Soirée, légère brume recouvrant les docks, elle plissa des yeux pour mieux y voir. Personne à l'horizon à part les collègues - où était passé son putain de hound d'ailleurs ? - , frisson sous l'uniforme. Elle avait presque froid. Heureusement qu'on lui avait fait miroiter l'action : embrouille sur les quais, besoin de renfort d'urgence, elle aimait donner dans ce genre de BA. Surtout que c'était pour se fritter contre l'Ordre, véritable allégeance qu'elle partageait avec tellement de connards qu'elle n'avait pas une once d'hésitation à éclater pour le bien de sa couverture. Avec un peu de chance, il y aurait Jordan à qui refaire le portrait avant de peindre un bateau avec son sang. Siham, grande artiste incomprise since 1978.

Top départ, enfin. Faux espoir plutôt parce que les renseignements donnés sur la localisation n'étaient pas suffisant donc ça faisait partie de cache-cache. Elle n'appréciait pas particulièrement le jeu, n'avait pas la patience pour surtout si bien que le niveau d'agacement grimpait de secondes en secondes. Baguette entre ses doigts, elle manqua d'étriper un chat qui passait par là, croyant que c'était un adversaire. Ok, il fallait se calmer sur le café, la faute au hound qu'elle préférait envoyer faire le tour de la ville pour lui rapporter une boisson plutôt que de le garder dans les pattes. Elle avait envie de s'allumer une cigarette maintenant, peut-être que ça la calmerait, peut-être pas. Le mieux encore serait de pouvoir enfin se défouler contre de super punching-ball vivants qui se défendaient juste ce qu'il fallait pour que ça ne soit pas trop facile, ni trop dur. Brève prière à Allah dans ce sens, on avait ressorti les Corans poussiéreux pour le père, autant que ça serve dans le doute. Prière qui ne fut pas du tout exaucée. Mais alors pas du tout. Preuve de l'inexistence d'une quelconque entité supérieure ? Elle méditerait dessus plus tard.

Là, il s'agissait de se débarrasser de la chose qui lui avait sauté dessus. Ce qui ne faisait pas parce que un, ok elle était fraîche mais on n'était pas chez les gueux ; et deux, c'était son plan à la base de prendre l'ennemi par surprise. Puis en plus, elle se faisait kidnapper ? Non mais le bordel. Bref retour en arrière. Il y avait eu le chat, puis un virage, puis un autre virage puis pam ! Elle était tombée en plein milieu du combat sans s'y attendre parce que ça avait balancé des sorts de silence pour ne aps rameuter tous les rats du coin. Pertinent. Puis re-pam ! A peine arrivée, déjà repérée, elle eut le temps de prononcer le premier A d'avada kedavra d'amplificatum - diablement efficace si on visait les chevilles ou autre partie du corps - qu'on la choppait et traînait dans un coin à l'écart. Et le pire, c'était que sa ravisseuse était Alvarez. A-L-V-A-R-E-Z. Regard plus noir que noir, elle y envoya un coup, s'en reprit un pile dans l'œil et ne put qu'écarquiller l'autre face aux agissements de la grognasse. Elle voulait lui froisser ou lui enlever son uniforme là ? "Mais qu'est-ce que tu fais ?" Ton presque paniqué, Siham attrapa l'épaule droite - valeur sûre - et tira.

Même Elena avait un peu tiqué quand on lui avait fait comprendre que le mieux, ce serait encore qu’[elle] provoque une bagarre (comprenez : une bataille rangée entre la VB et un détachement de l’Ordre), par exemple sur les Docks, un de ces soirs. Ce serait la chose la moins suspecte du monde, qu’on avait ajouté, quand ses sourcils s’étaient rapprochés sous le coup de l’interrogation ; elle avait donc fini par hausser les épaules, attraper son sac et foutre le camp aussi vite que possible (c’est qu’elle n’allait pas non plus cracher sur une occasion toute trouvée de distribuer des mandales). Elle avait quand même un peu continué à les regarder en coin, les cadres de l’Ordre, quand il lui était arrivée de les croiser les jours suivants – parce qu’elle ne comprenait plus rien à ce qu’ils lui voulaient, à l’envoyer sur des missions de la plus haute importance tous les deux jours sans vraisemblablement s’inquiéter de son intégrité physique. (Était-ce pour la calmer, éviter qu’elle revienne mettre St-James sens dessus dessous, ou parce qu’ils espéraient secrètement qu’un coup mal placé la ferait un peu taire ?) Le comble avait évidemment été de se voir assigner un agent-double au beau milieu de ce foutoir, ce qui impliquait en plus de retourner s’asseoir dans le bureau de Kingsley comme si de rien n’était (comme si la nouvelle décoration ne lui était pas en partie due – évidemment, ni l’un ni l’autre n’avait su (pu) rester parfaitement de marbre).
Et puis, cerise sur le patacitrouille, l’agent-double en question s’était trouvé être Siham Fucking Al-Massri. Elena, en principe toujours contente de gagner en responsabilités, d’autant plus en cette période où tourner en rond risquait de la rendre chèvre, s’était pourtant présentée avec un enthousiasme candide – jusqu’au moment où on lui avait donné le nom de sa cible, dont elle s’était absolument convaincue qu’elle ne pouvait être que Joseph Jane. Sensation de pierre dans l’estomac : my life is a joke and I’m no longer laughing. Elle était partie en n’ayant sifflé que trois mots, ce jour-là.

