making us better (odalis)

making us better
✘ @odalis bayat & @lotfi hashimi

▬ L'avantage d'être un inventeur était qu'il pouvait travailler partout, mais surtout qu'il pouvait travailler à la maison. Le genre de métier qui lui avait permis de s'occuper de Nadia et Majid, quand Leïla était au travail, quand Leïla était en voyage, quand Leïla avait besoin de prendre du temps pour elle. Lotfi était toujours là, pour elle, pour eux et toutes ces années passé avec eux avant leur entrée à l'école des sorciers, il ne les échangerait pour rien au monde. C'était un privilège, une chance. Quand il était plus jeune, c'était parce qu'il aimait les sortilèges, les inventions de son grand-père, l'idée de pouvoir voyager, parcourir le monde, sans vraiment se soucier d'avoir un chez soit. Non, à l'époque, comme beaucoup de ses compères, il avait l'atelier dans une valise, dont il était le seul à connaître la combinaison. Une fois marié, la valise était devenue une pièce, souvent au bout d'un jardin, son entre à lui, dans lequel il invité parfois ses amis, souvent sa famille, toujours les enfants.

Et justement, son invité aujourd'hui était son la famille de son ami Odalis, Hazan, petit bout qui du haut de ses sept ans ne laissait pas tout et n'importe quoi l'impressionner, mais elle aimait bien l'atelier de Lotfi, généralement elle trouvait de quoi s'occuper dans les ouvrages disponibles dans la grande bibliothèque des Al-Massri, les traînant jusque dans l'antre de l'inventeur pour lire dans un coin, se laissant parfois distraire par les bibelots moitié objet immobile, moitié objet qui avait leur propre personnalité évoluer dans cet espace qui donnait l'impression d'être dans un autre temps, un autre monde. Lotfi était généralement attentif à la présence des personnes autour de lui, mais lorsqu'il était plongé dans son travail, il ne captait pas toujours les mots, ainsi lorsqu'il sentit une main lui poker les côtes, il levait la tête de son travail, des lunettes assortit de plusieurs verres pour inspecter les détails de son travail d'orfèvrerie, Lotfi baissait les yeux vers la petite fille dont il avait la garde.

« Excuse moi, que disais-tu Hazan? » Demandait l'inventeur en relevant les lunettes sur sa tête. La fillette lui faisait signe vers l'un des globes qui trônait sur la bibliothèque. « Oh ? C'est le globe de mon grand-père Zurvan qui te fait de l'œil ? » « Oui. »

Lotfi esquissait un large sourire amusé, se détachant de la chaise afin de rejoindre la bibliothèque, la petite fille lui emboîtant le pas, les mains derrière le dos attendant que le sorcier descende le globe en question, en l'activant avant de lui tendre, le globe s'illuminant avant de parer la pièce de la carte des constellations. Rien d'extravagant ou inventif, c'était inspiré des projecteurs moldus afin de répliquer ce qu'il y avait de dessiner sur le globe autour du sorcier qui le tenait. Ainsi, la carte était en aucun cas à jour, mais le vieux globe était une antiquité, arrangée par son grand-père, assez pour qu'il ait une place chez lui. « Wow ! » S'exclamait la petite, regardant autour d'elle, remarquant que si elle bougeait vers un pan du mur, la carte bougeait aussi. La petite éclatait de rire, commençant à chasser un point choisi, sous le regard attendrit de l'inventeur qui avait l'impression de voir Nadia. « Eh, Lotfi, tu le tiens ? » Demandait-elle en lui tendant le dit globe, il haussait un sourcil. « S'il te plaît ? » Ajoutait-elle avec un sourire espiègle, alors que le sorcier acceptait cette fois l'objet, alors qu'elle commençait à sauter à cloche pied sur les constellations. Lotfi la regardait faire amuser, avant de remarquer la présence d'Odalis dans le cadre de la porte. « Oh, il la saluait d'un geste de sa main libre. Hazan, regarde qui est arrivée. » La jeune fille se retournait pour voir sa mère vers laquelle elle se dirigeait, pendant que Lotfi éteignait le globe, le posant sur l'une des étagères et rejoindre les deux filles. « J'étais en train de terminer ta commande, l'informait-il en désignant le harnais sur son bureau. Ce n'est pas tout à fait terminé, du coup, tu restes pour un thé ? »

