2005. Salomon l'a appelé en toute urgence quand un inconnu s'est présenté à la résidence des Guterman, interrompant Ephraim dans ses études, alors qu'il était enfermé dans son bureau depuis dix heures la veille. Tous leurs frères vaquent à leur occupation loin du Pays de Galles, fort heureusement, certains au travail, d'autres courtisant leurs amants et amantes aux quatre coins du pays sans le moindre respect pour le travail incroyable qu'Ephraim est en train d'accomplir pour leur égard à tous. Il approche d'une solution, d'une idée, d'un théorème, d'un cercle - la victoire est proche, et les journées sont trop courtes. Alors Ephraim ne dort pas, passe son temps à lire, à étudier et à travailler, sans jamais se lasser, les doigts tâchés d'encre et les yeux cernés.
Ainsi il est d'une disposition plutôt désagréable quand il enfile une robe de chambre sur son pyjama soyeux froissé, les cheveux décoiffés et le regard hagard, apparemment déboussolé par le soleil qui filtre à travers les fenêtres centenaires du manoir des Guterman non loin de Cardiff.

Et malgré tout, il accueille le visiteur inopiné d'un simple "hm" en découvrant Göran Falk sur le pas de sa porte, son visage impavide se ridulant d'un froncement de sourcils en détaillant l'horrible personnage. Ses yeux pâles étudient silencieusement sa silhouette, s'attardent sur son bras, et Ephraim fait un pas en arrière par pur mécanisme pour protéger son frère Salomon. Sa baguette apparaît dans sa main d'argent et de fer subitement, et se lève d'un geste impérieux et agacé dans la direction générale du visage de Falk, les yeux perçants d'Ephraim ne lâchant pas les siens alors que se réveille dans le fond de son crâne un frémissement qui a des relents désagréables d'inquiétude et de crainte. "Right now is now a good time," lui dit-il d'une voix ferme. "Please do not attempt to enter the house: it is magically protected and we just renovated the hall's carpet. It would be a bother to have your blood staining it." Sa baguette se basse en direction de l'épaule de Falk, incapable d'empêcher une curiosité certaine de s'inviter dans son regard et sa voix, morne et tendue à la fois: "State your business." Il a bien une petite idée, vu l'énergie alchimique déconnante qui émane de l'homme en face de lui et la mauvaise surprise qu'il lui a réservé si Falk cherchait jamais à le contrarier, mais il a besoin de savoir si il doit se préparer à le réparer ou à le faire fuir - ça dépendra de l'humeur de Falk, et sa disposition à demander de l'aide pour la deuxième fois en peu de temps.
Comme on dit, pas de bras, pas le choix.

( tw ; mention de meurtre.s, vulgarité )

Tu fulmines tellement que t’as manqué la désartibulation ; dommage, t’es entier, et t’as toujours ton maudit bras avec toi. Les terres galloises reçoivent ton pas lourd sans trembler, ce qui n’aurait pas été le cas d’un quidam s’il s’était trouvé sur ton chemin. T’as l’air d’un fou. D’un fou de cent kilos qui pourrait cogner leur sacrosaint Merlin s’il t’apparaissait comme par miracle. Sous ton long manteau rapiécé, duquel pend une manche vide, est coincé ton bras. Tu l’as entortillé autour de ton buste avec des lanières magiques qui l’empêchent de bouger, et, surtout, d’avoir des mouvements brusques. C’est que, lui et toi, vous vous êtes sacrément battus quelques minutes plus tôt, si bien que t’as failli y passer quand il a commencé à entortiller ses doigts autour de ton cou de buffle. C’est nouveau, ça ! La première fois qu’il tente de te dézinguer. Et autant dire que t’étais plus serein quand il se contentait de renverser un verre ou de buter les autres.

En arrivant sur le perron du manoir Guterman, tu beugles et tambourines durement contre le bois centenaire de l’illustre porte. Y a un type qui te reçoit, la copie conforme de cet incapable d’alchimiste, mais il te fait savoir assez rapidement qu’il n’est pas Ephraim et qu’il n’est pas nécessaire d’être grossier. Comme si t’en avait quelque chose à carrer de savoir ce qu'il est nécessaire ou pas de dire et de faire ici ou ailleurs. Tu finis par lui glisser une œillade noire tout en fermant ta grande gueule, et de le dévisager ainsi tout le long que vous attendez l’apparition de l’alchimiste en question ; dans ton clan, les jumeaux nouveau-nés on les brûlait pour s’attirer les faveurs de la Mère et repousser le mauvais œil. Ben t’as comme qui dirait envie de perpétrer la tradition, soudain (t’es loin de te douter que y’en a une armée entière, de têtes à claques comme eux deux).

Ephraim apparaît enfin, t’arrachant à l’observation fielleuse de son frangin. Assez bizarrement, tu sens que ton bras est attiré par sa présence, comme s’il était aimanté par son énergie, mais tu mets ça sur le compte de ta colère et du poing que tu rêves de lui coller sur sa bouille d’ange pédant. T’étires un peu plus le rictus vénère qui te cisaille la barbe au moment où il lève sa baguette vers toi. "Right now is now a good time. Please do not attempt to enter the house: it is magically protected and we just renovated the hall's carpet. It would be a bother to have your blood staining it." C’est rentré par une oreille et c’est ressorti par l’autre. "State your business." Sans prendre la peine de lui répondre, ton énorme masse fait un pas en avant pour entrer sans y être invité ; parce que c’est une habitude chez toi que d’envahir l’autre, et parce que tu vois rouge (aussi rouge que quand t’as refroidi le dernier alchimiste qui s’est foutu de ta gueule, c’est dire si t’es peu disposé à papoter).

Evidemment et comme, pourtant, ton hôte te l’a bien précisé, la protection du manoir se met en branle dès lors que ta botte poisseuse franchit le seuil. Une décharge te fait instantanément reculer et retourner à ta place, où tu te redresses en clignant des paupières, sonné. Ça a eu le mérite de te faire redescendre d’un cran, disons assez pour calmer tes pulsions meurtrières et réactiver le peu d’intelligence dans laquelle flotte ta cervelle. Sans autre transition qu’un juron same, tu désignes ton bras ligoté sous le manteau. "You fucked up." Vu que l’idée c’était de brider la magie vaudou du membre courant encore et malgré tout dans ses nerfs, on peut considérer, au vu des bleus et des plaies te tartinant la tronche et les carrés de chair visible ici et là, que le merdier est encore loin d’être soumis à tes terminaisons nerveuses. "It tried to kill me." L’index de ton autre main se lève à la hauteur de l’aristocrate en peignoir. "You better fix it boy." Or else. Mais tu vas pas lui rappeler ce qui est arrivé au dernier type qui s’est foiré. T’en as un peu marre de courir à droite à gauche pour dégoter ces foutus alchimistes ; puis tu vas pas commencer à tous les éliminer, y’en aura plus aucun pour s’occuper de ton cas, à la fin…