Après avoir écouté trois fois d’affilée le message de la Beuglante qui a volé jusqu’à chez elle, Carrie la déchiquète méthodiquement pendant environ cinq minutes, le temps d’en faire une pluie de confettis qu’elle envoie valser en direction de la corbeille d’un mouvement magique de la main. Une fois son bureau débarrassé, elle y appuie ses coudes et enfonce son visage dans ses paumes pour y réfléchir.
Elle laisse généralement les affaires générales de fric et de petty fights aux Dogs du gang, Jin ayant tendance à lui reprocher de s’intéresser d’un peu trop près à toutes les affaires du gang. Déléguer n’est pas quelque chose qu’elle fait naturellement, mais qu’elle a dû apprendre à supporter à moins de devenir folle - de toutes façons, avec toutes les petites mains, importantes ou non, faisant partie du gang, elle aurait bien du mal à garder la tête hors de l’eau. Mais cette affaire-là est particulière: une bande de gamins désoeuvrés aux ambitions démesurées pour laquelle elle s’est mouillée et en qui elle a placé un modicum de confiance, leur donnant une chance là où le reste du monde leur avait craché à la gueule.
Et comme tous les gamins désoeuvrés aux ambitions démesurées, ils ont fini par se retourner contre eux - contre elle. La trahison laisse un goût d’amertume dans le fond de la bouche de Carrie, et l’ironie d’une bande de gamins essayant de faire régner sa loi sur les Warlocks en allant contre eux lui échappe tout à fait.

Au bout de longues minutes passées à se masser les paupières, Carrie écrit elle aussi une Beuglante qu’elle envoie au Dog qui est entré en contact avec elle directement. Ce n’est pas une situation qui mérite de s’alanguir, à moins qu’ils ne perdent un peu du respect terrifié que les bandes de gamins du genre qu’ils emploient parfois leur vouent. Elle est tentée d’aller au Phoenix rassembler quelques têtes et les envoyer s’en occuper, ou même informer quelqu’un d’autre pour s’en charger - elle a, après tout, des plans ce soir - mais la trahison la laisse encore amère et plus retorse que d’habitude. Elle ira elle-même et, elle réalise quand elle entend la clef dans la porte d’entrée, peut-être qu’elle ne sera pas seule.
Carrie finit de plier rigoureusement sa Beuglante en forme de tête de renard et jette un regard en biais à Bao qui apparaît derrière la porte d’entrée. Inutile de jeter un coup d’oeil à la montre à son poignet pour savoir qu’elle est en retard, et inutile de le lui reprocher aussi: certaines choses sont immuables et ne changeront jamais, et Carrie trouve un certain réconfort dans l’idée que Bao sera, somme toute, toujours fidèle à elle-même.

Après avoir passé une semaine chez Kamala et Elias, Carrie a remis la main sur le propriétaire du studio qu’elle a loué pendant quelques mois il y a plus d’un an, et a récupéré les clefs plutôt facilement (quoiqu’après avoir envoyé deux Dogs le secouer dans tous les sens et le menacer, il aurait été de mauvais goût de ne pas virer les actuels locataires et de ne pas exaucer le moindre de ses voeux). Bien décidée à ne pas croiser Jin, elle a fait livrer ses vêtements et ses vinyles, et refuse même de se présenter au Phoenix pour partager son bureau avec Kamala: après tout, plus que jamais, la VB rôde même dans les tréfonds de Knockturn Alley et il est hors de question qu’elle se fasse choper et tatouer par le Gouvernement. Pour la première fois de sa vie, Carrie apprécie d’être seule. Même si cette solitude est toute relative, puisqu’elle a donné un double des clefs à Bao et que celle-ci a la fâcheuse tendance d’occuper ses pensées quand elle ne se trouve pas dans la même pièce.

“Wait.” Elle accroche sa Beuglante à la patte de la chouette attendant sagement près de la fenêtre, et la pousse sans douceur à travers avant de claquer le battant. “We’re going out,” précise-t-elle en regardant Bao commencer à retirer sa veste. Elle s’approche d’elle avec un visage impassible - comme si il n’y avait absolument rien d’étrange ou d’inattendu à ce qu’elle vient de dire -, attrapant son propre manteau et glissant ses pieds dans ses chaussures. “There’s something I need to do. After that, we could…” Ses yeux papillonnent, et ses sourcils se froncent. “I don’t know.” Elle n’est pas tellement du genre à sortir, ou à faire quoique ce soit, encore moins avec Bao - la pensée est suffisamment ridicule pour lui arracher un très léger sourire distrait alors qu’elle noue ses lacets d’un sortilège du bout des doigts. “You can help,” décide-t-elle en se voyant déjà donner une bonne leçon à cette bande de gamins et leur leader, Darcy. Elle ouvre l’un des tiroirs du buffet et en sort ses boucles d’oreille, qu’elle met rapidement, ainsi qu’un poing américain plaqué or (cadeau de Stan) qu’elle glisse dans la poche de son manteau.

Carrie fronce des sourcils en faisant volte-face pour regarder Bao, et l’étudie de la tête aux pieds. Il est difficile pour être d’admettre qu’elle est contente de la présence de Bao - que ce soit à l’intérieur du studio ou dans sa vie. Que ce qu’elle vit avec elle est stupide, mais inédit et mérité - qu’elle en a marre, de s’interdire une pulsion du genre quand Kamala n’en fait qu’à sa tête et que Jin a apparemment décidé d’être un connard fini.
Carrie sait ce qu’elle fait, que ce soit avec l’opium ou avec Bao, alors pour une fois, elle n’a pas peur des conséquences quand elle s’approche de la Wang pour attraper les revers de sa veste et la forcer à se baisser un peu pour l’embrasser. “It won’t be long,” promet-elle en se détachant rapidement. “We can do whatever you want afterwards.” Elle ne relâche pas le col de sa veste en baissant les yeux dessus, fronçant les sourcils d’autant plus en laissant ses pouces en éprouver le cuir. “That’s new.” Elle la relâche et s’éloigne, la détaillant de nouveau avec un intérêt non-feint. “It looks good on you.”

Pour une fois que tout se déroule sans embûche, Bao trouve tout de même le moyen de soupirer bruyamment lorsqu’ils rentrent à l’appartement et qu’elle file s’enfermer dans la salle de bain sans demander son reste. Bien sûr, qu’elle aurait également soupiré si elle avait dû se débarrasser seule de corps encombrants ; mais il n’est pas inconnu qu’elle préfère largement quand un peu d’action se jette sur son chemin et qu’elle peut s’échauffer contre les dangers se dressant contre le Clan. Lorsqu’elle venait à se plaindre du calme irritant de certaines de ses journées, Wei prenait toujours le temps de lui rappeler que cela signifiait qu’elle avait bien fait son travail - qu’elle a été dressée pour cela, après tout, s’assurer de la sécurité de ses frères et soeurs, et que tous ceux qu’elle accompagne rentrent en un seul morceau. Maintenant que Wei n’est plus, le calme en est presque étouffant pour Bao, et elle s’applique à rincer sa frustration sous la douche, laissant le jet d’eau sur son visage la débarrasser de ce poisseux sentiment d’inutilité.

Avant de franchir la porte de l’appartement familial, elle s’est faite arrêter par un Quon la dévisageant de la tête aux pieds, puis la renvoyant dans sa chambre pour enfiler les vêtements ringards qu’il a cru bon de lui acheter il y a peu. "You’re not going on a date dressed like that. − It’s not a date what the fuck.” A ce stade, Bao se demande pourquoi elle écoute encore ses frères ; et pourtant, docilement, elle a fait demi-tour, se changeant promptement pour revenir devant un Quon satisfait, lui expliquant encore pourquoi cette tenue était bien mieux que la précédente lorsqu’elle a refermé sur lui la porte d’entrée.