Fin mars 2020 » Si les problèmes du monde ne semblent jamais effleurer Odalis Bayat, si elle ne s’inquiète jamais de rien, et fait face à tout avec une indifférence crasse, les soucis que la Seconde Ligue d’Ur ont rencontrés dans les dernières semaines ne bénéficient pas de la même désinvolture. La Turque est angoissée, boule de nerfs perpétuellement coincée dans la gorge. Elle se traîne partout comme si elle avait des boulets aux chevilles, ne réussissant qu’à maintenir une façade normale lorsqu’elle est en compagnie d’Hazan. La culpabilité aussi la ronge alors qu’elle doit s’absenter pour un court voyage à l’extérieur de la ville, un dernier contrat de quelques jours avant de remettre sa fille entre les mains d’Azra pour un voyage qui sera long, et pénible, et dont l’issue est plus qu’incertaine. Elle aurait voulu passer chaque minute avec sa fille, sentir son petit corps tout près du sien, le nez dans sa chevelure frisée, à l’écouter papoter sans relâche de tout et de rien. Elle aurait voulu ne jamais avoir à retourner dans ce damné pays, au creux de ce maudit temple (deux fois plutôt qu’une), pour défaire les erreurs de cette imbécile de Lillian. Ils n’ont pas le choix. Ils l’ont encore moins maintenant, alors qu’Aries a découvert ce qui s’est passé (ou ne s’est pas passé), maintenant qu’ils savent que le temps leur est peut-être compté.

Les préparatifs vont bon train, chaque jour les rapprochant de la date du départ. Odalis récupère les derniers ingrédients, peaufine quelques recettes au dernier moment, même si elle sait à présent que les Inferi seront le dernier de ses soucis, lors de cette expédition. Coup de chance, le contrat dégoté n’était qu’un truc de routine, un sort lancé sur un mausolée familial, et Odalis s’est permis d’emmener Hazan pour de courtes vacances, laissant la petite à son bon ami (et inventeur émérite). C'est au retour d’une journée de courses particulièrement remplie qu’elle fait un dernier arrêt chez Lotfi, à la fois pour récupérer une commande passée plusieurs semaines plus tôt, et pour récupérer sa fille.

Elle arrive à l’atelier alors que cette dernière tournoie sur des constellations projetées au sol et au mur, d’un magnifique globe tenu par Lotfi (elle s’imagine bien que quelqu’un le lui a demandé). La vision l’attendrit, puis l’attriste, et elle n’a que le temps de se plaquer un sourire sur le visage avant qu’Hazan se précipite vers elle. La sorcière attrape la petite sous les bras et la soulève sans peine, en dépit de sa grandeur – la gamine s’accroche à sa mère comme un petit singe, commençant à lui babiller dans l’oreille à-propos de sa journée, lui laissant à peine le temps d’arriver. « J’ai du temps, assure-t-elle, redéposant Hazan sur le sol. Ce serait avec plaisir. » Son œil habitué évalue rapidement l’atelier, trouve un coin où se poser pour ne pas déranger ni les affaires du sorcier, ni son travail. « J’espère qu’elle ne t’a pas fait trop de misères, s’enquiert-elle, ouvrant son sac sur ses genoux pour y récupérer quelques babioles achetées pendant la journée. Un vrai petit monstre ! » Sa fille, devant pareil outrage, lui répond d’une grimace, aussitôt rendue par sa mère. « Je t’ai emmené des gâteaux, en compensation. J’espère que ça suffira. » Au mot gâteau, la petite s’approche, le nez levé, essayant d’apercevoir de quels gâteaux, exactement, il s’agit. « Ils ne sont pas pour toi, ceux-là, précise Odalis, sourire aux lèvres. Je te connais, tu les aurais tous mangés ! » Devant les véhémentes protestations d’Hazan, elle sort une autre boîte, plus petite, de son sac, qui renferme ses cookies favoris. De quoi l’occuper pendant que Lotfi achève sa commande.

making us better
✘ @odalis bayat & @lotfi hashimi

▬ Le sorcier observait la ronde entre la mère et la fille, qui lui donnait une impression de déjà vu se remémorant des moments passé avec Majid, Nadia et Leïla. C'était difficile de ne pas regarder une mère et sa fille sans penser à eux trois, si soudé, si fragile et fort à la fois, ces moments tendres qui balançaient ans arrêt les quelques disputes et désaccords qu'ils pouvaient avoir. Il y avait quelque chose de très doux, d'attachant dans ces brefs moments de complicité et Lotfi ne pouvait pas s'empêcher de les observer avec un sourire tendre. Il connaissait bien ces moments-là, ils les chérissaient même et il voudrait bien, parfois, revenir en arrière pour les vivre à nouveau. Avoir Nadia qui s'aventure dans son atelier pour lui poser mille et une question, Majid revenir la tête basse en avouant avoir tenté de jouer avec l'une de ses inventions pour la casser ou avoir fait une bêtise, ayant donc besoin de l'intervention paternel pour effacer ses bêtises avant que Leïla ne tombe dessus. Ralentir le temps, juste un instant, surtout ces dernières années, depuis leur arrivée en Angleterre, Lotfi avait eu l'impression de prendre dix ans dans la figure, avec ses deux enfants maintenant fiancés. Des accord qui avait des airs de politique, si celui de Leïla et le sien avait été aussi arrangé, il avait espérait que pour ses enfants, ils pourraient avoir un peu plus de chance, un peu plus d'amour derrière qu'un souci de réparer les écarts de leurs cousins. Non, il n'approuvait pas vraiment les fiançailles, même s'il faisait confiance à Leila, comme à Nadia qui semblait bien l'aimer ce Vincent Crabbe. Et ce, malgré son inclination, et celle de sa famille, à pratiquer la magie noire, un big no no du côté des Hashimi, mais aussi des Al-Massri. Il n'avait pas vraiment de choix, choisissant de ne pas trop s'attarder sur le sujet pour ne pas offenser la famille de son futur beau-fils, mais Lotfi pouvait espérer que sa fille puisse guider son futur mari sur une pratique plus noble.

