Une fois de retour à Murlough, Savage donna ses directives, et le cœur encore battant, fonça à la tente de Numa.

"How is he?" Comme toujours, le leader était réduit à une silhouette immobile, un amas de chair qui respirait tout juste, les yeux clos, son corps abîmé recouvert de la même façon par une Aoife attentive. "Better. Good, for now." Le regard d'Aoife revint s'ancrer au visage de la Halfer. "How did it go?" "We got the wolfsbane", répondit-elle d'un ton bourru et abrupt, les yeux rivés sur Numa, son poil se hérissant au souvenir encore frais de leur intervention musclée. Elle se détourna. "Thanks." "You're hurt..." "Leave it." Déjà à mi-chemin de la sortie, Savage dégagea brusquement la compassion de la potionniste. A l'extérieur, elle parcourut du regard les quelques silhouettes qui s'activaient aux dernières tâches, se détachant tout juste sur le petit jour qui pointait à peine.

Elle se sentit soudainement lasse, comme si son corps révélait d'un trait la lourde fatigue qu'il avait accumulé au corps de ces dernières heures. C'était le contrecoup de l'adrénaline, et de la retombée du concentré de potions qu'elle ingurgitait à chaque sortie – une pointe lancinante au cœur, qui ressemblait à de la mélancolie, l'étreignait alors immanquablement. Savage détestait ce sentiment de faiblesse soudaine, le feu de sa colère réduit à néant ; elle avait beau plonger en elle, remuer la hargne, la rancoeur, les injustices qui battaient encore contre sa chair, elle peinait à dégager du ravage de son esprit autre chose que quelques braises, les vestiges d'un incendie passé. Le sentiment fut d'autant plus fort, ce jour-là, que s'y mêlaient les réminiscences de cet été lointain, dont la douceur n'avait été jusqu'alors que teintée d'une légère amertume – celle qui voilait l'ensemble des souvenirs heureux d'une Diana qui n'existait plus.

Elle serra ses phalanges comme pour en chasser la douleur, battant contre sa chair et résonnant durement contre ses os. C'était l'autre symptôme suivant la disparition des substances dopant son système : la prise de conscience des coups et des blessures, qui brûlaient son corps avec d'autant plus de véhémence qu'ils avaient jusqu'alors été mis en sourdine par des nerfs endormis. Fucking shit. Elle souffla vainement sur les braises, qui se soulevèrent dans son estomac pour y retomber aussi sec. Pour distraire son esprit agité et anxieux, elle alla s'assurer que tout était en ordre, auprès de leur petite équipe. Puis elle rejoignit sa tente, et sitôt qu'elle se laissa tomber sur son lit, elle sentit un abattement lui tomber sur les épaules, casser sa nuque fragilisée par les événements de la nuit.

Elle avait fait ce qu'il fallait – ils avaient tous fait ce qu'il fallait. Elle, Riv, Fenrir – Cormac. Elle déglutit difficilement en revoyant l'éclat stupéfait dans ses yeux, sa baguette inutilement pointée sur elle, le visage ensanglanté. Quel con ; elle se serait sentie un peu mieux, s'il lui avait lancé un sort à la gueule le premier.
On repoussa l'ouverture de sa tente. Elle releva les yeux vers Rivage, sans solliciter le reste de son corps pétrifié par les retombées physiques et émotionnelles, un ersatz de gargouille figée au bord de son lit, le crâne écrasé par le poids trop lourd des conséquences de leurs actes. "All done?" Elle balaya rapidement son visage du regard, un mouvement qui manquait sensiblement d'entrain. L'épuisement était visible sur ses traits - quelque part, se dit-elle pour se rassurer, ils étaient tous logés à la même enseigne, ce qui les empêchait de se sentir complètement seuls, même une fois perdus dans le brouillard de l'après, quand n'existait plus la guerre ni les cris de la bataille.

