La situation est si surréaliste que Millicent pourrait presque croire que tout ceci n'est qu'une vaste blague, un canular ambitieux dans lequel on la force à jouer depuis plusieurs années maintenant. Ou alors une mauvaise blague qu'on raconte entre deux verres trop plein d'hydromel. Un Pouflsouffle et une Serpentard se rencontrent. L'un est un vampire, l'autre une harpie. L'un dit à l'autre, "hey". L'autre dit à l'un, "hey". Ouai... Vraiment pas fameux.

Jamais de la vie Millicent n'aurait pensé que sa vie, un jour, se résumerait à ça; un vielle appartement moldu miteux, un travail tout aussi dégradant, et pour seul ami, un vampire bancal qu'elle n'avait pas forcément envie de revoir un jour. Peut être qu'elle devrait commencer à croire au karma...

Elle écoute Boris en gardant bien fixée sur son visage son éternel resting bitch face, un mélange de dédain, dégout, et d'ennui qu'elle a su parfaire au fil des ans. Une vraie tête de harpie, comme diraient certains. Il parle, il parle, il parle, comme toujours, et c'est un peu réconfortant, quelque part, de savoir que il y a certaine constante dont on ne peut pas se défaire, des choses qui seront toujours là, toujours vrais, peu importe ce qu'il leur arrive.

"Bah j'sais pas, y'a bien des combats d'humains, de base, donc..." Boris répond et Millicent balance légèrement sa tête, forcée de constater que ce n'est pas si faux. Quand même, ça reste un peu dégradant, non ? Elle garde sa question pour elle. Ils n'ont pas besoin de cette remarque. Ils savent ce qui est dégradant ou non. "Après, j'suppose que c'est pas méga équitable, genre tu fais pas se battre une harpie contre un loup-garou une veille de pleine lune."

"Je suppose que non," Millicent répond lentement entre deux gorgées. "De toute façon, qu'est ce qu'une harpie lambda a à offrir dans ce genre de combat ? C'est pas comme vous autres les vampires ou les loups garous qui ont des avantages physiques. Nous on a quoi ? Un dégout pour la viande et un regard menaçant qui de temps en temps peut maudire les gens ? J'ai du mal à voir comment ça peut valoir le coup sur le ring," elle élabore, les mots sortant si facilement de sa bouche qu'elle en est presque surprise, ayant du mal à croire que c'est elle qui les prononce.

"C'est vrai, quoi ; si on peut se faire du fric sur leur dos, aussi, c'est tout bénef, nan ? J'veux dire, ça montre que, même s'ils nous aiment pas et qu'ils ont peur de nous, ils peuvent pas se passer d'nous !" Millicent rit à ça. "T'y as réfléchit, avoue," elle dit, comme si elle même n'avait pas été intrigué par le concept. Si elle est vraiment honnête avec elle même, avant qu'elle découvre la vérité sur ses origines, quand elle faisait encore partie de l'élite, tout là haut dans les étoiles, entourés de ses formidables amis, elle aurait sûrement adoré ce genre de plans.

"Nan mais t'imagines ?" il continue. "Il paraît y'a un lupanar, genre spécialisé en hybrides ; tu vois un peu jusqu'où le délire est poussé ? En fait, on les fait autant rêvé que cauchemardé, c'est fou..." C'est fou... Ce sont les mots, en effet. Boris n'a pas tellement tord. Millicent serait prête à parier que ceux qui l'ont si facilement écarté, étiqueté en tant qu'harpie, et poussé tout au bas de l'échelle sont les même qui se délectent de voir des hybrides se foutre sur la gueule pour leur plaisir, et ce vieillard de Von Baüme en tête de liste, le patriarche qui s'est fait un plaisir d'humilier la famille Bulstrode jusqu'au bout en récupérant leur manoir à Mann. "ça donnerait presque envie d'y faire un tour," elle murmure, plus pour elle que Boris, avant de boire une nouvelle gorgée, une idée déjà grandissante en tête.

"Mais t'sais quoi ? Si t'es pas invitée aux soirées, moi j'dis, go faire tes propres soirées ! Rien qu'au Ministère, ça grouille d'hybrides, j'pense ils donneraient tout pour s'amuser un peu là... casser du sucre sur le cul des handlers, faire un peu les fous ; ça détendrait les strings ! 'Faut leur prouver, à tous les autres, qu'on a pas changé, et que c'est pas pour eux qu'on changera ; tu vois c'que j'veux dire ?" Cette fois-ci, Millicent le regarde comme s'il était fou. "Bien sûr. Parce que si j'invitais les gens, ils se pointeraient. T'as vraiment besoin que je te rappelle le genre de réputation que j'ai ? Ma côte de popularité a jamais été bien haute mais maintenant je suis presque sûre que je suis perso non grata. Même chez les hybrides. Alors je passe."

