“ Mais je serai sage! ” Narcissa lève les yeux au ciel. À bien la connaître, on pourrait deviner un certain amusement sur son visage et dans le rictus crispé qui s'étale sur ses lèvres. Harry commence à bien la connaître, et sait que c'est plutôt bon signe: quand elle se détend un peu, Narcissa finit par accepter ses demandes. Il est vrai ceci dit qu'il y en a rarement eu de plus loufoque: s'en aller de Malfoy Manor, et puis quoi encore? À sa grande surprise, cette demande calée entre le fromage et le dessert pendant un dîner la semaine dernière, n'a pas fait s'étouffer Madame Black. Elle a arqué un sourcil, penché la tête, et a fini par dire non. Mais pas un non définitif. Alors Harry garde l'espoir et tous les jours, repose la question. Je pourrais vivre à Londres. Parler aux gens. Mettre une cible sur mon dos pour attirer les rebelles et les forcer à sortir de leurs cachettes. Inciter au changement. Rappeler aux citoyens la bonté du Lord. À chaque fois, une micro-expression sur le visage de Narcissa. Le sourcil. La paupière. La fossette. Des petits signes que Harry a appris à lire et à interpréter.

Et enfin, un petit sourire. L'ombre d'un sourire. L'esquisse de l'ombre d'un sourire. “ Je n'en doute pas Harry. ” C'est la première fois qu'elle répond concrètement, avec des mots. Harry est pendu à ses lèvres. Elle ignore son regard curieux posé sur elle et pose brièvement le plat de son pouce contre le bout de sa langue avant de tourner la page du Daily Prophet qu'elle est en train de lire. Alors qu'elle la tourne, Harry aperçoit sont propre regard sur la Une: il y a quelques jours, le journal sorcier a annoncé son grand retour et depuis, tout le monde en parle. Sa célébrité n'a jamais semblé si factice que de loin, depuis les landes anglaises où se trouve Malfoy Manor. Étrange que certains se souviennent de lui. Pourquoi ne sont-ils pas venus le chercher? “ Mais nous devons penser à ta sécurité. À Londres, tu ferais une cible plus facile... J'en ai parlé avec Lui. ” Harry sent tous les muscles de son corps se tendre quand il comprend de qui elle parle. “ Il pourrait accepter mais à une seule condition... ” Harry se penche presqu'au-dessus de la table pour mieux l'entendre. “ Il faut que tu ailles vivre avec Draco. ”

La surprise passée, le déni surmonté, la colère ravalée, il a fini par se rendre à l'évidence: il ne pourrait pas l'éviter. Alors il s'est bien rasé et il a mis ses plus beaux vêtements et il a attendu que Draco s'enferme dans sa chambre pour travailler après sa leçon avec Narcissa, et il est allé frapper à la porte gentiment. Il n'a pas attendu d'entendre son autorisation pour ouvrir la porte et glisser sa tête à l'intérieur. “ Draco? ” Ils s'adressent rarement la parole, et encore moins ainsi: comme égaux. “ Je sais que tu travailles dur du coup je t'ai fait un déjeuner. ” Il boude souvent sa nourriture, Draco, et il n'a pas beaucoup mangé le matin. Alors Harry lui a fait deux triangles jambon fromage, et il a même monté une tasse de thé avec. Noir, comme il sait que Draco préfère. Il travaille dur sur son alchimie, il mérite bien un petit break (et Harry sait que si il le caresse dans le sens du poil, il acceptera de l'héberger les trois jours par semaine qu'il pourra passer à Londres).

