Corban met un temps avant de s’asseoir, comme s’il étudiait le moindre centimètre de bois vermoulu de la barque miteuse. Les remous ont finalement raison de son équilibre et il s’assoit un peu trop brusquement pour que ce soit totalement contrôlé, les yeux rivés sur la mélasse dans laquelle ses bottes cirées pataugent. "J’arrive pas à croire que tu chasses." Corban relève le chef, appuyant un regard visiblement ennuyé sur son compère. La moquerie est facile, presque prévisible, pour ne pas dire qu’il s’y était préparé (ça ne l’avait pas empêché non plus de se mettre sur son trente-et-un, à croire qu’il avait tenu à filer le bâton pour se faire battre). Bah, si Göran veut se frotter à ça, il se ferait un plaisir de rentrer dans son petit jeu. "Depuis mes huit ans. C’était un business familial, avant que mon père ne décède." Trauma plus qu’un business, à ses yeux, pour être honnête. Sa mère avait bien protesté pour épargner à son aîné ce genre d’activités en plein air qu’elle jugeait trop barbare et dangereuse, mais comme pour beaucoup de choses, c’est Euan père qui avait eu le dernier mot. Et baby Corban de soulever une arbalète plus grande que lui, la bile coincée dans la gorge, les genoux tremblants et le fond de la culotte trempée, tandis qu’un centaure chargeait dans sa direction.

Mais le Mangemort ne fera pas le plaisir à Göran de lui filer ce genre de détails; lui avouer qu’il avait commencé dès son plus jeune âge est amplement suffisant pour qu’il se l’imagine à batifoler avec les bêtes sauvages en couche-culotte. "Vous êtes toutes aussi mignonnes que ça à la VB, quand vous partez traquer la racaille ?" Cette fois-ci, Corban cligne des yeux, son regard sidéré papillonnant des iris troublants et presque transparents de son interlocuteur à ses lourds mouvements d’épaules réguliers, tandis qu’il les conduit au milieu du lac. "Désolé de te décevoir mais non; l’uniforme règlementaire est autrement plus... sobre. Tu serais surpris de voir certains de mes spécimens..." Le fait que Corban ne précise pas s’il fait allusion à ses handlers ou ses hounds est un poil dérangeant. "Quand tu seras débarrassé de ta malédiction, passe me voir, je suis certain que tu y trouverais ton compte..." Corban ponctue son arrogante promesse d’un sourcil charmant et insupportable. C’est qu’en se penchant un peu sur la question (et sur l’animal en question), Göran sentait vaguement comme Prewett, et semblait nourrir le même goût douteux pour les tatouages que James.

Göran immobilise l’embarcation, et les deux hommes s’accordent sur un silence attentif. Les premiers remous ne se font pas attendre. Corban a dégainé sa propre baguette, ainsi qu’une courte lame (l’enseignement d’Euan). Il plisse les yeux, observant du même côté que son comparse.
La seconde suivante, Corban est projeté dans l’eau, un bord de la barque tapant à l’arrière de son crâne. Il va pour crier mais de l’eau s’engouffre aussitôt dans ses poumons. D’une brasse chaotique, il se débat jusqu’à la surface, agrippant la boucle de sa cape pour s’en débarrasser avant qu’elle ne le coule. "Göran!" glapit-il, à la recherche de ce dernier.
Le temps d’illuminer le bout de sa baguette dans l’espoir d’y voir plus clair qu’il sent un courant remonter. Le kelpie rue hors de l’eau, l’envoyant chavirer quelques mètres plus bas. Corban a retenu sa respiration, et nage pour se mettre à l’abri derrière la barque. Il est évident que l’animal est là pour son appât maudit, lui laissant une fenêtre de tir. Agrippé à leur barque retournée, Corban agite sa baguette et tente de balancer quelques salves de sortilèges pour écharper la créature, sifflant entre chaque un: "Putain!" ou un: "Göran!" espérant agacer suffisamment la bête (Göran) pour que celui-ci se montre.

( tw; violence, cruauté animale )

Les profondeurs du lac s’étalent à perte de vue devant tes yeux ahuris. Par réflexe, ta gueule est fermée et ta respiration suspendue, mais tu coules à pic, et plus tu coules à pic, plus tu sens la panique envahir ton crâne. C’est que t’as jamais eu l’occasion de nager, dans tes montagnes, et t’as jamais non plus traîné ta carcasse sur les plages maltaises (toi). Petite pensée pour ce satané Yaxley et son plan foireux de vous amener en plein milieu de ce foutu lac ; si tu l’avais eu en face de toi à l’instant t tu lui aurais (au mieux) collé ton poing dans la figure. La petite silhouette du bois de ta baguette passe devant ton regard et t’arrache à tes pensées furibardes. Tu t’en saisis aussi vite que tu le peux, avant de jeter un regard autour de toi, cherchant la position de ton acolyte, puis sous toi, car une ombre immense s’approche. Des bulles s’échappent de tes narines grandes ouvertes : le kelpie revient à la charge et t’as même pas le temps de riposter que son corps algueux te fonce dessus. La collision t’arrache un cri de douleur que l’eau noire retient, quelque part sous les chairs y te semble que des os ont craqué, mais ça n’empêche pas ta pogne droite de s’accrocher au crin gluant de l’animal qui vous hisse tous les deux jusqu’à la surface.  

La nouvelle ruade te projette hors de l’eau, ce qui te permet de reprendre in extremis ton souffle. Après un moment à cracher l’eau avalée de travers tout en aspirant des bouffées d’oxygène (ceci sans compter ta nage hystérique et parfaitement ridicule qui te permet tout juste de tenir à flot) tu regardes en direction des glapissements (à plusieurs mètres de là) et vois enfin Corban, accroché à la coque de la barque qui s’est retournée dans votre naufrage. Si c’était par pour les salves de sortilèges qu’il lance, et qui illuminent par à-coups sa position, t’aurais pas vu que le kelpie traîne dans son périmètre (ici et là se détachent de la surface quelques remous et morceaux luisants). "KEEP GOING", tu gueules, à la fois pour lui indiquer où tu te trouves, que pour l’encourager à continuer d’attaquer la bête. On repassera pour l’état impeccable du trophée de chasse, mais au vu de la situation c’est plus tellement votre priorité.