Et puis, c’était comme ça que quarante-huit heures plus tard, elle s’était retrouvée à assommer un Mangemort à la garde distraite, dans la fraîcheur nocturne du Londres presque moldu. Comme prévu, ces abrutis de la VB n’avaient pas tardé à rappliquer ; il avait ensuite fallu jouer le jeu, demander aux autres de se cacher un peu pendant que Rip et elle-même se mettaient en quête de l’Al-Massri et de son Hound. Ils étaient d’abord tombés sur le limier, aussi désorienté que d’habitude, que Rip avait facilement pu maîtriser ; elle avait donc repris la chasse-à-la-connasse en solo, arpentant les quais jusqu’à l’aviser. Zbim, un sortilège silencieux en plein dans la face – l’autre n’avait rien vu venir, s’était retrouvée les quatre fers en l’air en un rien de temps, et Elena avait alors pris un plaisir non dissimulé à lui confisquer sa baguette et à la traîner (par les cheveux) jusqu’à une ruelle attenante. Immobilisation imminente (c’est toujours un pied particulier d’immobiliser les soi-disant flics du Ministère), si ce n’est qu’elle commet l’impair de la laisser d’abord sur le dos, ramassant ainsi au passage un crochet du droit en plein nez (qu’est-ce que c’étaient que ces sang-purs qui se servaient de leurs poings, vraiment !) Ouistiti se cale plus solidement sur sa victime, vérifie rapidement que son nez n’est pas (déjà) devenu une fontaine, puis renvoie le coup en plein dans l’œil de la main gauche (paf, pile là où son sort a frappé, histoire de lui laisser un joli cocard) – de l’autre main, parce qu’elle doit s’en assurer, elle tire sur la manche de Siham (leurs uniformes trop moches là), se heurte à un glapissement et…

Elle reconnait aussitôt le bruit sourd, ne peut pas s’empêcher d’hurler à la mort en insultant le monde entier en espagnol, doit serrer les dents pour ne pas risquer d’ameuter tout le quartier. Pas besoin de regarder son épaule pour savoir que cette cabrona est encore descendue d’un étage – la douleur, fulgurante, lui fait aussitôt lâcher sa baguette, qu’elle envoie bouler plus loin d’un coup de pied pour qu’Al-Massri ne mette pas la main dessus. « Mierda ! » Elle a tout juste eu le temps de voir les quatre cercles au poignet de l’autre, ce qui la rend d’autant plus furax (et la fait d’ailleurs grogner à voix haute) (comment c’est possible où est-ce qu’on recrute ces tocards d’agents doubles pas étonnant que ce soit Kingsley qui s’en charge…). La perte d’un bras rend par ailleurs plus difficile l’opération « retourner-cette-grognasse-comme-une-crêpe » ; elle est obligée de basculer davantage vers l’avant, rapprochant un de ses genoux de la gorge ennemie (en écrasant au passage copieusement ses doigts de son pied en plein effort), se sent au moins tout autant dans l’impératif de lui balancer un sourire goguenard (et le sarcasme qui va avec) à la gueule. « Crois-moi, je préfère être dans cette position avec Jo… » La blague ne s’éternise pas, cependant – dans un nouveau grognement d’effort (et de douleur), Elena achève de placer son ancienne camarade de promo sur le ventre, retourne aussitôt à la charge (prend un coup de coude au passage qui, cette fois-ci, a bien pour effet de transformer son nez en geyser sanguinolent) (Kingsley et Rubén et n’importe qui d’à peu près censé lui diraient qu’elle baisse trop sa garde).

Elle attrape une grosse mèche de cheveux de l’Al-Massri en guise de représailles, la force à plier la nuque vers l’arrière, le tout dans le but de lui faire comprendre qu’elle peut lui enfoncer la face dans le béton à tout instant (mais Sisi n’est pas réputée maline, il faudra peut-être lui faire un dessin). « Bon, maintenant tu te calmes ou je te calme Sisi. » Elena s’assoit un peu mieux (c’est qu’elles en ont pour un moment), s’efforce à ne pas penser à toutes les infâmes potions que Sid va lui faire ingérer pour « guérir plus vite et mieux », se concentre même plutôt sur son petit speech qui lui est totalement sorti de la tête avec toutes ces conneries. Rapide coup d’œil sous l’aisselle, histoire de vérifier qu’elles sont toujours seules – un peu trop tard peut-être, elle choisit la prudence. « Donc, il se trouve que le Vieux a passé l’arme à gauche. » C’est tout réfléchi – sortie de son contexte la phrase semble faire référence au père Al-Massri tout juste décédé ; entre initiées (elle déteste se penser appartenant au même cercle que Bloody Siham, mais bon), il est évident qu’elle désigne en fait l’ancien référent de celle-ci, un petit ancien fort respectable mais surtout fort mort. Penchée vers l’oreille de Siham, elle ajoute un peu précipitamment « Embuscade. Il a pas souffert. » comme un semblant de condoléances ; pas vraiment par compassion pour elle, ou si, peut-être un peu, ça fait toujours chier de perdre quelqu’un, même après dix ans de guerre. Elle préfère passer rapidement sur le sujet, lui laisse trente secondes de répit avant de reprendre le cours plus normal de leurs interactions. Le sourire lui est revenu, moqueur à souhait sous l’hémoglobine qui a coulé jusqu’aux lèvres - « Il paraît que t’as des choses à me dire Al-Massri, mais d’abord un peu de politesse, tu voudrais pas dire bonjour à ta nouvelle cheffe ? »
Bam, peut-être l’uppercut le plus efficace depuis qu’elle l’a attrapée. (Elle se demande quand même si elle devrait préciser que c’est elle le nouveau « chef » du coup, même si ce n’est pas tout à fait le terme exact elle le préfère encore comme ça, puis vu que Sisi n’est pas le couteau le plus fin du tiroir…)

