Tout le monde est très occupé en ce moment, du coup Lee se retrouve avec encore plus de travail que d'habitude. En temps normal, il éviterait de s'en plaindre... mais quand même. Dennis abuse, son téléphone sonne dans le vide depuis quelques jours, il a encore dû se terrer dans un coin et il va falloir que Lee le trouve avant que Sofia s'en rende compte pour lui éviter une sacré raclée. Comme d'habitude.
Lee est emmerdé, non pas parce qu'il aimerait moins travailler et être moins fatigué et moins chargé et moins épuisé en général, non. Ça, il y est habitué. Non, il est emmerdé, parce qu'il aimerait passer plus de temps avec Flora. Parce qu'il l'aime beaucoup Flora, elle l'aime beaucoup en retour, et ils peuvent passer des heures à parler, de tout et de rien, lui s'endormant parfois sur ses genoux quand elle lui lit un livre, quémandant quelques baisers pour la faire sourire quand elle boude parce qu'il passe le plus clair de son temps à pioncer qu'à être avec elle, dans le secret de cette chambre sous les toits qu'il a aménagé pour elle.
Son coeur se gonfle en pensant à elle. C'est un sentiment qu'il n'a presque jamais connu, pas comme ça en tous cas.

Lee est heureux, ces temps-ci; mais il l'est un peu moins quand il transplane, son énorme sac à dos sur le dos, et se retrouve au milieu d'un camps déserté. Il fronce les sourcils, met une main au-dessus de ses yeux comme pour bloquer le soleil tapant au zénith aujourd'hui. "Alasdair?" appelle-t-il. Il se trouve dans un petit camp normalement plein de vie, une dizaine de personnes tout au plus, sauf qu'il n'y a... personne. "Cherry? Where--" Il voit l'ombre du coin de l'oeil et son instinct prend le dessus. Lee se recroqueville sans réfléchir alors qu'on essaye de lui sauter dans le dos, et se transforme dans un mouvement souple et presque naturel pour lui; là où se trouvait un homme à l'air confus, un lynx demeure désormais, esquivant sans mal les bras patauds tentant de se refermer sur lui.
Ils sont trois, deux de trop. Le lynx se met à feûler en reculant, profitant de l'effet de surprise pour seize up ses adversaires. Il faut qu'il ait le temps de se retransformer pour transplaner.

Il pense à tout ça jusqu'à reconnaître le visage d'un des trois. La petite queue du lynx s'immobilise et puis son corps s'agite, tremble, jusqu'à ce que Lee puisse faire face à Diana, l'air ébouriffé et mécontent. Sa baguette est apparue dans sa main en même temps qu'il s'est re-transformé, mais il la garde pointée vers le sol pour le moment. Ils sont trois, toujours deux de trop. Il se demande ce qu'ils ont fait des autres. "You don't want to do this, Diana," dit-il d'une voix étonnament très calme, aux antipodes de son corps rigide aux muscles tendus. "If you go now, I won't hurt you and I'll make sure you're not followed." Sa voix placide résonne d'une confiance impitoyable en ses propres capacités. Il sait très bien qui ils sont, et à quel point ils sont dangereux, mais Lee n'a pas peur pour autant. Il plisse légèrement des yeux. "Think," lui intime-t-il avec un grain de bienveillance. "You really don't want to do this."

tw: crude language, violence


"Fucking hell, there's nothing here", constata Savage après avoir retiré le bandana qui lui recouvrait le nez – un tissu enduit d'un sort barrière contre les gaz des fumigènes d'Aoife. "It's not that bad." "It's not enough", siffla la Halfer en constatant la quantité de nourriture bien en-deçà de ses espérances : de plus la majorité de la nourriture était en conserve, quand elle avait espéré trouver un peu de viande séchée (on aimait chasser et se faire des bons petits plats, à l'Ordre – elle se rappelait encore certains repas opulents, du temps de Wolverhampton) et des légumes frais pour les quelques harpies sous son commandement.

C'était ce qui arrivait, quand on tombait sur les planques au hasard : on n'était jamais certain de trouver ce que l'on cherchait, particulièrement depuis que Wolverhampton, première source de vivres (néanmoins beaucoup trop bien gardée), avait éclaté pour laisser place à de multiples refuges à la taille plus modeste.
Il leur faudrait peut-être faire un détour à Sweet River, pour renflouer les stocks.

Un craquement sonore interrompit le pillage, effectué grossièrement de la pointe de sa baguette ; Savage raffermit la prise sur son arme, les sens aiguisés par la potion qu'elle avait ingérée avant de foncer (ce n'était, pour une incursion discrète, et de cette taille, pas forcément nécessaire – mais son corps et sa magie étaient ses seules armes, et sans le souffle des Potions d'Aoife, Savage se sentait nue sur le terrain). Ils déboulèrent à l'extérieur ; et elle put distinctement voir Lee Jordan, avant qu'il ne se transforme en lynx furieux, glissant entre leurs mains et leurs sorts bazardés à la volée. Fucking cats.