Le kelpie quitte justement les parages où flotte Corban pour revenir à la charge. Cette fois t’armes ton poignet à temps et replonges d’une tête dans les flots histoire de bien viser. Ce que tu fais. Alignement parfait. Moulinet impeccable. A cette distance, ton sortilège de chasseur devrait pouvoir atteindre le kelpie pile entre les deux yeux et le tuer sur-le-champ. Mais ton bras en décide autrement. Sa magie vaudou se réveille au mauvais moment, fait trembler ses muscles et dévie le sortilège. L’éclat blessant traverse les eaux, frôle l’animal, et file les dieux seuls savent où (directement vers Corban, mais tu le sais pas encore). Un juron same échappe par bulles. A la fois pour avoir raté un sortilège que tu maîtrises pourtant parfaitement, à la fois pour ce maudit bras qui n’en finit pas de te les briser, et à la fois pour la seconde collision que tu te prends de plein fouet. Le goût du fer envahit ta bouche, aussitôt remplacé par celui insipide de l’eau comme tu l’entrouvres pour mieux serrer des dents. T’es cette fois trop sonné pour accrocher la bête au passage mais le coup t’as fait remonter à la surface.  

Autre rasade d’air, prise précipitamment, avant de replonger. Le sentiment d’urgence ne te fait même plus attendre d’avoir le kelpie dans ta ligne de mire ; tu vises son gros corps d’équidé qui est en train d’opérer une énième volte-face et lances un second sortilège qui le projette vers le haut. Pas assez puissamment pour le faire sauter comme un poisson hors de l’eau, mais assez pour qu’une moitié de son corps se retrouve à la surface. T’enchaînes immédiatement, ton poignet mouline derechef et ta baguette fait geler l’eau dans un périmètre suffisamment large pour que le kelpie se retrouve prisonnier de la glace, et que la surface gelée te permette de quitter les flots. Tu t’y hisses avec peine, les fringues collantes, le corps endolori et la masse de ton corps trouve le contact dur de la petite portion de lac gelée. Il te faut plusieurs secondes pour reprendre ton souffle et tes esprits. Puis tu te redresses, une main contre tes flancs douloureux, jetant un regard au kelpie figé sur place, l’encolure sortie des eaux et la pupille folle sous la glace qui le comprime. "Corban?!" La fatigue transperce ta voix, laquelle est légèrement sifflante sous le timbre grave (tes poumons sont en feu). Comme en décalage, tes yeux quittent la carcasse pétrifiée pour chercher l’acolyte dans la poix environnante. Le silence est de plomb. D’autant plus prégnant qu’il succède un chaos qui résonne encore contre tes tempes. Plutôt que de récidiver, tu te lèves pesamment, plus lourd encore qu’à sec, plus puant aussi (ton bras de cadavre a retrouvé son odeur naturelle maintenant qu’il est trempé), et tu commences à marcher sur la glace avec plus d’aplomb que s’il s’agissait d’une glace naturelle. Tu passes devant le kelpie, continues, puis vois la barque retournée, elle-même pétrifiée par le gel.   

En arrivant à sa hauteur tu constates que, juste à côté, Corban est lui aussi pris dans la glace. "Fuck!" D’un coup de baguette, tu le dégèles et le tire des eaux glaciales en l’empoignant par le col. Il rejoint à son tour le dur de la glace, sur laquelle tu t’effondres aussi le cul le premier à peine ton geste est-il terminé. Vos carcasses trempées fument à vue d’œil. "Hey, you alright?" T’en est pas certain. Y a du sang, et il cause pas, c’est à peine s’il bouge, ou alors il se remet lui aussi de la chasse. Si tant est qu’on puisse appeler ça une chasse…

Il y a quelque chose de très satisfaisant à voir Corban Yaxley évanoui, à moitié dans l’eau, à moitié pris dans la glace, totalement dans les vapes. Les membres lâches, la mèche désordonnée et l’échine abandonnée à qui aurait la riche idée de l’achever une bonne fois pour toutes et d’ainsi débarrasser la surface du monde sorcier de l’un de ses virus les plus coriaces. Interrogez n’importe qui à la Brigade, si l’inverse d’un Epouvantard existait (miroir du riséd style), knock out Corban figurerait dans le top cinq des réponses de sa Brigade, et peut-être plus généralement de son entourage. Autant dire que son offre, faite à Göran, juste avant la débandade : "Quand tu seras débarrassé de ta malédiction, passe me voir, je suis certain que tu y trouverais ton compte..." prenait tout son sens, sachant que le Falk serait accueilli en héros, pour avoir été celui qui avait pété la gueule à Corban Yaxley (le kelpie ne pouvant plus revendiquer pareil exploit d'ici les heures à venir).

Quelques instants plus tôt, donc, le sortilège lancé par le bras maudit avait percuté Corban, lui épargnant un sort moins néfaste grâce au ricochet fait sur la barque retournée. Il n’avait tapé que dans la patte arrière du sorcier qui avait eu tout le mal du monde à se maintenir à flot, à cause de la douleur, des remous et de ses mains glissant sur le bois vermoulu de l’embarcation. Il avait fini par tourner de l’œil lorsque Göran avait jugé bon de transformer leur petit bout de lac en patinoire à sorciers.