Son manque de réactivité flirtait avec le préoccupant là. Baguette en moins - on ne parlerait pas de sa coiffure, Merlin elle voulait lui arracher les cheveux ou quoi ? -dignité envolée également, Siham battit des paupières (action déterminante) avant d'y filer un gnon parce qu'il ne fallait pas déconner puis hop, botte secrète parce qu'Alvarez tentait vraiment des mouvs chelous. Petit sourire très satisfait à la sorcière qui en avait lâché sa baguette - égalité (non) - manche de son uniforme immédiatement remise en place. Quel était au juste le but de la manœuvre ? En tout cas, elle y avait déjà perdu un œil - ce qui lui avait valu de lâcher un cri de douleur parce que l'autre ne l'avait pas raté - et ça n'allait pas du tout parce qu'elle avait réception demain et qu'il fallait être présentable. Chose que cette connasse d'Alvarez ne connaissait pas parce que son truc était plutôt de plaquer au sol des femmes dans des coins glauques. Bonjour les kinks de grosse tordue. Surtout que ça osait l'allusion sexuelle (ok, la position portait à confusion) et que Siham se jura de se foutre de la gueule de Jo parce que un, voilà les goûts, deux, il était en dessous. Par contre, ce serait bien de se reconcentrer, puis de se défaire de la prise de l'autre qui manœuvré pour la mettre ventre à terre. Ca envoya des coudes et des pieds, fit mouche - le nez était moche de base donc c'était limite une bonne action - avant de s'immobiliser parce que pas les cheveux.

Elle louchait sur le bêton, n'écoutant pas réellement les menaces d'Elena (de toute façon, les gens qui lui donnaient des surnoms ne méritaient pas son attention), calculant plutôt le temps qu'il faudrait pour que les renforts arrivent et donc pour se dépêtrer de sa position absolument honteuse avant d'être vue. Mais ça jactait trop pour être ignorée sur le long terme, Siham finit par raccrocher aux paroles, yeux qui s'écarquillèrent légèrement. "Le Vieux ?" Quel vieux ? Il y en avait plein des vieux et c'était le propre des vieux. Et des un peu moins vieux, genre son vieux à elle qui avait cané il y avait peu. D'ailleurs, les décès affectaient-ils les aptitudes en combat rapproché ? Peut-être que oui, ça expliquerait le désastre. Les précisions chuchotées à son oreille lui firent froid dans le dos. Pas son vieux père donc... L'autre Vieux qu'elle avait en tête, elle ne voulait décidément pas le savoir mort. "Pardon ?" Voix qui monta dans les aigus à la dernière syllabe. L'autre souriait avec ses dents sanglantes et Siham ne l'avait jamais autant haïe qu'à cet instant précis.

Nouvelle volée de mots, nouveau coup, elle n'avait décidément rien à dire à la pouffiasse sauf peut-être d'aller se faire foutre. Plan en tête, concentration, mouvement de doigts pour envoyer voler l'ennemie à des kilomètres de là. Echec total car un sanglot la prit à la gorge et que ce n'était pas idéal de faire de la magie quand on se retrouvait à pleurer nez face au bitume. Après son frère, son père, les histoires d'héritage, le marquage qui lui pendait au nez, c'était au tour du vieux de lui faire faux bond ? Un peu trop à gérer ou même à faire semblant de gérer sous le masque d'impassibilité, même pour Siham je-fais-genre-je-suis-inatteignable Al-Massri. Pleurer plaquée au sol par Alvarez ? Fait. Elle pouvait mourir en paix de honte. Ca n'allait pas du tout, sursaut de dignité, de nouveau un mouvement de main, sort informulé qui arracha Elena de son statut de carapace, permettant à Siham de se remettre debout, un peu tremblotante.

Yeux essuyés du revers de la manche - les larmes ? c'était juste à cause du coup de l'autre et de la douleur, rien d'autres - semblant de contenance retrouvée, Siham avait le regard haineux, les yeux qui lançaient des éclairs, la totale. "Je n'ai rien à te dire" cracha-t-elle avant de reprendre, ton absolument glacial. "Tu devrais revoir la qualité de tes blagues, elles sont pitoyables." Parce que ça ne pouvait rien être d'autres. Le vieux ne pouvait pas mourir, Elena ne pouvait rien savoir sur elle en dehors de la version officielle et surtout - surtout - jamais on ne l'aurait nommée référente avec ses trois neurones qui se battaient en duel. A vomir. Furieuse envie de lui refaire le portrait en plus du nez, de taper dans un truc pour se défouler jusqu'à ne plus avoir de phalanges. Elle se jeta sur Elena, y envoya un coup de boule - tant pis pour le sang sur ses cheveux - avant d'embrayer avec un chassé dans le plexus. Une membre de l'Ordre choppée, c'était bien pour sa crédibilité de future mangemort, non ?

« Hey tu– » Même pas le temps de finir sa phrase que l’autre profite, évidemment, de son semblant de relâchement ; et voilà Elena partie valdinguer dans le décor d’un coup, à maugréer contre ces foutus Al-Massri et leur magie sans baguette (et maugréer d’autant plus qu’elle peut entendre la voix de Shacklebolt lui suggérant sérieusement de s’y mettre). La raison de son inattention, pourtant, continue d’attirer sa curiosité – est-ce que Siham chiale ? Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? Médusée et franchement un peu dépassée par la tournure des évènements (ça pleure une Siham ?!), Elena en oublie de remonter sa garde en se relevant (un peu maladroitement, parce qu’allez vous relever avec une épaule en moins hein). Alors évidemment, trop occupée à regarder l’autre s’essuyer les yeux, elle n’a pas le temps de parer le nouveau coup qui lui tombe dessus ; et cette fois-ci, incontestablement, elle entend le craquement d’un nez déjà bien fragilisé. La baguette ennemie à peine tirée de sa poche de jean lui échappe aussitôt des mains.