Riv pouvait sentir la fatigue le prendre tout entier. What a fucking day. Les derniers jours avaient été particulièrement éreintants et cette soirée en particulier. Ils étaient revenu au camp, à l'aube d'une nouvelle journée, épuisés, ensanglantés pour certains mais heureux d'avoir pu prendre ce pour quoi ils avaient fait tout cela. L'aconite était une ressource précieuse et essentielle pour eux, et la voler à McLaggen n'avait rendu la chose que plus douce. Riv était quelque peu rancunier, il l'avouait sans problèmes. Il avait cru être ami avec son ancien camarade, quelques années auparavant, lorsqu'ils étaient à l'école, et cela avait duré jusqu'à ce que McLaggen fasse marcher son cerveau atrophié et réalise que Riv était un descendant de harpie. À partir de ce jour-là, Cormac ne lui avait plus parlé et Riv l'avait tout naturellement détesté. Le revoir n'avait fait qu'intensifier son dédain pour lui et la satisfaction de l'avoir mis plus bas que terre était belle et bien présente. Asshole

Il poussa un soupir las avant de se diriger dans sa tente, le poids de son arme lourd entre ses mains. Elle lui avait bien servi, encore une fois, mais ses coups n'avaient pas été sans répercussions. Les sortilèges avaient rapidement fusé, et certains d'entre eux avaient été touchés, d'autres s'étaient blessés de manière plus indirecte, attaqués par les morceaux de bois qui avaient explosé en leur direction ou par les retombées sur le sol dur du camp. Rien qui ne puisse être guéri  et les traces de sang séchés effacées d'un bref coup de baguette. C'était toujours comme ça, les blessures physiques étaient souvent effacées pour laisser la place à celles qui ne pouvaient être guéries si facilement, les souvenirs ancrés dans leurs esprits, la peur, la colère, l'adrénaline et l'épuisement qui allait avec tout cela. C'était ce qui était le plus douloureux, de ruminer sur tout ce qui n'avait pas été bien fait, tout ce qui aurait pu être mieux, tout ce qui aurait pu être évité, les pensées intrusives, les what ifs. Tout ce qui les gardait éveillés des heures durant alors que leurs corps était vidé de toute once d'énergie.

Il se dirigea lentement vers la tente de Sav. Ils passaient encore plus de temps ensemble, ces temps-ci, depuis qu'ils avaient discuté au coeur de la nuit. Quand il entra, Sav était sur son lit et son visage reflétait l'état général de leur groupe, le manque d'énergie évident dans ses paroles autant que sur son visage. "All done?" — "Yep", il avait répondu simplement, avant d'ajouter "move over" et de se laisser tomber sur son lit à ses côtés. Il ferma les yeux un instant, la tentation de se laisser prendre par le sommeil presque irrésistible. "Are you okay? Are you hurt?" Il demanda néanmoins, son visage se crispant en une moue soucieuse. "It was uh … intense, tonight," il murmura presque, comme si admettre cette vérité si imposante était un signe de faiblesse.

L'arrivée de Riv la força à se sortir de sa torpeur – un état d'apathie, suivant généralement les batailles, qu'elle détestait cordialement, comme toutes les choses qui lui donnaient l'impression d'être faible, inutile, un boulet rattaché aux pieds d'un Numa lui-même devenu un poids depuis de longs mois. Elle se décala pour le laisser s'installer, se penchant sur ses chaussures pour les défaire ; une vive douleur sur ses côtes ralentit brusquement son geste, lui arrachant le souffle. Sa fêlure avait été rapidement ressoudée par les sorts de Malee, mais les lacérations de Paws, quand bien même pansées par les onguents d'Aoife et les soins de la triton, dataient de la veille et avaient battu contre sa cage thoracique, comme cherchant à la déchirer encore, toute la nuit. L'agitation du jour avait rouvert les griffures fraîches (comme Aoife l'avait prédit), ravivé les brûlures, et les potions ingurgitées pour pousser ses capacités physiques rendaient le sang plus fluide – un effet qui pouvait s'avérer handicapant, voire dangereux, lorsqu'elle se retrouvait blessée.

Sav retira une première chaussure sans grâce, s'aidant de sa deuxième botte pour ce faire. "Are you okay? Are you hurt?" Elle lui adressa un rapide coup d'oeil, la mâchoire serrée pour contenir l'amertume qu'elle sentait fleurir dans la poitrine. "A little but I'm fine", répondit-elle en se penchant de nouveau pour enlever sa seconde botte. Si la brûlure dans sa chair l'incommodait, c'était le battement douloureux de son cœur qui la chiffonnait péniblement – la sensation vive des griffes de l'animal, ravivant de malheureux souvenirs, le regard incrédule de Cormac en la reconnaissant. "It was uh … intense, tonight." La deuxième chaussure valsa brusquement, et Sav défit la boucle de son étui à baguette, qui s'était contenté d'être, comme d'habitude, un malheureux bout de bois pendu inutilement à sa cuisse. Intense était le maître-mot de cette rencontre – cette attaque.

