Cela fait déjà presque deux heures, que la réunion a commencé. Yelena n'aime pas ce genre de rendez-vous interminables. Elle ne comprend pas l'intérêt de faire durer les choses comme ça. Mais soit, elle s'exécute. Ici, elle n'a pas vraiment son mot à dire, sauf en off parfois. Il faut dire, qu'elle travaille majoritairement pour Piotr, qui n'est autre que son cousin par alliance, si on veut. Elle ne l'a rencontré que récemment, lors de son arrivée en Angleterre. Yelena n'avait pas pu se rendre à son mariage avec Feodora à l'époque. Piotr est un homme... particulier. Pas vraiment apprécié par le reste des Dolohov, il ne lui paraît pas être si terrible que ça. Yel mentirait, si elle disait, qu'il ne l'impressionne pas un peu (beaucoup). Néanmoins, elle a du mal à comprendre, ce qui le rend si détestable auprès des autres, surtout de sa cousine. Elle comprend, qu'épouser quelqu'un, que l'on n'a pas choisi, n'est pas aisé, mais c'est un devoir. Yelena n'était pas non plus la plus enchantée, à l'idée d'épouser Conrad. Mais, avec le temps, elle a appris à l'apprécier, et puis c'est ce que sa mère a toujours voulu pour elle. Polina est une femme protectrice avec ses enfants, surtout son aînée. Aucune raison qu'elle lui veuille du mal.
Sans s'en rendre compte, Yelena a commencé à tapoter des doigts sur le bureau. C'est un tic nerveux, quand le temps ne passe pas assez vite à son goût. Finalement, Piotr lui demande de traduire, encore, quelque chose à leurs interlocuteurs. Un sourire se dresse sur ses lèvres, alors qu'elle se redresse sur sa chaise. Ses yeux manquent de sortir de leurs orbites, lorsqu'elle l'écoute lui dire, en russe, ce qu'il souhaite qu'elle traduise. S'ils étaient seuls, elle aurait soupiré lourdement. Elle n'en fait rien. Nouveau sourire. Quelques minutes passent avant qu'elle ne finisse par traduire la dite phrase. Yelena voit le sourire au coin des lèvres de Piotr. Il n'y a que lui pour trouver cela amusant. Il a de la chance, qu'elle l'apprécie plutôt bien, et qu'il lui enseigne l'occlumancie. Elle est consciente de la chance qu'elle a. Yel ne sait pas vraiment, en quoi cela lui sera utile, mais Piotr a dit qu'on en a toujours besoin, et que cela est très utile en société. Soit.
La réunion prend enfin fin, et tout le monde sort du bureau. Il ne reste plus que Yelena et Piotr. Elle se lève de sa chaise, et se tourne face à lui, en haussant ses sourcils. ─ It was really not funny. At all. Next time I'll let you translate your nonsense on your own. Elle range ensuite ses quelques affaires, et dossiers disposés sur la grande table. ─ If you're in a teasing mood, I suggest you talk to my cousin. Your wife.

tw: piotr?, crude & explicit language

Il y a peu de choses que Piotr aime plus que faire chier son monde.

C'en est presque maladif: quand l'appât est lancé, il le mord sans la moindre hésitation, comme un gros poisson sans le moindre contrôle sur ses impulsions. Généralement, et comme souvent, Piotr se sort des situations délicates dans lesquelles il finit avec une pirouette, un sourire, un pot-de-vin, ou les trois. L'étendue des manières expertes qu'il a d'embêter son entourage va de la simple remarque désobligeante au plan sur le long-terme dont il ne récoltera les fruits que plusieurs mois, ou années, plus tard. Piotr, malgré ses manières crasses et brusques, est un homme incroyablement patient.

Ça ne semble pas être le cas de Yelena, dont les doigts s'agitent nerveusement et en rythmne sur la table de rendez-vous, interromptant de temps à autres le fil de pensées de Piotr. Déjà que le rendez-vous, en lui-même, n'est pas particulièrement intéressant ou passionnant... L'habit d'ambassadeur va à ravir à Piotr, mais pas ses responsabilités: si il aime bien serrer des mains, échanger des anecdotes rocambolesques et tracer son élégante signature sur les liserés qu'on lui tend, il aime un peu moins les rendez-vous de diplomates, les négociations économiques, et les interminables réunions sur la souveraineté politique et légale d'un pays ou d'un autre.

