chaos#2 ⊹ for you alone i will be weak.

TW: explicit content

La sensation de la peau de Bao contre la sienne est enivrante, presque inconfortable par son intensité. Carrie aimerait la presser d'autant plus contre elle, dans le vain espoir qu'elle fasse disparaître par sa simple présence le léger inconfort qu'elle ressent, mais qu'elle repousse avec la même fermeté qu'elle applique sur le dos de Bao pour la tenir près d'elle. Se montrer vulnérable est toujours un combat avec elle-même, comme si ses pensées si facilement emmêlées ne pouvaient pas même s'arrêter dans ces moments précis où elle aimerait juste s'abandonner complètement, entièrement, et les laisser de côté. A ce jour, il n'y a qu'une seule substance qui a jamais su la faire arrêter de réfléchir.
Les lèvres de Bao sont néanmoins un bon placebo, surtout lorsqu'elles sont si avides et pressantes, requérant toute son attention - ce que Carrie lui accorde sans hésitation. Elle aimerait fondre sous les doigts que Bao fait traîner à la surface de son corps, disparaître sous l'eau, s'enfermer pour toujours dans cette sensation de bien-être qui, elle le sait, n'est qu'éphémère. Mais peu importe, en cet instant précis. Rien n'importe, si ce n'est Bao, Bao qui l'embrasse, Bao qui la caresse, comme si il restait quoique ce soit à adorer dans son petit corps.

Les doigts de Bao effleurent son sein et un sursaut agite Carrie malgré elle. Elle repousse fermement Bao pour mieux se redresser elle-même, ses mains glissant sur ses épaules, remontant dans son cou se cacher dans ses cheveux - comme toujours, tout plaisir qu'elle ressent est accueilli avec un mélange de gêne et d'incompréhension. Après tout ce qu'elle a vécu, elle a l'impression que cette sensation est dérangeante, presque dégoûtante, la paralysant douloureusement sans qu'elle puisse l'expliquer; et déjà, elle sent des griffes s'enfoncer à l'arrière de son crâne, lacérer les souvenirs et émotions contraires qui y sont logées, impatientes de les laisser s'échapper.
Mais sur sa nuque sont aussi posés les doigts de Bao, comme un barrage à toute éruption violente et destructrice. Peu désireuse de s'attarder sur la chose, les mains de Carrie se crispent autour du cou de Bao pour l'attirer de nouveau à elle et l'embrasser avec ardeur et un peu trop de brusquerie. Si une main attrape sans douceur une poignée de cheveux noirs pour l'empêcher de s'éloigner - même si elle doute que Bao pense à cela en cet instant précis - dans une vaine tentative de se rassurer qu'elle est en contrôle de la situation, l'autre main va chercher celle de Bao sous l'eau pour la poser sur sa propre taille. "Don't move your hands." Elle relâche le poignet de Bao, bizarrement rassurée par le simple fait de savoir qu'elle n'a pas besoin d'en faire plus pour qu'elle lui obéisse.

Sa main reste sous l'eau, effleurant son genou avant de descendre le long de l'intérieur de sa cuisse rapidement, jusqu'à son entrejambe, ses doigts trouvant son centre impatiemment, ravie de taire son soupir d'un énième baiser. Elle abandonne vite les lèvres de Bao pour laisser sa bouche trouver son cou, son pouls qui y bat à toute allure, comme si l'embrasser pourrait l'imprimer sur sa propre peau. Bao est vivante, vibrante contre elle, brûlante là où elle la touche sous l'eau, la rendant elle-même légèrement fébrile. "You can move them now," finit-elle par lâcher du bout des lèvres, tout contre sa peau, quand les griffes à l'arrière de son crâne se sont rétractées et l'angoisse à la surface de sa peau un peu calmée. Elle arrête seulement ses baisers pour se reculer et se plonger dans ses yeux impossiblement noirs, sa main dans ses cheveux la tenant à distance afin qu'elle puisse l'observer quand ses doigts, après l'avoir caressée, s'introduisent impatiemment en elle sans mal.

(CHAOS #2)
for you alone, I will be weak.

