| | | « Eh. C’est pas grave pour la lessive. On lavera à la sorcière pour une fois. Ok ? » les mains sur mes épaules qui s’affaissent un peu plus sous ses mots, je libère une espèce de moue approximative - le genre de moue qui me créait un double-menton de toute pièce. « Moué mais ça pue après… » marmonnai-je dans ma barbe. Ça c’est parce que je n’avais absolument pas les nuances et que j’étais plus douée avec une machine à laver qu’avec la magie pour ce genre de choses. Enfin osons le dire tout de même, je n’étais pas une sorcière incroyable non plus, loin de là. « Ça va aller. On boit nos cafés en quatrième vitesse et on rentre chez nous. Ça te va ? » « J’espère que le café descendra pas trop vite alors. » Et pour vidanger après à la sorcière, c’était le même tableau si vous voulez mon avis. « D’accord. » en secouant la frimousse, lui jetant un regard bref accompagné d’un petit sourire complice. Faisons ça.
Je le laisse aller préparer le café à contrecoeur, étant manifestement en besoin de proximité. Je m’en mords la lèvre inférieure, le plus doucement possible, ce qui me valut malgré tout une égratignure - j’avais oublié, encore. Je baisse encore davantage le nez et lui tourne le dos, une main sur ma hanche. « Tu sais ce que Noémia a prévue pour le dessert ? » j’ai l’air de sortir d’un rêve étrange, sursaute presque, bafouille. « Euh… oui, enfin non, je vais voir… » fis-je en me précipitant sur la porte du réfrigérateur. J’ouvris son battant et penchait la tête, toujours dans mes pensées. J’ai quand même vraiment merdé. Lothar répondit à maman tandis que je tirai le bras vers un plateau rempli de bocaux en verre, eux-mêmes couverts. « Ah, c’est ça… » puis pris de mon autre main et ramenai ledit plateau vers moi, et dieu merci il n’était pas lourd, même pour mes petits bras d’écrivaine. Je pivotai, donnai un coup approximatif avec ma fesse pour fermer le battant et me retrouvai à nouveau nez à nez avec mon ami. « T’es sûre que ça va aller ? »
Je lève les yeux dans sa direction, à nouveau, et j’essaie de mentir, vraiment, à ce moment-là. Et j’en ai du mal à le regarder plus de deux secondes. « Oui, c’est pas trop lourd, ça va, » lui dis-je en me faufilant en première ligne pour finir au salon. J’avais hâte de partir alors que ce n’était pas le pire des repas qu’on ait pu avoir en la matière, et de loin. « Et voilà ! » je dépose le plateau, dispatche les mousses au chocolat à chacun, m’en réserve une autre en rab sous l’œil de juges : Ewan et ma mère. Gneugneu et les autres… j’ai faim, j’ai envie d’un bain, je veux partir, c’est tout. On se régale et je parle peu pour le dessert. On prit la peine de débarrasser, et le pantouflard de sang-pur finit par nous aider, enfin.
« Merci pour le repas maman. » lui dis-je en français alors que je finissais d’enfiler ma veste. « C’est normal ma chérie. Revenez plus souvent lorsque vous pouvez les enfants, vous êtes toujours la bienvenue à la maison. » Elle vient m’enlacer juste après et me dépose un autre bisou qui fait du bruit sur ma joue, si fort que j’en grimace un peu, tout sourire. À la maison. Ça me fait mal d’y penser, de me l’avouer, mais ce n’est pas là ma « maison ». Je remue un peu le visage pour la chatouiller avec mes moustaches et me libère avec tendresse. Puis je me plante devant Ewan, Lothar se dirigeant vers maman. Je ne savais jamais comment faire. Je n’avais même pas envie de le regarder, ni le toucher. Ce n’est pas mon père. Ce n’est pas… « Au revoir Waffahèl, » et lui fait une bise très succincte, à la française, le maximum que je pus me permettre et déjà trop le concernant. « Au revoir. » Mon regard vrilla sur le côté, fuyant, bel et bien pressée de quitter les lieux malgré la chaleur de la présence maternelle.
Et puis on s’en est allé.
Après avoir marché quelques mètres, j’enfilai mon bras sous le sien, me calant sur son rythme. Les yeux dans le vide, un peu. Un léger silence. Trop lourd. Peur latente.
« …tu crois qu’on nous arrêterait pour avoir de l’équipement moldu ? » lui avais-je soufflé en serrant davantage son bras. Viendra un jour où il faudra s'en délester, certainement… |
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