"Yelena, would you be so kind as to please tell this man that he has the ugliest face I have ever seen on this side of the Thames, and could you please also provide him with the nearest brothel's name and address? Evidently, M. Fitzgerald's wife is either absent or incompetent, as I'm sure he wouldn't have the audacity to put forward this motion if he had the opportunity to bust a good load every so often. This is ridiculous and nor I nor the Party will negociate in these ridiculous circumstances. Tell him to go fuck himself and that we will examine his proposal again when it has been reasonably put together and not half-assed by his underage interns. That will be all for today."

Les yeux de Yelena semble prêts à sortir de leurs orbites, et Piotr lui sourit d'un air radieux - difficile de ne pas se réjouir de son air à la fois confus et scandalisé. Il l'écoute traduire ce qu'il vient de lui dire dans un anglais précis et rapide, omettant toutes les insultes qu'il a glissé dans son petit discours. Fitzgerald a l'air surpris et désolé, essaye de dire quelque chose que Piotr interrompt en levant la main. "We meet tomorrow," lui dit-il, en anglais, s'inventant un épais accent russe - aux yeux de tous, il n'est qu'un rejeton sibérien dont la seule valeur est le sang-pur, et qui ne parle pas un seul mot d'anglais. Fitzgerald et son équipe finissent par prendre congés, la tête basse.

Piotr se tourne de nouveau vers sa chère cousine par alliance, un grand sourire aux lèvres. D'un geste de la main, il fait signe à sa typiste et son assistant de quitter la salle de réunion, le laissant seul avec la fille de Polina. Les membres de son équipe, habitués à ses fraques, n'ont pas sourcillé en l'entendant. Yelena, quant à elle, semble avoir quelque chose à dire. "It was really not funny. At all. Next time I'll let you translate your nonsense on your own." Piotr la regarde ranger quelques affaires et s'esclaffe. "Oh come on, sweetheart, it was a bit funny," dit-il d'un ton léger en se levant, reboutonnant sa veste. "If you're in a teasing mood, I suggest you talk to my cousin. Your wife. - And why would I do that? She'd cut off my tongue rather than let me have my fun." Quiconque étant familier avec les Dolohovs pourrait vérifier ses propos: Piotr a déjà vu Feodora faire bien pire à d'autres, et tenter les mêmes choses avec lui.

Un sourire ténu demeure sur son visage à la pensée de sa femme meurtrière. "I was hoping to talk with you later," dit-il lentement, en russe, alors qu'ils se dirigent vers la porte, l'ambassadeur la lui ouvrant et lui laissant la place de passer devant - c'est qu'on peut être un gentleman et un enfoiré à la fois, dans le monde tordu de Piotr. "I had a wonderful tea delivered from Krasnoyarsk - a real delight. Please have a cup with me, Yelshenka. I'd like to discuss your training in Occlumancy. I believe that you are ready to tackle more serious things now."

Il y a peu de choses que Piotr aime plus que faire chier son monde.

Faire chier Polina Dolohova est certainement l'une d'elles.