Early 2006 - London

tw: sexual content

C’est avec une aisance voluptueuse que Bao s’abandonne plus encore à la peau, aux lèvres, au souffle chaud, au corps de Carrie. Sous l’avalanche soudaine du désir qui s’empare de son esprit et qui guide ses gestes, l’animal poursuit sa caresse sans même en prendre conscience, se laissant aller aux injonctions de ses membres, l’invitant à épouser le corps sous le sien sans retenue, pour effacer les restes de leur brève altercation qui semble bien loin maintenant qu’elle la recouvre parfaitement. Sa paume progresse sur la poitrine de Carrie, dans cet élan incontrôlable, quand Bao peut la sentir se tendre brusquement sous sa caresse, lui faisant rouvrir les yeux lorsqu’elle se redresse plus abruptement.
Être à l’écoute d’un partenaire est aussi unique pour Bao que la chaleur renversante dans sa poitrine quand elle est en présence de Carrie. Elle ne cherche habituellement qu’une satisfaction égoïste dans ses rapports, assouvissant rapidement un besoin pressant dans les bras de vulgaires sorciers - et parfois même moldus -, souvent repérés dans des bars où la Wang ne se rend toujours qu’une seule fois, s’assurant de ne jamais recroiser ceux qu’elle utilise comme un moyen expéditif de se soulager. Cela l’a toujours rassuré, d’être avec des hommes, trouvant cela bien plus simple de n’y voir qu’un acte purement charnel et surtout d’y mettre toute sa rage incandescente. C’est le visage qu’a toujours revêtu le désir et le plaisir pour Bao : une envie passagère, que l’on fait disparaître sous quelques coups de rein - et plus rarement sous les caresses et le corps de femmes - avant de se volatiliser, satisfaite et indifférente.

Avec Carrie, plus rien n’a la même teneur.
Dans ces bras, Bao y retourne volontiers, inlassablement même, et se découvre une nouvelle facette de son avidité, prenant naturellement le pas sur ce qu’elle a toujours connu quand il s’agit de Carrie. Elle aime se livrer à l’intensité de la Warlock, la laisser guider son propre désir pour répondre aveuglément au sien ; à son contact, elle sait qu’elle n’a aucunement besoin de prendre la moindre initiative, qu’il lui suffit de suivre celles de son amante pour être satisfaite. Le chien du Clan trouve dans leur rapport un reflet de son existence à se plier aux autres sans se poser la moindre question ; elle y trouve ce qu’elle ne savait pas pouvoir désirer un jour : un abandon total, sans condition.

Sous l’arrêt net, Bao rétracte fébrilement sa main, la laissant retomber plus bas sur le ventre de Carrie avant de sonder son regard en se redressant elle-même pour suivre son corps, ses jambes se repliant de chaque côté des siennes dans un même mouvement. Elle n’a pas à soutenir les pupilles agitées plus longtemps, alors qu’elle plonge sur ses lèvres en obéissant aux doigts dans sa nuque qui l’attirent vers la bouche qu’elle retrouve dans un soupir, sa respiration s’accélérant malgré elle quand la main se referme pleinement sur sa chevelure - ne sachant pas bien si la douce excitation qui se déverse dans son crâne est dûe à la prise ferme en elle-même ou à la vague brûlure qu’elle lui procure à la racine de ses cheveux. ”Don't move your hands.” Sans l’ombre d’une réticence, Bao replie son poing sur sa hanche quand Carrie l’y guide, suivant ses paroles et ses gestes avec une attention rare.
Une onde de chaleur remonte le long de son estomac, lui enserrant furieusement la gorge, lorsque les doigts de Carrie se dirigent entre ses jambes, la caresse lui imposant un soupir qui s’écrase contre les lèvres de la blonde, qu’elle dévore avec plus d’intensité sous le plaisir fulgurant qu’elle lui donne. Elle ferme les yeux, renversant la tête en arrière pour lui offrir pleinement son cou, sans pouvoir empêcher un souffle plus court se faufiler hors de sa bouche entrouverte. ”You can move them now.” La voix basse la tire un instant vers la lumière, cillant frénétiquement en baissant son regard vers celui que Carrie lui renvoie lorsqu’elle lui force à reculer son visage de la main toujours agrippée à ses cheveux ; et c’est un gémissement plus audible qui lui échappe quand elle sent les doigts glisser en elle, ses traits se contractant fébrilement en soutenant les pupilles sombres dans les siennes.