Corban gisait donc là, sous le regard consterné de son comparse d’infortune, jusqu’à ce que celui-ci le tire de ce mauvais pas, avec la même facilité qu’on soulèverait une grappe de raisin. La manœuvre a l’avantage de réveiller la tête (plus si couronnée que ça) de la Values Brigade. Il va pour ouvrir la bouche (certainement pour se plaindre), mais seulement de l’eau s’en échappe, comme un poisson qui aurait blow trop de tritons d’un coup. Il s’étouffe un temps dans son propre air avant de gémir finalement pour de bon: "What the hell was that???!" Sa voix malmenée se barre dans ses insupportables aigus, tandis qu’il rampe comme un ver (fort bien sapé) jusqu’à Göran, simplement pour se tenir le plus loin de l’eau possible.
Le mouvement lui arrache un couinement de douleur et il se retourne pour s’asseoir à son tour, examinant avec dégoût sa jambe qui a des airs de saucisson mâchonné. "Hey, you alright? - I— I think I’m fine; it hurts but it seems to be only superficial..." Un sang-froid relativement étonnant pour un petit gabarit dans son genre, mais qui témoigne d’une expérience terriblement ancienne.
En revanche, il ne peut pas en dire autant de sa botte qui a vu des jours meilleurs.

Le souffle court, la mèche goutant, il tourne la tête vers le géant. "You?" Il a la goule bien cabossée (enfin, plus que d’habitude), et Corban tend un bras pour lui examiner les tempes puis l’intérieur de la bouche, d’un geste sans tendresse, comme on checkerait la dentition d’un canasson. "You’d be fine..." D’ailleurs, dans le fond de son champ de vision, il découvre le kelpie pris dans les glaces, et une pointe d’excitation rallume son regard de caverne, arrachant à son visage trempé un rictus en coin. S’appuyant allègrement sur l’épaule de Göran (qui à elle toute seule doit être plus épaisse que son tour d’épaules complet à lui), il se hisse sur ses genoux, pour s’approcher prudemment de la bête folle. "I can’t believe your... plan or whatever it was, actually worked!" Un rire un peu dément crisse à leurs oreilles; un miracle qu’il ne lui passe pas le savon de l’année, à voir la catastrophe que ça aurait pu être. Mais l’euphorie du chasseur est plus forte, et Corban se voit déjà ramener son fabuleux trophée à la maison.
"What do you think? Should we finish it off now? Or drag it back to the camp and kill it there? That thing is massive, and I don’t think neither you or I are in a good condition to skin that bastard..." hasarde Corban, dont les doigts fébriles s’agitent pourtant sur sa botte encore en un seul morceau, de laquelle dépasse le manche d’un couteau de chasse.

( tw ; cruauté animale )

Il est vivant et c’est tant mieux ; t’as bien assez de tes propres emmerdes pour pas te taper une enquête de la VB et un allé simple pour leur prison à la con (t’es loin de te douter que Gracefield existe, tu t’en tiens donc à la version officielle d’une Azkaban où il fait – pas du tout – bon vivre). Ta cage thoracique n’arrête pas de croître et décroître sous ton manteau ; difficile de reprendre son souffle quand on a la condition physique d’un gros et vieux chien passant son temps à roupiller dans sa niche. Un regard est jeté vers la botte de Corban où y te semble que ça pisse le sang, mais plutôt que de geindre le brun s’en désintéresse. L’état de choc, peut-être. T’espères qu’il va donner le change encore un moment, parce que t’es pas sûr d’avoir la patience de le voir larmoyer ou l’écouter dire combien tout ça c’est de ta faute (même si c’est le cas).

"It hurts but it seems to be only superficial..." Un sourcil délavé se lève. "If you say so." Il est peut-être pas si en mousse que ça, le Yaxley, et c’était peut-être pas que de la fanfaronnade, ce qu’il t’a dit avant que vous sombriez. Il a probablement dû en voir d’autres s’il est habitué à chasser depuis ses huit piges. Ça te le rendrait presque sympathique. "You?" Ta patte quitte les flancs abîmés par les différentes ruades du kelpie et tu grognes un "yeh" brutal, quasi réjoui. L’adrénaline court encore dans tes veines, si bien que t’as l’impression de planer plus haut que toutes les autres fois, comme un toxico replonge après des années de sevrage. "Huh- wha-" Corban t’ausculte la gueule d’une main glaciale que tu dégages d’un coup de coude mou. "You’d be fine..." Tu trouves rien de mieux à commenter qu’un second grognement, celui-là montant depuis ton poitrail qui vrombit à l’occasion sous les frusques trempées, cette fois inintelligiblement et sans engouement. T’as l’impression de te revoir à Malte quand t’inspectais les bêtes ; un parallèle que t’apprécies pas spécialement.

Ça va que t’es pas susceptible. Au moment où il se redresse t’es déjà passé à autre chose. "I can’t believe your... plan or whatever it was, actually worked! – Sure. It was all... very much planned." Si l’improvisation est une donnée valide dans l’équation. Tu te redresses à ton tour, plus pesamment et moins rapidement, rangeant dans un même temps ta baguette – une œillade est coulée vers ton bras qui, t’espères, va rester sage à présent qu’il a eu son petit quart d’heure de gloire. T’interromps ton observation en entendant Corban rire (l’espace d’un instant t’as cru qu’une banshee était sortie des bois et venait vous attaquer à son tour...). De toute évidence (?) il est ravi. Ce type est un mystère, et ses réactions plus versatiles encore que les tiennes. Un dégénéré comme t'as toujours eu l'habitude d'en côtoyer. Feels like home. "What do you think?" Tu t’es approché, les pupilles braquées sur la créature prise dans la glace. "Should we finish it off now? Or drag it back to the camp and kill it there?" Tes pouces s’accrochent à ta ceinture. La posture est à la réflexion. "That thing is massive, and I don’t think neither you or I are in a good condition to skin that bastard..." Petit mouvement de tête. "Wounded or not, I’m always in the mood to skin stuff." Un grosse inspiration est prise. Pendant laquelle ton regard a croisé le manche du couteau de chasse. "And so are you I believe." Un rire glauque t’échappe. Aussitôt interrompu par une toux grasse, qui se termine en mollard rougeoyant sur la banquise magique. "Er-" Une pogne est revenue flatter tes flancs. C’est peut-être toi qui es en mousse, finalement. La vie citadine a probablement eu raison de la résilience ahurissante de ton corps (non, les sabots du kelpie ont eu raison de tes os et organes, mais tu préfères mettre ça sur le compte de ton train de vie minable plutôt que sur l'inéluctable vieillesse et ses conséquences sur ta carcasse – fut un temps indéfectible).