Parfois (souvent), Yelena se demande bien pourquoi Piotr ne s'entend pas avec un seul membre de sa famille, à commencer par sa propre femme, Feodora. Dans ces moments-là, elle n'hésite plus. Il sait être un vrai emmerdeur, quand il s'y met. Et le soucis, c'est qu'il s'y met plutôt souvent. Yelena mentirait, si elle disait, que cela ne l'amuse pas aussi (un peu). Il faut dire, qu'à l'hôtel des Dolohov, l'ambiance est plutôt morose. Il n'y a, que lorsqu'elle ferme les portes de ses appartements, que la tension redescend subitement. Elle ne dit pas non plus, que sa vie devient rose entre les murs de son étage ou aux côtés de Conrad, mais c'est toujours mieux, que le regard insistant de sa mère. A dire vrai, Yel aimerait bien voir un peu plus son cousin par alliance venir à l'hôtel, mais ce n'est pas demain la veille, qu'il franchira le seuil aisément.
Yelena écoute à peine Piotr, quand il lui répond, que son move était plutôt amusant. Elle se contente de lui répondre, sur un ton agacé, qu'il devrait plutôt s'amuser avec sa femme, que sur son temps de travail. En vérité, c'est parce qu'il l'a mise dans une situation délicate, qu'elle lui dit cela. En général, elle apprécie sa compagnie. Fait assez rare pour une Dolohova. La blonde continue de ranger ses documents, les triant par ordre d'importance à l'aide de sa baguette. ─ Maybe she has good reason to cut out your tongue, hm? Maybe I'll do it too one day if you don't stop talking nonsense. Elle fait de grands yeux, avant de fermer son sac à main. Yelena plisse ensuite sa jupe, prête à se diriger vers la sortie, lorsque Piotr s'adresse à elle en russe. Elle s'arrêt net, et se tourne dans sa direction. Elle le regarde marcher jusqu'à la porte, et l'ouvrir pour lui laisser le passage. La sorcière lui adresse un large sourire, certainement un peu forcé, mais il ne s'en formalise jamais. Piotr reprend, toujours en russe, évidemment. Il est toujours plus prudent de parler dans leur langue maternelle. ─ It's been a long time since I drank this tea. I have some free time before I go home. It would be a pleasure. Your office? glisse-t-elle, tout en sortant de la pièce, devant lui. Yel se tourne légèrement, pour lui faire face, attendant une réponse, et prête à le suivre. Les leçons d'occlumancie de Piotr sont toujours éprouvantes, mais sont aussi enrichissantes. Cela lui rappelle, un peu, son apprentissage auprès de son père. Elle est devenue maître dans l'art de se concentrer. A ce jour, elle ne comprend toujours pas vraiment ce qui a poussé Piotr à lui proposer ce deal, qui lui apporte plus à elle qu'à lui, mais soit, s'il y trouve son compte. ─ That is, unless you have something planned, of course.

tw: piotr yikes, sexisme

"It's been a long time since I drank this tea. I have some free time before I go home. It would be a pleasure. Your office?" Yelena passe devant lui dans le couloir et Piotr laisse ses yeux se balader le long de sa silhouette sans la moindre gêne. Conrad est un homme plutôt chanceux. Il ne s'est jamais trouvé beaucoup d'atomes crochus avec l'autre homme - un rescapé, comme lui, d'un mariage à la Dolohov - mais n'a jamais particulièrement cherché à le connaître non plus. Certains pourraient penser qu'en terrain ennemi et miné, des hommes esseulés et en danger comme eux se serreraient les coudes, mais ce serait mal connaître Piotr et les hommes de sa trempe. "That is, unless you have something planned, of course. - I always have time for family," dit-il d'un ton généreux avec un grand sourire en lui emboîtant le pas, refermant la porte derrière lui en gardant son précieux attaché-case en main.

Ils se déplacent en silence dans les couloirs de la coopération magique internationale, Piotr esquissant quelques sourires crispés et maladroits (une expression faciale propre à la Russie, a-t-il appris) aux employés étrangers qui le saluent avec déférence, avant qu'ils ne parviennent enfin aux bureaux réservés à l'ambassade russe.

Selon l'influence et l'importance des dignitaires, les intérieurs des ambassades changent au sein du Ministère. Certains racontent que celle des américains est la plus grandiose, avec une suite et plusieurs pièces, des salles d'étude et tout le toutim. Celle des russes n'est pas en reste, quoique plus étroite: Piotr a décoré les murs d'un papier-peint vert criard, et a fait amené des meubles de la Mère Patrie dont les dorures seules pourraient nourrir une famille nucléaire pendant une décennie au moins. Flotte dans l'air une tension palpable, ainsi qu'une délicieuse odeur de thé: un samovar ouvragé en argent trône en roi au centre de la pièce, enchanté pour rester chaud et toujours plein. L'endroit est un peu cheapos mais impressionnant, tous les employés portant des costumes finement rayés et ayant les cheveux soigneusement gominés, les nez rehaussés de lunettes aux montures métalliques argentées.

Yelena est la seule femme, bien entendu.