Comme s’ils en avaient attendu l’autorisation, les doigts de Bao s’impriment plus profondément dans la nuque de Carrie en réaction au plaisir qui remonte jusque dans ses joues rosées, le reste de son corps fondant tout simplement dans l’eau chaude. Son autre paume, elle aussi libérée par les mots de la Fox, vient retrouver la peau qu’elle parcourt fiévreusement, avec un appétit non dissimulé. Soupirant encore sous la caresse, elle s’aventure à nouveau sur sa poitrine, reprenant son parcours là où elle l’avait laissé, glissant souplement sur son sein, puis plus haut sur sa clavicule, la naissance de sa gorge, avant de redescendre sur son ventre ; autant de parcelles de cette peau dont elle veut ressentir chaque fragment. Dans un mouvement plus hésitant, Bao se dirige entre les cuisses de Carrie, lui adressant un regard où se mêlent autant son plaisir que son envie de lui apporter le même bien-être. “Tell me what you want. parvient-elle à souffler entre deux soupirs, déglutissant difficilement. Tell me what you want, please.” Et en répétant son envie d’uniquement répondre à ses désirs, malgré elle, elle atteint l’entrejambe de Carrie, pour la caresser à son tour dans un regard tout aussi vulnérable que son toucher.

TW: explicit content

Le gémissement qui s'échappe d'entre les lèvres de Bao tiraille le ventre de Carrie d'un désir et d'un plaisir vertigineux, la faisant retenir sa respiration momentanément. Elle a l'impression d'avoir réveillé quelque chose chez Bao, dont les doigts se pressent d'autant plus sur sa nuque, appuyant sur ce point si sensible chez elle, la soulageant d'une énième bouffée d'angoisse quand son autre main reprend ses caresses sur son corps, sans hésitation ni retenue. Carrie frissonne partout où Bao la touche, et sent même son corps la trahir, demander plus de ces caresses fébriles. Elle a découvert, avec le temps qui a passé, combien elle aimait le corps de Bao. Pressé contre elle à l'étouffer, en train de se contracter de plaisir sous ses attentions, détendu quand elle dort. Elle a appris à le connaître, a retracé chaque cicatrice du bout des doigts, a fait l'inventaire des grains de beauté le parsemant, se souvient de chaque marque, chaque creux, chaque détail, les réimaginant avec une précision obsessionnelle quand elle a envie d'elle et qu'elle est loin.
Mais son imagination est bien décevante, quand elle la compare à la réalité. Bao est brûlante, avide, impatiente, d'une manière qui la dérange ordinairement chez ses amantes, ayant du mal à concilier son envie d'être désirée et son dégoût d'être regardée, décortiquée. Le regard incandescent que Bao pose sur elle quand elle la touche, l'embrasse, la déshabille, est tellement impossible pour elle que son imagination est bien incapable de le créer.

Bao accueille ses doigts sans mal, tirant un soupir de satisfaction à Carrie qui doit réprimer l'envie de fermer les yeux pour profiter de l'instant présent, s'abandonner complètement. Mais elle préfère nettement plus l'observer, graver dans sa mémoire tout ce qui peut l'être, pour le savourer plus tard de nouveau.
Carrie sent ses cuisses se contracter sous la main de Bao, s'écartant légèrement comme pour l'y accueillir plus facilement. “Tell me what you want." Malgré elle, les doigts de Carrie se resserent dans les cheveux de Bao et sa respiration se coince dans sa poitrine, ses yeux sombres s'écarquillant en l'entendant, comme si ces mots passaient ses lèvres pour la première fois. "Tell me what you want, please.” Le dernier mot, please tiraille le bas-ventre de Carrie d'autant plus, et elle soupire, se mordant la lèvre quand les doigts de Bao atteignent son entrejambe. Jusqu'à la rencontrer, Carrie ignorait qu'elle avait envie de tout ça: son avidité, son ardeur ou sa dévotion, pas à ce point, en tous cas. Ce constant la remplit d'une certaine nervosité quand elle y repense, quand elle ne s'y abandonne pas complètement, quand Bao et son regard intoxicant sont loin.
Des soucis pour le lendemain. Ou un autre jour. Ou jamais.