Harry réalise qu'il a fait une énorme erreur quand un petit silence l'accueille. Il ne croit pas avoir jamais appelé Draco par son prénom. Jamais. Il a toujours été Malfoy. Mais là c'est sorti, plus fort que lui. C'est à force d'écouter Narcissa le dire, en parler: humaniser celui qui a un jour été la terreur de sa scolarité, le bully stupide et arrogant qu'Harry trouvait aussi impressionnant que ridicule. Narcissa, qui réfléchit à voix haute quand elle dit qu'elle veut s'assurer que le garde-manger de son fils est plein; Narcissa, qui mentionne parfois au dîner les cours d'alchimie qu'elle lui donne; Narcissa, toujours heureuse d'accueillir son fils pour un dîner, un week-end, une soirée. Voir l'envers du décor est étranger, déroutant. Malfoy est devenu Draco. Harry n'a pas d'amour pour lui, malgré le fait qu'il s'autorise désormais à voir le monde comme il le voit: maintenant qu'il comprend mieux la démarche du Lord, ainsi que la répartition des gens et des choses sur Terre, il peut bien pardonner à Draco son arrogance d'antan. Ils étaient des gamins, de toutes façons. Aujourd'hui, ils sont des hommes. Ou presque.

Draco pivote sur sa chaise pour l'observer et Harry ne bouge pas, tendant un peu les bras pour mieux lui présenter le plateau en argent (et plutôt lourd) qu'il tient. Son sourire est gentil, léger sur ses lèvres, un peu bouffé par sa légère barbe. « Qu’est-ce que tu veux, Potter ? » Il repassera pour la courtoisie, mais rien n'arrête un Gryffindor qui s'est mise une idée en tête alors à la place, Harry s'approche avec le plateau pour venir le poser sur le bureau aux côtés de Draco, pensant que si il n'était pas invité à l'intérieur, l'héritier Malfoy se serait fait un certain plaisir à lui lancer un sort pour le mettre dehors. “ Juste te donner ça. ” Draco se lève brusquement quand il s'approche, et Harry s'agace de le trouver plus grand que lui. Il pince des lèvres malgré lui. Même après toutes ces années, ils ont toujours une relation rivale, ils se comparent, se déchirent, s'énervent, se chamaillent, se battent parfois, Narcissa agissant comme gardienne et arbitre entre eux. À la course à la taille, Draco mène depuis toujours ceci dit.

« Peu importe ce que tu me veux, ma mère ne peut pas te le donner ? » Il y a ça aussi: ce relent de jalousie dans la voix de Draco. Il doit partager sa mère pour la première fois de sa vie. Il ne comprend pas que Narcissa n'est pas la mère d'Harry et n'agit pas comme tel... si? Harry ne sait pas ce que ça fait d'avoir une mère. Narcissa... l'aide. Lui donne la stabilité et le calme dont il a besoin. Narcissa l'aide à trier ses pensées et ses souvenirs, à tirer sa mémoire au clair. Narcissa est... une alliée. Une... une amie. Quelque chose comme ça. Il fronce les sourcils, une pensée étrange menaçant de remonter à la surface, d'exploser sur son visage (un mélange de confusion et de colère et d'incompréhension et d'horreur: quand est-il devenu la bitch des Malfoy, depuis quand leur fait-il confiance, les adresse par leurs prénoms?); mais au dernier moment, elle disparaît et le visage d'Harry retombe dans cette expression amiable et affable à la fois, ce léger sourire sur les lèvres. “ Cette fois non. J'ai besoin de ton aide, ” admet-il, plutôt difficilement, décidant que la sincérité le mènera plus loin que le reste. Il lui adresse un grand sourire.

Machinalement, il tourne la tête, commence à observer les alentours. Il a déjà été dans cette pièce, la chambre de Draco, mais jamais avec ce dernier à l'intérieur: il remarque quelques détails, une veste qui pend à une armoire, des chaussures bien cirées qui attendent près de la porte, son sac en cuir près du lit. Et sur le bureau, un nom innombrable de livres, et des dessins, des cercles auxquels Harry n'entend rien. Ils lui rappellent... ces dessins lui rappellent Sirius et ces étranges signes qu'il avait de tatoués sur le corps... à la pensée de son parrain, les sourcils d'Harry se froncent et il regarde les dessins avec plus d'intensité, tendant même la main vers l'un d'eux. Il a bien compris que Narcissa apprenait l'alchimie à son fils, mais il imaginait... qu'imaginait-il exactement? Juste... une pierre philosophale. Des fioles. De l'or. De la fumée? “ Qu'est-ce que c'est? ” demande-t-il d'une voix un peu éteinte, repensant à la peau tendue de Sirius sur ses côtes au sortir d'Azkaban, les signes sur sa peau, les tatouages mal cicatrisés à l'air encore douloureux.