Il sortait de ses pensées pour se concentrait de nouveau sur Odalis à qui il venait de proposer un thé puisqu'il n'avait pas fini son travail. « J'espère bien, la taquinait-elle alors qu'elle confirmait avoir du temps, Hazan ? Non, bien sûr que non, c'est plutôt moi qui me suis laissé déconcentré par la demoiselle. » Affirmait-il avec un clin d'œil, alors qu'il faisait signe à la jeune femme de le suivre, l'invitant à s'installer sur l'un des poufs disponibles près de sa table de travail. Il s'installait sur sa chaise avant qu'un sourire amusé s'esquisse sur lèvres, alors que la mère poursuivait avec une boutade sur sa fille avant de lui tendre un paquet. « Oh, son sourire s'étirant un peu plus, ce n'était pas la peine, tu sais bien que ce n'est jamais un problème. » S'il n'avait jamais osé rêver d'être père, le sorcier avait toujours été heureux d'avoir pu élever les enfants de Leila, ses enfants et donc n'importe quel petit être qui venait à la maison était le bienvenu. Il n'aurait certainement jamais plus la même énergie que par le passé d'avoir un enfant 24h sur 24, mais pour filer un coup de main de temps en temps, c'était toujours avec plaisir. Il avait cette liberté et ce privilège. « Merci beaucoup. » Ajoutait-il en éloignant cachant les dit gâteaux dans son dos quand la petite Hazan se montra très intéressait par la mention de ces derniers. Odalis avait pensé à tout, ayant préparé une boite pour la gourmande.

Lotfi laissait échapper un léger rire amusé, posant les gâteaux dans l'un des casiers libres. D'un geste de la main en direction de la petite cuisine aménager, il organisait un plateau de thé, tout en mettant une théière sur le feu avant de remettre ses lunettes sur son nez afin de terminer son travail. « Comment vas-tu Odalis? Demandait-il sans lever le nez de son travail, tu me disais que tu te préparais pour repartir en Irak. » D'un geste précis, il termina d'ajuster une couture, avant de retourner la ceinture pour une dernier inspection, tournant la tête vers la jeune femme. « Tu te sens prête ? » Évidemment, il demandait en tant qu'ami, mais aussi et surtout en tant que père, qui, à chacun de ses déplacements avait eu un pincement au cœur de laisser ses deux petites têtes brunes derrière. Être parent était certainement la meilleure chose qui existait au monde selon lui, mais c'était aussi la source d'ennui et d'inquiétude à vie.

L’atelier de Lotfi est accueillant, et chaleureux (tout comme son propriétaire) et Odalis souhaiterait presque que ce soit elle, et non Hazan, qui doive y passer ses journées. Il serait bien plus simple de se cacher ici, à aider Lotfi et à observer des inventions avec émerveillement, que d’affronter ce qui doit être fait en Irak. Elle n’est d’ordinaire pas du genre à fuir, mais cette fois, ce qu’ils doivent surmonter semble absolument impossible et la briseuse de sorts ne dirait pas non à disparaître de la face du monde si ça veut dire qu’elle n’a pas à y remettre les pieds. Ce n’est pas une partie de plaisir, qui les attend. « C’est la moindre des choses. » Il n’imagine pas à quel point son amitié est précieuse, et à quel point son aide lui est essentielle. Laisser Hazan derrière, bien qu’essentiel, ne lui a jamais été facile et savoir qu’elle est avec des gens de confiance qui prendront soin d’elle comme l’une des leurs lui permet de partir l’esprit tranquille.