"Keep going," parvient-elle à lâcher d'une petite voix, attirant de nouveau Bao vers elle, ses doigts toujours crispés dans ses cheveux. "Just like that." A mesure qu'elles s'embrassent, se touchent, se caressent, les pensées de Carrie morcelées et éparpillées dans un beau foutoir agréables pour une fois, elle sent monter en elle une vague vertigineuse de plaisir, de contentement aussi. Bao ne la juge pas, Bao ne la méprise pas, Bao ne l'utilise pas, Bao la veut.

La vague devient trop grande. Il y a les lèvres de Bao, ses doigts dans sa nuque et ses doigts qui continuent de la caresser, son corps pressé au sien, ses cheveux humides qui collent à ses joues, l'eau tiède teintée de sang, la mousse qui les entoure, le froid de la porcelaine dans son dos et sous elle, l'air pesant de la salle de bains, l'odeur de Bao qui l'enveloppe, celle du produit qu'elle a déversé dans le bain, celle des cigarettes qu'elle a fumé plus tôt, il y a aussi son coeur qui tambourine dans ses oreilles, les gémissements qui lui échappent souvent malgré elle, la respiration de Bao sur ses lèvres entre deux baisers, l'eau qui déborde quand elles bougent, la lumière trop forte venant du plafond, et Bao, Bao qui est partout, contre elle, sur elle, partout. "Stop." Elle se sent étourdie, mal à l'aise, submergée.
Carrie relâche sa pression dans les cheveux de Bao et sa main vient plutôt sur son visage recouvrir ses yeux quand elle se recule, incapable d'affronter son regard en cet instant précis. Il n'a pas fallu plus qu'un mot pour l'arrêter, constat qui la remplit d'une satisfaction intense. Carrie reprend son souffle, sa main abandonnant ses caresses entre les jambes de Bao pour se poser au fond de la baignoire. Au début, elle refusait toujours que Bao la regarde, lui bandant les yeux comme à la quasi-totalité de ses amantes, sorte de rite d'initiation le temps qu'elle lui fasse confiance et s'habitue à elle. Maintenant, malgré les émotions contraires qui l'agitent encore, Carrie préfère se plonger dans ses yeux quand elles se voient.

Sa main finit par retomber dans son cou, son pouce sur sa gorge. "Let's go on the bed." Elle l'embrasse rapidement avant de la laisser se relever, l'observant d'un oeil noir de désir, avant de l'imiter. "Go, I'll be a minute." Et comme pour l'y inciter, ou juste parce qu'elle ne peut pas s'en empêcher, elle l'attire à elle, l'embrasse de nouveau, avant de la pousser vers la porte.
Quand elle est toute seule, nue et trempée dans la salle de bains, Carrie ferme les yeux et tous les traits de son visage se plissent. Elle relâche un long soupir souffreteux, expie un rien de mal-être, et convoque à grand mal le regard de Bao dans ses pensées pour se calmer. Devoir penser au chien des Wang pour faire taire une nervosité qui n'a pas lieu d'être... Carrie en a honte, mais décide que personne n'a besoin de savoir - encore moins la concernée.
Elle rouvre les yeux et, confrontée à son reflet dans le miroir au-dessus du lavabo, essaye vainement de griffer la colombe logée sous son sein, la regardant disparaître dans son dos avec agacement.

Elle a remis ses sous-vêtements quand elle quitte la salle de bains après avoir rapidement appuyé sur le clapet de la baignoire, offrant un regard impassible à Bao avant de la rejoindre sur le lit. "I bought these for you, so you could at least enjoy them for a bit," grogne-t-elle en venant l'embrasser sans hésitation ni patience, ses doigts s'enfonçant de nouveau dans ses cheveux avec plaisir, peu désireuse aussi de voir sa réaction à l'idée que Carrie ait fait cet achat rien que pour elle. Les lèvres de Bao effacent les derniers relents de nervosité, comme elle s'y attendait, et Carrie se sent se détendre malgré elle. "Roll on your side." Elle se détache pour la laisser faire, ses doigts venant légèrement effleurer ses côtes avec un froncement de sourcils. "You're funny with your "I don't care"s but foreplay's over and I won't have you writhing in pain while I'm trying to get off." Et de se pencher pour tirer, de la table de nuit, une crème apaisante qu'elle utilise quand elle reste trop longtemps penchée sur le bureau et que ses épaules lui font mal; sans lui demander son avis, elle en badigeonne le flanc de Bao avant d'y poser ses mains et de commencer à la masser, l'air concentré et imperturbable, insensible semblerait-il à l'étrange de la situation.