T’as ressorti ta baguette, avec laquelle t’exécutes deux-trois sortilèges pour dégager le kelpie de la glace, non sans l’enchaîner magiquement au niveau des pattes et de la gueule pour l’empêcher de fuir, ou de vous attaquer. "Let’s keep it alive and take it back to the camp. The spell is starting to wane anyway." L’eau, en effet, commence ici et là à reprendre ses droits sur le lac. Vous avez encore le temps de préparer votre retour, mais clairement pas de vous attarder le temps d’un dépeçage en bonne et due forme. Tu retournes sur tes pas pour rejoindre la barque, que tu retournes cette fois à la force de tes bras ; les rames sont toujours là, coincées grâce aux anneaux sur lesquels elles glissent. La remettre à flots t’arrache quelques grimaces mais elle est fin prête à être utilisée. "Can you levitate it to the shore?" Manière de dire que t’as plus assez de jus, de ton côté, pour assurer le rapatriement de la bête. Puis faut bien que quelqu’un rame, n'est-ce pas.

"Wounded or not, I’m always in the mood to skin stuff." Hm, ok; lowkey hot. Corban le félicite d’un coup d’œil satisfait, tandis qu’il défait d’un dernier mouvement haché l’énorme couteau caché dans sa botte (c’est à se demander comment l’instrument avait pu tenir sans lui couper la patte en morceaux). C’est que l’engin fait la taille de son avant-bras, et semble avoir un sacré tableau de chasse à son compteur. Il va sans dire qu’il appartenait à Euan Yaxley, le père de Corban. On pouvait encore lire quelques lettres de son prénom, là où Corban avait pris l’habitude de passer son pouce sur le manche, comme pour en lisser le cuir (ou bien était-ce pour faire disparaître les dernières traces de son paternel...). "And so are you I believe." Corban soupèse le couteau dans sa main, haussant une épaule. S’il répond quelque chose, sa voix est couverte par la toux gutturale de Göran.

Always in the mood, qu’il aurait pu renchérir. Ça n’est pas tant qu’il appréciait particulièrement le dépeçage en soi; il n’y avait rien de plus malodorant, de plus salissant et de plus sauvage. Mais disons qu’à neuf ans, quand il avait dû faire la peau à son premier lapin, il y avait projeté toute sa rage de petit enfant, salopant certes son travail, du fait qu’il ait projeté l’image de son père dans la carcasse du pauvre animal. Aussi, à chaque fin de partie de chasse, c’est son père que Corban imaginait qu’il achevait.
Hé, on fait comme on peut quand on refuse de s’essayer à la thérapie...

Néanmoins, Göran semble posséder encore une once de raisonnables dans son quintal de chair. "Let’s keep it alive and take it back to the camp. The spell is starting to wane anyway." Corban fait volte-face un peu trop vite dans sa direction, l’air passablement outré, à la manière d’un gamin qu’on aurait traîné au parc d’attractions, avant de lui avouer qu’il était trop petit pour les manèges à sensations. Et le voir encore à quatre pattes, armé de son couteau plus grand que lui, le Mangemort est assez difficile à prendre au sérieux, bien que son acharnement ait quelque chose d’intimidant. "Ugh, fine," siffle-t-il en rangeant son arme, dégainant à la place sa baguette (qu’il n’avait pas perdue dans les eaux du lac, grâce à la lanière qu’il accrochait à chaque fois qu’il partait sur le terrain, à la manière d’une cravache).

Corban claudique jusqu’à la barque (maintenant que l’adrénaline retombe un peu, sa jambe commence effectivement à le piquer). De là, il assène un bon wingardium leviosa des familles au kelpie, tandis que Göran pousse l’embarcation dans l’eau et le rejoint, s’affairant à les ramener sur le rivage.
Du côté de Yaxley, le trajet se passe en silence, du fait de la concentration dont il avait besoin pour ramener l’animal agité jusqu’à la plage, puis jusqu’au campement. Le batelier semblait avoir disparu, laissant simplement comme traces de son passage des crachats de chique noire.

"We’ll have to secure the perimeter, before we (and by we, I mean you) attracted more creatures... explique-t-il succinctement à son freak magnet, une fois qu’ils sont revenus en haut de la falaise, où la tente à moitié montée les attendait.
Le regard de Corban se pose de nouveau sur le kelpie, comme irrémédiablement attiré par son pouls encore trop vif à son goût (ou insérez ici une comparaison un peu capillotractée entre le kelpie et Buck). "You know what’s a very strong repellent for magical creatures?" Il range sa baguette dans sa cape (ou ce qu’il en reste), dont il se défait, avant de rouler ses manches jusqu’aux coudes.
Le couteau se matérialise de nouveau dans ses pattes, tandis qu’il s’agenouille à côté du kelpie immobilisé, dont le regard fou semble comprendre (ou du moins redouter) ce qui va lui arriver.
Corban pose une main sur le flanc de l’animal, flatte un temps sa cuisse trempée, d’où il retire quelques algues qui lui servent de crins, ses yeux noirs comme les eaux du lac étudiant la physionomie de l’animal. C’était une belle bête, à n’en pas douter, et pourtant, les doigts de Corban se resserre autour du manche de son couteau, tandis que son regard se pose de nouveau sur Göran, comme s’il attendait sans grandes attentes qu’il réponse à sa question, dont il délivre la réponse d’un sourire en coin: "Kelpie’s semen."

Et, d’un mouvement terrifiant de précision, Corban ampute le pauvre animal de ses parties génitales. Le kelpie redouble de ruades contraintes par la magie de Göran, et son hennissement gargarisant, déchire la nuit noire. Le vacarme ne semble pas ébrouer le Mangemort plus que ça, à l’instar du sang et autres fluides qui ont éclaboussé sa figure et sa chemise. Il se lève, avec certes moins de prestance à cause de sa patte folle, et lance les bourses équines à son partenaire. "Spread it generously everywhere. I would even advise you to drink some but I’d understand that you don’t feel like getting a facial from a horse..."