Titubant un peu en arrière, occupée à vérifier qu’elle n’a rien d’autre de cassé (des dents, par exemple), Lena ne peut pas plus éviter la descente qu’elle reçoit en plein plexus, a à peine le temps de contracter les abdominaux (foutus kickboxeurs, elle a beau avoir fait du jiu-jitsu, de la boxe, et maintenant même un peu de taekwondo et de kung-fu, elle n’a jamais croisé personne qui les aimait de toute manière). Elle attrape tout juste le pied-assaillant, à défaut de pouvoir le bloquer ; alors quand ses jambes la lâchent (évidemment, mais à sa plus grande fureur quand même), elle a bon espoir d’avoir entraîné son adversaire dans sa chute. Le souffle coupé, la tête comme vidée de tout son sang, elle remercie déjà son semblant de patrimoine sorcier de l’avoir empêchée de tomber raide inconsciente ; mais les remerciements n’aident pas spécialement et, dans un grognement de douleur et du fond de sa nausée, elle doit sévèrement s’accrocher pour garder un esprit un minimum clair et ne pas se faire tout bonnement et simplement casser la gueule (ça fait un peu beaucoup là).

Elena se retrouve un peu piteusement à quatre pattes, tentant farouchement de reprendre sa respiration et crachant le sang qui s’est accumulé dans sa gorge en n’essayant de ne pas rendre tripes et boyaux (heureusement qu’on ne mange jamais trop à l’Ordre). Elle est hors d’elle (presque littéralement), mais elle sait aussi qu’elle ne peut pas continuer à encaisser les coups comme ça ; alors qu’elle se redresse douloureusement en position assise, elle dégaine donc visiblement un petit couteau de lancer qu’elle pointe dans la direction de la furie. « Stop… stop… » Elle déteste l’aspect presque suppliant que le manque de souffle donne à ses mots, déteste être dans cette position, déteste devoir détourner légèrement son couteau pour se protéger le visage, à défaut d’être en possession d’un autre bras fonctionnel, et surtout déteste Al-Massri. « Je suis désolée… Okay ?! » Du coin de l’œil, elle peut apercevoir une des deux baguettes au sol, à moins de cinq mètres – mais dans un souci de désescalade de la situation, elle n’esquisse pas le moindre mouvement. « J’aime pas perdre des gens non plus mais… C’est la guerre… » Putain, elle est à deux doigts de lâcher son meilleur Kingsley speech. « C’est ce qu’ils font », qu’elle conclut donc maladroitement avant de se lancer dans une grande analyse morale de la situation dans laquelle ils sont tous empêtrés depuis dix foutues années. « Je suis désolée, Siham. » Lena se rend compte en prononçant ces mots qu’elle est plutôt sincère, qu’elle a appelé Siham par son prénom, qu’elle est étrangement touchée par les larmes de cette grognasse, même si sa réaction première serait de se foutre des sang-purs découvrant que oh shit, people actually die at war. Et pourtant, vraiment, bordel, elle est à deux doigts de lui présenter ses condoléances pour Al-Massri Senior, pourtant un sombre fumier de son état. « C’était un chic type. »

Elle se redresse un peu plus, évite obstinément de jeter le moindre regard en direction de la baguette abandonnée, garde quand même son couteau prêt au cas où. A ce stade il faut sauver sa peau (elle déteste ça), faire preuve de diplomatie (pas son fort) ou à défaut d’empathie (déjà un peu plus), alors son cerveau mal oxygéné tourne à plein régime. « Je voulais vérifier ton tatouage, toute à l’heure », qu’elle explique maladroitement, comme premier jalon, en désignant le poignet de Siham de la tête. « J’y croyais pas trop quand Shacklebolt me l’a dit. » Je croyais qu’il se foutait de ma gueule et je trouvais ça tellement improbable que j’ai failli me casser aussitôt serait sans doute plus juste en termes de vérité, mais moins adapté à l’ambiance qu’elle essaye d’installer (ne pas se faire arrêter, ne pas relancer la bagarre même pour la gagner).
Elena hausse son épaule valide et a un petit rire (qui lui fait encore un peu plus cracher de sang) ; elle ne sait pas trop pourquoi ou ce qu’elle entend par là, exprime sans doute à sa manière qu’elle est un peu dépassée par la situation. Al-Massri et elle coopérant pour le compte de l’Ordre, sérieusement ?! Elles font ça (se battre comme des chiffonnières) depuis qu’elles ont onze ans, tout ça n’a pas de sens. « C’est à lui qu’il faut faire des réclamations, c’était son idée. » Ce qu’elle entend par là, c’est que c’est pas des lol Siham, on est vraiment coincées ensembles. « Beaucoup d’humour », qu’elle ajoute entre ses dents.

Elle la laisse digérer un peu, en profite pour baisser très rapidement son arme et éponger ses blessures sanguinolentes.
Bilan des courses : c’est quand même vachement plus simple (et naturel) de se taper dessus.

Gorge toujours nouée malgré les yeux à peu près secs - enfin un œil n'avait pas fini de pleurer vu comment Elena avait tapé dedans - Siham était plus que déterminer à réduire l'autre en pâté pour croup. D'ailleurs, pourquoi c'était pas elle qui y était passée à la place du Vieux ? Il était bien le Vieux, à avoir été tellement paranoïaque que Siham n'en connaissait pas le nom, ce qui rendait le tout très ridicule maintenant. Puis merde, elle avait l'œil ou quoi, pour que ça crève comme des mouches autour d'elle jusqu'à ce qu'il ne reste que ceux qu'elle détestait. Léger mal de tête maintenant qu'elle avait définitivement bousillé le nez de l'adversaire, elle ne prit pas trop le temps d'y réfléchir pour enchaîner. Juron en arabe quand son pied fut choppé, soleil ou presque au-dessus d'Elena quand cette dernière tomba, atterrissage tout en douceur et délicatesse (non). Arrière goût métallique dans la bouche - ce qui arrivait quand on mordait le bitume ou presque - elle ne put retenir le ricanement satisfait en voyant l'autre à quatre pattes. La prochaine étape, la faire ramper. De quoi se changer les idées comme il le fallait en somme, de faire voir à cette connasse d'Alvarez qu'elle valait beaucoup mieux qu'elle et ses attitudes de première de promo populaire.