(CHAOS #2)
for you alone, I will be weak.

Early 2006 - London

tw: epxlicit content

"Keep going. Just like that." Naturellement, le corps de Bao répond à la voix soufflée de Carrie, aspirant le soupir qu’elle écrase contre ses traits lorsqu’elle la caresse voluptueusement. Observer de son regard brûlant, sentir sous ses doigts impatients, le corps sous le sien réagir passionnément à sa tendresse, fait courir un frisson le long de sa nuque, comme si le plaisir qu’elle peut lire sur le visage de la Warlock passait de sa peau à la sienne dans une onde électrisante et savoureuse. Jamais Bao n’aurait cru pouvoir un jour tirer une telle satisfaction en s’abandonnant au désir et aux sensations données à l’une de ses amantes ; de fait, jamais se serait-elle cru capable d’une douceur avide semblable à celle qui habite ses gestes quand il s’agit de toucher Carrie. Elle aime la désirer à ce point, et se découvrir en mesure d’apprécier - un mot bien peu représentatif de la chaleur que cela lui procure - les multiples manifestations du plaisir simple et saisissant qu’elle peut donner. Comme si elle était capable, après tout, de donner dans autre chose que la destruction et la colère.

L’impatience dévorante la rendant tremblante ne lui empêche pas de savourer chaque seconde contre la peau translucide de Carrie, qu’elle épouse parfaitement, comme à chaque fois qu’elles se laissent aller à cette passion qui les ronge. En l’embrassant, l’étreignant, la caressant, en s’oubliant sous les doigts en elle, en détaillant les traits sous ses yeux, en soupirant contre ses lèvres, en fondant tout simplement face à l’assaut de cette addition de contacts sur son corps, sa bouche, ses cheveux, Bao a l’impression qu’elle n’en aura jamais assez, que s’en lasser un jour serait du domaine de l’absurde. Dans l’eau brûlante teintée de sang, il n’existe plus que Carrie, et Bao souhaite qu’il n’existe plus que ce moment ; que le temps s’arrête, et les laisse ainsi, ne formant plus qu’une même respiration.

"Stop." Sans avoir le temps de se raccrocher à ses sens, Bao se retrouve aveuglée par la main de Carrie s'empressant de la plonger dans le noir - un écho de leurs premières étreintes, où cette dernière lui imposait immanquablement l’obscurité d’un bandeau sur les yeux. Elle ne sait plus quand, ni comment, elle a décroché le droit de pouvoir l’observer ainsi, elle sait simplement que désormais, elle ne s’en passe que difficilement. Le chien de garde récupère aussitôt sa main, qu’elle laisse flotter dans l’eau, et desserre la prise de ses doigts sur la nuque chaude de Carrie, alors qu’elle retrouve enfin la vue en papillonnant violemment sous le retour désagréable à la réalité. "Let's go on the bed." Les yeux sombres de l’animal rencontrent brièvement ceux de son amante, avant de la laisser capturer ses lèvres à nouveau, contre lesquelles elle étouffe un soupir brusque. Étourdie et haletante, elle opine faiblement du chef en se relevant sans contester l’envie de Carrie, prenant le pas sur la sienne - sans l’ombre d’un doute, Bao serait restée fondre dans l’eau rosée pendant des heures si elle en avait eu l’occasion. ”Go, I'll be a minute." Et avant même de pouvoir lui exprimer son envie de rester à ses côtés - la perspective de se décrocher de sa peau trop longtemps, alors que l’empreinte de Carrie est partout sur la sienne, faisant cavaler à l’arrière de son crâne une sensation amère -, à nouveau, elle reçoit un baiser qui a raison de ses réticences. “Ok.” S’emparant à la volée d’une serviette qu’elle balance sur ses épaules, la Wang finit par sortir de la salle de bain en jetant un dernier regard fébrile à celle qui la pousse vers la porte.