Dans la foule des sentiments qui l’assaillent ces derniers temps, voir ses frères se mêler de ce qu’elle a retrouvé auprès de Carrie est certainement l’un des plus désagréables. Ils ne comprennent pas et ne comprendront jamais, à essayer de réduire ce que les deux sorcières ont à leur vision étriquée des relations humaines. Cela ne les regarde en aucun cas, cela ne regarde personne - cela ne les regarde même pas elles-mêmes, qui ne s’arrêtent jamais sur la nature de ce qu’elles entretiennent à nouveau depuis quelques semaines. De fait, Bao n’en pense rien, si ce n’est que voir la Fox des Warlocks lui fait du bien, et qu’elle baigne volontiers dans ce refuge que cette dernière lui a offert en lui cédant un double des clés de l’appartement où elles se retrouvaient autrefois.

”Wait.” Bao lève ses grands yeux vers Carrie, s’arrêtant dans son impulsion pour refermer la porte derrière elle. ”What? − We’re going out”, répond la sorcière en s’approchant d’elle ; et de nouveau, Bao s’immobilise dans son geste, sa veste à moitié retirée quand elle fronce les sourcils en penchant la tête sur le côté. Sortir ? Elles ne sont jamais sorties, se rend compte Bao, cela ne fait certainement pas partie du spectre restreint des habitudes qui s’installent à nouveau. C’est du moins assez inhabituel pour qu’elle se retrouve figée dans cette expression confuse, à dévisager Carrie dans l’attente d’une réponse à son interrogation silencieuse. ”There’s something I need to do. After that, we could… I don’t know.” Carrie veut que Bao l’accompagne faire quelque chose, et cette dernière fronce un peu plus les sourcils sous l’accélération soudaine de son coeur à ce simple constat. L’imprévu, de manière générale, la plonge toujours dans une forme sensible de malaise, la poussant bien souvent à aboyer sur les autres pour obtenir un semblant de réponse. Avec Carrie, évidemment, tout est différent, et l’a toujours été. Plutôt qu’une désagréable gêne, se glisse dans son crâne la sensation familière de l’impatience. ”You can help. − Help?”, répète-t-elle en remontant sa veste sur ses épaules, la bouche légèrement ouverte alors qu’elle continue à couvrir la demi-Vélane de son regard interrogateur - et elle ne manque pas de l’observer glisser dans la poche de son manteau un objets métallique doré, qu’elle identifie aussitôt comme un poing américain. Oh. Qu’est-ce que-

Bao n’a pas le temps de s’interroger plus qu’elle rencontre à nouveau le regard de Carrie, un moyen beaucoup trop efficace pour imposer le silence à son esprit, d’autant plus quand elle l’attrape par le col, l’intimant à se pencher tout juste pour saisir ses lèvres, inspirant un instant contre ces derrières alors qu’elle referme une main sur sa hanche. Comme toujours, la Wang étire la nuque lorsque Carrie se détache, cherchant à prolonger vainement le baiser dans lequel elle se serait bien perdue quelques secondes de plus. ”It won’t be long. We can do whatever you want afterwards.” Les yeux de Bao s’arrondissent quelque peu en l’entendant ; elle a en effet, une idée très précise de ce qu’elle souhaiterait faire lorsqu’elles seront rentrées de cette escapade mystère - l’une des multiples raisons pour lesquelles elle ne cesse d’ailleurs de faire usage de ce double de clés.

”That’s new. − Hm?” Elle revient au regard de Carrie, le suivant jusqu’à la veste en cuir qu’elle porte sur le dos. ”Oh. Yes. − It looks good on you.” Bao n’a jamais su réagir aux compliments, et celui-ci la laisse une seconde idiote, ses pupilles passant du vêtement à la Warlocks ; elle y répond par un haussement d’épaules, peinant à contenir la naissance d’un sourire au coin de ses lèvres. Peut-être a-t-elle bien fait de se plier aux insistances de Quon, finalement - elle se gardera cependant de le lui dire, pour éviter d’affronter son rictus fier et ses questions dérangeantes.
Bao inspecte rapidement d’un geste réflexe sa taille, vérifiant la présence de sa baguette dans son étui, et des Qiu de l’autre côté, dans la petite poche en cuir accrochée à sa ceinture - comme si elle se séparait jamais de ses armes. Et plutôt que de chercher à en savoir plus, elle tend la main à Carrie, la détaillant un instant du regard avant de demander simplement : ”So, where are we going?”

Elles apparaissent dans un craquement au coin d’une rue pour le moins douteuse, déjà plongée dans l’obscurité, uniquement éclairée par un lampadaire clignotant. L’endroit est vraisemblablement désert, et sensiblement silencieux ; déjà, le regard de Bao sonde les lieux, avant de revenir vers la sorcière dans un froncement de sourcils, plus curieux que sévère. ”Okay, now what the fuck are we doing here?” Et ce n’est qu’à ce moment qu’elle réalise que la paume de Carrie est encore dans la sienne, un contact éloquent qui attire ses pupilles sombres. Aussitôt, Bao la lâche pour ramener ses doigts à sa ceinture dans un raclement de gorge discret, ces derniers se refermant nerveusement sur l’étui de sa baguette.

tw: violence, crude language

Bao ne répond pas à son petit commentaire appréciateur, mais le sourire que Carrie discerne au fond de ses yeux lui suffit, réveillant un léger rictus satisfait sur son visage à elle. Elle finit rapidement de rassembler ses affaires, fait glisser un trait de rouge à lèvres sur sa bouche et replace une mèche de cheveux blonds derrière son oreille après s’être observée dans le miroir de l’entrée avant de se tourner vers Bao, attrapant avec un temps de retard la main qu’elle lui tend. Bao a la paume un peu plus douce que ce qu’elle aurait imaginé quand elle est appuyée contre la sienne, une information qu’elle garde pour elle et range dans un coin de son esprit - celui où tourbillonnent les sourires de Bao, rares et satisfaisants. ”So, where are we going?” Carrie retient à grand mal un petit sourire de venir éclairer son visage de nouveau. “Peckham in South London. Just apparate, I’ll guide us through.” Ne sachant pas transplaner, elle a devisé cette technique avec Maxim et Jin il y a des années pour l’aider à se déplacer sans finir en mille morceaux - les rares fois où elle s’est chargée d’un transplanage toute seule, Carrie a failli se désartibuler et elle tient bien trop à ses sourcils pour les sacrifier de nouveau ainsi.

Carrie retient la nausée qui lui tord le ventre en sentant le sol qui se résorbe sous leurs pieds, et rouvre les yeux en sentant une bourrasque de vent lui frapper le visage, cillant légèrement en balayant les alentours du regard, soulagée de voir qu’elles sont entières et au bon endroit. Carrie plisse les yeux en essayant de distinguer quelque chose dans la ruelle - elle se souvient de la dernière fois qu’elle est venue, avec Maxim, rendre visite à la petite bande de gamins se faisant appeler les Rogues (cringe), et note avec déplaisir que l’endroit a toujours l’air aussi insalubre. ”Okay, now what the fuck are we doing here?” Les yeux de Carrie reviennent à Bao, laissant sa main retomber le long de son corps quand elle la relâche. Elle a un spasme du bout des doigts, malgré elle, et ferme le poing en l’enfonçant dans la poche de son manteau. “Relax, I just need to have some words with one of these kids. I have a couple of Dogs on the way, you can take a walk around the block if you’re too chicken to come, I’ll join you later,” réplique-t-elle en levant les yeux au ciel, tranquille face à la nervosité qu’elle peut lire dans la silhouette de Bao - inhabituelle, tout comme le reste de cette situation qui tire vers l’absurdité, mais étrangement intéressante.