Les regards se braquent immédiatement sur elle quand ils pénètrent ensemble dans les bureaux et Piotr fait mine de ne pas le remarquer, posant une main sur le bas de son dos pour la pousser en avant vers son bureau. Il ferme la porte derrière eux une fois qu'ils y sont. D'un coup de baguette, Piotr prépare le thé dans son propre samovar (plaqué or, évidemment) et va déposer son attaché-case près de son bureau. "Please, have a seat, зая." Il lui montre la chaise en face de son bureau et s'assied sur son propre fauteuil, défaisant le bouton de sa veste dans un geste rodé par l'habitude. "So, tell me." Il lui offre un sourire, radieux comme toujours. "How are you finding our lessons? Have you been practicing like we discussed? I'm quite impressed with how well you're learning and making progress, I have to admit." Même dans ses tissus de mensonges, Piotr n'est pas mielleux mais semble sincère, encourageant, son sourire toujours érigé sur ses lèvres et ses yeux pétillant d'intérêt. "You'll be a certified Occlumens in no time! You'll see, it's quite useful in everyday life." Il hoche la tête d'un air sérieux. "Say, Yelenshka, you are keeping this between us, aren't you?"

tw : vague mention de sexisme
Le mot famille lui laisse échapper un rire, étouffé entre ses lèvres. Elle doute, que Piotr connaisse réellement le sens de ce mot. On ne peut pas dire, qu'il fait preuve d'une quelconque sympathie envers sa belle-famille, en dehors d'elle. Yelena ignore bien, si sa propre famille est encore envie, et quelle est la nature de leurs relations. Elle doute, qu'il lui en parlera un jour. C'est un peu le cadet de ses soucis, il faut dire. Ses conversations avec Piotr sont à la fois profondes, à la fois pas du tout. C'est assez déroutant, et elle ne sait pas réellement expliquer, ce qu'il en est de leurs échanges. Pour être honnête, Yelena ne sait pas vraiment la nature de sa propre relation avec le russe, en dehors de leur lien par alliance, évidemment. Est-ce vraiment nécessaire d'y réfléchir, après tout ?
D'un geste de la tête, elle lui indique, qu'elle va le suivre jusqu'au dit bureau. Yelena a l'habitude de traverser ce bâtiment, mais il reste toujours aussi impressionnant. Le silence est de rigueur, et elle se contente de rester droite, et d'afficher une expression, à la fois détachée, à la fois agréable. Tout un exercice, qu'elle maîtrise à la perfection. Sa mère serait fière.

Enfin, l'ambassade russe se dessine devant eux. Il est difficile de louper l'entrée de celle-ci. A chaque fois, Yel a l'impression de retourner en plein coeur du domaine familial. Il faut dire, que leur hôtel particulier n'échappe pas, non plus, au style à la russe. Yelena n'est pas vraiment dépaysée depuis l'arrivée des Dolohov en Angleterre. Le vert des murs lui a longtemps donné des maux de tête. Elle a fini par s'habituer. En revanche, elle ne s'habituera jamais aux regards, quand elle franchit le seuil de la porte. La blonde n'est pas dupe. Cela fait bien longtemps, qu'elle a compris pourquoi ils se permettent tous de l'observer de haut en bas, sans une once de discrétion. Elle sait aussi, que dire quelque chose ne sert à rien, alors elle se tait, mais elle n'en pense pas moins. Un sourire faux grandit sur ses lèvres. Yelena aurait pu glisser une remarque subtile, que la plupart des hommes présents n'aurait pas comprise, mais elle n'a pas le temps. Piotr s'empresse de glisser sa main sur le bas de son dos, la pressant en direction de son bureau. La porte se ferme rapidement derrière eux. Il l'invite à s'asseoir, et elle prend place sur une des chaises en velours, ne relevant pas comment il venait de l'appeler. Elle ne relève plus rien avec Piotr. ─ It is certain that tomorrow there will be rumours about our so-called relationship. They will all think we are lovers. I don't really care tho. Elle croise ses jambes, et y pose ses mains. La leçon va pouvoir enfin commencer. Elle l'écoute sagement. Ses compliments lui arrachent un léger rire. Cette manie, qu'ils ont tous à toujours vouloir en rajouter, devient presque risible. Néanmoins, elle apprécie les appréciations du russe. ─ Practicing at the hotel is not easy but I have a natural disposition for occlumency, it seems. Elle se pince les lèvres. ─ Don't worry. These lessons are still our little secret, aнгел мой. Yelena replace une mèche de cheveux, derrière son oreille. ─ I look forward to be a certified Occlumens! It is certain that I'll be grateful to you for a long time for this gift that you are giving me.
Flatter Piotr est toujours une bonne idée.