Bao ne prête pas vraiment attention à l’eau gouttant sur le sol quand elle se dirige vers la chambre, se sèche sans grande conviction avant de jeter la serviette roulée en boule sur le tabouret près de la fenêtre, avant de se laisser tomber sur le lit en soupirant. Malgré la douceur des draps qui l’accueillent sans mal, elle ne parvient pas à retenir une faible grimace à l’impact - sous les caresses de Carrie, elle en avait presque oublié la douleur lancinante dans ses côtes, soit peu de chose en comparaison à son envie insoutenable de la voir franchir la porte.
Et elle n’est pas déçue, quand elle l’aperçoit peu de temps après, vêtue des sous-vêtements dont elle a dû se défaire pour la rejoindre dans le bain. Assurément, Bao n’est pas de celles à être particulièrement séduite par des morceaux de tissus et dentelles cousus entre eux - elle laisse volontiers cet attrait à son frère Zhang, qui s’entête à refaire constamment sa garde-robe pour qu’elle soit plus “hot”, urgh. Pourtant, et invraisemblablement, les tenues de Carrie savent toujours avoir leur effet sur le chien de garde. Quoi qu’elle porte, la blonde est une oeuvre qu’il est grisant de détailler du regard. Bao ignorait aimer l’art, avant de découvrir le corps de Carrie. "I bought these for you, so you could at least enjoy them for a bit." I bought these for you. L’animal ne peut s’empêcher d’arrondir les yeux sous la déclaration décontractée de son amante, qui la rejoint sur le lit, ne lui laissant pas le loisir de réagir pour l’embrasser avidement. L’idée même que Carrie - que quelqu’un - ait pris le temps de choisir une tenue susceptible de lui plaire lui tourne la tête ; Bao, peu habituée à de telles attentions, sent son coeur s’emballer sous ces émotions contradictoires, violentes, nouvelles.

Le torrent, couplé au contact retrouvé avec la peau claire qu’elle effleure en passant une main dans son dos, ravive la chaleur nette dans son ventre. "Roll on your side." La jeune Wang doit provoquer l’effort de rouvrir les yeux, fronçant les sourcils devant cette nouvelle frustration ; c’est aussi cela, que de rentrer dans le jeu de Carrie : la laisser jouer avec son désir. “Really?” Difficile pourtant, à ce stade, de se retenir d’exprimer son impatience. La première rupture dans la salle de bain a déjà été un supplice, et cette seconde entrave à son envie de parcourir son corps, l’obligeant à se tourner sur le côté dans un léger soupir, est pire encore. Bao s’allonge sur le flanc en rabattant un bras sous sa tête, avant de lever un oeil vers Carrie pour apercevoir la main se rapproche de ses côtes. Elle ne peut réprimer une inspiration profonde quand la douleur se diffuse sous les doigts qui l’effleurent - ce n’est rien, trois fois rien. "You're funny with your "I don't care"s but foreplay's over and I won't have you writhing in pain while I'm trying to get off. − I’m not going to-” La fin de sa phrase se perd entre ses dents qui se serrent soudainement lorsque Carrie commence à la masser doucement, après lui avoir badigeonné le flanc d’un onguent frais qui lui tire un frisson. Ses muscles se tendent sous les paumes qui viennent répartir la douleur dans le haut de son corps, lui coupant quelques secondes le souffle - sans trop savoir si sa subite difficulté à respirer est due à la peine physique, ou à l’attention déconcertante de Carrie à son égard. Bien sûr, la Fox ne fait cela que dans son propre intérêt, comme elle l’a souligné, pour ne pas voir son amante grimacer quand elles reprendront là où elles ont se sont arrêtées dans la baignoire. Bien sûr, Bao le sait, et se le répète. Carrie la répare simplement pour mieux profiter d’elle, et cela lui convient - tellement, que la chaleur jusqu’alors logée dans son ventre remonte dans sa poitrine.

”You know...”, glisse-t-elle alors qu’elle récupère progressivement son souffle, un peu surprise par l’effet du baume sur sa blessure. Ses doigts, jusqu’alors crispés sur les draps pour supporter le massage, s’en détachent pour frôler le genoux de Carrie, toujours penchée au-dessus d’elle. ”You don’t have to.” Elle n’a pas à être tendre, aussi bien dans son attention que dans ses gestes. Elle n’a pas à prendre soin d’elle. Elle n’a pas à lui offrir cette fenêtre insolite sur ce que Bao n’avait jamais effleuré. Elle n’a pas à traiter Bao de la sorte, comme si elle importait réellement.
Sa main remonte sur l’extérieure de sa cuisse en une caresse lente, précédée de son regard, qui balaye sa peau avant de chercher à capturer son regard. ”I’m not one for tenderness”, dit-elle, en faisant preuve de la même tendresse, lorsqu’elle passe sa paume dans son dos, cherchant à l’étreinte bien malgré elle. Jamais assez.

