“We’re different people now, aren’t we?” "Yes we are." Il affirme sans réfléchir. Luca semble moins emportée par des élans de colère et lui est bien plus ouvert qu'il ne l'était alors. Ils sont jeunes encore, le quart de siècle atteint il y a peu, la vie devant eux, et pourtant ils ne sont plus des adolescents. Malachi se sent parfois presque adulte et cette idée ne lui sied guère, il a l'impression souvent de se débattre avec toutes les attentes que les autres adultes ont sur lui, avec les responsabilités de son métier, et la pression sociale de s'insérer dans une norme. Mais ce sont des détails qu'il ne cherche pas à modifier, avec lesquels il se bat silencieusement sans jamais en parler à voix haute. Des secrets qui le mettent mal à l'aise mais qu'il n'avouera pas sur ce banc au milieu d'un parc. Qu'il ne pourrait à peine lui chuchoter dans l'intimité. “It’s weird, actually, it’s almost like we just met, isn’t it?” La douce voix de Luca brise le court sombre de ses pensées, et Malachi détache son regard de la main de son amante pour lever son visage vers le ciel, observer les discrets rayons du soleil qui éclairent un ciel bleuté. "I guess so." “I mean, can we even say we still know each other, after all this time?” Ses sourcils se froncent un instant avant de reprendre leur forme initiale. Il ne peut que secouer la tête négativement face à la question de la journaliste.

Pendant quelques secondes des nuages ont obscurcit le ciel bleu, Malachi n'aime pas trop cette idée qu'ils ne se connaissent plus réelleement, qu'il existe une distance entre eux, qu'ils ne sont que des amants de passage. Mais ce nuage disparaît - comme le font les nuages - et laisse la place à une quiétude résolue ; c'est bien tout ce qu'il désire non ? Des relations simples sans tous les inconvénients qui vont avec les relations sérieuses ; pas de cris, pas de dispute, aucune attente... "We can't. But ehm we're getting there, right?" Sa main quitte les doigts frais de Luca pour glisser contre sa propre nuque dans un geste un peu embarrassé. "We do spend quite a lot of time together. And for one I like getting to know you all over again." Il y a une question derrière cette phrase, une interrogation qu'il n'est pas certain de comprendre, une gêne qu'il n'a pas l'habitude de ressentir. Malachi se demande si elle apprécie ce qu'il est devenu, si elle apprécie sa compagnie, si elle voit en lui plus qu'un corps contre lequel s'échouer de temps à autre, car au final c'est toujours lui qui vient chez elle, c'est toujours lui qui reste plusieurs jours, et si son amante ne lui refuse jamais l'entrée elle ne semble pas non plus rechercher sa présence. Et si Malachi est certain de ne pas être amoureux, s'est interdit de retomber dans ces travers après leur rupture et l'échec cuisant de sa relation avec Bry, il trouve en elle bien plus que des moments fugaces de jouissance mutuelle. Autrement, il serait parti après la première fois où ils sont retombés dans les bras l'un de l'autre.