"It is certain that tomorrow there will be rumours about our so-called relationship. They will all think we are lovers. I don't really care tho," lui a dit Yelena en pénétrant dans son bureau, provoquant un grand rire de la part de Piotr. L'idée ne le dérangerait pas tant que ça. Il ne doute pas une seule seconde que Polina lui en voudrait mortellement et que Conrad serait lui aussi un peu contrarié, et rien que cette idée met les choses en perspective... C'est d'un oeil nouveau qu'il regarde Yelena. Peut-être qu'elle essaye d'amener la conversation parce qu'elle en a envie? "Let them talk," élit-il de répondre prudemment, sans pour autant se départir de son sourire de loup.

C'est au tour de Yelena de rire quand il la complimente à outrance, faisant joyeusement pétiller les yeux de Piotr. "Practicing at the hotel is not easy but I have a natural disposition for occlumency, it seems." Il hoche la tête, heureux de l'entendre. Piotr pense que les russes ont effectivement une propension à l'Occlumancie. C'est que garder un calme placide et la tête dure est une spécialité nationale. Yelena, néanmoins, est plus britannique qu'autre chose: elle n'est jamais allée à l'école avec ses pairs, et n'a jamais appris les tenants et aboutissants du Parti et de ses enseignements. "Don't worry. These lessons are still our little secret, aнгел мой." Le surnom le fait renifler, amusé. "Good." Tant que Feodora n'apprend pas qu'il se mêle des affaires de sa famille ou, pire encore, tant que Polina l'ignore... tout va bien. Piotr ne ressent aucune peur à l'égard de ces deux femmes, mais tout même une certaine appréhension et un peu d'agacement à l'idée de devoir se battre avec. "I look forward to be a certified Occlumens! It is certain that I'll be grateful to you for a long time for this gift that you are giving me." Piotr secoue la tête. "Oh, Yelenshka, don't be silly, sweetheart. We're family, I don't expect anything in return. You'll never owe me anything." Il est étrangement sincère, pour une fois. "This is not a business transaction. Just me helping out my favourite cousin."

Son sourire, comme toujours, est aussi lumineux que froid. Piotr se lève et va récupérer deux tasses de porcelaine dans un cabinet pourvu à cet effet. Il utilise le samovar pour verser un peu de concentré de thé au fond des tasses avant de s'approcher de Yelena, s'asseyant sur le bureau face à elle, insensible semblerait-il à son espace personel qu'il envahit avec un naturel désarmant. D'un mouvement de baguette, Piotr remplit, à la russe, leurs tasses d'eau brûlante, diluant le zavarka. "See, being an Occlumens, it brings out many gifts in people. Some people use Occlumancy to protect themselves from being probed, others need it to compartimentalise their thoughts and ideas into neat little boxes that they can draw from when they need to... others use it to assure themselves that they have agency over their thoughts and actions." Piotr se penche, sans bouger de son promontoire, pour mettre un carré de sucre dans sa tasse, faisant tourner le liquide de la baguette. "Always acting out of one's own volition... that's a pleasing thought, isn't it, sweetheart?"