tw: tenderness

Bao se laisse faire, après un rapide sursaut sous les mains de Carrie, et celle-ci se concentre sur son petit massage avec un air concentré et sérieux. Elle fait attention, mais n’y met pas trop de douceur non plus, préférant rester efficace et rapide, comme si elle n’aimait pas prendre soin de son amante; il faut après tout prendre soin de ses jouets pour qu’ils durent longtemps.
Elle doit réprimer une grimace quand ses yeux s’attardent trop sur les hématomes et les blessures, agacée de cette sensation désagréable montant en elle en imaginant que Bao aurait peut-être pu mourir ce soir et ne pas se présenter à leur rendez-vous. Des amantes, elle pourrait en avoir des dizaines; des amantes comme Bao, aucune. Elle est spéciale, Carrie l’a rendue spéciale, et c’était une grossière erreur.
Mais si elles gardent le secret, alors ça ira.

Carrie frémit en sentant les doigts de Bao effleurer son genou, et reporte son regard au sien d’un air interrogateur. Elle a senti son corps se détendre sous ses mains, l’onguent s’immisçant sous sa peau et y délivrant ses propriétés magiques; de quoi soulager la douleur et les muscles meurtris, mais Carrie se fait une note mentale de lui rappeler d’aller faire se soigner correctement demain. “You know...” Carrie hume en réponse, attendant silencieusement la suite en reportant son regard sur le travail de ses mains. “You don’t have to.” Carrie ressent un pic d’agacement en l’entendant et lui décoche un regard noir malgré elle. Elle ne veut pas penser à ce qu’elle est en train de faire, ce moment intime et doux en dehors du temps, elle ne veut pas s’arrêter pour y réfléchir parce que si elle se met à réfléchir, ses pensées vont tourbillonner désagréablement dans sa tête et même les baisers de Bao ne sauront pas les calmer.
Carrie réprime un long frisson tandis que les doigts de Bao remontent le long de sa cuisse jusqu’à sa hanche, son dos. “I’m not one for tenderness.” Le sourire en coin qui vient éclairer ses lèvres pincées, en revanche, elle ne le réprime pas.

Il y a tant de choses qu’elle pourrait lui répondre, entre le sincère me neither et le dédaigneux that’s not what this is. Mais elle n’a aucune bonne raison de mentir à Bao, alors simplement: “then don’t think about it too much.” Elle se penche en avant, pressée par la main dans son dos, entoure de ses cheveux blonds le visage de Bao en s’en approchant. Elle la regarde un instant avant de venir l’embrasser avec moins d’impatience qu’avant, sa main glissant elle aussi dans le dos de la jeune femme, caressant sa colonne. Le baiser est délicat, d’une manière inédite, déterminé et doux. Quand elle se recule, Carrie s’attarde près du visage de Bao pour l’observer un bref instant. “You might not be “one for tenderness”,” elle signe les guillemets dans les airs avec sa main libre, “but it seems you’re pretty good at it.”

Elle essuie ses mains sur les draps négligemment avant que l’une d’elles revienne sur son dos, remontant le long de sa colonne jusqu’à sa nuque, son cou, ses cheveux. Carrie s’allonge face à Bao sur le lit, laissant ses doigts glisser entre ses cheveux, les repousser de son visage, le fouillant des yeux d’un air incertain. “I won’t tell if you don’t.” Elle ne doute pas qu’ils seraient plus d’un surpris de les trouver là, idiotes et tendres, dans un rare moment de calme pour elles.
Elle caresse distraitement les cheveux de Bao, son cou, sa pommette, fronçant légèrement les sourcils en réfléchissant, avant que ses doigts s’immobilisent dans sa nuque pour l’attirer dans un autre baiser, un peu moins calme que le précédent, mais la remplissant de la même plénitude simple et satisfaisante.

(CHAOS #2)
for you alone, I will be weak.

