summertime (river)

summertime.

Bière à la main, Seamus contemplait la Tamise, posé sur un rocher. Le port de Londres était un endroit idéal pour les personnes qui voulaient prendre l’air, tout en restant cachés. Ici, seuls les ouvriers et quelques crapules s’aventuraient, ce qui laissait un peu de tranquillité aux fugitifs comme Seamus ou aux hybrides, comme River. Cet endroit était devenu un lieu de rendez-vous pour eux, lorsqu’ils ne pouvaient se voir ailleurs. Un moment pour prendre un verre, avant que le couvre-feu ne s’annonce. La vie que leur imposait se nouveau monde était insupportable et ils espéraient, l’un comme l’autre, du changement. A contrario de Seamus, l’asiatique continuait de vivre parmi ses semblables, et acceptait à contre-coeur le statut qu’on lui attribuait. Avant de partir en France, Seamus avait rencontré River, un homme de la nuit, avec qui il avait flirté. A son retour, un peu perdu et déboussolé, il s’était tourné vers lui pour combler ses nuits. Une relation qui leur convenait à tous les deux, une manière d’oublier la solitude. Depuis qu’il avait retrouvé Dean, les choses devenaient plus floues dans son esprit et pour une raison qui le dépassait complètement, il éprouvait une certaine culpabilité à finir dans les draps de quiconque.

Cependant, même s’il ne terminait plus ses nuits avec River, l’irlandais continuait de le voir, et surtout d’essayer de lui apporter son aide. Opprimé par son statut, le jeune homme n’espérait désormais qu’une seule chose, voir ce monde partir en fumée. Sa colère était telle qu’il rêvait lui-même de tuer le lord. Seulement, la marque le suivait, et il était difficile de le faire sortir du système. En attendant, il lui apportait de la compagnie, et se laissait parfois aller à un peu de chaleur. « Quoi de beau depuis la dernière fois ? » Mécaniquement, il lui décapsula une bière, avant de la lui tendre. « Elle est pas très fraîche, j’ai acheté le pack en venant. » Les moldus ne buvaient pas les meilleures bières du monde, mais cela faisait largement l’affaire pour un moment comme celui-ci.

Devant eux, les bateaux de transports avançaient doucement dans le port, et les conteneurs étaient déchargés et empilés sur les quais. Les ouvriers s’occupaient, sans leur prêter la moindre attention, pensant sûrement que c’était des junkies venus piquer en paix. Vivre dans l’ombre était devenu son quotidien, si bien qu’il avait parfois l’impression d’être absolument rien, ni personne. Un sentiment difficile pour celui qui manque de confiance en lui et qui aimerait simplement pouvoir faire ses preuves. C’est sûrement pour cette raison qu’il a décidé d’aider River, le besoin de se sentir utile et de donner du sens à son existence. Puis quelque part, c’était le rôle de l’ordre d’aider les opprimés, les victimes de ce nouveau monde.

(@river min)

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summertime

juin 2007 - muggle london - @seamus finnigan

C’est au bord de la Tamise que River retrouve Seamus, le saluant rapidement avant de s’asseoir à côté de lui. C’est le lieu de retrouvailles idéal quand ils ne peuvent se voir ailleurs ; ce n’est sûrement pas ici que les sorciers, notamment la patrouille, vont traîner. Trop isolé, entre l’eau et les bateaux et les chantiers et ouvriers (et sans doute l’un ou l’autre junkie). Des fois, ça rappelle à River cette année qu’il a passé à traîner, errer, survivre dehors, avant qu’il ne rejoigne le bordel sorcier où il travaille encore aujourd’hui - à l’époque, ça n’avait rien du charme du Filet du Diable, et l’atmosphère du Centaure Lubrique ressemblait à celle du port de Londres : gris, morne, vide.
Machinalement, le jeune homme prend la bière tendue, remerciant rapidement Seamus. “T’inquiète, ça conviendra.” River fait tourner la bouteille entre ses doigts, semble l’étudier un instant. C’est sûr qu’en plus, y’a mieux à boire. Même au bordel, ils sont mieux lotis, avec des bouteilles de vin hors de prix toujours à portée de main - ça détend les clients trop timides et, lui, ça le calme ou ça l’occupe quand il est seul dans ses quartiers, ou qu’Angelina vient l’ennuyer.
Il prend une gorgée - constate qu’effectivement, la bière n’est pas très fraîche, mais tant pis - avant de répondre à son ami. “Pas grand-chose.” La réplique est plate - comme son quotidien, finalement. Il hésite. Il pourrait parler de l’attaque du Filet du Diable, récemment - un incendie mineur apparemment causé par un gang rival, sans victimes, si ce n’est la fille du patron. Mais River se doute que Von Bäume n’aimerait pas que l’info remonte aux oreilles de la Résistance, si jamais celle-ci en a quoi que ce soit à faire des guerres de gangs. Le blond se méfie assez de son patron pour, donc, se taire et prendre une nouvelle gorgée de bière, avant d’ajouter. “La vie, le travail continuent.” Qu’il aimerait pouvoir avoir des choses intéressantes à raconter... Il n’arrive même pas à feindre l’enthousiasme, le ton quelque peu amer. Mais à part parler de ses clients, ou des disputes stupides avec ses collègues, rien ne lui vient. Et même ça n’est pas franchement passionnant.
Un peu l’esprit ailleurs, River se penche légèrement en arrière, posant une main derrière lui. Le port, la vue des bateaux, le rend… nostalgique. Les mots lui échappent à voix basse. “T’as pas envie de sauter sur un de ces bateaux et disparaître ?” Il jette un coup d'œil à Seamus - le premier depuis qu’il s’est posé sur le rocher à côté de lui - et le dévisage de haut en bas avant de détourner la tête, reportant son attention sur les bateaux. “Quoique... T’es revenu, toi.” Un faible rictus, qu’il retire bien vite, se dessine au coin de ses lèvres. Il se demande bien pourquoi Seamus est revenu de France. Il aurait dû rester là-bas, rester loin de ce gouvernement, de cette guerre, de ce mode de vie. Le syndrome du héros, peut-être. La loyauté. River hausse les épaules, dans sa réflexion. Lui, il ne serait jamais revenu, c’est sûr. Y’a rien qui le retient ici. Ni personne. Par réflexe, il regarde derrière eux, cherche du regard Jinju, son chat, qui doit penser que cet endroit est un excellent terrain de jeu (pendant que River stresse un peu à l’idée de la perdre de vue, ou de la perdre tout court).
La vélane a un soupir, fixant un point sur l’épaule de Seamus. Seamus. River n’a pas énormément de connaissances, et encore moins d’amis, en dehors de… Jinju. Et l’un ou l’autre. Il ne sait pas exactement ce qu’est Seamus pour lui. Un confort ? Quelqu’un avec qui passer du temps loin du Filet du Diable, loin de tout d’ailleurs, et parler ? Et puis, Seamus s’intéresse à lui. Pas en tant que demi-vélane ou prostitué, mais en tant que personne, et ça fait une différence. River lui donne un petit coup de coude, chassant la mélancolie qui tourne dans sa tête, et arbore un petit sourire un peu moqueur. “Et toi ? Les amis, les amours, les emmerdes ?” Il l’observe avec son intensité habituelle mais, comme c’est Seamus, aussi un peu de douceur dans l'œil. “Il doit pas se passer grand-chose dans ta vie pour que t’aies le temps de boire une bière avec moi”, il taquine, car il sait pertinemment que du temps, Seamus en a passé avec lui. Beaucoup, rien que ces derniers mois. Un peu moins maintenant, cela dit, et plus de la même façon - des fois, ça manque à River, qui trouvait (ré)confort et chaleur dans les bras de l’Irlandais. Il détourne la tête sans perdre son mince sourire.