Yelena n'est pas totalement dupe, concernant les motivations de Piotr. Même s'il lui dit le contraire, elle se doute fortement, qu'il y trouve son compte quelque part. Il a toujours au moins un bénéfice. Cela ne l'empêche pas de penser, qu'il ne fait pas ça vraiment gratuitement. Aucun russe n'est du genre à offrir ses services pour le plaisir. Un jour peut-être, il lui demandera de lui rendre ce service. Ce n'est qu'une question de temps. Cela l'importe peu. Elle n'a peut-être pas étudié en Russie. Elle a quand même eu une éducation à la russe. Elle comprend le sens de l'expression, un prêté pour un rendu. Yel sourit néanmoins, quand il la qualifie de cousine préférée. Piotr a la flatterie facile, mais cela ne lui déplaît pas. On ne peut pas dire, que ça soit Conrad ou Polina, qui sont généreux en compliments. Elle fait de même, en glissant un surnom affectueux, ou en souriant le plus chaleureusement possible. Tout est une question d'apparences après tout, non ? ─ I must say I am touched to be your favourite cousin. I don't know if you really have others but I am touched. I understand, but if you ever need anything I would be happy to help you one day. As long as it doesn't harm my family of course. Elle apprécie sa compagnie, mais il ne partage pas son sang, pas comme Feodora par exemple. Même si ses relations avec sa cousine se sont distanciées avec le temps (elle ignore pourquoi), elle tient toujours beaucoup à elle.
Yelena suit du regard Piotr, qui s'affaire à préparer leur thé. Déjà des odeurs commencent à se dissiper dans la pièce, et elle a encore plus l'impression d'être retournée à Moscou. Ses yeux se perdent sur ce qui l'entoure. Ce bureau est à l'image de l'ambassadeur russe, too much, mais étrangement plutôt agréable. Elle arque un sourcil, lorsqu'il s'assoit en face d'elle. A peine un mètre les sépare. L'occlumancie requiert une certaine proximité, et Piotr prend la consigne au mot près. Elle l'écoute sagement, comme toujours, avant d'attraper sa tasse fumante. Elle n'y ajoute rien de plus, et se contente de la porter à ses lèvres, après avoir soufflé dessus. Yelena boit son thé d'une façon élégante, comme on le lui a appris.
Tout ce qu'il lui dit, sur l'utilisation d'un tel don, n'est pas nouveau. Elle est déjà informée de ça. Pour elle, l'occlumancie est une façon de (re) connecter avec son don de sorcelien, et peut-être aussi, de mettre un peu d'ordre dans son esprit, étrangement embrumé depuis des années. Elle ne voit pas vraiment, ce qu'elle aurait à cacher, pour le moment. Mais, comme cela vient d'être dit, ce don est toujours utile, et le maitriser permet de toujours avoir une main d'avance. Yelena boit une nouvelle gorgée, qu'elle avale lentement, avant de relever son visage. ─ Obviously. Quel idiot dirait l'inverse ? Être libre de ses faits et gestes, libre de penser, il n'y a rien de plus primordial. C'est tellement basique, que souvent, il arrive de l'oublier, mais Yelena ne comprend pas vraiment pourquoi Piotr insiste pour le lui rappeler. ─ Do you have something to confess мой хороший? Elle incline légèrement sa tête sur le côté, avant de la faire reprendre sa place. ─ What about you Piotr? What do you use the occlumancy for?

"Obviously." À défaut d'avoir toute sa tête, au moins semble-t-elle bien faite. Piotr sourit largement, comme si elle venait d'apporter la réponse parfaite à une colle posée par un professeur, et hoche la tête. Il n'y a rien de plus important que l'intégrité du corps et de l'esprit, bien entendu - deux choses que Yelena a perdu en finissant sous le joug de sa chère famille, obligée de pondre des enfants et whatnot. La vie a vraiment un certain talent pour l'ironie. "Do you have something to confess мой хороший?" Piotr se met à rire en l'entendant, et en notant le surnom qui lui convient parfaitement, trouve-t-il. "I only confess when I go to church, Yelenska." Malgré son éducation orthodoxe, en bon russe, Piotr n'a jamais cru en Dieu ou au dogma de la religion - il n'a jamais cru qu'en lui-même et son propre pouvoir sur sa destinée.

"What about you Piotr? What do you use the occlumancy for? - When you've lived as long as I have, you quickly learn that it's impossible to be a half-decent businessman without this sort of skill," répond-t-il aisément. C'est vrai: constamment, et sans jamais se fatiguer, Piotr garde les barrières mentales érigées autour de son crâne solidement bâties. Il a peur qu'on lui dérobe ses secrets, peur qu'on le rendre vulnérable, pliable, différent.