La perspective de revenir au camp n’a pas eu l’air de ravir ton acolyte, et tu t’en es royalement cogné, savourant le silence du retour que t’as pas une seule fois brisé – si ce n’est en ramant, assez douloureusement d’ailleurs, mais sans t’en plaindre. En arrivant sur le haut de la falaise, tu te débarrasses de ton manteau alourdi par l’eau dont il est imprégné, le déposes sur un rocher à côté de la tente, puis observes les parages que les lumières auparavant installées par Corban continuent d’éclairer. Les ombres sont revenues, vous accueillant de loin en poussant des cris et des grognements que tu braves en restant planté face à la nuit. La chasse (or whatever it was, comme dirait Yaxley) a fait remonter en toi le goût du risque ; lequel n’est jamais bien loin, mais généralement trop ennuyé par les stimuli médiocres de ton quotidien barbant pour daigner se bouger. "We’ll have to secure the perimeter, before we (and by we, I mean you) attracted more creatures..." Le froid humide t’humectant les nippes est démuni face à la fièvre qui te cogne dans le crâne depuis l’affrontement. "Or not", que tu souffles dans ta barbe. T’as déjà envie de remplier pour un round 2, de continuer à en découdre avec la faune environnante, même si t’as la carcasse abîmée et que ta magie va mettre un certain temps à retrouver sa vigueur. L’excitation est telle que tu serais prêt à y aller aux poings.

"You know what’s a very strong repellent for magical creatures?" Ton profil se tourne de trois-quarts et t’interroges Corban du regard. Il s’est agenouillé auprès de votre prise avant de lui flatter le cuir et les algues ; tu reconnais dans ses gestes l’expertise du chasseur qui ne s’émeut de rien mais s’applique en tout point. "Kelpie’s semen." Et de lui trancher les génitoires, aussi sèchement qu’un couperet tombe. Ça te laisse impassible. Du moins la violence du geste, sorte de goutte d’eau dans un océan de barbarie auquel on t’a habitué dès le plus jeune âge. Sa nature, en revanche, à la fois nécessaire et gratuite, salissante et grisante, fait tordre tes babines sur lesquelles naît un genre de sourire particulier. Agressif. Inspiré. "You don’t say." Ta voix pierreuse se mêle aux vagissements plaintifs de la créature mutilée. T’y crois évidemment pas des masses, à son astuce, mais quand il te jette le butin dans les pognes tu l’accueilles sans broncher, évaluant la paire à la façon d’un marchand – sinistre, le marchand. "Spread it generously everywhere. I would even advise you to drink some but I’d understand that you don’t feel like getting a facial from a horse..." La grivoiserie des propos t’arrache un rire gras. T’en reviens à la gueule poisseuse de Corban (grimage qui lui va franchement mieux que son teint propret de fonctionnaire). "I've drunk worse than that." C’est mal connaître les traditions culinaires de ton clan ; et toutes tes tentatives infructueuses pour booster ta fertilité, sous les conseils tordus et malavisés d’un chaman frappadingue. "Nice handling by the way", tu railles, regardant l’énorme membre de la bête que Corban tient sans timidité (ou écœurement, vu la boucherie) dans sa main libre, "looks like you've done this a lot." (Si tu savais.) Là de tes blagues vaseuses, tu pars avec tes abats rallier le fameux périmètre à sécuriser ; les bourses prisonnières de tes gros doigts se voient pressées au-dessus des herbes folles, suivant le cheminement des lumières disposées en cercle autour du camp.

"What you gonna do with it?" Tu croises la progression de Yaxley qui s’est lui aussi mis à renforcer la protection du camp. "Hang it’s head in your bedroom like a fucking painting?", ironises-tu. La dimension esthétique de la chose t’a toujours échappé ; quoique le sentiment de puissance (et dans ton cas de revanche) ne te soit pas tout à fait inconnu, étant donné que tu gardes dans ton arrière-boutique la goule empaillée qui t’a arraché le bras quelques années plus tôt. L’avoir sous le pif a un côté cathartique. Quand vous revenez au point de départ, tu t’es rapproché de la bête agonisante et t’accroupis un genou à terre, pas loin de l’hémorragie. "It’s a fine beast." Ta pogne repasse dans le sillage abandonné plus tôt par la main de Corban, mais la tienne bifurque et saisit entre pouce et index un échantillon de crin algueux que t’examines de plus près. "A young one. You should have it stuffed, it would look great, trust me." On dirait que vous parlez de la pluie et du beau temps et de combien c’est pratique d’avoir des bottes et de les cirer régulièrement. Un échange de bons procédés comme tout le monde (mh) en a, en somme. Ta gueule marquée d’hématomes et autres coupures se relève un peu, observant Corban d’en bas, non sans lui indiquer d’un signe de tête le kelpie en plutôt bon état, minus l'amputation récente (qui n'est pas de ton fait, alors ça compte pas). "Anyway, the extra we talked about is well deserved, don't you think?" T'as rien oublié de votre deal et tu veux t'assurer (assez naïvement) qu'il respectera sa part du marché, toutes conditions comprises.

Le douteux conseil pharmaceutique trouve écho dans le rire de Göran qui n’a pas l’air de gober l’information. Corban ne bronche pas, histoire de conférer à sa théorie un semblant de crédibilité, même si ça ressemblait tout bonnement à une invitation à Göran de se souiller un peu la couenne. Ceci dit, il en faudrait davantage pour lui retourner l’estomac puisque: "I've drunk worse than that." Cette réponse est loin d’être celle attendue par le Mangemort, et pourtant, à bien y réfléchir, elle contient cette satisfaisante logique qui finirait d’imprimer l’image de sauvage que Corban se faisait de son comparse. "You don’t say," réplique Corban à son tour.