Elle serra les mâchoires, et releva son t-shirt maculé de transpiration et de sang pour constater les dégâts. Un filet de sang dégoulinait le long de son ventre, gonflé par les nombreuses entailles sur le chemin le menant jusqu'à son jean, dont le bord était maculé d'une tache plus sombre."These fuckers", siffla-t-elle en récupérant sa baguette – les sorts de soin n'avaient jamais été sa spécialité, et Sav était une sorcière médiocre, dont la scolarité magique avait seulement été sauvée par des matières annexes aux enchantements divers et variés. "Why do they have to cling onto this fucking stuff like their lives depend on it? A goddamn bag, some plants, fucking toilet paper and whatnot, what the fuck? When you see fucking armed hybrids coming to fuck you over, just fuck off." Et elle grogna un "collasanguis" en direction de ses entailles ; le sang se mit à coaguler et à brunir par endroit, une mosaïque incomplète qui suffirait pour cette nuit.

Riv l'observa en silence. Il pouvait sentir la tension qui s'échappait d'elle, comme si son corps n'était plus assez pour la contenir, comme si elle allait exploser à tout moment. Il serait là, et il espérait qu'elle en était consciente. Il avait fallu que tout cela tombe ce jour-là, of all fucking days. Personne ne l'avait mentionné mais Riv avait passé la journée avec la lourde conscience que c'était l'anniversaire de Sav. Il aurait aimé que les choses se passent différent, qu'ils puisse fêter cela, comme ils le faisaient tous les ans, tranquillement, sans les blessures et le sang.

"Why do they have to cling onto this fucking stuff like their lives depend on it? A goddamn bag, some plants, fucking toilet paper and whatnot, what the fuck? When you see fucking armed hybrids coming to fuck you over, just fuck off." Il ne pouvait pas voir son torse, mais il ne pouvait qu'imaginer l'état dans lequel il était, similaire au sien, couvert de bleus et de marques de leur bataille sanguinaire.

"They think they're untouchable. It's the Order after all, they do nothing and think everybody's fucking scared of them." Il lui répondit après un instant, le mépris évident dans ses paroles. Il les détestait, tous. Eux qui pensaient être de bons samaritains, qui pensaient faire le mieux possible alors qu'ils ne faisaient rien à part se tourner les pouces et mépriser les hybrides. C'était ça qui le dégoutait le plus, ils n'étaient pas anti-hybrides comme le gouvernement l'était, ils ne voulaient pas tous les tuer ou les réduire en esclavage, ils voulaient simplement les parquer entre eux, pour être surs que le reste de la société ne les voit pas, que personne ne sache où ils étaient et comment ils vivaient. Et ils agissaient comme si c'était la meilleure solution, la plus juste.

"And Mc-Fucking-Laggen is there, obviously. Protecting wolfsbane like his life depended on it and like he didn't fucking hate hybrids back then." Il avait du mal à contenir sa colère, le souvenir de McLaggen et ses amis, ceux qu'il avait croisé à Hogwarts et qui l'avait ignoré au mieux, rejeté au pire.

"At least we got what we came for, huh?" Il laissa une main se glisser sur son bras, là où il était sur qu'elle n'était pas blessée, le contact rassurant d'une certaine manière. Ils avaient eu ce qu'ils voulaient, ils étaient ensemble, ils étaient vivants, même si pas mal amochés. Peut être que la fin de la nuit leur serait plus douce. Peut-être même que Riv pourrait lui offrir son cadeau, qui patientait sagement dans sa poche. Il l'avait pris, au cas où, parce qu'il lui arrivait d'être optimiste, parfois.

tw : sexisme, homophobie

"They think they're untouchable. It's the Order after all, they do nothing and think everybody's fucking scared of them." Savage serra les mâchoires, laissant la colère couler librement sur elle, l'explosion chaotique de sa fureur transformée en un flot tumultueux, néanmoins moins propice à la destruction massive, sous le sentiment partagé de Rivage. C'était ce qu'elle avait aimé dès le début, chez lui, et ce qui l'avait fait revenir à lui en dépit de leurs disputes d'impulsifs ; Riv la comprenait, et portait le même regard sur leur ancienne affiliation – un choix qui se serait avéré terrible, si leur rancoeur commune envers l'Ordre n'avait pas en grande partie provoqué la création de la NSFW.
Sans eux, Sav n'aurait pas rencontré Numa ; et si elle se serait bien passée de la retenue de mijaurée d'Aoife, elle ne pouvait que reconnaître le rôle essentiel de cette dernière au sein de leur petit groupe.