« De l’alchimie. Quelque chose que tu ne peux pas comprendre. » La voix de Draco est sèche et le ramène à l'instant présent comme un coup de fouet: il cligne des yeux et l'instant suivant, Malfoy se met en mouvement, rassemblant ses affaires, fermant les livres et fourrant les dessins entre les pages. Aussi brusquement que ça, les images le quittent, et cette pensée à Sirius se transforme en léger mal de tête. ... pourquoi? Il se souvient, très vaguement, d'une conversation lors de l'été séparant la quatrième de la cinquième année: ces quelques jours passés à Grimmauld Place, à tout nettoyer sous les ordres de Mrs Weasley. Ils étaient tombés sur des vieux livres, rongés par les mites, abîmés par le temps, rendus lourds par la poussière. Il y avait des symboles similaires sur ceux-là aussi... mais Harry se souvient plus précisément de l'énorme sourire de Sirius en retrouvant l'un des ouvrages. Il avait mentionné son oncle et...

Il a l'impression qu'on lui enfonce une pique de métal chauffé à blanc dans la nuque alors il repousse ce souvenir avec force. Une chose à la fois. Il faut se tourner vers le futur. Oublier le passé. Harry observe Draco débarrasser son bureau sans rien dire, ni rien faire, pas même un faux mouvement pour l'aider ou lui dire d'arrêter. Harry lui-même voit bien qu'il met Draco mal à l'aise. Qu'il n'aime pas l'avoir avec lui au manoir: Harry ne peut pas vraiment le blâmer, lui aussi n'aime pas toujours partager et il peut comprendre que Draco le considère comme un ennemi quand il passe la plupart de son temps dans la maison dans laquelle il a grandi, avec sa mère qui plus est. Il ne peut pas s'empêcher d'imaginer, avec un certain amusement, la situation inversée, Draco dormant dans le petit placard sous l'escalier... ça le rendrait certainement fou.

Ça rendrait fou n'importe qui. « Alors ? Tu voulais mon aide je crois ? Qu’est-ce que je peux faire pour toi ? » Harry hoche la tête. Une chose à la fois. Il ne doit pas s'égarer. Il sent déjà la pression entre ses sourcils augmenter, le léger mal de tête devenir plus puissant. Des fois, ses migraines sont telles qu'il doit aller s'allonger et se reposer pendant des heures. Mais Narcissa l'aide à gérer la plupart du temps, lui a appris à compartimenter douleurs et émotions, souvenirs et mémoires floues. Ça l'aide beaucoup. “ Oui, ” dit-il pour se recentrer et se reconcentrer à la fois. “ J'ai besoin de ton aide. Oui. Tu peux m'aider. C'est ça. ” Il hoche la tête d'un air assuré. Il a l'air accablé tout d'un coup, et bien plus vieux qu'il ne l'est réellement. Ces dernières années ont été longues et dures pour Harry. Sous certains angles, ça se voit. “ Il s'agit de... et bien, comment dire ça... t'es sûr que tu ne veux pas du sandwich? Non? Bon. Eh bien. ” Draco ne veut jamais manger de toutes façons. Pas étonnant qu'il soit si fin et maigre. Il se met à arpenter la pièce, faire les cent pas, l'air concentré. “ Narcissa- ta mère. Ta mère m'a envoyé ici. Elle veut- elle aimerait- eh bien non, pour tout te dire, j'aimerais sortir d'ici. Aller à Londres. Parfois — quelques jours par semaines seulement. Trois, en fait. Pas consécutifs. Juste trois jours loin d'ici. Mais elle aimerait, enfin, ta mère pense qu'il vaudrait mieux... ” Il relève les yeux vers Draco. Ses sourcils sont légèrement froncés, mais son regard est intense, et ne lâche pas celui de Draco. “ Que je vienne chez toi. Il y a deux chambres, de toutes façons, n'est-ce pas? ”

Les pensées d'Harry ont tendance à se mélanger, à ne pas faire de sens. À tourner, à rebondir, à s'éclipser, à se mélanger: et au final, du bout des lèvres, il parvient à parler, une diarrhée verbale. À chaque fois, Narcissa fronce les sourcils, essaye de suivre; et calmement, lui demande de répéter, dans l'ordre Harry s'il te plaît. Et puis parfois, ça fonctionne: les synapses retracent le chemin entre les neurones, les mots retrouvent leurs places comme des petits soldats dans leurs bataillons, et on verrait presque un peu du Harry d'avant dans le corps du Harry d'après.