"Nous on a quoi ? Un dégout pour la viande et un regard menaçant qui de temps en temps peut maudire les gens ? J'ai du mal à voir comment ça peut valoir le coup sur le ring." Tu te pinces les lèvres, admettant par ton silence que Millicent venait d'appuyer un point important. Tu n'avais pas réalisé que certains hybrides ne recevaient pas des coups de botte dans le derrière pour aller signer à la Values Brigade. Tu sais pas s'ils sont plus chanceux que toi ou pas. D'un côté, Millicent disait vrai ; les loups et les hémovores étaient en haut de la chaîne alimentaire. Mais d'un autre côté, tu te serais bien passé de transvaser du rang de handler à celui de hound... C'était un miracle que tu aies survécu aussi longtemps à la Brigade, indépendamment de tes nouvelles capacités physiques. Il faut dire que c'était un repère à dégénérés et à imbéciles, quand ils n'étaient pas les deux à la fois...

"Legit ça dépend du temps qu'ça met, les malédictions, avant d'se réaliser ? Est-ce que c'est genre immédiat, comme les vœux ?" Tu te redresses, les fesses posées tout au bord de ton fauteuil. "Omg, y'a pas genre moyen de baiser le game, et genre de refiler une malédiction mais genre bénéfique à quelqu'un??" Avant que Milli ne te coiffe au poteau d'un regard consterné dont elle avait le secret, tu te ravises, les sourcils soucieux. "Ah bah nan, tu m'diras, c'est genre à l'opposé de ce que c'est supposé faire, une malédiction..." Tu noies ton idée de génie dans une nouvelle gorgée inutile.

Vous vous embarquez sur la pente glissante du sujet du Filet du Diable. Tu n'avais pas évoqué le sujet pour rien ; ça faisait un petit moment que ça te trottait dans le crâne. Et, généralement, quand tu mettais le doigt sur une telle idée (catastrophique, qu'on se le dise), tu ne la lâchais pas de sitôt. C'est que tu te faisais bien chier, maintenant que toute ta vie sociale se résumait à trois vieux croulants de la Brigade, et une flopée de vampires que tu ne connaissais ni de Morgane, ni de Merlin. Millicent, en comparaison, officiait comme un vent de fraîcheur et une nouvelle perspective de plans foireux, aussi peu encline pouvait-elle paraître, au départ. "Ça donnerait presque envie d'y faire un tour. -C'est ça que j'veux entendre, ma chérie!" t'exclames-tu, manquant de renverser la moitié de ta bouteille de bière au sol.

Et pourtant, c'est pas gagné d'avance de l'embarquer dans tes petites combines. C'est que la jeune femme a dû en baver, aussi, elle se méfie encore davantage des autres qu'elle avait pu le faire, du temps de Poudlard. "Bien sûr. Parce que si j'invitais les gens, ils se pointeraient. T'as vraiment besoin que je te rappelle le genre de réputation que j'ai ? Ma côte de popularité a jamais été bien haute mais maintenant je suis presque sûre que je suis perso non grata. Même chez les hybrides. Alors je passe." Tu claques la langue à plusieurs reprises, reposes ta bière sur la table basse.
Forçant sur la rigidité de tes interminables jambes, tu viens t'accroupir, un genou à terre, au pied de Millicent, l'obligeant, de ton regard trop clair un peu dérangeant, à te fixer dans les yeux. Tu vas même pour lui prendre les mains, refermant tes doigts étrangement froids autour des siens. "Ecoute, ma grande. C'est pas moi qui devrais te dire ça, mais j'crois que, dans notre situation, ça compte plus trop, qui on était avant. Alors, oué, ok, j'suis là en mode "faut leur montrer qu'on a pas changé, qu'on sait toujours faire la bringue", mais le fait est que, pour eux, on est diff'. Alors j'ai limite envie d'te dire ; bah profitons-en pour faire table rase des vieux bails de quand on était encore des sorciers lambdas, tu crois pas? Parce que déjà qu'on est mis de côté, alors si en plus entre "mis de côté", on s'regarde de traviole, euh, on va crever seul, moi j'te l'dis!"