Les plaies gauchement colmatées, un soin d'appoint en attendant d'affronter le regard trop bleu, presque globuleux sous l'inquiétude de la potionniste, Sav reposa sa baguette sur la table de nuit – deux caisses entassées l'une sur l'autre, transformées en meuble par les soins d'un des leurs autrement plus porté sur le confort que Selvaggio. "And Mc-Fucking-Laggen is there, obviously. Protecting wolfsbane like his life depended on it and like he didn't fucking hate hybrids back then." Sa nuque se raidit à la mention du nom de Cormac ; Sav braqua son regard sur Rivage, fronçant les sourcils en détaillant son expression courroucée, qui s'adoucit lorsque ses yeux croisèrent les siens. "What?" Back then? He hates hybrids? Un mauvais pressentiment s'empêtra dans les pensées confuses de Diana, tandis qu'elle tentait de comprendre comment Riv pouvait le connaître – et comment Cormac pouvait-il les détester quand il avait embrassé (certes maladroitement, mais avec beaucoup d'enthousiasme) les cicatrices argentées qui parcouraient son corps.

Le souvenir, encore trop vif après plus de douze ans, lui tira un long frisson à la teneur incertaine ; un profond sentiment d'inconfort, sans aucun doute, une gêne où elle ne voulait voir qu'une répulsion face aux gestes gauches et à la tiédeur fade de leur redite, quelques années plus tôt à Wolverhampton. "At least we got what we came for, huh?" Sav ignora la caresse sur son bras, et rabattit son tee-shirt en se tournant vers la harpie, repliant une jambe sous elle. "How do you know that fucker?", demanda-t-elle en détaillant le visage de son compagnon sous elle, avant d'ajouter avec une expiration moqueuse : "Did you shag him or what?" Sav se raccrocha à cette hypothèse en y plantant les crocs avec ferveur. Tout était possible, avec ces enfoirés de bisexuels ; peut-être qu'elle n'était pas la seule à partager la faute d'avoir frappé une ancienne histoire.

"What?" Riv observa le regard confus de Sav avec une confusion réciproque. Ce qu'il avait dit était pourtant bien simple. Mais il avait l'impression que quelque chose n'était pas normal, elle semblait réfléchir beaucoup trop pour une simple remarque sur quelqu'un qui n'était pas très important.

"How do you know that fucker? Did you shag him or what?" Il pouffa à l'expression moqueuse de son amie, Sav avait tendance à penser qu'il avait baisé beaucoup plus de monde qu'il n'était vrai. Et même si, à l'époque, il avait pu penser que Cormac était kind of hot, son attitude l'avait assez dégoûté pour qu'il ne veuille pas le toucher, à part d'un poing dans le visage, ou ailleurs.

"Come on Sav, you know I only shag the best, for guys at least, like Numa" il répondit, tout aussi moqueur. Toute occasion était bonne pour lui rappeler de son passé charnel avec leur leader, à une époque où il allait bien et pouvait être le leader et l'amant dont ils avaient tous besoin.

"But, in all seriousness, we used to be friends actually," il répondit finalement. Les souvenirs de ce temps là semblaient comme enrobés dans une épaisse couche de fumée, comme s'ils appartenaient à un autre temps, à une autre réalité même. C'était presque risible, en y repensant, de se dire qu'il avait pu être ami avec Cormac McLaggen et qu'ils s'étaient retrouvés, ce jour-là, à se battre l'un contre l'autre, défenseur d'une même cause, plus ou moins,  mais d'une manière complètement différente. "We were in the same year, same house at Hogwarts and we were friends for a few years." Il pouvait se rappeler des moments passés à discuter, à parcourir le chateau avec une insouciance bien caractéristique de l'enfance. Jusqu'au jour où tout avait changé, où Cormac avait connecté ses quelques neurones pour découvrir ce que beaucoup savaient déjà depuis un moment. "Until he figured out I was a hybrid and stopped talking to me." Comme ça, du jour au lendemain, sans explication, simplement motivé par la haine de ceux qui étaient différents de lui. Et il défendait maintenant l'aconite utilisée pour les loups, comme si tout cela n'était jamais arrivé. Riv avait du mal à croire que les gens pouvaient changer, il l'espérait, évidemment, mais que quelqu'un fasse tant de chemin en quelques années seulement était assez difficile à croire. Peut-être qu'il était tombé amoureux d'une hybride, et qu'ils voulaient maintenant les défendre corps et âme; ou que c'était juste les harpies qui ne plaisaient pas. Il poussa un nouveau soupire à ces souvenirs, Cormac avait laissé une marque bien plus importante qu'il ne l'aurait souhaité. Il avait brisé son coeur d'adolescent en ruinant une amitié qui s'annonçait pourtant plutôt bien. Il reposa son regard sur Sav, son expression confuse toujours présente dans son esprit. C'était étrange, qu'elle ait autant de question, elle aurait pu juste accepter que McLaggen était un connard et passer à autre chose. Il était confus, lui aussi, à présent. Tout cela n'était pas logique, à moins que quelque chose d'autre ne se trame.