Se relever fut un peu plus dur qu'escompté, un genou avait pris cher dans la chute puis elle avait clairement perdu des points de vision. Ca allait encore être une galère à rendre ça présentable songea Siham avant de se concentrer sur l'autre idiote qui avait sorti le couteau. Regard franchement glacial et bien de haut (facile quand il y en avait une par terre), elle se fendit même du sourire supérieur à l'entente des supplications. "Range ton couteau" siffla-t-elle, pas trop fan d'être menacée ainsi (surtout que c'était crétin, elle n'avait pas besoin de faire grand chose pour envoyer la lame valdinguer au loin, juste un mouvement de main). Et bien sûr, Elena n'obéit pas, fit un truc beaucoup plus imprévu que ça, s'excusa. Ah. On réagissait comment à ça ? Air franchement soupçonneux parce que c'était super louche, Siham suivit le regard de l'autre, tomba sur la baguette non loin, se prépara à répliquer au moindre mouvement vers le bout de bois mais rien ne vint. Juste d'avantage de mots. Merlin, mais elle lui faisait quoi là ? Ca sortait presque les condoléances avec le petit discours lignée "c'est la vie" et son prénom même pas sur un ton insultant. "Range ton couteau" répéta-t-elle, voix un peu moins assurée que la première fois, larmes de nouveau plus trop loin parce qu'Elena jactait au passé et que Siham n'y croyait toujours pas.

Brune ne bougea pas d'un iota alors que ça se redressait en face, restant à l'affut des mouvements brusques, plus trop du reste. Cerveau ayant du mal à digérer les informations, main allant se poser par réflexe sur le poignet encerclé alors qu'en face ça continuait son speech. Putain, putain, putain, ça ne pouvait pas être vrai. "Merde !" jura-t-elle, shootant rageusement dans une canette se trouvant non loin de ses pieds quand Shacklebolt fut invoqué. Ca rendait le truc trop vraisemblable maintenant. Elle dévisagea Elena à la gueule ensanglantée quelques instants et l'énervement remonta en flèche. Elle la détestait cette fille, elle comme tous les anciens gryffondor de sa promotion. Ceux qui se la jouaient "on est les gentils cool et trop marrants" alors qu'ils valaient que dalle et qu'au final leur petit chef de bande s'en était allé ramper au pied du Lord. "Tu sais quoi ? Va te faire foutre !" Et fuck Kingsley too. "Puis ta prétendue pitié, tu peux te la garder ! Et je veux rien avoir à faire avec toi, ok ?" C'était mort, elle aurait voulu que les choses restent comme avant, qu'Elena la pense toujours du mauvais camp parce que c'était nettement plus facile de se la jouer méchant devant de tels individus, qu'elle ne voulait surtout pas être assimilée à eux. "Alors maintenant, tu ramasses ta putain de baguette" rugit-elle, explosant par la même occasion son quota de gros mots pour le mois à venir. "Et tu te bats parce qu'il est hors de question que je me fasse griller à cause de toi !" Le coup du membre de l'Ordre lui filant entre les doigts pour un simple coquard, c'était trop léger pour ne pas paraître totalement louche après tout et les collègues n'étaient pas loin. Accio informulé pour ramener sa baguette entre ses doigts - un peu trop énervée pour se passer de catalyseur, ça risquait de finir avec les docks en flamme après - le sort fusa au bout de quelques secondes. BAM, expulso dans la gueule, histoire de l'envoyer valdinguer dans le décors.

tw : grosse bagarre, sang, langage cru, lena en bombe
Evidemment qu’Al-Massri ne prend pas la perche qu’on lui tend, qu’elle préfère jurer, continuer de la menacer, relancer la bagarre. En échange, parce que c’est de bonne guerre, Elena ignore les aboiements qui lui pleuvent dessus et refuse de baisser son couteau – faut dire que sans baguette, sans épaule, sans poumons, la face en sang, c’est bien tout ce qu’il lui reste. "Puis ta prétendue pitié, tu peux te la garder ! Et je veux rien avoir à faire avec toi, ok ?" Un long soupir lui échappe ; qu’est-ce qu’elle a fait pour mériter ça sans déconner, puis surtout pourquoi ses efforts ne marchent pas, est-ce qu’on peut vraiment négocier avec une telle connasse ? Ne pas regarder en direction de sa baguette, ne pas regarder en direction de sa baguette… Ce n’est pas une calme de nature, Elena, et il lui coûte physiquement de ne pas replonger tête la première dans une lutte presque-à-mort, aussi irraisonnable que ce soit. Elle serre ses dents toutes tachées d’hémoglobine, s’efforce de reprendre une respiration régulière et (presque) maîtrisée. Joder, l’autre ne l’aide vraiment pas. Elle lui présente des excuses sincères et rien ?!

