Déjà que t’es pas une fille du matin, t’es encore moins une fille du matin pour le Ministère. C’est glauque de se pointer à huit heures, alors que t’aurais bien dormi deux ou trois de plus. T’aurais pu en fait, tu ne sais pas vraiment ce qui te retient de rentrer pour retrouver ton lit. Enfin si, tu sais. La curiosité. Parce que si on t’a envoyé cette note en te demandant expressément de venir ce matin-là, c’était pas pour des hiboux. Enfin t’espères parce que ça allait pas te plaire sinon. T’avais l’habitude de venir au Ministère sans que grand monde le sache. Fallait que tu te perfectionnes, que tu deviennes la meilleure dans ton domaine, la métamorphomagie. Parce que tu gardais toujours cet espoir qu’un jour, on te fasse suffisamment confiance pour t’envoyer sur le terrain. Toi, t’es pas d’accord avec eux. T’es pas nerveuse et capricieuse, ça jamais voyons. Ils te connaissent pas, tout simplement. T’es un peu excentrique, tu rends la vie facile à personne, mais c’est pas pour ça que t’es une mauvaise graine et t’es certaine que tu pourrais être un bon atout pour eux, s’ils t’en laissaient la chance. Mais ça, c’est seulement dans tes rêves les plus fous. Là, t’as juste l’air d’une pauvre gamine qui attend sa mère devant la porte du directeur parce que t’as fait une connerie. Et pour une fois, c’est pas le cas, pour une fois, t’as été bien sage, t’as même pris un petit déjeuner avant de venir afin de ne pas t’énerver quand la raison de ta présence ici te sera révélée. Un point pour toi. Mais t’étais loin de t’attendre à ce qui arrive. Ou plutôt à qui précisément. Y’a pas des tonnes de personnes que t’as pas envie de voir, même si ce sont tous des imbéciles, ou la plupart. Mais alors elle, on ne peut pas dire que t’en garde un super souvenir. Deuxième, troisième année à Poudlard. Un peu dingue sur les bords, qui s’énerve facilement, qui n’aime personne, sûrement pas les élèves, encore moins les sangs impurs. Mais y’avait fallu qu’elle soit dans un moment où même les sangs purs comme toi la dégoûtait. T’étais pas passée loin de la mort ce jour-là, enfin c’était ce qu’elle croyait. Finalement, ta mère t’avait un peu sauvé la vie avec sa rune qu’elle t’avait tatoué. Merci Maman, louée soit-elle. Ouais, Alecto Carrow, c’était pas la femme que tu rêvais de voir et pourtant, c’était visiblement pour elle que t’avais dû te lever de si bonne heure. Ô joie. « Si on m’avait dit que je reverrais un jour celle qui a essayé de me tuer mais qui m’a juste châtouillé… j’aurais ri au nez de cette personne. » Enfin sauf si c’était Voldemort, difficile de lui rire au nez à celui-là. T’avais un sourire sur les lèvres, le même que lorsque tu étais étudiante, parce que tu ne crains rien, t’as jamais rien eu à craindre contrairement à ce que les gens pouvaient penser. T’es pas une miraculée, non, t’as juste la chance d’être née dans la bonne famille, même si c’est pas toujours facile. « J’ai encore fait une bêtise et on va me punir ? » T’avais peut-être pas envie d’être là, mais t’avais quand même envie de savoir pourquoi on t’avait fait venir. Pourquoi elle t’avait fait venir.

Evidemment que t’es pas ravie d’être là. T’as encore dû faire une connerie dont t’es incapable de te souvenir. Ca serait pas la première fois et ça ne sera sûrement pas la dernière. T’as la tête dure, pas évident de te faire changer. Et c’est bien pour ça que t’es fidèle à toi même quand tu pénètres dans le bureau de la Carrow. Tu sais de quoi elle est capable, à quel point elle peut être terrifiante mais ça n’empêche rien. Tu parles encore et toujours avant de réfléchir. Ca aussi ça te fera défaut un jour. Mais pas aujourd’hui, pas au Ministère. Y’a la petite pique qui s’échappe d’entre tes lèvres et qui te fait sourire. La provocation est plus forte que toi, surtout que tu ne mens pas quand tu dis que tu n’imaginais pas la revoir. En réalité, tu pensais que ça faisait bien longtemps qu’elle s’était faite tuée. Ca devait pas manquer le nombre de personne qui voulait sa peau. « Ma mère ? Si vous saviez ce que je pense de ce qu’elle pourrait me dire, même vous pourriez en rougir. » T’arrivais toujours pas à penser du bien de ta mère, c’était bien plus fort que toi. Un jour, ça te passerait peut-être mais pas aujourd’hui, sûrement pas. T’as les yeux qui se lèvent au ciel, un soupir qui franchit tes lèvres aussi. Pourquoi toujours devoir se presser dans ce monde. Mais fallait bien te rendre à l’évidence, Alecto Carrow était bien loin de te porter dans son coeur. Enfin, en avait-elle un en réalité ? Intéressant à savoir. « Les nouvelles vont vite à ce que je vois par ici. Mais c’est correct. On n’arrête juste pas de me dire que je suis trop jeune. Pff, les adultes. » Tu recommençais à faire ta gamine pourrie gâtée, à croire que tu savais faire que ça mais en réalité, t’en avais plus qu’assez qu’on te dise que tu étais trop jeune, tu pouvais faire tes preuves, tu le savais. « Si mon père ne m’avait rien appris, vous pensez vraiment que je passerais mon temps libre à suivre des cours particuliers ici même pour me perfectionner ? » Répondre par une question à une question, ça n’avait jamais été du génie, surtout pas avec la Carrow. Alors tu soupirais et levais les yeux au ciel. « Oui madame. Mon père mais aussi mon oncle, Marlon. » Ca te semble en tout cas important de le préciser histoire qu’elle comprenne bien que tu n’as pas ces idées en l’air, que tu sais ce que tu fais, ou que tu le penses en tout cas. L’idée ne te vient pas de nul part. « Est-ce que vous allez finir par me dire ce que je fais ici ou on joue aux devinettes ? Vous ne m’aimez pas, je ne vous aime pas. Alors autant abréger nos souffrances respectives. » T’es un peu trop sans langue de bois, et ça aussi ça te jouera des tours un jour. Trop de choses sont contre toi, mais pas ta détermination à servir un jour, pour de bon, la bonne cause.