Les derniers mois avaient été particulièrement difficiles. Azra pourrait même dire que les dernières années avaient été éprouvantes, mais elle préférait ne pas trop s'en plaindre. Il n'est pas de bonne augure, que de montrer la moindre faiblesse par les temps qui courent. Elle est loin d'être stupide, et elle a bien compris depuis longtemps tout ce qui se déroule à Londres, et dans toute l'Angleterre. Les journées passent et se ressemblent. Elle ne voit pas le temps défiler, et pourtant. Cela fait bien des années, qu'elle n'avait pas vraiment pris un moment pour elle, un vrai moment et pas une heure par ci par là. Elle ne se rappelle d'ailleurs pas quelle était sa dernière soirée loin du manoir. Pourtant, ce soir, elle sortait. Beaucoup penserait que l'indienne avait un rendez-vous galant pour la St-Valentin, mais il n'en était rien. Ambrose est un ami, un très bon ami certes, mais elle le connaît depuis si longtemps, que l'idée d'une possible ambiguïté ne lui a pas traversé l'esprit. Pourtant, Azra a le droit de refaire sa vie. La période de convenance post-deuil est plus que dépassée, mais elle n'en a pas le coeur. Elle ne s'est pas privée de retrouver du réconfort dans les bras d'autres personnes, parce qu'elle a des besoins comme tout à chacun. Mais, elle n'a jamais souhaité plus, à quoi bon ? Azra a été obligée de se marier alors qu'elle sortait de l'école, alors qu'elle n'était encore qu'une gamine. Bien qu'elle aurait préféré ne jamais perdre Hisham, elle ne voit aucun intérêt à épouser un autre sang-pur alors qu'elle est libérée des chaînes du mariage. Ses pensées, elle les garde pour elle, sachant pertinemment ce que les sorciers de la haute société penseraient. Azza n'est pas l'exemple de la femme parfaite, mais elle n'en a jamais eu la prétention, tant qu'elle s'estime à la hauteur de ce qu'elle est.

Face au large miroir de sa chambre, elle tourne sur elle-même, essayant tenue après tenue, sans éprouver de satisfaction. Elle ne sait pas pourquoi elle s'inquiète autant de sa toilette, alors qu'il s'agit d'un dîner classique. Azra met cela sur le compte des apparences, parce qu'il faut toujours faire bonne impression. Après moult essayages, elle finit par jeter son dévolu sur une longue robe d'un vert profond, faite en velours, ceinturée à la taille et avec des manches bouffantes. Elle est légèrement fendue le long de sa jambe gauche. Rien d'extravagant, mais rien de trop simple non plus. Azza rehausse ses lèvres d'un rouge cerise profond, laissant sa chevelure à son état naturel. Elle en ferait presque trop pour ce simple dîner, presque. Quelqu'un toque à la porte, et la brune l'ouvre d'un geste de la main. ─ Mistress, sorry to disturb you but Mister O'Neill has arrived. Iseult se tient dans l'encadrement, gênée de l'interrompre, mais Azra n'est pas ce genre de patronne. ─ Thank you Iseult. I'll be there in a minute. La domestique repart, fermant la porte derrière elle. La Shafiq reporte son attention sur son reflet, essayant tant bien que mal de se cacher la réelle portée de ce rendez-vous.

Après quelques minutes, elle finit par se rendre au rez-de-chaussée, là où l'attend Ambrose. Elle s'arrête, un instant, dans l'escalier, le regardant jouer avec Haris. Et, elle ne peut se retenir de sourire. Azza finit par se retrouver à la hauteur de l'irlandais, le laissant se retourner de lui-même en sentant sa présence. Sa réflexion lui fait lever les yeux au ciel, sur un air amusé. ─ They all say the same. Elle le laisse dire au revoir à Haris, avant qu'elle ne vienne embrasser le front de son fils. ─ Be nice okay? Le garçon hoche de la tête, avant que sa mère ne s'éloigne pour se diriger vers la porte d'entrée. Le froid est glaçant, mais la sorcière s'était bien couverte. Il lui tend son bras, qu'elle attrape sans réfléchir. Les deux amis transplanent jusqu'à une petite ruelle qu'elle connaissait bien. ─ That's my favorite! qu'elle lui lance, avec une petite moue de joie. ─ But you knew it, as always. Whad did I do to deserve you? Agrippant le haut de son bras, Azza se dirige en direction du restaurant indien, un des rares à mériter cette appellation. Un serveur les accueille et les place à la table réservée. ─ So, we have a special menu for tonight, 'cause it's V-day. Il sort deux coupes d'alcool. ─ Offered by the house for the lovebirds. Azza allait répliquer qu'ils n'étaient -en aucun cas- amoureux, mais le serveur avait déjà disparu. ─ Well I guess we have to drink now. dit-elle en attrapant sa coupe, prête à trinquer.