Mais pour être tout à fait honnête, Piotr garde aussi certaines choses enfouies - des choses qui ne font plus partie de lui et qui ont été oubliées avec le reste, jetées dans une prison dont on se serait débarassé de la clef. Il n'est pas prêt de le dire à Yelena, bien entendu. "Occlumancy gives me peace of mind," admet-il lentement, sincèrement. "It helps me sleep. I'm the only person who's privy to my own thoughts and I like it that way. Money, husbands, family - these things come and go. Only your mind is your own forever." Il offre un sourire entendu à Yelena. "When I was younger," commence-t-il d'un ton docte, "I was faced with a Legilimens that was so good that I never felt him probe me. He would know what I was about to say and would be ahead of me at every turn. That was not a nice feeling. I was second-guessing myself for a time. Did he just look into my thoughts or was he putting some of his own into my head?" Il secoue la tête, une grimace venant s'inscrire très rapidement sur son visage toujours souriant. D'un geste lent et calculé, Piotr apporte sa tasse chaude à ses lèvres, les y trempe. "I killed him with my own two hands." La chaleur du thé lui fait un bien fou et il repose sa tasse sur le bureau. "And I vowed that I would never let something of the sort happen to me again."

Ses yeux clairs se plantent dans ceux de Yelena avec sérieux, les coins tirés de sa bouche retombant. "Now, Yelenshka, you and I, we are a kindred spirit, don't you think? This is why you are my favourite cousin." Il s'humecte les lèvres, se remet à sourire légèrement. "And this is also why I don't want the same thing to happen to you. I'm protective of you. And I'd do anything for family."

Un nouveau rire s'étouffe entre ses lèvres. Piotr a toujours réponse à tout. Il donne l'impression de ne jamais hésiter, de toujours savoir exactement ce qu'il va dire ensuite. L'âge, certainement. ─ I can't really imagine you in church. Maybe one day. Elle n'a jamais été vraiment très religieuse, non plus. La magie est sa religion. Qui a besoin de croire en des dieux, quand on tient le pouvoir entre ses doigts ? Ce n'est pas un quelconque dieu, qui va lui sauver la vie. Sa baguette, en revanche. Elle sait, que cela apporte du réconfort aux âmes en peine, maudites soit elles.
Piotr entreprend, ensuite, de répondre à sa question. La réponse l'intéresse vraiment. Elle ne le lui avait jamais demandé avant, mais l'interrogation lui a toujours brûlé les lèvres. Piotr fait parti de ces hommes, qui ont tout, absolument tout. Qu'est ce que l'occlumancie peut-il bien lui apporter de plus ? Et pourquoi, ne pas avoir entrepris d'apprendre la legilimancie plutôt ? Entre dans les esprits d'autrui, lui paraît être bien plus pertinent, pour un homme de la trempe de Piotr Shklyarov. ─ Of course, but... there must be something else. Right? Ce don n'a pas pour unique but, que de l'aider à être un homme d'affaires. Piotr est bien plus nuancé et complexe, que cela. Yelena l'a tout de suite remarqué, la première fois qu'elle l'a vu. C'est aussi, ce qui lui a donné envie d'apprendre à le connaître, outre la réputation qu'il possède auprès des Dolohov. Elle reprend une longue gorgée de thé, attendant qu'il continue, et c'est ce qu'il fit. Piotr ne lui dira certainement pas tout, mais il suffit d'un simple échantillon. Quand il évoque des nuits plus apaisées, cela la fait déglutir. Ses nuits ont toujours été agitées, aussi lon qu'elle s'en souvienne. Sans potion, il lui est impossible de dormir paisiblement. Les ombres viennent toujours la déranger, et les voix ne la laissent pas tranquille. Only your mind is your own forever. Cette phrase résonne étrangement en elle. Elle ne sait pas l'expliquer. L'ambassadeur continue dans sa lancée, et son monologue. Elle l'écoute assidûment, entre deux gorgées de thé. Son anecdote est inattendue, mais appréciée. Elle ne peut néanmoins pas retenir son expression interloquée, quand il lui avoue avoir tuer celui, qui a osé infiltrer ses pensées. Yelena n'est pas dupe. Un homme, comme Piotr, a forcément tué des gens, mais l'avouer de vive voix est autre chose. ─ I bet you did. Sa réponse est à peine audible. C'est peut-être, parce qu'elle n'a jamais fait face à un legilimens tentant de la sonder (si elle savait), qu'elle a eu du mal à comprendre l'intérêt d'apprendre l'occlumancie. Après son récit, elle y voit un intérêt capital.
Piotr prend soudainement un air sérieux, la fixant du regard. Elle le soutient du sien. Sa confession lui va droit au cœur. ─ I would also do anything for my family. I appreciate your concern. I don't really know what you should protect me from but it appeases me in a way. Still I can take care of myself мой хороший. Don't worry. Si elle savait. ─ Shall we?

tw: mention de violence graphique, sexisme

Des fois (souvent), Piotr ment si bien qu'il y croit lui-même.