"Legit ça dépend du temps qu'ça met, les malédictions, avant d'se réaliser ? Est-ce que c'est genre immédiat, comme les vœux ?" Millicent lève un sourcil intrigué. Elle n'y a pas vraiment réfléchi mais c'est peut être un point sur lequel elle devrait réfléchir avec Ocean. "Omg, y'a pas genre moyen de baiser le game, et genre de refiler une malédiction mais genre bénéfique à quelqu'un??" Boris ajoute et cette fois, elle fronce les sourcils et entrouvre la bouche, prête à souligner ce qui ne va pas avec sa théorie. Cependant il semble s'en rendre compte lui même puisqu'il continue, sans vraiment s'arrêter pour respirer, "Ah bah nan, tu m'diras, c'est genre à l'opposé de ce que c'est supposé faire, une malédiction..."

"Voilà," Millicent commente simplement avant de boire une longue gorgée. Heureusement que ce n'est pas à Boris qu'elle a demandé de l'aide pour essayer de comprendre sa nouvelle - pas si nouvelle - condition. Avec lui à la barre, elle serait sûrement morte dans un trou en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Mais au moins elle se serait amusée...

Le "ma chérie" que Boris lui lance ensuite fait sourire Millicent, un peu malgré elle, et elle tente de le cacher derrière sa bière. Elle ne saurait dire à quand remonte sa dernière discussion avec un ami, avec un vrai amis, sans jeux de pouvoirs, sans remarques blessantes sur qui elle est ou son statut, sans manipulation ou demande de service. Elle a Ocean, bien sûr, mais Ocean c'est pas pareil. Ocean, c'est comme une petite soeur, quelqu'un qu'elle a envie de guider, de protéger. Boris... Boris c'est peut être le meilleur ami qu'elle puisse avoir à l'heure qu'il est. Et avec cette pensée, elle reprend une longue gorgée de bière.

"Ecoute, ma grande" - Millicent lui lance un regard noir quand il se positionne devant elle et lui prnd les mains. A quoi il joue ? - "C'est pas moi qui devrais te dire ça, mais j'crois que, dans notre situation, ça compte plus trop, qui on était avant. Alors, oué, ok, j'suis là en mode "faut leur montrer qu'on a pas changé, qu'on sait toujours faire la bringue", mais le fait est que, pour eux, on est diff'. Alors j'ai limite envie d'te dire ; bah profitons-en pour faire table rase des vieux bails de quand on était encore des sorciers lambdas, tu crois pas? Parce que déjà qu'on est mis de côté, alors si en plus entre "mis de côté", on s'regarde de traviole, euh, on va crever seul, moi j'te l'dis!"

Millicent aurait presque envie de lui rire au nez mais surtout de se moquer d'elle même parce qu'au final, c'est ça la vraie solution non ? Oublier Millicent Bulstrode, l'héritière, la glaciale, la terrible qui savait où elle allait et qui, surtout pouvait y aller, et tourner la page. Tourner la page et accepter pleinement Millie la harpie, l'invisible, qui fait toujours aussi peur mais pour d'autre raison. "ça a l'air si simple dit comme ça," elle répond, l'air un peu triste, un peu déçu, parce qu'au fond d'elle, oublier ce qu'elle était avant elle ne veut pas. Elle donnerait tout ce qu'elle a pour retrouver sa vie, son statut, ses amis, même si tout ce qu'ils ont fait depuis la grande révélation c'est lui marcher dessus et lui cracher au visage.

Millicent n'a jamais vraiment été à sa place dans l'élite, pas comme Pansy. Elle était obligé de se battre, de faire peur, de jouer des coudes pour prouver qu'elle méritait sa place tout en haut. Mais elle avait fait ce travail parce qu'elle le voulait, plus que tout, parce qu'elle savait que c'était ce qu'elle méritait, avait assez entendu sa mère lui lui répéter pour l'internaliser. Alors aujourd'hui, plus bas que terre, elle veut cette place, ce droit, encore plus qu'avant et ça pourrait la rendre malade. Et c'est peut être pour ça, justement, qu'elle devrait écouter Boris.

"C'est ce que t'as fait toi ?" elle finit par demander, un peu plus fermement, chassant la moindre trace émotive de son visage, en rejetant ses cheveux en arrière d'un geste fier. "T'as réussis à faire table rase ? Avec ta brigade ?" elle ajoute avec un léger soupçon de venin parce qu'elle refuse d'être la seule à se débattre pour ne pas couler.

"Ça a l'air si simple dit comme ça..." répond Millicent, sans grande conviction. Tu as à ton tour un rictus un peu las, compatissant, vu que tu étais passé par là, toi aussi. "Ouais, nan, c'est grave la merde, hein, j'dis pas..." concèdes-tu en te rappelant tes douloureux débuts en tant que vampire, à te faire jeter de tous les lieux branchés de Londres, à te faire jeter par tes ami.e.s, par ta mère, comme on se lasserait d'un jouet trop usé, d'une mise à jour trop alambiquée.