Assise en tailleur, malgré qu'elle soit en robe, Azza avait l'impression d'être un peu chez elle. Il manquait beaucoup de choses, sa famille, l'ambiance, les odeurs, la chaleur. Mais, ce qui était présent lui suffisait à se sentir comme à la maison. Et puis, il y avait Ambros. Lui aussi lui donne l'impression chez elle. Il représente la chaleur constante d'un foyer, parce qu'il a toujours été là, l'irlandais. Malgré les années, malgré les épreuves, il n'avait pas failli. Oh bien sûr, il s'était absenté trop longtemps, à de trop nombreuses reprises. Et Azza n'avait jamais manqué de le lui faire remarquer, de jouer la distante quelques heures avant de succomber à son soit-disant charme légendaire. Il faut dire qu'elle se trouve en présence d'une célébrité. Ce mot lui arracherait bien un rire. Il n'y a jamais eu de ça entre eux. C'est sans doute parce qu'elle l'observerait un peu trop intensément, que le serveur crut bon de les prendre pour un joli couple présent pour le rendez-vous annuel des amoureux. Si elle avait commencé à boire, elle aurait pu recracher sa boisson. Ambros n'est pas son compagnon, ni rien de tout cela. Il est un ami, un très proche ami elle le reconnaît. Peut-être a-t-elle déjà laissé son esprit divaguer à leur sujet, elle le reconnaît. Mais, il reste le meilleur ami de son mari décédé. Cela ne serait pas politiquement correct que de passer quelques nuits avec lui, bien que cela ne serait pas déplaisant. En même temps, Azza avait bien batifolé avec Abbas, et cela était encore moins moral. Elle ne porte pas réellement d'attention à ceux qui partagent sa couche, en dehors de certains critères indispensables. Ses codes et sa morale ne sont pas exactement les mêmes que ceux de l'aristocratie anglaise, et elle s'en fiche. Non, il y a autre chose qui l'empêche de sauter le pas avec Ambros. Après tout, une nuit ou deux, cela n'est pas grand chose, et elle en aurait bien besoin en ce moment. Mais, elle ne sait pas pourquoi, elle ne peut pas. Elle le respecte trop. Pourtant, elle respecte aussi Abbas, et cela ne l'a pas retenu. Peut-être y-a-t-il autre chose qu'elle n'a pas encore déchiffré. Peut-être qu'elle voit trop Hisham quand elle le regarde. La sorcière préfère se convaincre de cela, que de laisser son esprit divaguer vers autre chose.

Sa coupe à la main, elle suggère de boire. Il valait mieux boire que réfléchir, ou peut-être pas. ─ To a great evening! Elle trinque avec Ambros, avant d'avaler le liquide alcoolisé. Cela n'est peut-être pas indien, mais elle devait avouer qu'elle raffole de cet alcool européen. Elle ne quitte pas le regard azur du sorcier, alors qu'elle finit ses quelques gorgées. Les lumières tamisées tombent à la perfection sur le visage et les boucles vénitiennes d'Ambros. Elle se pince la lèvre, tout en reposant son verre, brisant le contact visuel un peu trop long. Elle attrape un menu, tout comme lui. Ses yeux parcourent le papier, même si elle sait déjà ce qu'elle va commander. Elle n'a pas le temps de finir sa lecture, que Ambros lui dit de commander tout ce qu'elle veut, puisqu'il l'invite. Azra pose son menu et arque un sourcil. ─ I would gladely say no, but I'm pretty sure I have no choice. Elle esquisse un sourire. ─ Oh you're so gonna taste everything, and it's gonna be spicy as fuck my dear. Elle n'avait jamais vraiment surveillé son langage en sa présence. Il faut dire qu'en dehors de la vie en société, Azza n'aimait pas vraiment tout ce protocole. Elle aimait être libre de dire ce qu'elle voulait. Ses élèves en seraient certainement les premiers surpris. ─ Well, I don't have any grievance against you. But, I'm sure you'll be leaving me soon, so you'll be paying in advance. Un petit sourire narquois se glisse sur ses lèvres, alors qu'elle s'était dangereusement approchée de lui pour ses confidences. Azra se redresse quelque peu, demandant au serveur de venir. ─ Two cheese naan bread, one daal palak, one aloo palak, one spicy massaman curry, two very spicy tandorii chickens, some basmati rice and two glasses of your homemade alcohol. Thank you! Elle lui donne son menu, ainsi que celui d'Ambros. Le serveur s'en va, laissant les deux amis seuls. ─ So, why aren't you with one of your conquests tonight? I mean, it's not like you are spoiled for choice hm. Les femmes étaient littéralement toutes à ses pieds. Il faut dire que vu ses récompenses, cela ne semble pas étonnant. Mais il ratait une occasion parfaite de jouer au petit Don Juan pour une soirée. A la place, il sortait avec une mère au foyer, pas vraiment la même chose.