"Nice handling by the way, looks like you've done this a lot." Heureusement pour Corban, la remarque est faite quelques semaines avant son mariage et donc avant son grand retour dans les bras de Buck (pour tourner ça gentiment). Aussi, un ricanement suraigu, un peu dépité, franchit sa bouche barbouillée. "You’d be surprised..." confie-t-il de manière énigmatique, sans préciser s’il évoquait là une vie bien avare en ébats (après tout, le ton était à la grivoiserie), ou plus concrètement un tableau de chasse en élagage incroyablement diversifié.

Göran se met à asperger les alentours du camp, comme Corban lui avait suggéré, et le Mangemort prend sa suite, récupérant au passage sa baguette afin d’ajouter quelques sortilèges de protection qui ne pouvaient pas faire de mal. "What you gonna do with it? - Well, you know how lonely it can get, some days— - Hang it’s head in your bedroom like a fucking painting? - Oh! you mean the—" Les oreilles de Corban virent au cramoisi, tandis que son regard se pose honteusement sur l’engin qu’il tenait encore nonchalamment. Il s’en débarrasse promptement, le balançant à côté du reste de l’animal qui, par douleur et fatigue, avait fini par s’évanouir (il n’était pas mort, la robe de son ventre luisait à la lumière des torches, à mesure qu’il respirait).

La gorge de Corban s’est serrée de gêne, et il se perd dans une quinte de toux brouillonne, s’essuyant négligemment le bas du visage d’un revers de manche, comme s’il pouvait se débarrasser du rougissement de ses joues, au même titre que le sang et la semence de l’animal, avant d’articuler une réponse moins suspecte. "Yeah! sure! I mean... probably not in the bedroom, but— - It’s a fine beast. Corban reprend un peu ses esprits, en réalisant que le gaillard s’est éloigné et est sensiblement passé au-dessus de sa terrible réponse. Il finit d’apposer son enchantement, avant de s’approcher de lui, le bout de ses oreilles encore rose. Un tour rapide dans la tente, histoire de récupérer compresses et potions de soin, et il s’assoit par terre. Le bout de baguette flirtant avec sa botte déchirée, il se met à grossièrement nettoyer ses plaies. A young one. You should have it stuffed, it would look great, trust me." Petit raclement de gorge pour se reconstituer une contenance (et afin de tempérer sa voix de crécelle affolée). "Yeah, I’ve thought about this, but I’m about to move with my soon-to-be bride in a smaller cottage down in Brighton."

Well, le cottage en question n’était pas si petit; mais en comparaison avec l’énorme et croulant manoir Yaxley, abritant d’innombrables salons dont les plafonds se perdaient dans la pénombre des toiles d’araignées, les deux étages de Brighton faisaient pâle figure.
"I’m not even sure Inès would like my take on interior design..." suppose-t-il en levant les yeux au ciel, réalisant les monceaux de trophées de chasse qu’il allait devoir bouger avant de vendre la baraque familiale; il se voyait déjà les entasser dans le grenier, avec les effets personnels de son père qu’il ne s’était pas résolu à brûler.

"Anyway, the extra we talked about is well deserved, don't you think?" Corban hausse une épaule: "Of course, I’m a man of my word. A bonus and a name, is that right?" qu’il réplique nonchalamment, les yeux rivés sur l’animal en peine, plus que sur les taillades qui avaient attaqué son tibia. C’est que le Mangemort n’est pas vraiment d’humeur à parler marchandage, sur le moment, ni même de se renseigner davantage sur la mystérieuse (et passionnante) malédiction qui hantait son comparse. Son souffle haché, son œil luisant, les petites mèches de cheveux folles collées à son front à cause du sang séché étaient autant de signes qui dénonçaient l’obsession actuelle du chasseur. "Speaking of extra..." Il glisse une œillade complice à Göran, un rictus en coin faisant craquer la fine couche d’hémoglobine séchée: "Fancy a second round?"

A voir comment il essaye de retenir son enthousiasme (certes un peu déplacé, au vu de leur état, et aussi de l’éthique douteuse de l’activité en question), il aurait aussi bien pu suggérer à Göran de coucher avec lui. Il sent son cardio battre dans ses oreilles, et les hurlements de bêtes sauvages au fond de la nuit n’aident pas à dompter sa fièvre. Corban a le couteau qui le démange et un trop plein d’adrénaline à dépenser quelque part. "I don’t think I’d be able to run, but we do need to go hunting if we want to have dinner..." se justifie-t-il en rafistolant sa botte à grands renforts de bandages imbibés de potion. "And I don’t know about you, big boy, but I’m starving."

"Of course, I’m a man of my word. A bonus and a name, is that right? – Yes!", que t'aboies. Tu t’es redressé avec une rapidité insoupçonnable, comme emporté par la satisfaction. Une fois debout, la tête te tourne et t’y vois trouble, mais t’as la gueule jouasse (quoique dénuée de sourire – la mention du nom de cette enflure qui t’a maudit taquine la colère sourde que tu te trimballes depuis l’exil.) T’hasardes un oeil sur la botte ensanglantée de ton acolyte qui a droit à quelques premiers soins. Une aubaine que ton foutu bras ne lui ait pas envoyé le sortilège entre ses deux yeux à lui ; sortilège par ailleurs agressif, qui pourrait taillader les écailles de n’importe quel dragon. Même en effleurant la guibole de Corban, le dommage collatéral doit donc sacrément lui piquer. Mais il n’en montre toujours rien, l’enfoiré, ce qui force le respect. "Good", t'en conclues, la voix rude mais ravie, parlant aussi bien du maintient de l'accord que de la résilience de l'aristo.

