plus francs et plus vifs. "What? Where?" Ils l'avaient emmené ailleurs ? Azkaban ? Une autre île du même genre ? Ou alors, était-il parvenu à s'enfuir ? Il y avait un espoir, alors, Rivage ne les laisserait jamais seuls, derrière lui - il était aussi borné que revêche"Riv's gone."

L'espoir rageur né dans son torse se fracassa violemment contre la voix retrouvée d'Aoife.
"What?" C'était du délire ; son regard valsa jusqu'à Sofiane, à la recherche de la confirmation que sa copine avait tout simplement pété un boulon - elle eut une expiration brève, un rictus d'incompréhension aux lèvres. Ce gone ne sonnait plus exactement comme une fuite réussie, désormais. "Yeah, I got that", répondit-elle en s'acharnant contre le sale pressentiment lui creusant le ventre.

"He- I... I'm sorry, Riv's gone, he's dead, there was..."
Riv's gone. Savage laissa retomber sa main, abandonnant le tatouage brûlant - ses yeux harponnèrent le profil d'Aoife, tandis que son visage plongeait, ses yeux fuyant les siens. "What the fuck are you saying?" Fucking coward, fucking liar - what the fuck ? Le rythme cardiaque de Savage s'emballa brusquement, diffusant une onde de chaleur brutale sous sa peau à vif. Dead. Non, non - non, Aoife racontait des cracks, non. "Chaghan, he's the only one but he... I haven't spoken to him." "No no, what the fuck, it's a fucking joke?" Son coeur martelait ses tempes et le picotement encore vif sur sa joue, sur son torse - elle peinait à chercher son souffle, son système respiratoire vrillé par la nouvelle - fuck, fuck, fuck, c'était impossible. C'était quoi, cette putain d'embrouille ? Elle avait collaboré avec le système et était chargée de leur retourner le cerveau avec des conneries ?

Elle ne la regardait pas - comme toujours, putain, elle fuyait toujours son regard comme si elle ne lui devait rien, ni respect, ni obéissance, une lâche en plus d'une traîtresse. "Look at me,", grogna-t-elle en lui attrapant le bras sans douceur, tordant la peau claire de l'Irlandaise pour raccrocher son regard au sien - Aoife était une piètre menteuse (une âme pure, corrigeait Numa dans sa grande mansuétude), et il lui suffirait de voir ses yeux pour y déceler le mensonge.

Il y avait dans ses yeux tant de larmes sincères que Savage sentit son coeur se tordre, frappée en plein thorax en y découvrant le goût amer de la vérité. "You're fucking kidding", souffla-t-elle en secouant d'un geste brute son bas entre ses doigts, comme pour contrer sa voix branlante sous le choc. "He can't be dead, what the fuck? Why are you fucking lying?" Et sa question s'écrasa sur un déglutissement intempestif, réclamé par son corps brutalisé par ce foudroiement soudain, les yeux de Savage déchiquetant le beau visage d'Aoife à la recherche d'une explication.