Calée ainsi près de la table de travail de son ami, à partager un cookie avec sa fille, elle pourrait presque se croire à l’abri. « Ça va, répond-elle un brin évasivement. » Elle ne peut pas se permettre de vider son sac alors qu’Hazan est dans la pièce. Et surtout, elle ne sait pas si elle est prête à vider son sac, tout court. Les dernières semaines ont été irréelles – de l’arrivée d’Ambros sur son pallier jusqu’à la surprise d’y découvrir Abbas, quelques jours plus tard – et Odalis peine à savoir où elle pourrait bien commencer son histoire, et comment faire pour ne pas tout révéler. Si la malédiction dont ils sont victimes ne semble pas affecter les gens autour d’eux (elle l’espère de tout son cœur, de toute son âme) il y a trop d’inconnues pour qu’elle se risque à mettre d’autres gens dans le secret. « On doit partir dans quelques jours, oui. » Et l’idée la met mal à l’aise, l’inquiète. Ils n’ont pas le choix, cependant. Ils ne peuvent pas continuer à se promener avec cette menace au-dessus de la tête, cette bombe à retardement dont ils ne connaissent strictement rien.

Elle n’est pas prête. « Autant que faire se peut, elle commence, croquant dans l’un des cookies, mâchant silencieusement comme pour se laisser le temps de réfléchir. J’ai profité de mon contrat ici pour récupérer quelques affaires, le reste est presque réglé. » La paperasse, l’équipement (il ne reste que ses vêtements), la résignation face à une mort certaine, prendre des arrangements pour laisser Hazan chez Azra pour plusieurs semaines, rassembler les autres … il ne reste pas grand-chose à faire pour que la Ligue soit fin prête pour le voyage. « Et Hazan va rester chez Azra, la chanceuse. » La petite sourit et lève les yeux vers elle. Odalis se sent toujours coupable de la laisser, mais Hazan semble véritablement apprécier de passer du temps avec la Shafiq et ses enfants. « Et toi, Lotfi ? Tu vas bien ? Comment vont les affaires ? » Bien, elle l’espère, même si elle n’a pas trop de doutes. Le talent de l’inventeur est inégalé, et elle ne confierait ses requêtes à personne d’autre – elle ne doit pas être la seule.

making us better
✘ @odalis bayat & @lotfi hashimi

▬ « Ça va, Répondait la jolie brune, Lotfi haussant un sourcil. Oh, c’est un petit ça va. » Remarquait le sorcier avec un ton chaleureux et réconfortant. Elle n’avait pas besoin de développer surtout en présence de sa fille, mais il lui offrait un espace pour le faire, quitte à demander un petit coup de main aux autres personnes présente dans la maison, comme le personnel ou alors a Nadia ou Leïla si l’une d’elle rentrait plus tôt. Lotfi n’osait pas le proposer, la jeune femme n’avait pas vu sa fille de la journée, et même si la gamine était plus intéressée par les cookies et l’atelier de l'inventeur, elle avait certainement les oreilles qui se baladait dirigées vers la conversation des adultes. Certes, elle ne comprenait pas tout ce qui été raconté, mais il ne fallait jamais sous-estimer l’instinct d’un enfant surtout lorsqu’il semblait avoir un lien fusionnel avec sa mère.

Le sorcier changeait donc de sujet, pour avoir quelques informations sur le voyage en Irak de la jeune femme, mais une fois de plus la demoiselle était évasive sur le sujet, l’informant qu’elle était presque prête à partir et avait régler l’essentiel de son voyage. En tout cas, administrativement, Lotfi hochait la tête, sachant que la ceinture entre ses mains faisait partit d’un des derniers éléments qu’elle aurait besoin pour son être efficace et utile auprès de ses camarades. Le sorcier avait allégé la ceinture, pour qu’elle ne soit pas trop lourde pour Odalis, mais assez solide et stable, pour ne pas s’apaiser sous le poids d’outils. Avec plusieurs poches, mais aussi tout un harnais pour la cuisse rendant facile d’accès d’autres outil avec sa main dominante. Il y avait aussi un système de sécurité pour se débarrasser de la ceinture au cas où. Le cuire comme les boucles en aluminium léger étaient gravé, par pur esthétisme, ajoutant tout de même une petite rune à l’intérieur de la ceinture pour porter chance à Odalis. Une petite intention superstitieuse qu’il espérait lui porterait chance.