D’un pas lourd et lent, t’en reviens à ton manteau pour récupérer, dans le revers de celui-ci, un canif de facture plutôt médiocre qui est coincé entre coutures (une technique de voyou permettant qu’on ne remarque pas le relief de l’arme sur le vêtement – quelque part, ça a aussi permis qu’il ne sombre pas dans les profondeurs du lac). Il a rien à voir avec le couteau de chasse de Yaxley, mais la lame est bien aiguisée et elle t’a plus d’une fois sauvé la vie ; dans ton monde, c’est tout ce qui importe. Tu le fais rouler dans ta main en revenant vers l’animal, te rendant visiblement disponible pour aider à le dépecer (puisque madame n'en voudra pas entier), mais la voix de ton acolyte t’arrête dans ton mouvement. "Speaking of extra..." Vos regards se heurtent de plein fouet et tu comprends avant même qu’il n’articule la suite qu’il est atteint de la même folie prédatrice que toi. "Fancy a second round?" Un sourire oblique lui répond. Puis ta phonation gutturale aux accents paresseux – qui n’en sont plus tant, vu l’excitation qui gagne derechef ton corps : "so you really are a hunter." Tu dirais pas ça au premier clampin venu. C’était d’ailleurs franchement pas gagné pour que t’en viennes à cette conclusion, mais faut croire que sous ses petites tenues bon chic bon genre et ses manières de princesse, se cachent des instincts sinon aussi bas que les tiens, en tout cas aussi sauvages. L'adrénaline ravivée te fait reculer d’un pas sous son effet bœuf et serrer des dents. Fuck, que ça t’avait manqué ; et l’état dans lequel est Yaxley lui-même ne t’aide clairement pas à te calmer.

"I don’t think I’d be able to run, but we do need to go hunting if we want to have dinner..." Yeah. Sure. Whatever. Tu balaies nonchalamment ses excuses, tranchant la nuit de ta lame brillante. "And I don’t know about you, big boy, but I’m starving. – I bet you are." La pogne armée s’est tendue et le vise du bout de la lame. "Let’s find you something to bite on, aye?" Comme si tu lui faisais cette faveur. Alors que tu tiens aussi peu sur place que lui tient sur son socle terreux. Ton sourire fait peur à voir, de la manière dont tu découvres ton émail crasseux et teinté d’or, mais il s’associe volontiers, et avec une complicité familière, au rictus de Corban. Vous partez d’un même mouvement en direction de la forêt.

Quelques mètres de marche au milieu des conifères ont suffi à exaspérer la faune – jusqu’ici tenue en respect par la distance te séparant justement des bois. Ta malédiction fait des miracles, si on veut : les buissons s’ébrouent, les cimes s’agitent, et derrière les troncs noircis par la poix glissent des silhouettes petites, moyennes... grosses. "Well. You can't run, and I can barely use my wand", que t’as laissée rengainée à ta ceinture, tandis que ta paume continue de tenir fermement le manche de ton surin. Un léger mouvement de tête précède un haussement de sourcil. "This is going to be fun." Le timbre de ta voix s’étiole tout juste en un nuage de vapeur que deux créatures jaillissent des fourrés et se jettent sur ta carcasse. Tu distingues rien de leur race ou de leur gabarit ; tu t’effondres sous leur poids et rejoins le sol glaiseux de la région où tu batailles et plantes ta lame dans un peu tout ce qui est à ta portée. "Now might be a good time to use yours!!" Sa baguette. Son couteau. Son gourdin d’équidé qu’il a peut-être ramassé et gardé comme en-cas, finalement. The fuck you care. Tant qu’il t’aide à abattre les bêtes survoltées.

"I bet you are. Let’s find you something to bite on, aye?" Le sourire de Corban semble vouloir venir titiller le bout de ses oreilles rouges. Il se force à ne pas jeter un dernier coup d’œil au morceau de kelpie fraîchement amputé dont il venait de se débarrasser, ses yeux noirs flirtant avec le regard presque transparent de Göran. Un ricanement un peu crissant franchit ses lèvres scellées et secoue doucement ses épaules. Il se dit qu’ils doivent avoir l’air malin, à se faire vaguement du gringue juste en parlant de chasse. L’échange a des allures un peu aberrantes, appuyées par le contraste entre les deux lascars, bien qu’ils se rejoignent désormais sur leurs mises froissées et leurs goules détrempées de sang.

Corban était content d’avoir trouvé un camarade de chasse. Depuis la fin des Battues, il n’avait plus trop l’occasion de se dégourdir les jambes, et pire encore, avec la disparition de son petit frère, il n’avait plus trop eu le coeur à partir chasser. C’est que Kalen était un traqueur hors pair, ayant très vite surpassé leur propre père, et Corban n’a jamais douté du fait qu’il ne l’atteindrait jamais à la cheville, étant beaucoup moins stratégique et plus sanguin que son cadet.
Fort heureusement, avec Göran, il avait visé juste, et avait trouvé quelqu’un d’aussi peu patient et impulsif que lui, avec en plus de ça, un aimant à ennuis et un tour de bras suffisant pour assommer un kelpie à mains nues s’il le voulait.

Aussi, l’inattendu et enthousiaste duo se remet en branle, un peu plus claudiquant cette fois, mais tout autant échaudé (si ce n’est plus) que lorsqu’ils sont partis en quête du kelpie.
"Well. You can't run, and I can barely use my wand. This is going to be fun." Corban jette un œil à la baguette rengainée et réalise qu’elle se trouve du côté du bras maudit de Göran. Il fronce sensiblement les sourcils. "Oh, so that was you back there, with your arm going apeshit and throwing spells at me..." Le coin de ses narines se froncent, tandis qu’il semble essayer de deviner la peau décharnée de sous les vêtements du géant. Déjà qu’il était intéressé par ce bras au point de vouloir en faire secrètement un autre de ses trophées, savoir que l’engin avait en plus attenté à sa vie, rendait son caprice, si ce n’est justifié, encore plus pressant. Mais il se passerait bien de le confier à son petit camarade.