Parfois encore, quand tu penses à Poudlard, ça te fait un pincement dans ta poitrine morte. Quand tu passes à côté des photos de promo, quand tu revois ton impeccable petite tête d'ange. Quelques photos de vacances, où t'avais la peau cramée à cause du soleil -le soleil. Plus encore que ton apparence qui s'était dégradée, c'était les sensations que tu avais perdues qui te manquaient le plus. Tu en avais acquise d'autres en échange, mais pouvoir soulever un magicobus, c'était rien face à l'appétit, face au soleil.

A force, ta nature résignée avait fait son travail, et l'exaspération, même si elle revenait de temps à autre et faisait bien rire la galerie, avait la plupart du temps laissé place à une nostalgie forcée. Tu avais baissé les bras, en fait, mais simplement parce que tu ne pouvais pas faire autrement; t'accrocher à qui tu avais été n'aurait servi à rien, et aurais fini par te perdre...
C'est peut-être ça, aussi, que tu veux expliquer à Milli.

Tu te redresses enfin, tes jambes interminables craquent contre la rigidité de ton pantalon d'uniforme. "C'est ce que t'as fait toi ? T'as réussi à faire table rase ? Avec ta brigade ?" Tu pouffes du nez, passes une main embarrassée dans tes cheveux (ça a moins de style que quand c'est Millicent qui rabat sa crinière en arrière). "Heee, bon, la Brigade, c'est un peu différent... Disons que j'ai... un peu rétrogradé, du coup, ils se font pas prier pour m'le rappeler... Mais c'est le taf, c'est pas aussi chiant que quand c'est les potes ou la famille, tu vois..." En parlant du loup (garou), il allait falloir que tu décampes pour retourner bosser. "Même si bon, ces derniers mois, mon cercle social se résume en effet à ces imbéciles de la Brigade... Tu comprends pourquoi j'ai b'soin d'changer d'air, un peu?" Milli n'avait pas besoin de bosser là-bas pour savoir que le service était un ramassis de butors sur son lit de privilèges.

Tu ramasses ta cape de fonction que tu lances sur tes épaules. "Faut qu'j'y retourne, mais promets-moi qu'tu vas réfléchir à c'qu'on a dit... On peut pas continuer comme ça, chacun dans notre coin; c'est trop con." T'as un sourire en coin qui semble gonflé d'espoir, en observant ton ancienne (et peut-être nouvelle) camarade d'infortune.

Millicent scrute attentivement le visage de Boris, guette la moindre réaction mais elle n'en est que plus frustrée de ne pas y voire la moindre marque de colère ou d'amertume. Elle pousse mais en retour, il n'y a pas la résistance qu'elle attend, dont elle a besoin.

"Heee, bon, la Brigade, c'est un peu différent... Disons que j'ai... un peu rétrogradé, du coup, ils se font pas prier pour m'le rappeler... Mais c'est le taf, c'est pas aussi chiant que quand c'est les potes ou la famille, tu vois..." "Je vois," Millicent répond, toujours aussi crispée. "Même si bon, ces derniers mois, mon cercle social se résume en effet à ces imbéciles de la Brigade... Tu comprends pourquoi j'ai b'soin d'changer d'air, un peu?"

Oui, elle le comprend. Et honnêtement, elle n'a pas le luxe de cracher sur la main que lui tend Boris. Jouer les difficiles, faire celle qui n'a besoin de personne, c'était un bon moyen de se protéger au début, histoire de leur montrer qu'au final, tout ça, ça ne l'atteint pas. Mais dans la sécurité de son appartement, seule face à Boris, elle se sent moins obligé de jouer à ce genre de petit jeu, a plus du mal à tenir la distance de façon crédible. Alors elle souffle, se détend (pour une fois) et acquiesce parce que oui, elle le comprend.

"Je comprend," elle le dit quand même à voix haute, parce qu'elle ne croit pas que les nouveaux pouvoirs de Boris inclus la télépathie. (Ou peut être que si, elle ne sait pas bien, ça a jamais été son truc les vampires.)

"Faut qu'j'y retourne, mais promets-moi qu'tu vas réfléchir à c'qu'on a dit... On peut pas continuer comme ça, chacun dans notre coin; c'est trop con."