Azra avait volontairement évoqué le fait qu'il allait bientôt repartir. Peut-être espérait-elle qu'il la contredise, qu'il lui dise que non, il ne comptait pas repartir de si tôt. Mais évidemment, il ne le fait pas. Elle soupire intérieurement. Elle a supporté ce mode de vie pendant des années, avec Hisham, non sans mal. Elle n'a pas envie de devoir revivre ça. Pourtant Azza ne reste jamais fâchée très longtemps. Elle ne sait pas ignorer Ambros plus que quelques heures, parfois quelques jours, mais jamais plus. Malgré son travail en dehors et à la maison, le temps est parfois long et il n'est pas rare qu'elle se sente seule. Bien sûr, il y a Abbas, Lizzie, mais ils sont occupés. Et parfois, elle préfère éviter son beau-frère plutôt que le voir n'être lui-même que partiellement. Le temps a fait qu'elle s'est habituée à voir l'irlandais chez elle, l'aider avec les enfants, discuter avec lui tout simplement. Les moments les plus simples sont toujours les plus appréciables. Et dans le fond, Azra le sait, elle a pris l'habitude de sa présence, mais il n'est qu'un voyageur de passage, bien trop pris par son travail. Elle ne lui en veut pas pour ça, ce serait bien trop égoïste. Mais, elle n'arrive pas à se détacher de cette envie qu'il reste pour toujours avec eux, avec elle, qu'il ne la laisse jamais seule pendant des mois. La sang-pur n'est pas dupe. Elle sait bien qu'on s'imagine bien des choses entre elle, et le meilleur ami de son défunt mari. Elle mentirait si elle disait ne l'avoir jamais envisagé. Mais la culpabilité serait bien trop grande. C'est en tout cas, le mensonge qu'elle se raconte et qui a fini par devenir sa vérité. Parce qu'elle ne s'est pas sentie coupable de partager le lit d'Abbas, elle ne regrette pas, bien qu'elle y a mis un terme. La vérité, c'est qu'elle ne saurait pas revivre ce qu'elle a vécu avec Hisham. Les absences, le manque de nouvelles, la solitude, et surtout la mort qui frappe quand on s'y attend le moins.

Pour tout cela, Azza ne se formalise pas quand il ne répond pas à sa pique. Parce qu'il y a un goût de vérité trop prononcé pour oser dire quelque chose. Elle préfère commander et regarder du coin de l’œil, la tête qu'il fait quand elle insiste sur les épices. Il a demandé, elle ne se fait pas prier. Elle pose son menton dans la paume de sa main gauche, et se décide à la titiller sur ses conquêtes : son passe-temps favori. Il n'est pas à l'aise, et n'ose pas la regarder, cela l'amuse évidemment. ─ So you're committed to me now? dit-elle, en arquant un sourcil, avant de rire. Elle se redresse un peu. ─ Of course, it's not like there's plenty of beautiful women out there. Elle lui adresse un petit sourire. ─ But yeah you're my MVP as well, we're mates after all. C'est ce qu'il voulait dire non ? Elle exagère complètement, mais elle fait exprès de le pousser dans ses retranchements. Elle ne sait pas vraiment pourquoi, ou ne veut pas le savoir.