"I can be your armed wing, th—" Une ombre fugace balaie le coin de son champ de vision, et une seconde après, Göran en disparait, projeté au sol par une bestiole bondissant des fourrées. Corban fait un bond sur le côté, se réceptionne en grinçant des dents à cause de la douleur de sa jambe blessée. Son dos s’écrase contre l’écorce d’un sapin, afin qu’il ne perde pas l’équilibre. "Now might be a good time to use yours!!" beugle Göran, lui indiquant ainsi sa position difficilement repérable dans la pénombre, et d’autant plus qu’il était aux prises non pas avec une mais deux bêtes survoltées.
Aussitôt, Corban expelliarmus tour à tour les deux créatures (un genre de sanglier magique et un loup, magique ou pas, telle est la question), restant en retrait, au lieu de se précipiter jusqu’à Göran qui, une fois n’est pas coutume, est couvert de sang frais, histoire de diversifier le patchwork qui tachait sa chemise et ses joues. "Are you alright???" siffle-t-il, avant de planter son regard dans la pénombre, là où le sanglier semble se remettre de ses émotions et prêt à charger une seconde fois.

Corban lève de nouveau sa baguette, afin de tenir l’animal à distance. Mais cette fois-ci, son expelliarmus fuse et rebondit sur les troncs d’arbre, avant de venir le percuter dans le dos, l’expédiant tout droit vers Göran sur lequel il s’effondre, leurs faces si proches l’une de l’autre l’espace d’une seconde qu’ils ont tout le loisir d’admirer les shrapnels de sang qui les constellent. "Is that your knife, or you’re happy to see me, big boy?" siffle Corban avant de rouler sur le côté, juste au moment où le sanglier prend appui sur le sol meuble pour se jeter sur eux. Corban tire le couteau de sa botte et, de concert avec Göran (sûrement), sa lame est prête à s’enfoncer dans le ventre de l’animal qui leur saute dessus.

T’appuyant sur tes coudes, tu te remets de l’attaque en soufflant bruyamment et en braquant ton regard dans la même direction que Corban. Ton poing est resté enroulé autour du manche, si fermement que tes phalanges blanchissent ; au contraire de ta gueule et… d’à peu près tout te composant, qui est rougi par le sang animal que la lame a fait couler. Mais v'là que ton bide est si gros qu’en se soulevant il te cache la vue ; tu te redresses donc, sur tes mains cette fois, grognant un truc qu’on qualifiera de 'réponse positive' à la question de ton acolyte. On pourrait en déduire que la réaction en chaîne t’a rendu encore plus patibulaire qu’à la normale, mais elle a simplement ragaillardi ton adrénaline – laquelle te ramène à ta nature (de) sauvage. Autant dire que t’es pas spécialement d’humeur à parler, ni même à formuler une phrase aux sonorités humaines.

Avant que les deux bestioles ne reviennent à la charge, tu te relèves à grande peine, et ce sans quitter des yeux le carré de nuit où est envoyé le sortilège de Ya- Yaxley !!! Que tu te prends de plein fouet ??! Les vieux genoux cèdent une seconde fois, et tu grimaces dans ta barbe crasseuse en sentant que le poids de son corps t’écrase un peu plus les côtes fêlées et autres hématomes hérités de l’affrontement avec le kelpie. Ton crâne a cogné le sol meuble et ta tignasse claire prend définitivement la couleur de la boue. "Is that your knife, or you’re happy to see me, big boy? – Argh, skit!!" L’haleine est chargée quand elle traverse ta rangée de canines serrées, même si t’es pas spécialement vénère contre lui. D’ailleurs t’es pas tellement en colère et, maintenant que tu rouvres les paupières, t’as même l’air de te marrer. "You’d have felt the difference if it really was my boner." Et allez. On a jamais honte de ses gros sabots. Quoique Corban n’est pas non plus en reste de vannes lourdingues ; à sa décharge, t’as effectivement un début de parpaing – l’excitation du moment, décidément grossie par l’adrénaline de la chasse. Parce que t’es à des années lumières de considérer la scène (vos corps écrasés l’un contre l’autre) sous le prisme érotique. Ça n’est d’une pas ton genre, en tout cas pas un réflexe quand il est question de corps masculins, et de deux pas le bon pairing (parce qu’on parle du chef de la Values Brigade, quand même, et aux dernières nouvelles tout ce que ces abrutis sont d’accord de se foutre au cul, c’est des balais) (si) (tu) (savais).

Quand Corban se dégage, ton couteau est déjà prêt à recevoir le sanglier magique. Il vous charge cette fois sans distinction, si bien qu’il n’y a plus une, mais deux lames pour l’accueillir. Ton bras libre a encerclé l’encolure de la bête pour la piéger contre vous tandis que vous vous attaquez à ses points vitaux. Une sensation de chaud se répand sur ton poitrail – sur celui de Corban aussi, probablement – et malgré ses cris gutturaux qui vous explosent les tympans, tu trouves une satisfaction sans nom à sentir l’animal se débattre entre vous deux et peu à peu lâcher prise. Des bruits de pas précipités t’arrachent à la contemplation de l’encolure qui s’est tassée (derrière laquelle y t’a semblé voir les petits yeux sombres et luisants de Yaxley), et quand ton regard file en direction du mouvement, la gueule du loup s’ouvre en grand. Merde. Tu (vous ?!!) l’avais presque oublié. Par réflexe, ta botte s’est levée et assène un coup puissant dans la mâchoire animale. Un geignement éclate aussitôt et la menace d’effondre à moins d’un mètre de là.

Mais le loup est vif et se redresse déjà. Tu te détaches de la carcasse morte pour  fondre, sans même vraiment te relever, sur celle bien vivante du loup. La bête n’est pas aussi vigoureuse que le sanglier, quand tu l’attrapes dans tes bras, mais elle est rapide et, surtout, t’es seul à la saisir ; heureusement, tu sais quoi tenailler et où comprimer. Fut un temps, t’aurais su la maîtriser et lui briser la nuque sans trop tarder, exactement comment on vous apprenait à le faire dans votre clan, mais t’as plus vingt ans, non plus ton corps de chasseur. Tes grands battoirs se contentent donc de museler la gueule qui s’agite et s’ébroue et revient aussitôt vers toi, tandis qu’une jambe est passée par-dessus le corps poilu pour tenir contre toi le spécimen et lui éviter de s’échapper. Corban saura le mettre à mort : t’en doutes pas une seule seconde maintenant que tu le sais capable.