« Et Hazan va rester chez Azra, la chanceuse. - En effet, elle a en de la chance. » Confirmait-il en regardant la petite sur les genoux de sa mère, la gamine laissait échapper un léger rire timide secouant la tête un large sourire sur ses lèvres avant de croquer dans son cookie, descendant des genoux de sa mère, gardant la boîte contre son torse, alors qu’elle retournait s’aventurer du côté de la bibliothèque. Le regard du sorcier, c’était attendrit une fois de plus, observant Hazan évoluer, une fois encore un souvenir de Nadia lui revenant en mémoire. « Et toi, Lotfi ? Tu vas bien ? Comment vont les affaires ? » Son regard se détachait de la silhouette de l’enfant qui s’installait sur le sol après avoir sélectionné l’un des livres, venant se poser sur Odalis, un léger sourire amusé par Hazan, tout en hochant la tête. « Comme tu le sais, cela fait plusieurs années que je travaille plus pour des connaissances et parfois des particuliers. Il n’y a plus vraiment d’affaire, que des projets que je prends ou non. » Comme le travail à la maison, c’était un autre privilège de sa profession, après plusieurs années de dur labeur, il arrivait à un stade où il avait une liberté, quasi-totale, sur ses projets. Il n’avait pas besoin de travail pour vivre, et la seule chose qu’il redoutait été qu’un jour des membres du gouvernement débarque avec une commande qu’il soit contraint d’accepter. « Sinon, je vais bien, j’ai été invité comme juré, mais aussi comme membre de différents panels pour le Magic Is Legendary Festival, et mon frère et ma sœur seront aussi invité pour leurs travaux. Ça va être la fête à la maison. C’est vraiment super de pouvoir les recevoir ici. » Ils avaient tous très inquiet pour lui ces dernières années, en particulier depuis la mort de leur père, seul Zurvan avait une réelle idée de l’état de son petit-fils. Ses états d’âmes, ses doutes, ce qui le travaillait, le déchirement entre ses valeurs et la ligne directive du gouvernement. « Et puis, il y a les fiançailles des enfants qui, entre toi et moi, ne me réjouissent qu’à moitié, mais c’est sûrement un truc de père protecteur. »

Le sorcier la connaît assez bien pour voir que quelque chose ne va pas – ce n’est pas comme si c’était particulièrement subtil, non plus. Odalis se contente d’un tout petit hochement de tête après s’être assurée qu’Hazan ne regarde pas. Elle sait bien qu’elle n’est pas infaillible et que la petite ne doit pas le penser non plus, mais elle préfère ne pas l’inquiéter inutilement. Cette situation est entièrement nouvelle. C’est la première fois qu’une expédition se révèle si dangereuse et que la spécialiste des explosifs envisage véritablement la possibilité qu’elle y laissera sa peau, cette fois. Tous les briseurs de sorts sont un peu fêlés, à n’en pas douter (il le faut bien pour exercer un métier si dangereux), mais c’est la première fois qu’Odalis se sent dépassée par les événements de la sorte. Et elle ne veut pas laisser sa fille au pays, dans l’incertitude et la crainte.

Pourtant elle brûle d’envie de se confier. Lotfi est digne de confiance (évidemment, sinon elle ne lui confierait jamais sa fille) et à l’écoute, et elle se sentirait presque mal de ne pas répondre à sa sollicitude. Vraiment, difficile de comprendre comment elle a pu mériter un ami si précieux, mais ne le regrette absolument pas – et en dépit de tout ce qui se passe mal, ces derniers temps, ça lui met du baume au cœur. « Comme tu le sais, cela fait plusieurs années que je travaille plus pour des connaissances et parfois des particuliers. Il n’y a plus vraiment d’affaire, que des projets que je prends ou non. – Je dirais que ça va particulièrement bien, alors. » Son sourire se fait malicieux; s’il a le loisir de n’effectuer que les contrats qui lui plaisent, c’est bien que sa réputation n’est plus à faire. Elle se penche vers l’avant tandis qu’il parle, un regard curieux et enthousiaste porté sur la ceinture qu’il a faite pour elle. Elle a si hâte de l’essayer !

« Je suis contente pour toi ! » Elle-même n'a pas vu sa famille depuis des années, et la pensée est à la fois étrange, triste, et étrangement distante. Malgré leurs différences, elle ne les déteste pas, ne voulait pas non plus élever sa fille loin d'eux, mais après toutes ces années, il y a bien un malaise palpable à l'idée de les contacter. « Je regrette de ne pas pouvoir y assister. » Elle avait complètement oublié l’existence de ce festival (probablement préoccupée par des trucs plus… inquiétants) et maintenant que Lotfi le lui rappelle, ça l’attriste de ne pas pouvoir y emmener Hazan. Elle peut sûrement s'arranger, avant de partir, pour que quelqu'un l'y emmène. « Heureusement, je n’en suis pas encore là ! Elle fait mine de souffler, laissant échapper un éclat de rire. Tu ne seras pas le seul, crois-moi. » Odalis peine tellement à se projeter si loin… surtout dans les circonstances actuelles. Que c’est déprimant ! Tout revient sans cesse à ce foutu voyage, à cette foutue malédiction – aucune échappatoire possible. « On veut tous le meilleur pour nos enfants, c'est normal. » Il ne faut pas non plus sous-estimer son instinct. S'il a des réticences, Odalis ne doute pas qu'elles soient légitimes. Que ce soit bénin ou pas, ça ne les empêche pas d'être valides.