"Wait … do you know that fucker? Do not tell me you fucked McLaggen." Fuck, ça n'était pas possible, s'il y avait une personne qu'il ne voulait vraiment pas imaginé dans le lit de Sav, c'était bien lui. Tout sauf lui.

"Come on Sav, you know I only shag the best, for guys at least, like Numa." "Fuck you Riv." Sav lui renvoya un regard noir, vif, les nerfs encore tendus sous la brusque montée d'adrénaline de la nuit et la fatigue terrible, l'agacement et le malaise, qui suivaient désormais la rechute. Comment pouvait-il se foutre d'elle en ces circonstances, et raviver la pointe aiguë d'une jalousie inavouée, qui la dévorait de l'intérieur ? Comment pouvait-il seulement plaisanter au sujet de Numa, quand ce dernier était réduit à un légume incapable de leur donner la guidance dont ils (elle) avaient besoin ? Elle aurait voulu lui faire bouffer son sourire, si indifférent à l'étau douloureux qui lui enserrait le buste, comme écrasant ses poumons et sa cage thoracique.

"But, in all seriousness, we used to be friends actually. We were in the same year, same house at Hogwarts and we were friends for a few years." Friends? Savage le détailla du regard un instant, comme pour se figurer sous quels angles lui et Cormac auraient pu s'entendre jusqu'à devenir des amis. Elle connaissait peu le McLaggen actuel, seulement par le bien d'une redite, une étreinte réchauffée qui avait achevé de confirmer que leurs atomes crochus ne s'emboîtaient plus comme ils avaient pu le faire, cet été-là ; elle pouvait néanmoins se figurer leurs sourires de crétins, et leur impulsivité commune. Le rebelle et le jock... En soi, ce n'était pas étonnant : avec les années, Sav avait appris que tout le monde semblait se connaître, dans ce microcosme sorcier qu'était Poudlard. "Until he figured out I was a hybrid and stopped talking to me." Les joues de Sav picotèrent d'une rougeur immanquable, un mélange de colère et de déception – celle de savoir qu'il ne décevait pas ses attentes de sale con, confirmées par les insultes carabinées qui résonnaient encore à ses oreilles. Monsters, reprobates. "He's a fucking asshole", cracha-t-elle en baissant les yeux sur son poing douloureux, le cœur fendu de ce qu'elle aurait aimé être uniquement de la rage – le seul sentiment qu'elle pouvait embrasser pleinement, une brûlure familière qui la consumait depuis des années, une protection contre le monde et le reste des inflexions dans son torse désespérément fragile. "Wait … do you know that fucker? Do not tell me you fucked McLaggen." Elle releva les yeux vers Riv, les sourcils froncés en une expression désagréablement surprise.

Le malaise qui dormait au fond de sa poitrine depuis que son poing s'était abattu sur la tempe de Cormac explosa à l'incrédulité suspicieuse de Rivage, son do not tell me qu'elle se prit en pleine figure – cette dernière se para d'un rouge colère, embrasant ses deux joues avec une violence à laquelle elle se raccrocha aveuglément. Tout était bon pour ne pas voir la culpabilité et le dégoût lancinants qui n'avaient dans leur guerre pas leur place. "Yeah, so what? It's a dick like any other", fit-elle sans sourciller, ses yeux rivés dans ceux de son amant. "You were fucking friends with the bastard, that's like a thousand times worse." Elle le toisa, lèvres pincées et yeux plissés, de toute la hauteur, et de tout le dédain, que lui conféraient leurs positions respectives. "Hope you had a blast tonight crushing his hybrid-hater face then."