(Il ne l'a jamais dit à personne mais des fois il voit dans le regard de Draco qu'il le voit lui aussi, le changement: quand son regard cesse d'être troublé, perdu, lointain. Il sent que Draco, parfois, le traite différemment. Il n'aime pas ça.)

Draco se met à rire et Harry fronce les sourcils. Ce son grinçant lui donne envie de serrer les poings, et d'en envoyer un dans la jolie mâchoire de l'ancien Slytherin. Les rires de Draco ont toujours eu la tendance à le crisper, à réveiller en lui des pulsions violentes. Il y a tellement de suffisance, et de condescendance, dans ce petit rire. « Et ma mère est d’accord pour que tu t’en ailles du Manoir comme ça ? » Il ne le croit pas — Harry ne lui en veut pas, mais lève les yeux au ciel tout de même. « Le Manoir ne te convient pas ? » Non ce n'est pas ça. L'endroit est grand, magnifique, bien décoré. Il a une chambre vaste qui est plus grande que la chambre de Dudley (un détail important pour lui) et qu'il n'a pas besoin de partager comme le dortoir à Hogwarts, ou sa chambre avec Ron au Terrier ou à Grimmauld Place. Tous les matins un elfe vient lui donner son petit-déjeuner et quand il a envie de sortir, le terrain qui entoure la propriété Malfoy est vaste, Narcissa lui a même fourni un balai alors il peut faire tout ce qu'il veut.

Mais. Il aimerait bien. Voir un peu plus le monde. Londres. Ses. Anciens? Anciens. Amis. De loin.

La vie ne s'est pas arrêtée pour lui. Lui, sa vie a été mise entre parenthèses pendant presque dix ans. Dix ans... dix ans de rien. De vide. (De douleur.) Dix ans d'attente.

Tout a un goût fade, même la nourriture qu'on lui sert au petit-déjeuner. Pourquoi est-ce qu'il est en vie? Pourquoi est-ce que Volde- le Lord veut-Il qu'il reste en vie?

Si il n'est fait que pour être un spectateur passif de cette guerre, alors il aimerait bien être au premier rang.

Il se demande si Florian Fortescue est toujours ouvert, il adorait ses glaces et leurs conversations. Oh comme il serait heureux de le revoir! « Je comprends mieux le plateau repas. Tu ne changes pas Potter. » Bizarre de dire ça: avant, il n'aurait jamais fait le moindre geste en direction de Draco. De Malfoy, l'appelait-il même. Mais maintenant, c'est dur de penser à lui autrement que Draco. Il est Draco, le fils de Narcissa, et non plus le petit prince arrogant et crispant qu'il était à Hogwarts. Harry n'a jamais été non plus du genre à demander les choses de manière détournées. Il demande, tout simplement; il n'est pas un roublard de Slytherin, à utiliser des moyens alambiqués pour obtenir ce qu'il veut. Narcissa a peut-être trop déteint sur lui... « Qu’est-ce qu’a dit ma mère lorsque tu lui as posé la question ? — De venir te voir. Que le Lord avait accepté, et que je devais simplement te convaincre. ” Il hausse une épaule. “ Il faudra bien évidemment sécuriser ton appartement. Mais elle a dit qu'un peu de compagnie ne te ferait pas de mal de toutes façons. ” Harry a cru comprendre que Draco n'avait plus vraiment d'amis depuis l'annonce de l'impureté de son sang. Ça l'a fait sourire quand il l'a appris. C'est triste bien entendu, pour Draco qui a vu sa vie exploser et son père sortir de sa vie. Mais ça l'a fait sourire de se rappeler de son arrogance d'antan. Comment se sent-il maintenant que ses amis lui ont tourné le dos pour une raison si stupide? Il comprend la valeur du sang, pourtant, Harry. On la lui a apprise. Durement.