Elle se détourne sans attendre, se mordant la lèvre pour réprimer un sourire en entendant les pas de Bao la suivre. Carrie agite rapidement sa main face à elle en se concentrant sur le lampadaire, marmonnant une formule sous sa respiration et ressentant une satisfaction intense quand la lumière s’éteint aussitôt. Se déplaçant avec précaution pour ne pas se tordre la cheville sur un morceau de rue inégal, elle finit par se hisser sur la pointe des pieds en espérant apercevoir quelque chose à travers la fenêtre barrée ornant la porte. Carrie déverrouille la porte d’un sortilège - après s’y être reprise à trois fois, sourcils froncés de frustration à chaque tentative - avant de jeter un regard à Bao par-dessus son épaule. “Now would be the time to take that out,” lui dit-elle en désignant sa baguette d’un mouvement de menton. “They can get pretty excited.”

L’endroit est désert, pourtant, quand elles y pénètrent silencieusement. Carrie voit les restes d’un repas ou d’un feu, des sacs de couchage délaissés, une pléthore d’autres objets qu’on a préféré laisser en arrière plutôt que prendre avec soi. Malgré l’apparence extérieure terriblement effrayante et humide, l’intérieur est un peu plus chaleureux, conservé par de la magie maladroite et des morceaux de cartons collés aux murs, les efforts de quelques gamins en fuite et leurs amis moldus. Cela rappelle à Carrie ses sombres années de Rat, à se cacher de la lumière et à dormir dos-à-dos avec Jin sur du carton détrempé, et elle fronce le nez en inspectant les alentours à la recherche de la trace des Rogues, qui auraient apparemment violenté quelques uns de ses Rats pour la deuxième fois en un mois, allant à l’encontre de l’accord qu’elle a généreusement passé avec eux. Ça lui apprendra de vouloir être sympathique une fois dans sa vie.

“Can you do a…” Elle fait un geste de la main à l’adresse de Bao, en regardant sa baguette. “I don’t know, a thing, a spell, to see where they are?” L'agacement qui transparaît dans sa voix est désagréable même pour elle, alors qu’elle s’enfonce dans ce qui semble être un entrepôt victorien délaissé depuis des années, abandonné à la moisissure et aux pauvres petits rats de Londres. Elle n’ose pas trop s’éloigner de Bao, mais espère quand même trouver l’insolent et lui dire deux-trois choses sur ce qu’elle attendait de lui et de leur contrat. “I can’t believe that--” Carrie n’a pas le temps de finir sa phrase, parce qu’une ombre devient homme et se jette sur elle, lui tordant le poignet en même temps que le bras dans son dos. La douleur fulgurante et inattendue l’aveugle momentanément et lui arrache un gémissement de douleur qui meurt dans sa bouche quand Darcy, qu’elle reconnaît à la lumière de la baguette volée qu’il tient à la main, se plante devant elle. “You came alone? You fucking idiotic cunt, I’m going to make you pay.” Il tord d’autant plus son poignet et Carrie gémit de plus belle, ses yeux paniqués cherchant Bao dans l’obscurité.

tw:crude language, violence

Les pupilles de Bao se lèvent jusqu’à celles de Carrie lorsque cette dernière la dévisage en levant les yeux au ciel. ”Relax, I just need to have some words with one of these kids. I have a couple of Dogs on the way, you can take a walk around the block if you’re too chicken to come, I’ll join you later.” Le froncement de ses sourcils se creuse un peu plus en l’entendant, sous la prise de conscience soudaine de la situation dans laquelle Carrie l’entraîne, sans même se poser de questions semble-t-il. Le constat fait imploser, comme toujours, une foule de pensées passagères et agitées dans son esprit, fusant trop rapidement sous ses yeux pour qu’elle ne puisse s’arrêter sur toutes. Il y en a cependant une qui devance les autres, s’ancre dans sa boîte crânienne, lorsque le mot Dog file naturellement entre les lèvres de la sorcière. Retrouver régulièrement la Warlock dans le secret de l’appartement qu’elle loue est une chose ; se retrouver à devoir effectuer une mission pour le compte des Warlocks en est une autre. Car tout, dans cette situation, lui évoque le travail qu’elle abat au quotidien pour le Clan, ce pourquoi elle a été dressée - et Bao sent grandir entre ses côtes un sentiment étouffant de trahison et de doute. Et si ses frères et soeurs l’apprennent ? Et si l’information remonte au Syndicat ? A-t-elle seulement le droit d’accompagner Carrie dans un tel contexte ? Est-elle toujours fidèle à sa famille, si elle suit Carrie ?

Et si Carrie se met en danger ?
Bao pousse un grognement étouffé, presque inaudible, en serrant l’étui de sa baguette, une grimace sur ses traits contractés lorsqu’elle emboîte le pas à Carrie - attirée par un lien imperceptible, comme si cette dernière tirait sur sa laisse pour lui intimer de la suivre. Et c’est ce que fait naturellement Bao, une nervosité sensible lui tordant un peu plus le ventre en balayant la rue du regard avec attention, et en ne pouvant s’empêcher de manipuler cette pensée poisseuse que d’être en train de faire une terrible erreur. Elle a toujours suivi son instinct, un outil précieux qui l’a sauvée de plus d’une situation - et désormais, elle se retrouve à suivre aveuglément Carrie, la silhouette de la demi-Vélane devant elle brouillant ses capteurs naturels.

Bao lève les yeux sur la porte que Carrie entreprend de déverrouiller ; elles se sont arrêtées face à un vieux bâtiment en état de détérioration avancée, lui faisant étrangement penser à tous ces squats de junkies qu’elle a pu retourner au fil du temps pour le Clan. ”Now would be the time to take that out. They can get pretty excited.” Un simple hochement de tête pour réponse, le chien de garde ouvre son étui pour s’emparer de sa baguette de sa main gauche, puis la petite poche en cuir pour faire fondre dans les Qiu au creux de son autre paume. La machine se met en route, chacun de ses gestes guidés par cette chorégraphie prudente et attentive développée au cours des années sur le terrain. Et naturellement, son instinct se branche à celui de Carrie - elle doit assurer sa sécurité, désormais, et elle ne quitte pas son dos lorsqu’elles pénètrent dans le lieu.

Il ne semble pas y avoir une âme dans l’entrepôt délabré dans lequel elles avancent doucement ; pourtant, Bao reste sur ses gardes, ses nerfs sur le fil du rasoir et ses sens à l’affût. ”Can you do a… I don’t know, a thing, a spell, to see where they are?” Mauvaise idée. S’il y a qui que ce soit avec elles, tapi dans l’ombre, elles révèleraient leur position en un rien de temps. Aussi Bao secoue vivement la tête en soufflant à voix basse : “Not now, wait.” Mais déjà, Carrie s’est détournée pour avancer un peu plus dans le lieu, vraisemblablement à la recherche de ces kids dont elle parlait plus tôt avec dédain.

L’alarme interne de Bao s’active lorsqu’il lui semble entendre un son à peine perceptible, couvert par les pas de la sorcière qui s’éloigne un peu trop d’elle. Ses yeux sondent l’obscurité, à la recherche de la moindre silhouette ; mais la pénombre est telle qu’elle parvient à peine à distinguer celle de Carrie, qu’elle devine tout juste à quelques mètres d’elle. ”Car- − I can’t believe that--” La fin de sa phrase se brise en un gémissement, un son désagréable qui fait bondir le coeur de Bao, une impulsion violente dans tout son corps éveillé par une pensée qui s’impose, supplantant les autres : Carrie est en danger. Et cette idée se confirme lorsqu’une troisième voix s’élève dans l’obscurité : ”You came alone? You fucking idiotic cunt, I’m going to make you pay.”