tw : slight slut shaming

Sav reposa ses yeux sur lui avec une expression quasi imperceptible. Du moins, Riv pensait qu’elle l’aurait été pour quiconque ne la connaissait pas comme lui la connaissait. Mais cela faisait des années qu’il pratiquait Sav, des moins qu’il s’était surpris à l’observer plus intensément qu’auparavant. Il avait appris certaines choses. “Yeah, so what? It's a dick like any other” elle lâcha le plus simplement du monde, et le coeur de Riv rata un battement. Sav s’était tapé McLaggen. Et McLaggen n’était pas simplement un autre, pas pour lui en tout cas. C’était presque démesuré, et une partie de lui en était conscient, cette haine qu’il avait développé pour son ancien camarade. Cormac avait été la première réelle trahison, la première personne qui lui avait dit, droit dans les yeux, tout ce qu’elle pensait de lui et de son hybridité, alors qu’il pensait qu’ils étaient au dessus de cela, que Cormac n’était pas comme les autres. Il avait simplement surestimé son intelligence. En y repensant, il ne savait même pas comment Cormac avait tenu si longtemps, comment il avait fait pour ne pas se rendre compte, pour ne pas entendre les remarques qui fusaient à son égard. Il avait mis le temps et il y était arrivé, et il avait coupé tout contact. “You were fucking friends with the bastard, that's like a thousand times worse,” Sav continua et Riv ne put contenir la remarque qui lui échappa. “You had his fucking dick inside of you, nothing’s worse than that.” Ca n’était sans doute pas vrai, mais la logique avait laissé place au venin, McLaggen était un point sensible, depuis des années, et savoir que Sav et lui s’était connus était déjà difficilement supportable. “Hope you had a blast tonight crushing his hybrid-hater face then.” Riv délogea un instant ses yeux du regard méprisant de Sav pour lâcher un rire plus méprisant encore. “I did, actually, kinda wished we’d done more,” il repensa au visage hébété de Cormac, qui ne devait pas comprendre ce qui venait de lui tomber dessus, et à sa propre colère, qui avait pris le dessus. Il l’avait savourée, cette sorte de revanche, qui n’en était pas vraiment une, certes, mais c’était déjà ça de pris. Il secoua la tête un  moment, essayant de se sortir des souvenirs amer qu’il associait à Cormac. “When did it happen?” Il demanda brusquement, “you and him?” Ca ne pouvait être qu’à l’Ordre, vraiment,  Sav n’avait pas fait sa scolarité à Hogwarts, de toute façon. Elle était déjà hybrides, donc et Cormac savait dans quoi il s’engageait. Et lui savait qu’il n’avait pas le droit d’être aussi atteint par la nouvelle, ni ne serait-ce que poser la question, ça ne le regardait pas, après tout. Mais c’était Sav, et Cormac, deux personnes qui avaient laissé une marque sur lui bien plus importante que ce qu’il n’aurait jamais imaginé.

tw: crude language

"You had his fucking dick inside of you, nothing's worse than that." Les sourcils de Savage se froncèrent en une expression incrédule face à ce retour de flamme. "Are you fucking serious?", lâcha-t-elle devant les implications de cette remarque – qu'il était pire de s'être tapé Cormac quelques malheureuses fois plutôt que d'avoir été son ami sans se rendre compte qu'il désapprouvait foncièrement les hybrides. Et de lui en vouloir encore dix ans plus tard – fucking child, gronda-t-elle intérieurement en retraçant ses traits avec un semblant d'animosité, le symptôme de la blessure ouverte par la présence de McLaggen, des coups qu'elle avait dû lui mettre, détruisant par la même occasion la douceur des souvenirs qu'ils avaient partagé à l'adolescence. Désormais, ils étaient teinté de sang, et le goût de fer collait aux papilles développées de Sav, comme si elle avait directement goûté à la blessure creusée dans le cœur de Cormac (la sienne était masquée par le devoir, la haine, la légitimité de leurs actions terroristes). "I did, actually, kinda wished we'd done more." Si elle aurait, d'ordinaire, participé de bon cœur à ce feu de joie carburant sur McLaggen, le rire de Riv, maintenant, écorchait ses oreilles avec violence. Fucking stupid asshole. "When did it happen? You and him?" Savage serra les mâchoires. "Seriously?" Elle détestait se justifier ; d'autant plus depuis qu'elle passait ses journées à tenter de rendre légitime sa nouvelle position de leader. Le faire auprès de Riv, l'un de ses soutiens indéfectibles depuis les débuts de la rébellion de Sweet River, au sein de l'intimité sa propre tente, envoyait une onde de choc désagréable le long de ses nerfs tendus par cette nuit de violence– you had his fucking dick inside of you. Elle ne lui devait rien ; et ce n'était pas le statut fraîchement officialisé de leur relation qui y changeait quoi que ce soit. Riv prenait, à son goût, trop ses aises depuis qu'elle lui avait dit oui – et Savage commençait à regretter ce moment (de faiblesse, voyait-elle désormais) qui l'avait poussée à franchir cette barrière.