Millicent le regarde remettre sa cape, sans dire un mot, sans même vraiment bouger. Elle est un peu sonné par la tournure de sa soirée, ne s'était pas vraiment attendu à une conversation soudain aussi sérieuse, avec Boris, qui plus est. Elle reste silencieuse un peu malgré elle, pour une fois. Parce qu'elle ne veut pas en rester là, a besoin de dire quelque chose.

"Boris, je..." elle se mord la lèvre, cherche ses mots parce qu'elle se sent déjà bête et ses joues chauffent avec la honte qu'elle n'a jamais réussi à contrôler. "ça m'a fait plaisir de te voir," elle ajoute, rapidement, presque trop rapidement. Son cœur bat vite, comme si elle venait de se jeter dans le vide. "Merci," elle continue, parce qu'elle ne semble plus pouvoir s'arrêter maintenant qu'elle est lancée. "d'être venu et puis pour ce que t'as dit. Je vais y réfléchir même si... même si je crois que t'as raison." Elle tente un sourire, malgré la sécheresse dans sa gorge et le sang qui tape dans ses oreilles. Elle acquiesce à nouveau, pour elle même, avant de conclure, "Alors je te dis à la prochaine ?"

Tu te vois encore faire le pied de grue devant sa porte, un peu plus tôt dans la soirée. Votre entrevue n’avait pas duré des heures, et pourtant, tu te sentais un peu bouleversé. Tu n’es pas très vieux, aussi, la nostalgie, c’était encore trop de ton âge. Jusqu’à présent, si tu remuais des souvenirs de Poudlard, c’était avec la distance et l’agacement un peu embarrassé de "oui, c’était moi le mec qui se cachait dans les casiers des vestiaires des joueurs de Quidditch, so what???", ou encore "et oui, c’était moi aussi qui me suis décoloré les cheveux après le décès de Cedric Diggory!!!! i was grieving, ok??!!!!"
Et il en allait sûrement de même pour Millicent qui, à l’époque, était une vraie terreur (pas forcément pour les bonnes raisons, mais tu restes persuadé qu’elle avait géré, et que ça lui allait presque bien au teint); la chute n’avait dû être que plus difficile, puisque de bully, elle était passée à bullied par l’intégralité de la société sorcière.

"Boris, je..." Tu lèves le nez de la boucle de ta cape que tu étais en train de fermer, la fixes un instant avant de décoller ton regard du sien, en y lisant un touchant embarras. Voir Millicent Bulstrode rougir était aussi déconcertant que de voir un dragon s’étouffer sur son en-cas ou que de remarquer un Mangemort renverser son café sur sa cape toute neuve. "ça m'a fait plaisir de te voir." Cette fois-ci, c’est à ton tour de rougir, bien que ça soit beaucoup moins visible, du fait de la lenteur des battements de ton cœur, ainsi que la pâleur de ton visage difficilement troublé, comme si une épaisse couche de lait recouvrait tes chairs. Mais on discerne l’embarras dans le petit sourire que tu adresses un peu par-dessus son épaule, affrontant difficilement son regard. "Ouais, bah pareil…" réponds-tu en te mordant un peu la bouche, réduisant ta lèvre à une fine ligne sur ton visage blafard.

"Merci, d'être venu et puis pour ce que t'as dit. Je vais y réfléchir même si... même si je crois que t'as raison." Et, constipé du sentiment que tu es, tu profites de son remerciement pour glisser une remarque blagueuse: "Hé! c’est pas faute de répéter que j’ai toujours raison!" Tu ricanes comme un adolescent. "Nan, j’déc’; ‘fin si t’as besoin de temps pour réfléchir, fais-toi plaisir. Techniquement, j’bouge pas et euh bah j’ai genre tout mon temps— c’est l’avantage d’avoir une longévité genre triplée." Tu tapotes la marque rouge sur ton visage.
"Alors je te dis à la prochaine ?" Tu ne sais pas quand tu as posé tes mains gantées sur ses épaules. Tu les presses un peu, et on sent que tu hésites à la prendre dans tes bras. Finalement, tu n’en fais rien, mais tu gardes tes mains un temps sur ses épaules. "Yes, on s’revoit vite!" Tu ranges tes longs bras sous ta cape et enfonces ton chapeau un peu sur ton front, ainsi que tes lunettes sur ton nez. Tu sors sur le palier, lui adressant un dernier regard teinté par tes verres rouges (un must-have pour les hémovores un tant soit peu à la mode, as in, Billy Barlow wouldn’t rock them as well as you). "Tchao, la terreur!" et de t’éclipser dans le bruit du craquement de l’escalier en bois agressé par tes talons, vaguement rongé par l'impression résignée que peut-être tu ne la reverrais jamais.