La Wang prend une inspiration profonde, en décelant un nouveau gémissement de douleur perdu dans la gorge de Carrie. Et fort heureusement, son assaillant est assez stupide pour faire jaillir un lumos au bout de sa baguette, éclairant le visage le visage de la Warlock, et celui juvénile du petit con, maintenant, lui semble-t-il à cette distance, le bras de Carrie dans son dos. Il ne lui faut pas plus que ce simple tableau pour éveiller le courant électrique familier, traversant chacun ses membres, remontant jusqu’à sa boîte crânienne en une fraction de seconde. Aussitôt, Bao enfonce sa baguette dans son étui - elle n’en aura pas besoin, face au ridicule gamin dont elle ne fera qu’une bouchée. Plutôt, le métal dans sa paume s’enroule autour de ses doigts, recouvrant parfaitement sa main lorsqu’elle transplane dans le dos du sorcier ; le gant d’acier se referme entre ses jambes, serrant vivement tout ce qui peut s’y trouver, tandis que sa main désormais libre empoigne sa chevelure sombre pour le forcer à courber la nuque en arrière. Et déjà, un faible sourire naît sur les lèvres de Bao, en entendant le couinement du gamin sous cet assaut surprise. ”Let go of the nice lady now or you can kiss your precious cock goodbye, fucker”, feule-t-elle à son oreille en resserrant un peu plus sa prise sur son entrejambe, lui prouvant qu’elle n’hésitera pas une seconde à s’exécuter s’il n’optembère pas. Dans un nouveau gémissement aigu, il finit par libérer Carrie qui s’écarte de quelques pas avant de se retourner vers eux ; Bao quitte le visage contorsionné du gamin pour planter son regard dans celui de la Warlock, la lueur de satisfaction au fond de ses pupilles ayant chassé les quelques doutes qui l’assaillaient il y a quelques minutes. Parce qu’il n’y a rien de plus saisissant et grisant pour Bao, que d’entendre le souffle rapide du sorcier - de sentir sa peur et sa douleur sous ses doigts. ”What do you want me to do with him?”, lui demande-t-elle presque calmement, dans l’attente presque naturelle du moindre de ses ordres.

tw: violence

Même Zanjin n'était pas aussi grand quand il avait dix-huit ans, de ça, Carrie en est persuadée: Darcy l'écrase de toute sa hauteur, et elle sent son souffle dans ses cheveux, et la douleur incandescente qui remonte le long de son bras la paralysant encore plus que la crainte insidieuse qu'il lui brise le poignet. Aveuglée par la peur, elle ne voit plus Bao et une partie de son esprit se jette déjà - fataliste et irraisonnée, elle-même s'en rend compte - sur l'idée qu'elle l'ait au final laissée là, toute seule, sans un regard en arrière; pourquoi n'a-t-elle pas voulu attendre ses Dogs, et faire plutôt cavalier seul avec quelqu'un qui ne porte même pas la marque des Warlocks? Sans doute comme un nouveau pied-de-nez à l'adresse de Mengwu et Chen, après son premier rendez-vous avec Zhang; certainement parce qu'elle se dit que plus tôt elle en aura fini avec Rogues, plus tôt elle et Bao pourront retourner à l'appartement et se distraire comme elles en ont l'habitude; et peut-être aussi parce qu'elle a placé, il y a des mois de cela, une confiance indue et dangereuse en la personne de Bao, et qu'au fond elle sait qu'elle n'a pas de soucis à se faire si elle à ses côtés. You wouldn't hurt me, lui a-t-elle dit lors de leurs retrouvailles improvisés il y a quelques mois (cela lui semble être il y a une éternité, maintenant) - et cette fois, pas la peine de se mentir pour se convaincre de cet état de fait.

Un craquement se fait entendre, et Carrie sent Darcy, derrière elle, faiblir un peu et arrêter de la tirer en arrière pour la forcer à lui faire face; le léger gémissement qui lui échappe est une musique à ses oreilles, mais incomparable au ”let go of the nice lady now or you can kiss your precious cock goodbye, fucker” de Bao qui fait résonner un nice lady? interloqué entre ses deux oreilles.
Après un bref moment de latence, Darcy la relâche et Carrie s'éloigne en portant immédiatement son autre main à son poignet pour le masser et l'ausculter, grimaçant de douleur, faisant volte-face pour le foudroyer du regard. Elle s'imaginait bien magnanime, pour une fois - elle avait vu en lui, il y a quelques semaines, un potentiel inespéré, le portrait saisissant d'un futur Dog utile et fidèle si il avait accepté de plier l'échine face au gang. Même si ils sont en froid, les conseils de Jin résonnent encore à ses oreilles, l'incitant à un calme inhabituel et pas du tout naturel pour elle face à ce genre de situation.

Mais toutes ses pensées concernant Jin disparaissent quand Carrie croise le regard de Bao, brûlant dans la pénombre, envoyant une désagréable nuée de frissons le long de sa colonne vertébrale, qui finit par se ficher dans son bas-ventre - son embarras se traduit par un froncement de sourcils, surtout alors qu'elle étudie avec intérêt la satisfaction qui semble exulter de son amante, et le restes du sourire ombrageant encore les coins de ses lèvres. Carrie aimerait bien mieux comprendre la recette des sourires de Bao, trop rares et aléatoires pour être prédits et compris dans la plupart des cas: même en gardant un inventaire extensif mental de la plupart de ces occasions surprenantes, elle a un peu du mal à suivre le fil de ce qui amuse ou contente Bao au point de la faire se réjouir ainsi. ”What do you want me to do with him?” Carrie déglutit en revenant au visage grimaçant de Darcy, dont les grands yeux clairs cherchent une sortie avant de se ficher sur Carrie en comprenant que la poigne - litérale - de fer de Bao ne le relâchera pas de sitôt. "Hold him still. - Please--" Carrie signe dans l'air l'un des premiers sortilèges que lui a appris Jin: un silencio qui arrache à Darcy les mots se précipitant dans sa bouche, ne faisant apparemment qu'agrandir sa terreur et ses yeux bleus qui roulent dans leurs orbites.

Carrie plonge la main dans sa poche et sent une vague de calme l'envahir en sentant le métal froid du poing américain offert par Stan se presser contre sa peau. Son poids un peu plus lourd que la normale est rassurant quand elle le sort, et les diamants qui le sertissent se reflètent dans les yeux écarquillés de Darcy quand ils attrapent la lumière du lumos émanant de la baguette du gamin tombée parterre. Si il se débat de plus belle en la voyant approcher, ses lèvres articulant des suppliques silencieuses et paniquées, Bao ne le laisse pas s'échapper et Carrie peut donc envoyer son poing de toutes ses forces dans sa mâchoire en se concentrant sur sa paume comme le lui a appris Jin pour activer les propriétés magiques de son arme.
Un craquement sinistre résonne et Carrie regarde le corps de Darcy, entravé par Bao devenir flasque pendant un instant en accusant le coup, un frisson d'excitation et d'adrénaline lui courant le long de l'échine. Cela fait bien longtemps qu'elle n'a pas elle-même administré la justice des Warlocks, des années à vrai dire, et elle avait oublié combien c'était satisfaisant - surtout en se savant bien protégée.

Carrie jette un coup d'oeil en biais à Bao, et la vague incendiaire qu'elle sent se répandre dans son visage en croisant son regard lui donne envie d'écraser son poing, précieusement conservé par l'arme, de nouveau dans quelque chose. Elle revient à Darcy dont la tête dodeline faiblement, qui se crache du sang sur lui-même, et elle sait au fond d'elle qu'elle pourrait s'arrêter là, que le message passerait sans aucun problème.
Mais elle repense à son souffle dans sa nuque, sa main tordant son poignet, et à la voix calme de Bao lui demandant ce qu'elle voulait faire de lui, effaçant les conseils avisés de Jin et de Mao promettant une paix factice sous le règne du Syndicat. Carrie s'en fout comme d'une guigne, d'être raisonnable et de prétendre faire ami-ami avec le moindre pèquenaud; au final, si Darcy ne l'a trahie aujourd'hui, ça veut dire qu'il ne le fera pas plus tard. "You really thought you could double-cross me and live," siffle-t-elle, en armant son bras. "So now you're going to die all alone, and it'll be your fault entirely."