Elena est en train de se dire qu’elle a vraiment tout donné quand Siham rugit encore, bordel, l’enjoint de ramasser sa baguette et… recommencer à se battre ?! Elle lève tellement les yeux au ciel que ceux-ci pourraient tout aussi bien finir dans une autre galaxie. « Mais bordel, chérie, tu crois que j’ai choisi ?! » Et ça y est, son élan conciliant semble avoir fondu comme neige au soleil ; un petit rire un peu trop moqueur lui échappe déjà, vient agiter douloureusement ses épaules déséquilibrées. « Pour ta gouverne c’est la guerre et… » Pas le temps de terminer sa phrase, encore – un sortilège fuse dans sa direction et Lena est obligée de se réfugier derrière une poubelle dans une roulade de dernière minute qui lui arrache (encore) un grondement de douleur. Comble du bonheur, l’expulso lancé par Al-Massri pulvérise le fameux vide-ordures et Elena se retrouve entourée (et plus ou moins recouverte) de diverses immondices… ça fait vraiment un peu beaucoup là, elle avait pas demandé à passer ce genre de soirée la chiquita. « C’est sérieux ça ?! »

Et d’un coup, Elena se retrouve vraiment en rogne. Contre Siham, qui est en train de lui casser la gueule (fuck Siham) ; contre Kingsley, à qui elle n’a pas réussi à le faire (fuck Kingsley) ; contre Jo, qui est un putain de traître (fuck Jo) ; contre l’Ordre, qui est vraiment une bande de pendejo et de couilles molles (fuck them) ; contre elle-même, qui est toujours trop conne, se fait toujours rouler et fait toujours les choses à côté (fuck me). C’est pas juste, ça fait des jours, des années qu’elle subit, qu’elle essaye désespérément et se prend des revers dans la gueule, alors ça suffit cinq minutes.
Alors elle oublie son souffle coupé, son nez fontaine et son épaule en miettes, et dans un grognement rageur, Ouistiti finit par bondir (ou plutôt se projeter au vu de son état de forme physique) de derrière son bouclier (le tas de détritus protecteur). Siham ne lui laisse clairement pas le choix : elle dégaine donc à nouveau son couteau (qu’elle a eu le doux réflexe de replier dans sa cascade), le lance dans sa direction. Paf, plein pied droit, sous le genou qui lui semble avoir été le plus affecté dans leur chute commune ; la blessure devrait en être contrariante, handicapante sur le coup, mais pas foncièrement dramatique, c’est donc un bon compromis et c’est surtout amplement mérité. Elena en profite pour reprendre la direction de son adversaire, puisque sa baguette gît toujours dans son dos, lui dépose au passage un kick dans le fameux genou pour la remettre à terre, enchaîne avec un crochet du droit quand c’est fait, en profite pour lui arracher sa baguette (oui, à mains nues, elle est vénère à ce point) et l’envoyer voler au sol. « Vas-y, dis-moi si t’as encore trop de dents pour convaincre tes petits copains, je t’arrange ça cabrona ! »

S’il y a bien un truc qu’Elena maîtrise plutôt bien, c’est la castagne, même contre des opposants de la trempe d’Al-Massri – méthodiquement (ou en tous cas rageusement), elle reprend donc le dessus, et logiquement, elle se devrait donc d’enchaîner. Elle envoie un nouveau kick, plein torse, qui étire douloureusement sa propre cage thoracique toujours meurtrie par le pied de l’autre ; puis elle se penche, arrache son couteau de sa destination (le pied ennemi), finalement sans la moindre délicatesse. « Tu veux quoi d’autre ? Que je t’attache ? Ma parole, je savais que t’étais ce genre de tordue. » Son souffle est encore trop court pour de telles phrases à rallonge – Elena sent son cœur qui recommence à s’emballer, puis un semblant de vague de lassitude qui lui commande de s’allonger elle aussi sur le dos pour laisser le temps à son pauvre corps de récupérer ne serait-ce qu’un peu. Ses côtes sont douloureuses, atrocement, sa gorge la brûle et elle voit partout le sang que son nez explosé a répandu… et c’est sans compter sur son épaule, toujours cette foutue épaule de mes couilles. Elle grogne un peu, relâche finalement la grognasse pour aller (enfin) récupérer sa baguette. Dans sa tête, l’envie de lui déformer le visage à grands renforts de mandales. Dans son cerveau… la conscience que ce n’est pas la meilleure des choses à faire.
Ses dents crissent à nouveau, de manière tout à fait audible cette fois-ci.

Quand elle revient se planter vers Siham, baguette tendue et couteau nettoyé, elle constate avec un certain plaisir qu’elle aussi n’est plus très chouette à voir. Elle place aussitôt une Rangers sur sa gorge en guise de sécurité supplémentaire, l’autre pied écrasant toujours la baguette adverse. Al-Massri sait se débrouiller sans baguette, mais Lena est censée avoir le dessus quand l’autre est au sol ; elle compte dessus, en tous cas, et au moindre faux pas elle est prête à lier pour de vrai les mains de la Handler afin de désamorcer toute attaque potentielle. Parce que c’est kiffant d’avoir le dessus certes, mais aussi et surtout parce qu’elle ne peut pas continuer à accumuler les dégâts comme ça. C’est ce qu’elle doit se dire. « ‘Tain Siham t’as une occasion de prouver que t’es peut-être pas si terriblement conne que ça, la gâche pas. » Sous-entendu : essaye pas de m’arrêter, de me balancer, de me tuer, de balancer l’Ordre. Sous-entendu complémentaire : j’aurais pas parié sur toi comme héro de guerre mais j’en prends note et tu gagnes un (petit) point de respect pour ça.
« Ecoute, j’comprends que tu sois vénère, mais t’inquiètes, on va pouvoir continuer à se bagarrer toi et moi. Paraît que c’est même bon pour la couverture. » Elena cale plus confortablement son pied sur la gorge de l’autre, enfonce davantage son autre pied dans la terre, garde sa baguette obstinément pointée en direction de la face ennemie pour l’exploser (non, bon, l’endommager gravement) au moindre écart. Une petite voix dans sa tête lui intime toujours d’écraser « juste une ou deux fois » le visage honni de sa semelle, pourquoi pas en beuglant « c’est pour mon nez/épaule/système respiratoire connasse », puis en justifiant ça sous le coup de « bah ouais mais c’est pour pas paraître suspect » - mais elle tient bon, elle se retient, même si elle est pas sûre de pourquoi, parce que l’autoconservation ça lui paraît quand même vachement abstrait comme concept. « Alors ça fait plaisir à personne ici mais grandis un peu et fais avec p’tain. »