Elle jette un regard à Hazan, plongée entre les pages d'un livre qui traite d'un truc probablement bien trop compliqué même pour Odalis. Obnubilée par les mots compliqués qu'elle articule en silence, le nez adorablement plissé lorsque certains lui donnent des difficultés particulières. Un bon moment pour parler, donc. « L'expédition est plus compliquée que prévu, avoue-t-elle enfin à mi-voix. Beaucoup plus compliquée. » C'est difficile d'expliquer sans s'attarder sur les détails, et elle ne veut pas inquiéter Lotfi plus que nécessaire. « Trop d'imprévus, ça commence à peser à toute l'équipe et évidemment, Aries et Colm n'en démordent pas. » Le départ de Lillian a précipité (et compliqué davantage) les choses. « C'est compliqué, réitère-t-elle, à défaut de trouver autre chose pour décrire la situation. Mais ça ira. »

making us better
✘ @odalis bayat & @lotfi hashimi

▬ Lotfi n’était pas facile à duper, il n’avait jamais vraiment eu besoin d’être legilimens pour détecter quelques réactions et autres tics trahissant les personnes. C’était un peu une déformation professionnelle, ayant toujours été relativement méfiant derrière ces airs de gentil, il avait appris à déceler quelques expressions qui pouvaient lui donner une idée si son interlocuteur mentait ou lui cachait quelque chose. Bien qu’il avait aussi appris à ne pas les relever constamment au sein de sa famille, comme ailleurs, déjà parce qu’il n’avait pas à trop forcer les choses pour que ceux qui le connaissaient bien se confient à lui et aussi parce que c’était indélicat, voir désagréable d’être repris sans arrêt. De plus, parfois, il était mieux de rien savoir. Et puis, il y avait aussi l’occlumencie, pour être capable de cacher ses pensées, il fallait apprendre à les protéger, et donc à mentir. Il n’y a jamais que les meilleurs menteurs pour en déceler un autre.

Odalis, bien entendu, n’était pas une menteuse, une amie qui se préparait pour un long voyage loin de sa fille. Une situation à laquelle le sorcier pouvait s’identifier, car il avait toujours eu un petit pincement au cœur lors de ses voyages d’affaires, laissant ses deux enfants seuls avec leur mère. « Heureusement, je n’en suis pas encore là ! Il éclatait de rire Te voilà bien chanceuse. - Tu ne seras pas le seul, crois-moi. On veut tout le meilleur pour nos enfants, c'est normal. » Et lui qui pensait que ça serait plus facile lorsqu’ils auraient grandi, mais en vérité, c’était plus difficile, peu importe leur âge, il y avait ce besoin affectif, presque indispensable de les protéger, de garde un œil sur eux. Au moins, il espérait avoir su retenir ses réflexes, donnant l’espace nécessaire à ses enfants pour s’épanouir, mais aussi qu’ils sachent que peut importe, il serait toujours là pour eux et il sera toujours fier d’eux. Les enfants grandissaient trop vite, comme leurs parents vieillissaient tout aussi vite. Ces derniers mois, plus qu’avant Lotfi s’était surpris à être nostalgiques des années passées en Egypte, loin de l’Angleterre, pays qui n’arrivait toujours pas à avoir son cœur, bien qu’il n’eut aucun mal à s’intégrer.

« L'expédition est plus compliquée que prévu, » confiait-elle à Lotfi qui laissait tomber sa propre réflexion pour lui accorder toute son attention alors qu’elle insistait. Plus compliqué, mais aussi des imprévus qui semblait avoir des conséquences sur leur équipe et du coup certainement sur l’inquiétude de la jeune maman. Il comprenait qu’elle puisse être inquiète, pas seulement pour elle, mais aussi, et surtout, pour sa fille. « C'est compliqué, répétait-elle, peut-être une fois de trop, en tout cas assez pour que cela face tiquer son ami, haussant un sourcil et lui adressant un regard qui promptait un, Mais ça ira, confiant et si Lotfi n’en doutait pas, il posait une main sur l’épaule de son amie. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas, j’ai quelques contacts en Irak. » Ajoutait-il avec un léger sourire avant de libérer son épaule, son regard se posant sur la petite qui semblait complètement plongée dans le livre qu’elle avait entre les mains. Lotfi souriait doucement avant de reposer son regard vers Odalis, « Tu sais, si Azra n’a pas le temps, je pourrais m’arranger pour qu’on puisse amener ta fille passée quelques heures au festival. Comme cela, elle pourrait te raconter ce que tu as manqué à ton retour. » Proposait-il avec une lueur malicieuse dans le regard, rebondissant sur la réflexion que la maman avait faite un peu plus tôt. Il était certain qu’elle aurait eu un plaisir à amener sa fille découvrir les différents stands qui présentaient les différentes nations du monde magique, de nouvelles cultures, mais aussi et surtout des attractions pour tous les âges. C’était une proposition bien entendu, lui-même n’obligeait pas ses enfants à y venir, bien qu’il espérait qu’ils y aillent, au moins pour saluer leur oncle et tante.