Son poing s'écrase dans son torse, faisant craquer quelques côtes et le faisant hoqueter un sang noir, dans l'obscurité de l'entrepôt insalubre où ils se trouvent. Carrie parvient à éviter l'hémoglobine de justesse, une grimace dégoûtée s'installant sur son visage à l'idée qu'elle ait pu être salie dans toute cette affaire. "Let him go," dit-elle à Bao sans la regarder, regardant Darcy tomber à genoux puis se recroqueviller au sol en gémissant de douleur, le silencio un peu faiblard levé trop tôt. Elle aurait presque envie de lui foutre des coups de pieds, mais préfère à la place retirer son poing américain et détendre les articulations douloureuses de ses doigts en les étudiant sans rien dire pendant quelques instants. "I think," dit-elle au bout d'un moment à l'écouter gémir entre deux gargouillis douloureux, faisant grimper son regard jusqu'à Bao. "That traitors deserve to be choked to death."

tw:crude language, violence, murder

Bao pourrait presque sentir la peur du gamin courir sous ses doigts fermement refermés sur son entrejambe et dans ses cheveux, une sensation galvanisante que d’insuffler une telle terreur chez autrui, dont elle se gave toujours avec autant d’allégresse que d’avidité. Pourtant, plutôt que de s’en délecter pleinement, comme elle pourrait le faire habituellement, la sorcière reste accrochée au regard de Carrie - se gavant plutôt de ses traits et de ses émotions à elle, à défaut de celle du petit con gémissant sous sa prise de fer. ”Hold him still. − Please--” La voix de sa victime meurt sous les signes invoqués dans l’air de Carrie, et Bao peine à se soustraire à cette scène parfaitement étonnante. De fait, elle ne voit que rarement la Warlock faire usage de la magie, pour ne pas dire jamais - peut-être la nature de leurs rencontres ne met-elle, après tout, pas les sortilèges et autres capacités des deux sorcières sous le feu des projecteurs. Aussi, Bao peut déjà sentir une chaleur inconfortable se diffuser dans sa cage thoracique, à la simple observation d’un pan de Carrie qu’elle n’a jamais eu l’occasion d’apercevoir.

Ses gestes suivent sans réticence la voix assurée de son amante : Bao relâche la chevelure du gamin pour faire dégringoler sa main jusqu’à sa nuque, qu’elle entoure rapidement de ses doigts, les pressant à moitié contre sa gorge pour s’assurer qu’il ne cherchera pas à se débattre. Ses pupilles sombres détaillent silencieusement Carrie sortir de sa poche son poing armé du brass knuckles qu’elle l’a vue y glisser un peu plus tôt, pour revenir aussitôt aux yeux emplis d’une détermination et hargne placides, intenses, juste sous les siens. Et sans même le réaliser, Bao s’en abreuve abondamment, sans retenue - une breuvage électrisant qui la laisse sans voix et sans le souffle. Si elle avait la capacité de déceler ce qui la laisse pleinement satisfaite, sûrement Bao se rendrait-elle compte que le visage de Carrie n’a jamais été aussi hypnotisant que dans cette expression de colère assurée.

L’impact du coup que cette dernière envoie dans la mâchoire du gamin traverse le corps de Bao, qui peut ressentir avec précision les ondes de choc passer de la peau du sorcier à la sienne. Le craquement éloquent des os brisés sous les diamants du poing américain la fait frissonner brièvement, contrainte d’inspirer profondément pour ne pas lâcher sa prise, qu’elle raffermit plutôt pour empêcher sa victime de glisser entre ses doigts. La violence est une vieille amie, qu’elle fréquente depuis bien trop longtemps, dont elle connaît tous les secrets les plus vicieux et pervers. Elle a pu l’observer sous toutes les coutures au fil des années, qu’elle soit administrée par autrui, par elle-même - sur elle-même. Et pourtant, Bao a l’impression vertigineuse de la redécouvrir sous les traits de Carrie ; ce simple fait ancre un peu plus cette tiédeur insidieuse dans sa chair, insupportable et délicieuse à la fois. ”You really thought you could double-cross me and live. So now you're going to die all alone, and it'll be your fault entirely.” Bao retient son souffle, lorsque le poing vengeur de la Warlock s’abat à nouveau sur sa proie, dans son torse cette fois-ci. L’animal endigue les spasmes de douleur du gamin, dont elle sent les forces s’amenuiser sous sa poigne de fer et de chair. Et malgré elle, la naissance d’un sourire éclaire son visage, ses yeux toujours ancrés à ceux de Carrie.

”Let him go.” Bao s’exécute, se délectant du son mat du corps tombant sur le sol, agité de soubresauts fébriles et paniqués. D’une manière tout à fait surprenante et inhabituelle, elle n’a même pas envie de participer, préférant amplement laisser son amante se défouler sur la carcasse recroquevillée du gamin, et embrasser sans honte le courant électrique qui picore chacun de ses mucles à l’idée de voir Carrie poursuivre sur sa lancée. Mais c’est sans compter le regard de cette dernière remontant jusqu’au sien, et sa voix impérieuse s’infiltrant dans sa boîte crânienne. ”I think that traitors deserve to be choked to death.” Bao y voit immédiatement un ordre - et rarement un ordre a su faire naître sur ses lèvres un tel sourire, presque complice, qu’elle adresse naturellement à Carrie. Déjà, le métal recouvrant sa main se réchauffe à cette unique perspective, que de répondre au ton assuré de celle qu’elle englobe d’un regard réjoui. ”I think so too”, dit posément Bao en se mordant l’intérieur de la joue pour provoquer l’effort de se détourner ses prunelles sombres de la Warlock, effleurant du regard sa victime déjà tordue de douleur.

Elle s’en approche en faisant danser ses doigts dans l’air, impatiente, avant de poser un genoux à terre pour se pencher sur lui. ”N-n-no-- − Shhhhh.” Le gant de fer se referme délicatement sur la gorge du sorcier, dont les yeux terrifiés et écarquillés se plantent dans les siens. Avant même que Bao n’exerce la moindre pression, le corps du gamin se tend, ce dernier agité d’un réflexe qui ne lui est pas inconnu - ses mains cherchent à attraper ce qu’elles peuvent, s’écrasant sur son visage impassible, dans ses cheveux, sur ses épaules. Le crépitement du métal brûlant contre la peau tendue lui arrache un nouveau frisson ; aussi Bao resserre soudainement sa prise, brisant sa paume d’Adam de puceau et écrasant sa trachée avec entrain, savourant chaque spasme agitant les membres du gamin, chaque gargouilli étranglé, au fur et à mesure que son visage s’empourpre, que la vie quitte son regard.