Early 2006 - London

tw:tenderness

"Then don’t think about it too much." Il est si facile, de ne penser à rien en présence de Carrie, de laisser son esprit se vider pour se concentrer uniquement sur ses traits, son corps, son odeur, sa voix, de s’abandonner parfaitement à sa volonté, et, dans le cas, présent, aux mains qui viennent apaiser la douleur sur son flanc. Jamais Bao n’aurait cru être capable d’un tel laisser-aller en présence d’un autre être humain, encore moins d’une amante. Mais Carrie rend l’exercice si simple, presque naturel, comme si Bao avait toujours été prédisposée à lâcher prise et à s’offrir sans conditions de la sorte, une chaleur sensible montant par vague dans sa poitrine à cette scène inédite, et pourtant sensée. Elle se défait de sa gêne pour suivre le son de la voix de Carrie, aussi douce que ses paumes sur sa blessure.

Elle la suit du regard, lorsque la sorcière se penche vers elle, ses cheveux encadrant son visage un rideau confortable qui semble les couper du reste du monde, renforçant l’intensité de ce moment suspendu dans le temps, et, maintenant, dans l’espace. Elle détaille les traits qu’elle a retracé dans son esprit tant de fois, chaque parcelle de son visage, si proche du sien, lui donnant l’impression de s’y perdre, sans la moindre retenue ou honte. Bao répond à son baiser avec la même douceur langoureuse, remontant sa main dans sa nuque instinctivement pour mieux l’accueillir contre ses lèvres, inspirant son souffle alors qu’un frisson parcourt sa colonne vertébrale. ”You might not be “one for tenderness”, but it seems you’re pretty good at it.” Le constat la laisse muette, entrouvrant les lèvres sans trouver réellement ce qu’elle pourrait rétorquer pour s’en défendre - pas quand elle caresse la nuque de Carrie de son pouce, pas quand elle se sent parfaitement détendue à son contact et qu’elle se délecte de la main dans son dos. Bao n’a jamais été un animal tendre, l’idée même lui paraît inconcevable, quand bien même en cet instant elle répond à celle de la Fox avec tant de facilité. C’est devenu instinctif désormais, que de se caler sur le rythme qu’elle leur propose, si ce n’est impose, sans se poser la moindre question, suivant tout ce qu’elle lui offre. “Only ‘cause you’re not bad either”, souffle-t-elle contre son visage, un surprenant sourire se glissant sur ses lèvres.

Bao ne rompt pas le contact lorsque Carrie s’allonge face à elle, au contraire, sa paume glissant dans son dos en même temps que la sienne, caressant sa peau tandis que ses pupilles accrochent celles de la sorcière. Les doigts dans ses cheveux lui procurent cette même sensation de bien-être, étrangère, effrayante et réconfortante à la fois ; il n’y a plus rien qu’elle souhaite de plus, sur le moment, que de rester ainsi, son regard dans celui de Carrie, bêtement et simplement, pour mieux laisser sa tendresse l’emplir et lui faire découvrir ces paysages inconnus et interdits, qui ne prennent vie et sens qu’en sa présence. "I won’t tell if you don’t." C’est une évidence, comme tout le reste. Personne ne doit savoir, et personne ne saura jamais - si ses frères n’ont pas été dupes et ont rapidement saisi qu’elles se voyaient régulièrement, il n’y aucune raison qu’ils découvrent un jour ce qui s’est logé dans la poitrine de Bao depuis des mois. Et la nature secrète de leurs échanges, de ce qu’ils sont réellement, l’enfonce un peu plus dans l’assurance qu’elle peut s’abandonner sans l’ombre d’un risque.

Il est si facile, de ne penser à rien en présence de Carrie. Parce que leur secret est bien gardé, qu’il ne quittera jamais cet appartement, et qu’il n’aura jamais la moindre conséquence sur leurs existences respectives. Elles peuvent être elles, peu importe ce que cela signifie, et se laisser porter par la route paisible vers laquelle elles se dirigent. “I promise.” Elle le souffle en se détachant un bref instant de ses lèvres, la regardant dans les yeux, avant de venir à nouveau cueillir sa bouche avec assurance. Sa main glisse en bas de son dos, pour la presser au plus près d’elle avec douceur, une jambe entre les siennes quand elle l’étreint sans empressement, ne pensant plus à ce qu’elles sont, à ce qu’elles ont été, à ce qu’elles pourraient être. Juste deux âmes se répondant naturellement, sans un regard pour l’avenir.

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