« Et sinon, reprenait-il prenant un air un peu plus sérieux. Je ne sais pas trop si tu souhaites en parler, et sans obligation de me donner la nature de votre expédition, mais celle-ci semblait avoir été planifiée, est-ce cet imprévu qui t’inquiète réellement ? Peut-être parce que tu n’as plus envie de prendre ce genre de risque avec ta fille dans l’équation ou justement est-ce que ce qui t’inquiète, c’est que tu continues à aimer ce genre de voyage malgré tout ? » La question n’était évidemment pas innocente, Lotfi ayant ses propres questionnements depuis la mort de son père, ses échanges avec son grand-père et les événements d’Halloween. Difficile de ne pas mettre ses enfants dans une équation, peu importe la décision, bonne ou mauvaise, il y aura des répercussions sur eux.

Odalis sait bien que ce qu’elle dessine vaguement est plus inquiétant qu’autre chose, et que sa confiance s’apparente plus à une tentative de se rassurer qu’à une conviction profonde. Malgré elle, elle a envie de tout déballer, de raconter à son ami ce qui la trouble, cette marque qui refuse de s’effacer, la mémoire qui lui fait défaut. Mais de prononcer ses peurs à voix haute semble leur donner vie, les rendre plus tangibles, et de ça aussi, elle a peur. « Merci, Lotfi. Je ne l'oublierai pas. » Nul doute qu’ils en auront besoin. Vu comment les choses vont, ça ne fait pas de mal de se savoir bien entourée, au cas où quelque chose arriverait qu’ils ne sachent pas gérer seuls.

« Je crois que ça lui ferait plaisir. » Et à Odalis aussi, de savoir qu’en son absence sa fille n’est pas confinée à la maison. Elle a la plus grande confiance en Azra, évidemment, mais s’en veut toujours de la laisser derrière, de manquer les événements en apparence si ordinaires, qui pourtant revêtent une importance capitale pour la fillette. Comme à chaque fois, la culpabilité la prend au cœur, et la briseuse de sorts laisse échapper un profond soupir. « Je ne sais pas ce que je ferais sans Azra et toi. » Elle serait bien dépourvue, à vrai dire. Elle leur en doit énormément. Sans sa famille autour, ayant laissé le cirque derrière, et sans avoir révélé la vérité au père de sa fille – ou du moins, pas encore – elle ne sait pas comment elle aurait réussi à poursuivre dans cette voie. Le métier est dangereux, ses collègues peuvent être de vraies têtes de pioches, mais en dépit de tous les risques et de tous les mauvais côtés, Odalis ne peut pas s’empêcher de sentir que c’est sa voie.

Et ça, Lotfi le comprend, peut-être mieux qu’elle-même.

La question la prend de court, alors que l’artisan articule ce qu’elle ressent d’une façon dont elle n’a jamais su le faire. « Je… Elle s’interrompt encore quelques secondes, interdite, avant de parvenir à faire sens de la réalisation qui vient de la frapper. Je n’y ai même pas pensé. » Dans toutes ces réflexions sur l’avenir de leur expédition, sur leur avenir, sur la forte possibilité de mourir… Elle n’a pas songé changer de métier. Ne plus jamais mettre les pieds en Irak, oui, elle l’a envisagé – mais arrêter ? Se séparer de la Ligue, chercher un autre emploi ? Si ça lui a effleuré l’esprit, c’était si bref qu’elle l’a oublié tout aussi rapidement. « J’ai peur de la laisser seule, s’il devait m’arriver quelque chose. Et j’ai l’impression de l’abandonner à chaque départ. Elle pose un regard chagriné sur la tête bouclée de sa fille, toujours plongée dans les pages du lourd volume. Elle est tellement brave, Lotfi ! » Bien plus que sa mère. « Mais je ne saurais pas quoi faire d’autre. Je n’ai pas envie de faire quoi que ce soit d’autre. » Elle est égoïste, Medea. Elle veut tout garder – son indépendance, sa fille, son boulot – sans rien sacrifier. « C’est toujours relativement risqué, mais cette fois… » Un claquement agacé de la langue, alors qu’elle se refuse toujours à avouer, la vérité révélée dans la moue résignée et le regard bas, posé honteusement sur le coin du bureau.