“ Quant à moi... ” commence-t-il, se sentant faible quand il est le premier à détourner les yeux de leur regard intense, préférant les visser sur le bout de ses chaussures. “ J'aime bien ici. Mais j'aimerais voir comment le monde a changé. ” À la fin de la semaine, il donnera son petit discours qu'il prépare depuis des semaines. Alors il aimerait bien être préparé, même avec une seule petite excursion. La seule fois où il n'était pas dans le manoir écossais, où chez les Malfoy, c'est quand Il l'avait emmené à Privet Drive. Une bien triste visite. “ Je pense qu'on a tous les deux à y gagner, ” dit-il, même si clairement Draco n'a aucun avantage dans cette affaire à part peut-être faire plaisir à sa mère. “ Je me ferai tout petit comme une souris et je ne ferai pas de bruit. ” Il arque un sourcil. “ T'as peur, c'est ça? Que je te tue, prenne ta baguette et m'enfuie? Que tu échoues, encore, à Ses yeux? ” Il attaque vicieusement, ses yeux verts revenant dans les yeux bleus de Draco. “ Tu devrais me faire confiance. Je suis un gentil garçon maintenant. ”

« Tu aimerais bien. » Draco a légèrement pouffé avant de parler et de reprendre son visage sérieux: Harry ne l'a que regardé sans rien dire. Désormais c'est à lui de sourire légèrement en l'entendant, sa mémoire fragmentée parvenant à faire remonter à la surface ce souvenir, lointain et étrangement tendre, de ses premières années à Poudlard. « Tu aimerais que j’ai peur de toi, mais ce n’est pas le cas. » Cette fois le sourire sur le visage de Harry s'élargit. Il sait bien que Draco ne redoute pas du tout Harry, qui n'a pas pris un kilo depuis des mois, qui n'est que... eh bien, Harry. Mais il sait ce qu'il représente aux yeux du Seigneur: il connait sa valeur. Draco se recule alors que Harry le toise, toujours avec ce léger sourire presque suffisant sur les lèvres. « Si le Lord a décidé de te confier à moi, qui suis-je pour aller à l’encontre de ses ordres ? — Effectivement, ” dit Harry. “ Oserais-tu? ”

Draco se passe une main dans les cheveux, Harry regardant presque avec agacement ses mèches blondes retomber de manière parfaitement ordonnée sur son crâne. Lui a toujours les cheveux en pétard, quoiqu'il fasse, même Narcissa a fini par abandonner ses vains espoirs pour lui donner une coupe de cheveux décente. Malgré son sang souillé, Draco a toujours ces airs de la haute qui hérissent les poils d'Harry sur ses bras. « Ma mère t’a parlé de ma chambre en plus, mais pour l’instant elle me sert de débarras. Elle n’est pas vraiment vivable. Je ferai en sorte de te caser un lit là-dedans. » Le visage de Harry s'éclaire, le sourire devenant sincère sur son visage — c'est sans doute l'une de ses premières véritables risettes qu'il autorise Draco à voir. « Te réjouis pas trop vite. Il y aura des règles à respecter sous mon toit, Potter. Tu ne pourras pas faire ce que tu veux. » Harry lève les yeux au ciel. “ Peu importe, ” dit-il en faisant un petit mouvement dédaigneux de la main. “ Tout ce que tu veux. ”

Et dans un geste qui ne trouve son écho que quinze ans plus tard, de manière complètement étrange et absurde et bizarre, Harry tend la main en direction de Draco.

Fais bien attention à qui tu fréquentes, Potter, lui avait-il dit, dans le compartiment du Hogwarts Express il y a presque seize ans, alors qu'Harry ne connaissait quasiment rien au monde magique. Aujourd'hui... aujourd'hui ils sont bien différents. Et Harry a bien changé de fréquentations... Malheureusement? Non. Harry a décidé qu'il croyait au destin. Qu'il est là pour une raison. Et il ne fait qu'accomplir ce destin, justement, en souriant à Draco. “ T'es sûr que t'as pas peur? ” le nargue-t-il quand il le voit hésiter.