Il y a des bruits de pas (de course, plutôt) au tout début de la ruelle ; Elena se retourne brièvement tout en tentant de ne pas (trop) détourner sa baguette de sa cible. Fausse alerte, mais les combats se sont rapprochés et leur temps est clairement compté. Peut-être qu’elle devrait vraiment lui exploser la face pour être sûre… (La colère n’est pas complètement retombée, son souffle n’est toujours pas complètement stabilisé) (Et bordel c’est la deuxième fois qu’elle suspend une bagarre qui lui pend clairement au nez, que quelqu’un lui donne une médaille non ?!) (Que l’autre comprenne le message, surtout.) « Bon j’compte pas m’éterniser, si t’as des questions c’est maintenant ou jamais. D’ailleurs Cléopâtre en nom de code, tu te fais pas chier, ça va les chevilles… »

Bilan des courses : c’est quand même vachement plus simple de se taper dessus.

TW. violence, sang

Siham s'en foutait qu'il y ait eu choix ou non, le résultat était là, il s'appelait Alvarez et donnait du chérie en faisant la leçon. Qu'elle crève, traverse des containers et des containers jusqu'à ne plus avoir un seul os intact, tout pourvu qu'elle arrête de faire la maline avec son petit couteau et ses paroles pseudo-réconfortantes. Doigts serrés autour du bois de vigne, yeux lançant des éclairs alors que les pupilles suivaient la trajectoire d'Elena droit dans les immondices. Sa place. Sourire moqueur vint étirer ses lippes, faisant remonter la pommette vers l'œil plus que poché, ravivant la douleur. Rien de grave pour peu que les larmes ne se remettent pas à couler. De toute façon, le combat était terminé ou presque, l'autre avait un bras en moins et une sale gueule, Siham voyait miroiter la victoire, baissa sa garde alors que son esprit était déjà à des lieux de là. Alvarez en référente, l'information tournait en boucle, filant presque la nausée.

Mouvement chez les ordures, leur cheffe se relevait des morts, trop vite, trop bien, Siham avait sous-estimé le regain du signe. Douleur vint la transpercer sur la jambe déjà blessée, les yeux s'arrondir à la vue du couteau qui y était planté. Et le deuxième coup finit par la mettre à terre avant qu'elle n'ait pu réagir réellement. Ca avait craqué là, non ? Ou alors c'était le bruit du poing d'Elena contre sa joue, lui faisant poser l'autre sur le bitume, goût du sang dans la bouche. Respiration qui se fit haletante, tentative pour se dégager ratée, baguette envoyée volée plus loin. A deux doigts de faire remarquer qu'elle s'en foutait, qu'elle n'en avait pas besoin mais son interlocutrice était trop occupée à lui cracher sa haine. Sourire ensanglanté, avec toutes ses dents, ça envoya sa jambe gauche vers le plexus de l'autre, pour la faire reculer, pour tenter de se relever après. Raté, encore une fois. La succession d'échecs commençait à peser, elle n'en fit rien paraître, regard insolent voulant dire "même pas mal" rivé sur Alvarez. Pied en plein ventre pour récompense, rendant la respiration flippante, clouant d'avantage au sol, rictus narquois. "C'est tout ?" lâché pour la provocation alors qu'Elena se spécialisait dans la dérouillée de femme déjà à terre.

Elle ne put retenir le gémissement de douleur lorsque la lame quitta son pied, faisant jaillir le sang histoire d'achever de pourrir l'uniforme. Ricanement bref à la question du ligotage qui vint lui soulever la cage thoracique. Aïe. "Sans façon, je ne voudrais pas te donner ce plaisir" qu'elle réussit à marmonner, mots à moitié hachés. Siham fut presque soulagée quand Alvarez s'écarta. Yeux fermés quelques secondes pour retrouver son souffle, elle tenta de se relever au moins pour la forme mais sa jambe refusait de lui obéir. Putain, putain, putain. Position plus ou moins à genoux atteinte quand Elena se rappela de son existence pour mieux la refaire tomber. Ok, à quel moment ça avait commencé à aussi mal-tourné pour elle ? Certainement dés le début, elle n'avait plus les idées claires de toute façon, encore moins maintenant que la godasse sale d'Alvarez appuyait sur sa trachée, coupant d'avantage le souffle, faisant presque tourner la tête. Elle attrapa la cheville par réflexe, tentant de la repousser en vain.

Elle n'aimait pas l'angle de vue. Elle était beaucoup trop aux pieds d'Elena qui s'amusait à lui marcher dessus. Regard vers sa baguette aussi piégée qu'elle, yeux de nouveau embués de larme mais cette fois-ci parce qu'elle était à moitié en train d'étouffer. Et les mots paraissaient venir de loin tellement elle était occupée à mordre la poussière. Ca avait des relent de discours paternalistes avec les injonctions à grandir et les "gâche pas tout" alors même que c'était sa spécialité et qu'elle préférait quand Elena la prenait pour la dernière des connasses plutôt que quand Elena faisait preuve de sa compassion toute pourrie. Et là, ça ne lui faisait pas tant plaisir que ça de savoir qu'il y aurait de nouveaux affrontements avec Alvarez, peut-être parce que celui-là se finissait de façon plutôt humiliante... Elle n'avait rien à répondre, ne pouvait rien répondre de toute façon, même pas faire aïe quand la ranger remua toujours sur sa gorge. Bordel, suffirait juste qu'elle appuie un peu plus et hop ! Une Al-Massri envoyée rejoindre son papa. Presque tentant juste pour vérifier qu'il était bien aux enfers, juste pour que les emmerdes s'arrêtent, juste pour sentir autre chose que la rugosité du béton dans son dos et la douleur partout ailleurs.