making us better

@odalis bayat & @lotfi hashimi

« Je ne sais pas ce que je ferais sans Azra et toi. L’inventeur venait de croquer dans un des cookies s’interrompant pour jeter un coup d’œil sur Odalis. Bien entendu, la question était rhétorique, mais il se redressait en riant doucement. Et bien, tu aurais certainement trouvé deux autres amis tout aussi géniaux pour t’apporter un peu de soutiens et prendre soin de ta fille. » Répondait avec pragmatisme l’Iranien en lui adressant un léger clin d’œil amusé. Et lorsqu'il lui posait la question concernant son métier Odalis semblait surprise .« Je… - Hmm ? » Elle admettait un peu timidement qu'elle ne s'était pas posé la question, plongeant dans ses réflexions. Elle n’y avait pas pensé, de changer de métier, de voie pour quelque chose d’un peu moins risqué ou tout simplement qui ne lui demandait pas d’aller à l'autre bout du monde sans sa fille. C’était peut-être que finalement, il y avait beaucoup de son métier en elle, ce besoin d’un peu d’adrénaline et de découverte, malgré les risques et les séparations (temporaires). L'inventeur comprenait, il avait toujours voulu créer des choses, charmer le métal, pouvoir faire des objets utiles comme inutiles, mais des fois, il aurait voulu en faire un peu plus, ou un peu moins.

« J’ai peur de la laisser seule, s’il devait m’arriver quelque chose. La peur de tout bon parent. Une peur à laquelle il pouvait évidemment s'identifier, alors qu'il se posait beaucoup de questions sur l'avenir de leur famille. Et j’ai l’impression de l’abandonner à chaque départ. Lotfi suivait son regard vers la petite, il reconnaissait bien là une mère aimante, prête à tout pour sa fille, mais qui voulait aussi pouvoir vivre, sans concession. Elle est tellement brave, Lotfi ! Mais je ne saurais pas quoi faire d’autres. Je n’ai pas envie de faire quoi que ce soit d’autre. - Et tu n’as pas à le faire. C’est tout aussi important pour un enfant d’avoir un parent épanoui, que présent. »

Bien entendu, il y avait toujours une limite lorsqu’il s’agissait d’absence, mais Lotfi n’avait pas l’impression que la petite d’Odalis souffrait de l’absence de sa mère, et cela faisait quelque temps maintenant qu’elle n’était pas repartie à l’aventure (ou alors il n’avait pas été mis au courant). Lotfi avait toujours trouvé les femmes si fortes, qu'elles soient mères de famille ou non, il y avait quelque chose dans leur énergie qu’il trouvait terriblement inspirant. Lotfi ignorait où elles allaient puiser cette force, mais il trouvait que ça valait le respect comme l'admiration et ceux qui prétendaient le contraire n’avaient rien compris à l’humain. Combien de fois, on lui avait fait remarquer qu’il laissait beaucoup de liberté et de ‘pouvoir’ à son épouse. Comme s’il fallait tenir les scores et qu’il devrait y avoir une hiérarchie. Leia était son épouse, certes, mais elle était sa propre personne, avant d’être une mère et sa femme, jamais Lotfi se permettrait de lui imposer des limites, pas plus qu’elle ne lui en imposait.

Odalis faisait partie de ces femmes-là, de caractère, maman lionne certainement, mais aussi une sensibilité que seul ses proches mérité d'en être témoins. « C’est toujours relativement risqué, mais cette fois… Il n’y avait pas de suite, ni de révélation, le regard de son amie plonge en direction du bureau et le sorcier esquissait un sourire dont lui seul avait le secret. Cette fois, tu reviendras aussi. Affirmait-il sans hésitation, et tu auras ta fille et tes amis pour t’accueillir à la maison. Et, j’espère, une nouvelle commande pour me donner un peu de challenge. Taquinait-il en croquant de nouveau dans son cookie. Tu sais Odalis, je pense que ta fille tient de sa mère, et tu ne devrais pas trop t'inquiéter : je la vois déjà au sommet des dunes et faire du parkour dans les ruines de nos ancêtres. Poursuivait-il dans un ton encourageant, tentant de lui remonter le moral. Peu importe ce que vous partez affronter, je suis certain que vous reviendrez à bon port. On ira boire un thé à ton retour, et tu me raconteras ton aventure. Il s'interrompait un instant, avant d'ajouter. Et si tu as besoin de quoi que ce soit, n'hésite pas. » Insistait-il terminant son cookie.

Contenu sponsorisé