"What's it gonna change if I fucked him when we were twelve or last month?" Sa voix avait éclaté avec une force qu'elle n'avait pas prévu, résonnant à ses propres tympans au rythme de son sentiment d'injustice – Savage montrait immanquablement les crocs lorsqu'elle se retrouvait acculée au pied du mur. "It's none of your fucking business, what the fuck." Le malaise latent avait ressurgi, battant sous son cœur en folie, enserrant sa poitrine presque douloureusement. "I didn't know you were a fucking prick, getting jealous about dumb stuff that happened forever ago – about a dude we just fucked in the face literally. What the fuck dude?" répéta-t-elle en esquissant un mouvement de recul, le dégoût s'invitant sur ses traits incrédules et déroutés par cette conversation filant vers un horizon, avant de lâcher : "I don't even know if I want to fuck you anymore."

tw : crude language, feelings

Riv avait pu voir le moment exact où il était allé trop loin, affiché inévitablement sur le visage de Sav. Merde. Ils étaient à bout, tous les deux, il le savait. Les dernières semaines avaient été impossible et la fatigue accumulée, le stress, tout cela était destiné à exploser un jour ou l’autre. Il semblait que ça allait être ce jour. “It's none of your fucking business, what the fuck. I didn't know you were a fucking prick, getting jealous about dumb stuff that happened forever ago – about a dude we just fucked in the face literally. What the fuck dude?” Riv en aurait presque regretté ses mots, presque. Parce que ça le concernait, ils étaient supposés être ensemble, pour de vrai, et il avait besoin de savoir, que c’était réellement forever ago et que ça ne datait pas de la semaine dernière, que Cormac n’était pas une menace, pour eux, pour lui. “I don't even know if I want to fuck you anymore.” Riv avait esquissé un sourire malgré lui en la voyant reculer. Ses gestes étaient toujours si violents, et créaient toujours une tension sur son coeur qui semblait impossible à contenir. Mais il la connaissait, Sav, il savait comment elle était, il savait que tout cela n’était qu’une réaction à chaud. Mais ses réactions nourrissaient les siennes en un tourbillon désastreux. Et Riv se sentait petit, insignifiant, et il n’y avait jamais eu rien de pire.

“You know what, Sav? Maybe if you acted like you cared, once every fucking month or something maybe things would be different and maybe I wouldn’t get like this,” il lui cracha. Ca avait toujours été un problème, il en montrait trop et elle pas assez, et le mélange de leurs deux fonctionnements étaient un mélange plus qu’explosif. Les souvenirs, douloureux souvent, de leurs altercations passées refaisaient surface, alimentaient le feu de son indignation, et lui faisait dire tout ce qu’il allait sans doute regretter. “I’m in love with you, and I feel like you don’t give a shit about me, so excuse me if seeing you getting so upset about a guy I didn’t even know you knew sucks for me.” Il termina avant de se lever du lit, il ne pouvait pas rester, rester ne ferait sans doute qu’envenimer encore les choses. Il fouilla rapidement dans la poche de son pantalon, en sorti le paquet qu’elle contenait avant de le jeter en sa direction. Un petit balai en bois, qu’il avait enchanté (avec de l’aide extérieur, peut être) pour qu’il puisse voler en direction de ce qu’elle souhaiterait, que ce soit des objets perdus ou un chemin inconnu. “Happy fucking birthday to you, Diana.” C’était pire que n’importe qu’elle insulte qu’il aurait pu utiliser. Il ne lui lança pas un autre regard et sorti en claquant métaphoriquement la porte derrière lui. Fuck her.