Et le regard oscillait entre l'assassin et l'interrogateur alors même qu'elle avait cessé de se débattre parce qu'au vu de la situation, ça ne servirait qu'à finir blessée d'avantage et que ce n'était ni dans ses intérêts ni dans ceux de l'autre et putain que ça lui coûtait de le prendre en compte. Siham aurait certes préféré (doux euphémisme) avoir le dessus mais l'objectif était indéniablement atteint : elle s'était faite beaucoup trop casser la gueule pour qu'on imagine la collaboration. Niveau de masochisme flirtant avec le plus l'infini, même plus assez de force pour cracher à la gueule d'Alvarez qui était sur le départ. "Va crever" en guise de phrase d'adieu, prononcé avec tout l'amour du monde une fois que le poids sur son cou se soit envolé, presque plus en promesse qu'en souhait. Puis d'abord, elle y connaissait quoi en surnom l'autre ? Siham, au moins, était matchée avec son bff et le reste importait pas tant que ça. Le sang, le genou fracassé, l'œil qui pulsait douloureusement, la gorge ornée d'une trace de pas, la respiration plus que sifflante, c'était que dalle - auto-persuasion - la douleur était une vue de l'esprit, d'ailleurs à y repenser elle n'avait même plus si mal. Mais c'était peut-être parce que sa vue virait au flou et que ça ne présageait rien de bon niveau conscience. Ok, ok, se taire, rester tranquille, attendre que son hound vienne la ramasser, raconter une jolie histoire mensongère où elle avait perdu parce que c'était du trois contre un et qu'ils étaient arrivés par derrière. Ouais, bon plan ça, en attendant, elle se récita les dates des guerres avec les gobelins pour restée éveillée puis nota dans un coin de sa tête qu'il faudrait qu'elle se venge de manière terrible. 

tw : encore un peu de bagarre, sang, langage cru
"Va crever", persifle l’autre et le sourire d’Elena s’élargit encore un peu. Son pied bouge et elle dissimule à peine la satisfaction que lui procure la respiration toujours plus sifflante d’Al-Massri – encore un peu plus longtemps, encore un peu plus fort, et elle pourrait la laisser là raide morte, l’air de rien, ne plus jamais avoir à entendre ses caquètements ou subir ses intonations railleuses balancées sous sa frange beaucoup trop droite. Elle appuie encore un peu, dix secondes peut-être, le temps de profiter de cette victoire qu’elle n’attendait plus, puis lève le pied, le laisse en suspens… Et le repose finalement (même sans délicatesse aucune) à quelques centimètres du visage honni. Ce n’est ni l’envie (de lui exploser la face) ni la fureur qui manque, mais Siham est sous sa responsabilité maintenant (¡Qué mierda!), et même elle ne la tuerait pas juste parce qu’elle le peut (d’autant moins maintenant qu’elle sait que, aussi improbable que ce soit, Sissi fait un peu partie des gentils aussi).

Elena sait d’ores et déjà qu’une revanche à la hauteur de l’humiliation actuelle l’attend, alors elle savoure un peu, même si elle comprend vite qu’aucune question supplémentaire n’est à venir, même si elle sait qu’on ne va pas tarder à leur tomber dessus et qu’il serait bon qu’elle lève le camp.
« Elena ! » Comme un signe, une voix familière résonne dans son dos – elle se retourne aussitôt, fait face sans surprise à Rip. L’homme se rapproche de leurs deux silhouettes, la baguette prudemment levée ; hausse un sourcil face à sa dégaine. « Ça… va ? » Lena hoche prestement la tête, histoire de préserver sa dignité et dissimuler encore un peu sa respiration chaotique, jette un rapide coup d’œil à Al-Massri qui n’a toujours pas trop bougé. Elle envoie finalement bouler la baguette de celle-ci plus loin, opine encore une fois du chef en direction de Rip pour lui faire savoir que, comme il peut bien évidemment le constater, the deed is done.
(Est-ce qu’elle ne peut vraiment pas lui coller un dernier coup de pied avant de partir ? L’autre l’aurait fait…)

Comme lisant dans ses pensées, Rip l’attrape par son bras fonctionnel, la tire en arrière vers le début de la ruelle. A quelques encablures de là, Elena peut entendre l’écho des derniers affrontements ; elle traîne un peu des pieds. Elle freine une première fois, interpelle Al-Massri dans une exclamation pas franchement prévue qui fait faire les gros yeux à Rip. « Hey Al-Massri dis, évite peut-être d’aller chasser prochainement sinon. » Elle tourne à nouveau les talons, plus traînée qu’autre chose, le cœur battant parce qu'elle ne sait pas trop si elle en a trop ou pas assez dit ; puis finalement, quand elle est certaine que Siham ne peut plus les entendre, elle freine plus franchement et fait un petit signe de tête dans sa direction. « Son con de Hound, il est dans le coin ? » Rip hausse à nouveau les sourcils – elle le pousse un peu en guise de protestation. « Ouais bah, faudrait pas qu’elle me claque entre les doigts comme ça non plus. » « Les gars vont le rabattre ici, mais toi tu rentres. » Pas le temps de protester, à peine le temps de jeter une nouvelle œillade par-dessus son épaule, vers l’autre qui ne s’est toujours pas relevée (elle lui a vraiment accidentellement enfoncé la trachée ou quoi ?!) ; en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, les deux Alvarez ont disparu dans un craquement sonore.