“We can't. But ehm we're getting there, right?” Luca baissa la tête presque solennellement alors que la main de son amant quittait la sienne. Il n’avait pas tort, elle le savait. Ce qu’elle ne savait pas c’était si elle appréciait ce fait, si lui l’appréciait, si c’était ce qu’ils voulaient, séparément mais aussi ensemble, d’apprendre à se connaître une nouvelle fois. “I guess so,” elle finit par répondre. Elle avait appris beaucoup de choses sur lui en ces quelques semaines, plus qu’elle ne l’aurait imaginé lorsqu’ils s’étaient revus la première fois. Mais Luca savait que c’était un jeu dangereux, pas parce qu’elle risquait de redévelopper des sentiments amoureux pour lui, mais parce que les problèmes qu’ils avaient eu des années auparavant existaient toujours, et elle ne savait pas à quel point il était possible qu’ils puissent s’entendre. Malachi avait toujours Rafaela et Romilda, peut-être moins présentes qu’avant mais toujours là avec leur supériorité morales et leurs phrases condescendantes, il avait toujours cette forme de détachement, de lenteur presque qui l’avait tant exaspérée, et … well, c’était déjà bien assez. Même si tout se passait bien, un peu trop, pour le moment, ces difficultés là les rattraperait sans doute, et les disputes qui allaient avec également. “We do spend quite a lot of time together. And for one I like getting to know you all over again.” Ca répondait à une de ses questions, du moins. Elle ne put s’empêcher de sourire légèrement. C’était presque risible, la situation dans laquelle ils étaient à cet instant, Malachi exprimant ses souhaits alors qu’elle butait sur ses mots pour lui répondre. Luca n’avait jamais été hésitante avant, mais beaucoup de choses avaient changé. “Yeah it’s, uh, it’s nice,” elle finit par lâcher maladroitement. “I mean, shit,” elle balbutia avant de se passer une main sur le visage. “It’s good, it’s just … not what I expected,” c’en était à des kilomètres, même. “I’m still really good at this, not everything has changed,” elle ajouta avec un rire dépréciateur. Fuck. “It’s good yeah, I- I like spending time with you, it’s a nice good that we can hang out, with no drama, no expectations. It’s uh- calm and that’s a lot for us I think?” Elle finit en relevant les yeux vers lui. Ils n’avaient pas une histoire calme, ils n’en avaient pas été capables à l’époque, alors c’était bien de savoir que, ne serait-ce que pour ça, ils avaient changé, grandi. Pour le meilleur, Luca n’en doutait pas.

Malachi se sent étrangement inquiet en attendant une réponse à une question qui n'a pas osé posée ouvertement. Does she like to spend time with him as much as he does? malachi n'avait jamais été le type de personne à s'étendre sur ses émotions ou ses états d'âme, ce n'était pas des qualités que l'on tolérait et cultivait chez les Goyles. Mais c'était ce qui avait en partie causé du tort lors de son histoire adolescente avec Luca et ensuite un peu avec Brygida, le manque de communication et d'investissement peut-être aussi ; et s'il ne se sent pas forcément préparé à agir sur le deuxième au moins se sent il la force de faire des efforts sur le premier. Pas qu'il souhaite commencer une nouvelle relation amoureuse, pas qu'il soit d'ailleurs à nouveau amoureux de Luca - loin de là. Toutefois, il espère ne pas refaire les erreurs du passé et garder cette amitié fragile qu'ils tentent de former aujourd'hui.

Il est donc assez inquiet en formulant cette interrogation déguisée et ne se détend qu'à peine en apercevant la trace d'un sourire sur les lèvres de son amante, ne sentant la tension pleinement le quitter qu'en entendant confirmation dans la bouche de la jeune femme, un miroir de ce qu'il ressent également.  il sourit doucement à son tour, en secouant la tête, attendri et un peu désolé par ces deux gamins qu'ils étaient. "Oh yeah it is. I was never fond of the drama anyway." Rafaela et surtout Romilda lui apportant déjà bien assez de drama dont il ne savait que faire ; et il était bien placé pour savoir comment se terminait les attentes qu'il ne savait comment respecter, par la fuite et une bonne dose de lâcheté. "I like that we can  spend time together and not worry about the future or expectations as you put it. It's kinda ehm refreshing? Easy? I don't know. It feels good." It feels right, murmure une voix dans son esprit qu'il ne prend pas la peine découter. Malachi éprouve déjà du mal à faire sortir ces explications de sa bouche et de son esprit qui s'il est très affûté lorsqu'il s'agit d'études s'embourbe complètement dès qu'il faut parler de relation.

Sa main retourne se poser sur celle de Luca alors qu'un silence agréable les entoure. Il y a quelques années, il aurait cherché à le rompre, allant à l'encontre de sa nature silencieuse et discrète dans l'angoisse que Luca s'ennuie ou s'énerve ou le plaque. Mais il n'y a plus tous ces doutes aujourd'hui - ils ne sont rien qui puissent se briser puisqu'ils ne sont pas ensemble. Et un calme bienvenue semble avoir remplacé tout cela. Malachi se sent apaisé dans ce silence, avec sa présence et leurs deux mains jointes. Il n'y a que l'instant présent et pas la question fatidique qu'il devra bientôt poser à Rafaela et pas non plus la pression de décevoir des gens qui pourraient compter sur lui. Pas de futur à lui glacer le sang.