Bao ne le relâche qu’au bout de quelques secondes, après que son corps a cessé parfaitement de se débattre, puis se bouger pour de bon. Elle détaille un instant ses traits violacés avant de retirer sa main pour contempler la trace de ses doigts sur la gorge du cadavre, une empreinte au fer rouge qui ne manque jamais de la laisser satisfaite. Elle se redresse enfin, les Qiu se contractant au creux de sa paume pour reprendre leur forme originelle. Elle enjambe le corps sans vie pour revenir aux côtés de Carrie, vers laquelle Bao lève son regard - seulement pour se prendre une nouvelle décharge tiède dans l’estomac. ”He was a quick one”, lâche-t-elle, presque déçue de n’avoir pu profiter un peu plus longtemps du spectacle - tout comme de n’avoir pu faire profiter Carrie. Il lui faut se faire violence pour ne pas glisser une main dans sa nuque et l’attirer à elle lorsqu’elle se retrouve en face de la sorcière. Plutôt, elle hasard d’une voix basse : ”What should we do now?” Se débarrasser du cadavre, le laisser ici, rentrer en vitesse à l’appartement, aller retrouver ses petits copains pour leur faire connaître le même sort. Peu importe vraiment à Bao, tant qu’elle peut profiter un peu du regard inhabituel de Carrie planté dans le sien.

tw: violence, death, sexy stuff at this point

Carrie observe Bao sourire, véritablement sourire, et essaye en vain de faire le vide dans son crâne et d'instaurer une distance nécessaire entre elles en la regardant. Pas question de se demander quand est-ce qu'elle l'a déjà vue sourire ainsi, aussi sincèrement et aussi largement, et certainement hors de question de réfléchir à comment faire pour que cela arrive de nouveau. Carrie n'a jamais vu Bao comme ça, Carrie aime voir Bao comme ça, et ne la quitte pas des yeux quand elle se détourne après un court moment. ”I think so too.” Carrie la regarde s'approcher de Darcy et poser un genou à côté de lui, tout le corps de Bao contrôlé et tendu d'un calme déterminé et placide. Carrie, quant à elle, a l'impression de se liquéfier de l'intérieur, d'être habitée par une tempête qui tape sans relâche contre les parois de son crâne et de sa poitrine, qui la force à garder les yeux vissés sur elle comme si elle avait peur de la voir se dématérialiser sans laisser de trace.

C'est seulement quand Darcy essaye d'articuler une dernière supplique qu'elle pose le regard sur lui, agacée qu'un personnage aussi insignifiant ait mis à mal le déroulé attendu de sa journée, et contente quelque part aussi que la perspective de l'étouffer ait réveillé chez Bao un tel sourire - la trace de celui-ci reste fermement ancrée dans l'esprit de Carrie, alors qu'elle regarde son amante poser sa main recouverte de métal sur sa gorge.

Elle a du mal à détacher son regard du profil du visage de Bao qu'elle arrive à apercevoir, mais la curiosité finit par prendre le pas sur la fascination, et Carrie observe avec un intérêt clinique Darcy se débattre désespérément, ses yeux exorbités dans leurs orbites, son visage s'assombrir et rougir alors qu'il se gorge de sang et de panique. Quand il arrête de bouger, un silence pesant s'abat sur la pièce. Pour Carrie, il est troublé par la cavalcade insupportable de son coeur dans sa poitrine, et la sensation électrique et désagréable de nombreux frissons traversant son échine et sa peau.

Bao se relève et les yeux de Carrie reviennent sur elle, la regardant s'approcher après avoir détaillé sa main pendant un instant, et observer les Qiu y disparaître après avoir repris leur forme habituelle. ”He was a quick one.” Carrie déglutit, un peu nerveuse d'avoir légèrement perdu la notion du temps en regardant la vie quitter le corps de Darcy, et ne répond pas. ”What should we do now?” Carrie est tentée de balayer la pièce du regard, d'attraper quelques informations en plus pour décider de la marche à suivre, mais garde les yeux plantés dans ceux de Bao en réfléchissant.

Il a sa baguette, sans doute que ses amis ne sont pas loin - elles pourraient essayer de leur mettre la main dessus, les secouer un peu avant de les jeter à genoux près du cadavre de leur chef. Ou alors, simplement laisser son corps là, en espérant qu'ils reviennent sur leurs pas. Attendre les Dogs, leur demander de brûler l'endroit, les regarder faire, leur donner quelques autres ordres ensuite. Se débarasser du cadavre, le foutre à l'eau ou au feu ou qu'importe, briser sa baguette, l'oublier pour de bon.

Carrie y jette un regard, un seul. Le visage de Darcy est toujours éclairé par sa baguette, et elle peut voir la trace rouge des doigts de Bao sur son cou.

"Take us back." Elle tend la main à Bao, et serre ses doigts en sentant sa paume se glisser contre la sienne; elle n'a pas le temps de s'attarder sur sa décision qu'elle sent le sol se résorber sous ses pieds et son corps être tiré par le transplanage de Bao jusque sur le pas de l'appartement. Carrie n'aime pas du tout la fébrilité qui agite ses doigts quand elle s'empare de sa clef et déverouille la porte, ni la vague qui explose dans son ventre quand elles sont enfin toutes les deux à l'intérieur et que l'image du sourire de Bao lui revient comme une claque, un retour de flamme inattendu et presque douloureux par son intensité.

Les clefs sont envoyées d'un sortilège jusqu'au vide-poches, et Carrie s'empresse de se tourner vers Bao pour l'embrasser, impatiente et nerveuse, ses mains se glissant dans sa nuque puis dans ses cheveux pour s'y accrocher. Elle l'attire à elle fiévreusement, jusqu'à se retrouver coincée entre le mur et son corps, une de ses mains descendant à sa taille pour la presser contre elle sans pour autant lâcher ses lèvres. Elle a l'impression que sa peau est en feu, et n'a aucune envie de s'attarder sur le pourquoi du comment, préférant fondre contre la bouche de Bao, s'y oublier complètement, quitte à le regretter plus tard.

Ses doigts se referment sur ses cheveux à l'arrière de son crâne, et Carrie guide la bouche de Bao jusqu'à son cou, ferme les yeux pour en profiter, légèrement gênée à l'idée de son pouls battant la mesure sous ses lèvres. Un soupir traverse ses lèvres et ses ongles s'enfoncent dans son crâne, son autre main occupée à froisser son haut sous sa veste, cherchant une ouverture pour trouver sa peau. "Thanks for the help," souffle-t-elle entre deux soupirs, tirant un peu sur ses cheveux pour la faire se reculer et croiser son regard. "You get a treat." Sa main sur sa taille parvient enfin à sortir son t-shirt de son pantalon, s'accroche à son flanc avec impatience, ses ongles s'enfonçant dans sa chair avec envie alors que ses yeux, quant à eux, restent vissés dans les siens pendant un instant, ses doigts dans ses cheveux la maintenant immobile. Carrie se penche, attrape sa lèvre inférieure entre les siennes pour l'embrasser légèrement et tirer dessus, avant de laisser sa bouche glisser jusqu'à sa mâchoire, son cou, remontant jusqu'à son oreille. "What would you like?"

tw: death, sexy stuff

Bao peut presque sentir le regard de Carrie vibrer au fond d’elle, quand elle maintient ses yeux noisettes dans les siens, un mélange qui la rendrait presque fébrile que cet échange silencieux couplé à l’adrénaline familière de la violence l’habitant de part en part. L’envie de s’attarder sur le cadavre, ses traits violacés, la trace de ses doigts brûlants sur sa gorge, ne la prend même pas - et pourtant, ses frères et sœurs savent combien Bao a toujours porté une forme de fascination malsaine pour les carcasses dont elle a ôté la vie. Mais sonder le visage de Carrie est autrement plus satisfaisant que de scruter les résultats d’un travail bien fait. Et elle pourrait rester ainsi un long moment, se rend-t-elle compte, à se gorger de cette tension presque électrique, et attendre le moindre mot de la sorcière pour se plier à ses quatre volontés ; parce que cette dernière l’a invités à franchir cette ultime barrière ce soir, dressée entre ce que Bao aurait été capable de faire pour Carrie, et pour le Clan. Le frontière est floue, désormais.

Même lorsque la demi-Vélane lui tend la main, Bao ne quitte pas ses pupilles des yeux. ”Take us back.” Elle glisse simplement ses doigts au creux de sa paume, venant enlacer les siens en une prise ferme et douce à la fois, son coeur battant jusque dans sa gorge quand elle l’attire à elle pour poser sa main en bas de son dos - un bête réflexe pour que Carrie ne perde pas l’équilibre à l'atterrissage, trahissant son impatience. Peut-être, au final, la Wang est-elle soulagée de l’entendre lui demander de les ramener à l’appartement. Peut-être, elle aussi, avait-elle envie de ne pas attendre plus longtemps.

