all that (elevator) jazz (litre)

Franchement, on est bien. Cette journée va bien se passer. C’est ce dont Olivia essaie de se convaincre alors que la dernière personne qui était encore dans l’ascenseur le quitte et s’éloigne vers le reste du sixième étage - Coopération Magique, indique l’écriteau métallique en face de l’ascenseur. Ça ne fait que peut-être cinq minutes qu’elle joue à la conne dans l’ascenseur, à faire semblant d’avoir oublié à quel étage elle voulait se rendre, de façon à attendre que les uns et les autres se barrent de la petite cabine pour qu’elle soit enfin seule.
Une petite voix dans sa tête lui murmure qu’elle aurait peut-être aussi bien fait de sortir de l’ascenseur maudit et d’en attendre un autre, vide.
Mais non, elle est seule, elle va enfin pouvoir enclencher le glyphe qui va l’amener jusqu’au fameux (et très secret) entresol entre le niveau 2 et le niveau 3.

Et bien sûr, alors qu’elle observe les grilles se refermer magiquement, seules, et qu’elle se réjouit de la solitude promise et enfin atteinte, quelque chose en interrompt la fermeture.
Quelque chose étant une mallette que d’aucuns auraient déjà qualifiée de très muggle-ish et auraient caractérisé comme une infraction à la séparation des mondes sorciers et moldus.

Ravalant un juron qui n’aurait pas vraiment sa place dans la bouche de la cruche de service qu’elle joue à merveille, la voilà à la place qui dévisage l’inconnu qui passe les grilles et s’engouffre dans la cabine d’ascenseur, avec un sourire charmant (et si purement et sincèrement niais qu’on en crèverait d’horreur). “Oh hi! I think we haven’t met yet, have we?” Mais bien sûr que non, triple buse, se morigènerait-elle presque si elle pouvait se dédoubler.

Au moins, l’avantage de jouer à l’idiote, et de le faire avec tant de conviction et de crédibilité, c’est que sa réputation est ternie (faite, donc) pour toujours. Se décalant un peu, alors qu’ils ont tout à fait la place de se tenir face à la grille tous les deux, sans se toucher, Liv observe davantage le personnage. “I’m Olivia, but you can call me Liv.”, se présente-t-elle en tendant la main vers lui, avant de faire mine de se rappeler qu’il faut qu’elle appuie sur un bouton pour se rendre à un étage différent : “Oh shoot! Sorry, I’m supposed to go to the second Floor. Or was it the Sixth? Wait...” Elle regarde le nouveau venu, avant de lâcher avec un rire gêné un aveu d’incompétence : “No we’re on the 6th floor, silly me. Is the second floor ok for you?” Comme si l’homme n’était pas capable d’appuyer lui-même sur le bouton.
Et Liv d’ajouter, enfin : “I think you failed to close the gates correctly, since the cabin won’t move up or down.”

Rien à voir avec elle qui utiliserait sans en avoir l’air la magie sans baguette pour bloquer les grilles en position entrouvertes, histoire que le type en question puisse avoir l'idée formidable de ne pas s’attarder avec la pipelette du Ministère...

tw: piotr, left of racism

Le sourire de Piotr est tordu sur ses lèvres comme une sculpture en acier, lui donnant l'air plus redoutable que d'habitude - ceux qui le connaissent sauraient immédiatement dire que c'est un sourire particulièrement dangereux, puisque celui-ci signifie qu'il est de très mauvaise humeur. Pour les autres, il a l'air tout aussi flippant et souriant que d'habitude, et on s'éloigne précautionneusement de lui alors qu'ils marchent à grands pas à travers ses bureaux, jouant des coudes, de la mallette et de la baguette pour se tailler un passage à travers le sixième étage du Ministère.

Les portes manquent de se refermer mais Piotr les retient du bout de son objet fétiche avant de prendre toute la place qu'il lui convient dans la petite cage d'ascenseur, adressant son sourire de prédateur fétide à la secrétaire qui s'y trouve déjà. “Oh hi! I think we haven’t met yet, have we?” Piotr la regarde de haut en bas sans se gêner. "I don't think so, no." D'une meilleure humeur, peut-être que Piotr lui aurait fait son numéro - mais il garde dans le bras la douleur du Crucio lancé par sa chère femme le matin-même, les relents acides de ce rendez-vous avec le directeur du département des Transports qui refuse toujours autant les visas dont Piotr a besoin pour son staff (et quelques membres de la Bratva), et la frustration de n'arriver à rien avec ce putain d'Ivan.

“I’m Olivia, but you can call me Liv.” Elle lui tend la main, que Piotr regarde avec intérêt. Il la prend dans la sienne après une courte hésitation. "Nice to meet you." L'accent russe - factice, mais nécessaire - lui fait défaut et il se reprend ensuite, appuyant le trait d'une manière un peu cliché: "I am Piotr." Il se sait meilleur acteur que ça - mais la matinée a été chaotique, il a mal au bras et- “Oh shoot! Sorry, I’m supposed to go to the second Floor. Or was it the Sixth? Wait...” -oh, pour l'amour de Dieu. "We're on the Sixth," gronde-t-il entre ses dents, mais l'autre idiote parvient enfin à la même conclusion: “No we’re on the 6th floor, silly me. Is the second floor ok for you? - Fine. - I think you failed to close the gates correctly, since the cabin won’t move up or down.” L'expression pincée de Piotr (il ne s'était lui-même pas rendu compte qu'il avait perdu son sourire habituel) se tord de nouveau dans un rictus aussi désagréable à regarder qu'à porter. "My bad. I take care of it." Il pose sa mallette sur le sol, desserre le noeud de sa cravate, et attrape la grille à pleines mains pour la déloger. Au bout de quelques secondes à se débattre, il parvient à la remettre au bon endroit; il se retourne vers la cruche de service avec un air crispé et la nuque constellée de sueur. "Is good?"

La cabine se met en branle, à son grand soulagement, et Piotr ramasse sa mallette. "Liv, you work at Second floor?" demande-t-il d'un ton distrait en jetant un coup d'oeil à sa montre brillante de diamands et d'or et faisant trois fois la taille de son poignet. "What do you do? The coffee? If it's good, you should come work for me. Nobody can do the good coffee in my office. You speak Russian? Your English is very good."