Le serveur finit par arriver, et dépose quelques plats sur leur table. Les odeurs, les couleurs, pendant un instant, Azza se croit de retour en Inde. Sans plus attendre, elle commence à se servir, profitant de retrouver des saveurs familières pour une soirée. ─ Hm yes, I agree. We should do this more often. Elle aimait le taquiner, mais il avait eu une bonne idée. Azra ne s'était pas rendue compte à quel point cela lui faisait du bien d'être loin de la maison, loin du quotidien. Ambros avait visé dans le mille, comme toujours. ─ So, tell me, when are you leaving? And where are you going next? Le serveur revient avec leurs deux verres d'alcool. Elle attrape le sien et trinque avec Ambros, avant d'en boire une grande gorgée. ─ I wish I could take you to India someday, but.. you know. Elle n'avait pas réellement le droit de quitter le territoire britannique comme bon lui semblait. Quelque part, elle enviait Ambros et ses voyages rocambolesques. Au moins, il ne s'ennuyait.

Son verre d'alcool ne dure pas très longtemps. Il faut dire qu'elle en avait bien besoin. Azra évite toujours de boire devant ses enfants, ce qui lui laisse peu de créneaux pour espérer consommer une coupe de vin français. L'alcool indien était plus fort, que ce qu'elle pouvait bien trouver dans les commerces de Londres. Et à cet instant, elle était plus que ravie d'en avoir à sa portée. Azza avait, dangereusement, ouvert la porte du prochain départ d'Ambros. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle en espérait. Enfin si, elle le savait, mais il ne s'agissait que d'une utopie. Ce sera donc l'Irak, au printemps, soit dans très peu de temps. Elle déglutit, et quitte son regard quelques secondes, le temps de se resservir. ─ I'm not really happy about it. But I guess that's the price to pay. You will be missed by the children. I will miss you too. Elle prend soudainement conscience, que ce repas est probablement le dernier, passé ensemble, avant un moment. Azra sait qu'elle est d'un égoïsme sans nom, mais elle ne peut pas s'empêcher d'être agacée par son départ. Après tout, c'est lui qui est arrivé dans sa vie, comme ça, sans lui demander. C'est lui, qui a pris cette place si importante. C'est lui, qui joue avec les sentiments de toute sa famille à chacun de ses départs. Elle ne savait pas trop quoi lui dire, alors autant qu'elle se taise sur ce sujet. De toute évidence, Ambros sait déjà ce qu'elle pense de ses escapades à l'autre bout du monde. Mais ce fut sa seconde révélation, qui lui fit avaler de travers son verre d'eau. ─ Two days?? Elle fronce son regard, ne comprenant pas pourquoi il ne lui en avait pas parlé avant, pourquoi il attendait ce soir pour le lui dire. ─ And you thought you told me the day before, if I hadn't asked you? Elle soupire. ─ I don't like when you leave. It may be selfish, but I can't help it. Anyway. Azza voyait bien la lueur dans ses yeux, dès qu'il parle de partir à l'aventure. Cette même lueur, qui brillait dans les yeux d'Hisham. Elle la connaît parfaitement. Et elle sait, qu'elle n'a aucun droit dessus. Fut une époque, elle aussi, elle a connu cette fameuse lueur, cette passion. Mais cela fait bien des années, qu'elle s'est éteinte. Peut-être est-elle un peu envieuse, qu'il aime la vie qu'il mène, qu'il aime ce qu'il est devenu. Parce qu'elle ne sait pas, si elle aime ce qu'elle voit dans le miroir chaque jour. L'Inde lui manque. Ce qu'elle avait avant lui manque. Mais, son pays lui paraît bien trop lointain à présent. Azza ne sait même pas si elle s'y sentirait chez elle, après toutes ces années. Elle a terriblement envie d'y retourner, de s'y réfugier, et d'oublier tout ce qu'elle a construit ici. Pourtant, elle ne sait pas si elle en est capable. Mais, il y a ses enfants, et pour eux, elle déplacerait des montagnes.

Pour changer de sujet, elle parle de ce qu'elle connaît le mieux. Elle ne ment pas. Elle aimerait tellement emmener Ambros en Inde. Elle sait qu'il adorerait. Mais, cela n'est pas possible. Elle sait pertinemment qu'elle ne peut pas y retourner, pas comme ça sans raison, pas comme bon lui semble. Pourtant, elle pourrait transplaner et y être en une minute. Il faut des autorisations, des raisons suffisantes, et voir sa famille n'en est pas vraiment une. Cette soirée comment à prendre un air morose. Elle préfère finir son plat, plutôt que ressasser tout ça. Ambros qui s'en va dans deux jours, l'absence à venir, sa vie qui n'a plus de sens, l'Inde inaccessible. Mais, la voix basse de l'irlandais la fait replonger dans l'azur de ses yeux. Elle l'écoute, comprenant ce qu'il voulait dire, insinuant qu'elle pourrait y retourner, y vivre avec ses enfants, si elle fait les choses correctement et intelligemment. ─ I could never leave without the kids, even for a few days. I trust my parents-in-law, but to leave without them, I can't. Le serveur revient avec le reste de leur commande. Azza se recule un peu, lui laissant l'espace nécessaire. Rapidement, ils sont de nouveaux seuls. ─ There are other possibilities, I know, but they are all extremely dangerous. Elle lui adresse un mince sourire. ─ This will remain a dream for now. But thank you for trying to find a solution.