Bao reprend ses mains aussitôt qu’elles apparaissent devant la porte de l’appartement, les nouant plutôt nerveusement en regardant Carrie se détourner d’elle pour introduire la clé dans la serrure. La chaleur dans sa poitrine, dans son ventre, dans tout son corps, est absolument insupportable, comme une bouffée la dévorant et la laissant confuse et irritée ; aussi elle glisse sans trop y réfléchir sa main sur la taille de la Warlock dès qu’elles pénètrent dans l’appartement, ses doigts s’enfonçant tout juste dans son flanc. Et Carrie revient à elle aussi vite qu’elle s’en est détachée, Bao accueillant ses lèvres dans un soupir brusque, se collant contre elle avec une fièvre déjà installée depuis de trop longues minutes.

Elle se laisse entraîner autant qu’elle entraîne Carrie dos au  mur, chaque geste et baiser déroulés contre sa peau et contre ses lèvres empreints de cette impatience étouffante. Elle ne se prive pas pour approfondir ce baiser, fouillant ses lèvres avec autant d’attention que de fébrilité, son corps pressant le sien contre le mur. Bao pourrait en perdre le souffle, à la main de Carrie refermée dans ses cheveux et guidant sa bouche jusqu’à son cou ; elle s’y perd volontiers, y dévorant sa peau en soupirant contre cette dernière, les yeux fermés, uniquement guidée par ses sens et son désir. Ses mains, aussi impatientes qu’elles, cherchent à attraper sous ce qu’elles peuvent, glissant nerveusement de sa taille à ses fesses en une caresse maladroite. ”Thanks for the help. You get a treat.” De violents fourmillements se diffusent dans la chair de Bao en retrouvant son regard, la respiration rapide et difficile, et ses yeux coulant aussitôt vers sa bouche, incapable de lui répondre ni d’analyser proprement ce que Carrie lui dit - encore moins quand les doigts de la sorcière trouvent sa peau sous son t-shirt, une vague de frisson parcourant son épiderme à leur passage.

Avide, Bao cherche à capturer pleinement ses lèvres quand Carrie joue avec les siennes, la langueur avec laquelle elle l’embrasse et glisse sur sa mâchoire accélérant le tambourinement furieux de son corps dans sa poitrine. ”What would you like?” You. Comme toujours. Rien de plus ni de moins qu’elle, toute entière, et tout ce qu’elle veut bien lui offrir - ses regards, ses sourires, sa voix, ses caresses, ses baisers, son corps, sa chaleur. Juste elle, cela lui semble être la meilleure récompense possible pour ce service rendu un peu plus tôt - qui n’apparaît pas à Bao comme tel, tant elle s’y est donnée à coeur joie.

A son tour, la main du chien du Clan coule sous le haut de Carrie, caressant fiévreusement la peau de son dos puis de son ventre, avant de remonter jusqu’à sa poitrine, ses doigts glissant à peine sous la dentelle entre ses seins dans un nouveau soupir. Elle finit par s’éloigner tout juste, quelques centimètres à peine pour se retrouver face au visage de la Warlock, ses lèvres flirtant avec les siennes en considérant brièvement sa proposition. ”I want you.” Ce qui est évident dépasse en premier ses pensées, d’une voix basse et rendue presque grave par le désir bouillonnant dans ses entrailles. ”I want you on your desk, right there”, précise-t-elle en détournant brièvement les yeux vers le bureau dans la pièce attenante, Bao presque surprise que ce désir s’impose à elle si simplement. Elle a pu y observer des heures Carrie, penchée sur ses comptes ou autres documents ennuyeux, dans une transe fascinante et presque irritante. Cette table en bois s’est mise tant de fois entre elles, lorsque la Wang l’attend patiemment au fond du lit, scrutant l’air concentré sur son visage sans parvenir à en comprendre la nature, ni la provenance de la tiédeur qui la submerge dès qu’elle détaille la sorcière plongée dans son travail. Alors, quelque peu gênée d’exprimer cette pensée naturellement, Bao revient au regard de Carrie et, avant même de pouvoir l’affronter, ferme les yeux pour revenir l’embrasser avec volupté.

tw: sexy stuff

Les doigts de Bao laissent derrière eux des vagues enflammées sous la peau du ventre de Carrie, et elle inspire brusquement en sentant ses mains remonter vers sa poitrine et l’effleurer, fermant les yeux en sentant son coeur se tordre sous sa paume. Il n’y a pas beaucoup de question à se poser, avec Bao, et encore moins de doute à avoir: les choses sont telles qu’elles sont présentées, il n’y a pas de faux-semblants desquels se soucier ou d’intentions cachées à redouter. Carrie trouve ça particulièrement rassurant, surtout quand Bao se recule en arrachant son cou de ses lèvres, et qu’elle peut étudier avec un plaisir certain le désir qui agite les yeux noirs de la Wang. Elle déteste parfaitement le feu que ça allume en elle, ravageur et indécis, entre l’effroi et l’impatience; toujours cette dualité difficile à naviguer, mais qui trouve un peu de repos quand c’est Bao qui la lui offre.

“I want you.” L’idée d’être désirée est enivrante, détestable, incroyablement satisfaisante; l’idée d’être désirée par Bao l’est plus encore, alors que tout est mis sur leur chemin pour le leur interdire. Les doigts de Carrie se resserrent sur ses côtes et ses cheveux, deux ancres nécessaires en cet instant précis. I want us. I don’t want anything. C’est à croire que Bao ne sait véritablement pas ce qu’elle veut mais Carrie ne lui en tient pas rigueur, parce qu’elle non plus; elle sait juste qu’elle peut se contenter de ça, et se contenter du brasier que viennent d’allumer ces trois mots dans ses entrailles.

“I want you on your desk, right there.” Prise de court, Carrie cligne des yeux en l’entendant - elle ne s’attendait pas à ce que Bao dise autre chose, ça ne lui ressemble pas - et elle suit, hagarde, son regard jusqu’à son bureau. Ses doigts dans ses cheveux se relâchent légèrement, glissent dans sa nuque alors que Carrie observe la table où sont encore étalés quelques documents en cours d’examen rigoureux.

Si les Warlocks ont longtemps employé des comptables spécialisés, Carrie a fini par prendre la main après les avoir observés pendant des années, incapable de laisser quiconque d’autre mettre son nez dans les affaires du gang - si le travail est fastidieux et chiant pour d’autres, il est d’une rigueur satisfaisante et étriquée pour elle, pour qui les chiffres et les nombres dansent avec une facilité qu’elle a depuis l’enfance. Elle aime travailler sur ses précieux documents, et Bao a dû le remarquer - c’est ce qu’elle fait pendant des heures, le soir, alors qu’elle l’attend sagement dans le lit en la regardant. Carrie fait toujours mine de ne pas sentir son regard sur elle, et attend simplement qu’elle s’endorme pour la rejoindre sous les draps et se presser contre elle sans rien dire - plus d’une fois, elle a remarqué que Bao ne faisait que semblant de s’être assoupie mais elle n’a rien dit, perturbée elle-même par sa propre faiblesse et sa propre envie de serrer son corps contre le sien, s’endormant après s’être nichée dans ses bras en ayant l’impression de faire une erreur.

Mais l’heure n’est pas à la tendresse, pas tout de suite en tous cas, et Carrie renifle légèrement en sentant les coins de ses lèvres se hisser dans un léger sourire amusé. “On my desk,” répète-t-elle, sans trop y croire, se tournant de nouveau vers Bao en sentant son mouvement vers elle, et accueillant avec plaisir ses lèvres contre les siennes. Dans l’expectative du moment où elle se retrouvera sur ce fameux bureau, Carrie sent le brasier enfler et enfler dans son ventre alors qu’elles s’embrassent avidement, la rendant maladroite alors qu’elle se déchausse aveuglément et retire son manteau, aidant Bao à en faire de même avant de la pousser à l’intérieur de l’appartement.