summertime.

( en musique )

« La routine quoi. » Rien de plus, rien de moins. Pour des personnes comme eux, la vie se limitait bien trop souvent à une répétition d’actions délimitées par un manque de liberté évident. Privés de se promener où ils voulaient, quant ils l’entendaient et avec qu’ils le souhaitaient, les deux garçons ne pouvaient agir en toute liberté, raison pour laquelle ils se retrouvaient à cet endroit pour se voir. Le port de Londres n’était sûrement pas l’endroit le plus chaleureux de la ville, mais le seul où ils pouvaient encore se pavaner sans risquer un sort fatal. En regardant les navires quitter le chenal, River se mettait à rêver d’ailleurs persuadé que l’herbe était plus verte chez les voisins. Un songe que beaucoup pensaient vrai, mais qui malheureusement, était bien loin de la réalité. Seamus était revenu de son voyage et pouvait attester de la désillusion qui les attendait au-delà des frontières du Royaume-Unis. Certes, la liberté s’y trouvait, mais au prix de la solitude et d’enracinement total. « Tu sais, ce n'est pas forcément beaucoup mieux ailleurs. Puis, mes amis me manquaient. » Proche de sa famille et de ses amis, l’irlandais avait très mal vécu cette période où il n’était que le fantôme de lui-même. Tout quitter pour se reconstruire, c’était uniquement dans les films que ça se faisait. Dans la réalité, la solitude et la culpabilité rongeaient l’âme. Finalement, il était revenu à la maison et même si ce n’était pas parfait, cela restait largement préférable.

Ce retour, River ne le comprenait pas, et pour dire vrai, Seamus ne pouvait pas lui en vouloir pour cela. Quelque part, il valait mieux qu’il croit encore à une forme d’espoir ailleurs, plutôt qu’abandonner. L’espoir fait vivre, et par ces temps sombres, il fallait mieux s’y accrocher. Au travers d’une question anodine, l’asiatique souligna l'ironie de sa présence, non sans une touche de cynisme. Un humour qui blasait un peu l’ancien gryffondor qui appréciait suffisament l’autre pour venir le voir par plaisir et non pas par défaut. « Arrête, ça me fait plaisir d’être là, on est ami, tu le sais. » Cela faisait bien longtemps que l’autre était plus qu’un plan cul, ou qu’un moyen de divertissement. Seamus savait apprécier la compagnie de Min, même si cela se résumait à une bière ou deux sur le port de Londres.

Prendre des nouvelles, discuter tranquillement et passer un peu de temps loin de leur quotidien. Voilà à quoi servaient ces petits moments et pour une fois, l’irlandais avait une vraie annonce à faire. « Depuis la dernière fois, je me suis enfin décidé pour parler Dean... » Après neuf mois passés en Angleterre, il avait enfin fait le premier pas pour venir parler à son ancien meilleur ami. Des retrouvailles larmoyantes et difficiles qui confirmaient ses peurs ; un retour en arrière semblait impossible. Néanmoins, il était heureux de l’avoir vu, d’avoir pu lui parler et surtout d’avoir pu s’expliquer un minimum. Il était revenu pour Dean, pas seulement, mais principalement. Sans lui, il serait sûrement resté en France, au moins quelques années de plus, en espérant s’habituer à cette nouvelle vie.

(@river min)

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