En parlant de l'Inde, Azra fait tourner machinalement son alliance. Même après presque six ans, elle ne l'avait toujours pas retirée. Pourtant, il est arrivé à de nombreuses, qu'elle ne la porte pas. Elle revoit toutes ces fois, où elle avait posé violemment la bague sur le comptoir de la cuisine, pendant une dispute avec Hisham. Elle regrettait presque ces moments. Sa vie était bien moins animée depuis qu'elle était veuve. Parfois, cela est agréable, presque doux. Mais, parfois cela est invivable et elle a l'impression d'étouffer. Se rendre compte de l'amour que l'on portait à quelqu'un lorsqu'on le perd, il y a difficilement pire. L'unique chose plus difficile que ça, c'est de perdre un enfant, et elle l'a également vécu, plus d'une fois. Azza sait très bien qu'elle n'est pas à plaindre. Elle est une sang-pur dans un monde fait pour eux, veuve d'un mangemort et belle-soeur d'un autre, étant directeur du Département des Mystères. Non, sa vie n'est pas des plus désagréables, mais il lui manquera toujours quelque chose. Hisham, sa famille, l'Inde. Tout ça, elle ne peut pas l'avoir, alors elle compose sans. Et, la Shafiq a su trouver de quoi combler tout ça. Ambros en fait parti. C'est pour ça, qu'elle ne peut pas s'empêcher de râler quand il part. Elle ne pourrait pas supporter, ne serait-ce que physiquement, s'il venait à mourir dans une de ses missions. Il connaît les risques. Hisham en est mort. Et, parfois, elle se demande bien pourquoi il continue. Elle s'énerve toute seule, parce que dans le fond, elle connaît très bien ses raisons, et elle les comprend. C'est un dilemme interne constant.

Ils n'ont pas besoin de dire grand chose pour se comprendre. Cette pensée lui arrache un sourire timide. Elle sait qu'il fait toujours tout pour elle, qu'il cherchera toujours ce qui est le mieux pour elle. Et en retour, Azza est égoïste, préférant qu'il reste à ses côtés pour la vie entière. Elle balaye de son esprit le fait qu'il devra, sans doute, se marier un jour, surtout depuis que son sang est devenu aussi pur que le sien. Dans le fond, elle remercie ses envies d'évasion, le tenant éloigné de toutes ses harpies prêtes à sauter sur un des meilleurs partis du Royaume-Uni. Ambros attrape sa main pour l'embrasser, après lui avoir confessé ne vouloir que son bonheur. Elle en rougirait presque. ─ And I only want yours as well. I'm sorry for what I said. I know your happiness is elsewhere in the world, seeking God knows what. Elle lui adresse un sourire d'excuse. ─ No, don't apologize. You haven't saddened me at all don't worry. I saddened myself. Comme souvent, quand elle pense à là où elle voudrait être, en sécurité avec ses enfants, loin de tout ça.

Ambros propose de manger ce qui venait de l'être apportés, et elle ne peut qu'être d'accord. Ils n'avaient mangé que quelques amuses-bouches jusque là, et elle commençait à mourir de faim. Elle le regarde, perdu face à tous les plats sur la table, ce qui l'amuse grandement. ─ Oh don't worry, I will definitely make fun of you. Même si Ambros mangeait souvent épicé chez elle, il n'avait évidemment pas le même palais que l'indienne. Et cela s'annonçait drôle. ─ Obviously, you'll start with the very spicy tandoori chicken. Everything will seem less hot afterwards. Eat it with rice. It will be easier. Elle le laisse se servir, alors qu'elle fait de même. Il n'y a rien à dire, la cuisine indienne reste la meilleure au monde, et rien ne la fera changer d'avis. Cette soirée loin du manoir et des enfants lui fait un bien fou. ─ So?