Elle revient bien vite à ses lèvres, incapable tout à fait de s’en détacher, ses mains sur son cou l’amenant avec elle jusqu’au bureau où elle s’assied sans rouvrir les yeux, accaparée par les baisers de Bao. Carrie débarasse sans un regard le plan de travail d’un geste magique de la main qui envoie valser tant son matériel que ses précieux documents - quelque chose qui la sortirait hors d’elle en temps normal, mais qui n’a aucune importance quand elle est en train de se consumer sous les lèvres et les mains de Bao, envahie par son odeur et sa chaleur. Elle repousse seulement Bao de nouveau - à contrecoeur - pour retirer ses collants et la lingerie soyeuse en dessous avant de l’attirer à nouveau à elle par le col, ses lèvres brûlantes contre les siennes. Elle repense au corps tressautant de Darcy et ses yeux roulant dans leurs orbites et sent une décharge électrique lui courir l’échine et se ficher en plein dans son aine, une brûlure désagréable et exaltante à la fois qu’elle accueille en soupirant contre les lèvres de Bao, une jambe se pliant autour des siennes comme pour la ramener tout à fait contre elle et l'y piéger.

Les doigts de Carrie se referment autour du poignet de Bao, et amènent sa main sous le liseré de sa jupe remontée sur ses cuisses, soupirant contre ses lèvres quand elle effleure sa peau. Elle se détache simplement de sa bouche pour hâtivement défaire les boutons de son chemisier et s’en débarrasser avec des doigts gourds, rendus maladroits par l’impatience. "I'm all yours now, so gwaa - how exactly do you want me?" demande-t-elle d'une voix rauque, avant de prendre le visage de Bao entre ses mains une fois à moitié dénudée, frissonnante dans sa jupe et la fine dentelle recouvrant sa poitrine, l'attirant de nouveau à elle pour l'embrasser voracement, l'ombre d'un sourire contenté sur les lèvres.

tw: explicit content

Bao a pu lire la surprise dans le regard de Carrie, et elle s’attelle à oublier la gêne naissante à l’arrière de son crâne en fouillant ses lèvres sans retenue, sa main caressant sa peau avec avidité sous son haut. L’embarras est remplacé par quelque chose de plus fort, plus intense, éloigné de la chaleur logée dans son bas-ventre ; une sensation saisissante et terriblement effrayante qui ne l’assaille qu’en présence de la sorcière, plus encore dans ces rares moments où elle cherche à la faire s’exprimer. Bao n’a jamais saisi cette opportunité, une incompréhension singulière quant à l’idée de désirer quoi que ce soit. You must find your own path, lui a toujours répété celui qui a pourtant tracé avec précision un futur auquel elle a toujours collé sans rechigner, au contraire, reconnaissante et dévouée. Une position que ses aînés n’ont jamais manqué de lui rappeler, appuyant sur sa nuque de toutes les manières possibles, pour s’assurer que l’animal ne mordrait jamais les siens.

Carrie lui offre autre chose, un désagréable sentiment de liberté, grisant et écoeurant à la fois. Un espace où elle se découvre petit à petit, effrayée par ce qui s’impose à elle et par ce que lui révèlent à la fois son corps et son esprit. Bao aimerait contenir tout ce qui fleurit naturellement au contact de la Warlock, qui la pousse un peu plus à s’explorer elle-même, autant qu’elle explore cette dernière. Mais cet effort lui est impossible, et elle commence tout juste à s’en rendre compte, alors qu’elle se laisse entraîner avec joie à l’intérieur de l’appartement, frissonnant sous les mains de Carrie l’aidant à se défaire de son manteau.

Une brûlure implose dans sa poitrine lorsqu’elle se retrouve de nouveau contre ses lèvres, y écrasant son souffle agité, tandis que ses paumes viennent accompagner ses hanches lorsque Carrie s’assoit sur le bureau. Ce simple fait lui arrache un soupir incandescent, revenant presser son corps contre celui de son amante avec une fébrilité sensible qu’elle peine à dissimuler, submergée par ce simple désir assouvi - une récompense, comme l’a présenté Carrie, qui en a en effet la saveur. Elle ne réagit même pas, insensible au fracas des affaires dégagées à même le sol, imprimant plutôt ses doigts avec plus d’ardeur dans la chair de la sorcière, à travers ses vêtements.

Un soupir de mécontentement échappe à Bao lorsqu’elle se fait repousser, frustrée de devoir se décoller tout juste de Carrie quand l’envie d’explorer son corps la déconnecte de toute pensée cohérente. Ses yeux couvrent avec fièvre le tableau qui se dessine devant elle, perdant bêtement le souple rien qu’à observer la Warlock faire glisser le long de ses jambes ses collants et son sous-vêtement. Elle profite de ces quelques secondes pour terminer de retirer avec empressement la chaussure qu’elle n’a eu le loisir d’envoyer voler plus tôt, la laissant traîner aux pieds du bureau avec le reste des affaires éventrées à même le sol. Un nouveau soupir s’écrase contre la peau de Carrie lorsqu’elle l’attire à elle, une décharge extatique traversant sa peau sensible en sentant la main de la sorcière guider la sienne sous sa jupe remontée.

Bao n’a pas besoin de se faire priser pour caresser sa peau, ses doigts glissant de l’extérieur à l’intérieur de sa cuisse en une caresse maladroite, imprégnée de cet empressement étouffant. Elle redresse un peu la nuque quand Carrie se défait de son chemisier, ne pouvant empêcher ses yeux de balayer son corps découvert, s’attardant sur la lingerie fine couvrant sa poitrine. ”I'm all yours now, so gwaa”, lui dit Carrie en prenant son visage entre ses mains, et Bao peut sentir son coeur remonter dans sa gorge serrée par l’excitation, quelque chose de lointain explosant tout simplement en elle pour lui voler son souffle. Elle accueille avec ce qui ressemble de loin à une forme d’émotion ce surnom tendre, un vestige de leur passé à tomber dans les bras l’une de l’autre en toute insouciance - avant son agression, avant la mort de Wei, avant- non. ”how exactly do you want me?” Les pupilles brunes de Bao tombent sur les lèvres de Carrie, avant de venir y presser les siennes, l’embrassant langoureusement en faisant courir sa main sur sa peau, remontant bien vite ses doigts entre ses jambes, frissonnant en la trouvant sans mal, pour la caresser doucement.

Jamais aurait-elle cru que donner du plaisir à quelqu’un la contenterait autant, quand tout ce qu’elle cherchait auparavant dans le sexe était l’assouvissement de quelques besoins entêtants. C’était avant d’obtenir le droit de détailler le visage de Carrie quand elle la touche, chacune de ses réactions envoyant une onde voluptueuse sous sa peau. Sa main libre voyage sur son corps, presque tremblante quand elle s’arrime à sa nuque, étendant ses doigts à la naissance de ses cheveux, son pouce caressant distraitement son cou, là où elle peut sentir son cœur battre furieusement. ”No”, souffle Bao sur ses traits en redressant à peine la nuque pour pouvoir la regarder. ”I got what I wanted.” Elle ne veut rien de plus que Carrie dans ses bras, sous ses doigts, à gémir à ses caresses, sur ce bureau qui a représenté trop de fois un obstacle, qu’elle a l’impression de narguer délicieusement avec sa demande un peu honteuse.

Ses yeux restent fermement ancrés dans les siens, résistant à l’envie de l’embrasser pour ajouter d’une petite voix empreinte de son désir pressant : ”Your turn now.” Et Bao franchit les quelques centimètres les séparant pour saisir ses lèvres, brûlante à la perspective que Carrie lui livre ce qu’elle désire, elle - comme un peu plus tôt, lorsqu’elle lui a intimé de la suivre et de refermer sa main létale sur la gorge de ce gamin dont le nom et le visage ont été oubliés sitôt que ses pupilles sont revenues à Carrie.