Il a toujours eu une facilité intéressante pour mentir et raconter des histoires, troublant la vérité et les mensonges dans un cocktail explosif et terrifiant à la fois. Il a eu une vie si chargée, si multiple, si improbable parfois - il est facile pour Piotr de piocher ce qui lui plaît, ce qui lui est arrivé, ce qu'il a entendu, pour tisser des histoires qui font briller d'un éclat sensible les yeux clairs de Mishka, le fils de Feodora qu'il considère aussi comme le sien. Avec lui, le visage de Piotr s'anime comme celui d'un acteur, le timbre de sa voix change pour faire les voix, au grand plaisir du gamin - les histoires de Piotr sont toujours rocambolesques, Ivan Tsarevich gagne contre Koschei l'Immortel et épouse Masha Morevna après une série d'aventures épiques aux animaux parlants et aux villageois reconnaissants (comme dans tout bon conte russe).

Dans la réalité, le visage de Koschei ne se départit jamais de son sourire quand il raconte des histoires et qu'il ment, ses yeux bleus rivés sur ses victimes et brilant d'une lumière obscure. Yelena soutient son regard et Piotr regrette, une nouvelle fois, de ne s'être jamais consacré à la Legilimancie. Il aimerait pouvoir prendre son crâne entre ses mains et le briser, l'ouvrir, plonger ses doigts avides dans sa matière cérébrale pour en extraire ses idées, ses pensées, ses souvenirs.

Il pense qu'il serait déçu de ce qu'il y trouverait. Il y a une raison pour laquelle il n'a jamais eu le moindre intérêt pour une femme du genre de Yelena, avant de comprendre au détour d'une conversation son triste sort. Mettre des bâtons dans les roues des plans de Polina est sa seule véritable raison d'aider sa cousine, peu importe les douces fioritures de ses mots.

Si il pouvait, il en serait désolé. "I would also do anything for my family." Le sourire Piotr s'étire, satisfait. "I appreciate your concern. I don't really know what you should protect me from but it appeases me in a way. Still I can take care of myself мой хороший." Il hoche la tête d'un air entendu, son sourire sincèrement amusé sur ses lèvres. Quelle ridicule petite femmelette - il semblerait que Feodora soit la seule Dolohova de sa génération à avoir hérité d'un cervelet. Pourtant, même elle a été victime du retournement de cerveau Dolohov il y a des années, en la personne d'Aliocha - mais ce processus-là a été naturel, psychologique, et terriblement plus insidieux. "Don't worry. - You're a grown girl," ronronne-t-il en assentiment. "Shall we?" Il hoche la tête. "Let's."

La session est longue et particulièrement dure. Piotr est un professeur exigeant et, bizarrement, pas si mauvais qu'on pourrait le penser: il est aidé par sa patience légendaire et son apparente bonne humeur en toutes occasions, ne se départissant que trop rarement de son sourire brillant. Il décide qu'ils en ont fini après un long moment. Leur thé a eu le temps de refroidir - un petit gâchis qu'il peut supporter. Au fil de leurs essais, Piotr a fini par retirer sa veste - envoyée d'un sort sur le dossier de son siège - et par retrousser ses manches. Maintenant qu'ils ont fini, il se passe une main dans ses cheveux gominés en se redressant, contournant son bureau pour s'y asseoir. Il se laisse tomber sur le fauteuil dans un grognement, même si il continue de sourire. "That was very good, sweetheart, I am impressed and very happy of your progress." Il se penche et ouvre l'un des tiroirs de son bureau. À l'intérieur, au mépris des lois ministérielles qui n'ont pas leur importance dans les ambassades internationales, des bouteilles de vodka russes, de whisky écossais et de gin anglais sont alignées. "Care for a drink?" propose-t-il, ses yeux sondant Yelena, se demandant quelle est l'ampleur du blocage imposé par Polina sur sa psyché.