Il y a autant de façons d’habiller la signature d’un contrat que de la célébrer ; et Ezekiel Zabini est certainement l’un des sorciers les mieux placés au monde pour le savoir. En plus de quinze ans de carrière, il a largement eu l’occasion de ratisser l’étendue des possibilités ; mais il n’est un secret pour personne ayant collaboré avec lui qu’il a su prendre goût aux célébrations formelles, sous la forme d’annonces en grande pompe, l’homme d’affaires ne ratant jamais une occasion de mettre en avant ses exploits, ou d'opulents dîners réunissant chaque important protagoniste des négociations. Une manière efficace de marquer le coup, autant que de sceller en bonne et due forme quelconque union - les seules auxquelles Ezekiel accorde une importance véritable.

Rares sont ceux échappant à l’un de ces nombreuses et rigides traditions, si ce n’est uniques - et de fait, Benjamin Rosier en fait partie depuis de longues années désormais. Une proximité nécessaire, dans un premier temps ; évidemment, on ne débarque pas fraîchement dans un pays sans se rapprocher intimement de ses sorciers les plus influents. L’unique fils de Fergus était une pièce maîtresse sur laquelle le regard d’Ezekiel s’est tourné sitôt qu’il a investi l’île européenne - il représentait après tout l’avenir de Rosier Events, et l’avenir lui a même donné raison plus rapidement que prévu.

Une proximité qui s’est muée en quelque chose d’apparence plus sincère et authentique : un respect mutuel et une confiance aussi présente que méfiante - on n’évolue pas dans un milieu impitoyable sans surveiller ses amis et proches partenaires de près. D’assez près pour que des similarités évidentes se dessinent dans l’esprit organisé du Santoméens, auxquelles se sont ajoutées des différences tout aussi flagrantes, un dosage parfait pour faire d’Ezekiel Zabini et Benjamin Rosier un duo redoutable et incontournable quand il s’agit de s’implanter dans le paysage financier et économique britannique.

On peut compter sur les doigts d’une main les sorciers chez qui Ezekiel accepte de se rendre - pour des raisons personnelles qu’il garde précieusement dans un recoin sombre et défendu de ses pensées, dont il ne s’approche jamais. Les deux confrères ont pourtant signé trop de collaborations pour être énumérées, jusqu’à voir naître des traditions qui leur sont propres ; soit par atterrir chez l’un ou chez l’autre après la succession de formalités, pour pouvoir se délecter ensemble, autour d’un verre de vin, de cet ajout à la longue liste de leurs succès communs. Parce que force est de constater que la compagnie de l’aîné des Rosier lui est agréable, légère, et que peu d’hommes d’affaires savent forcer si naturellement son respect.

”I must say, you were quite impressive earlier”, avoue Zeke dans un sourire, faisant tourner le verre à pied dans sa main en détaillant du regard le spiritueux pourpre danser derrière l’écran de cristal. ”See, hearing my advice once in a while never turns bad”, ajoute-t-il en étirant ses lèvres, un rire léger s’y échappant, avant qu’il ne vienne y porter la coupe pour prendre une rapide gorgée de vin. Une habitude de la première heure que de s’accaparer pleinement la moindre de leurs réussites, qu’Ezekiel ne manque jamais d’appuyer dans un regard complice et satisfait.

Ses pupilles sombres balayent un instant le mobilier luxueux du salon de la demeure Benjamin, dans laquelle il s’est retrouvé à de nombreuses occasions, avant de revenir à son hôte. L’immense manoir qui lui est familier a, de toute évidence, pris une teinte sensiblement différente ces derniers temps, depuis que la bibliothèque est devenu la pièce qu’Ezekiel fréquente le plus fréquemment ; depuis que ses pensées ne peuvent brièvement s’empêcher de se tourner vers la présence certaine de Celyn à l’étage. Une rapide pensée qu’il garde pour lui, se redressant plutôt sur la banquette, son sourire toujours placardé sur son visage éclatant, ajoutant avec une pointe d’humour prétentieuse : ”You should invite your cousins to follow the same path. Time has proven following Zeke Zabini’s counselling only makes for Rosiers’ success. I don’t make the rules”, offre Ezekiel gratuitement, arquant un sourcil en même temps qu’il lève son vers en direction de Benjamin, avant de souligner sa remarque d’un sourire solaire.