"You don't want to do this, Diana." A l'emploi de son prénom prohibé avec désinvolture, elle sentit ses muscles se tendre. Elle détestait Lee pour son ton sirupeux et son calme olympien, cette apathie programmée dans laquelle il se réfugiait pour ne prendre position sur rien. "Pretty sure I do", répondit-elle, les mâchoires serrées par une nervosité grandissante ; la présence inattendue de Lee, le sac de provisions supplémentaire à ses pieds, les effets de la potion dans ses veines. "If you go now, I won't hurt you and I'll make sure you're not followed." Quel con ; devant son ton condescendant, comme s'il s'adressait à des gamins turbulents qu'il était aisé d'amadouer, elle poussa une expiration faussement amusée – amère, pleine de mépris envers Jordan. "Think. You really don't want to do this." "Oh, golly. You seemed more aptycock as a lynx, lad." "The fuck?" L'intervention de Baruch ne s'était pas arrêtée à ce vocabulaire alambiqué dont elle ne comprenait goutte ; il s'était rué sur le sorcier, et Savage s'était avancée trop tard – il lui avait déjà éclaté le nez, fort de réflexes surhumains. "Fucking back off, Baruch!" Elle vint repousser le torse du vampire de son bras, dardant sur lui un regard furieux en l'écartant de sa victime. "What the fuck you think you're doing?" fit-elle comme si elle n'avait pas eu la moindre intention de mettre elle-même un coup à Lee et à sa bienveillance poisseuse, qui avait du temps de Sweet River rampé sous sa peau comme une maladie doucereuse. "Know your fucking place." Et ses yeux retombèrent sur Lee, fronçant les sourcils devant le filet de sang qui s'échappait de son nez blessé.

"Leave the damn bag and fuck off, we're in a rush", menaça-t-elle, aux antipodes de la douceur avec laquelle il s'était adressé à eux.

tw: crude language, violence, blood

« Oh, golly. » Les yeux de Lee se détachent à contre-coeur de Diana, ses sourcils se fronçant un peu sur son front. Si il reconnait sans mal Aoife restée en arrière, l'air incertain, il ne reconnait pas ce lui-là. Sa tenue digne d'un western Clint Eastwood et son accent dyschronique ne laissent pas grand chose à deviner sur sa nature. Diana est donc toujours aussi bien entourée... « You seemed more aptycock as a lynx, lad. » Lee n'a pas besoin de se poser la question de ce qu'il est en train de dire que le vampire se jette en avant et, avant qu'il ait le temps de réagir, lui attrape le poignet. Le sort qu'il était sur le point d'incanter meurt sur ses lèvres quand la tête de Lee rebondit avec violence sur l'autre main de l'hybride.
Foudroiement. La douleur explose dans le crâne de Lee, en même temps que son nez se brise net sur le coup. Les yeux de Lee se renversent dans leurs orbites, pendant un bref instant le monde n'est que douleur. Douleur et sang, un sang poisseux qu'il sent inonder le bas de son visage, imprégner sa barbe; dans le fond de sa gorge, aussi, ce goût ferreux et désagréable du sang. Ce n'est pas la première fois que Lee se bat à mains nues, mais il ne l'a jamais fait avec un hybride, un vampire de surcroît. Il a l'impression d'avoir eu un accident de balai. "Fucking back off, Baruch!" Les mots lui parviennent à peine, ses oreilles sont en train de sonner alors que ses pensées essayant désespérément de trouver à quoi s'accrocher.

Lee se sent lâcher, et parvient à peine distinguer Diana qui repousse le vampire, Baruch. Lee gémit malgré lui, levant une main en direction de sa blessure, hoquetant sur son propre sang et parvenant à en cracher une partie dans l'herbe. "What the fuck you think you're doing?" Sa main tremble, couverte de son propre sang. La douleur est aveuglante, assourdissante.
Furieuse. Cette douleur est furieuse. "Know your fucking place." Lee se redresse un peu, sonné et furieux, dardant désormais Diana d'un regard noir. "Leave the damn bag and fuck off, we're in a rush." Trêve de discussion, donc.

En repoussant le vampire, Diana s'est légèrement intercalée; Lee espère que ce sera suffisant pour qu'il ne soit pas en mesure de l'attaquer trop vite. "Terrae Motus." Sa voix est déformée, alors qu'il se transforme en même temps que le sol sous eux se met à trembler puis à s'agiter comme si il était fait de vagues violentes et non de terre. Lee se sent lâche mais, en désespoir de cause, attrape la bandoulière de son sac et se détourne pour se mettre à courir le plus vite possible dans l'autre sens, son coeur battant la chamade dans sa poitrine.

tw: crude language, violence, blood

« Fucking back off, Baruch! » Il éclate de rire et se laisse pousser sans opposer de résistance lorsque la Halfer s’interpose entre lui et l’Animagus, lâchant son poignet dans le mouvement. L’odeur ferreuse du sang lui monte aux narines et au cerveau en une fraction de seconde comme le ferait la meilleure des drogues, aiguise ses sens surdéveloppés, creuse l’appétit impossible à satisfaire. « What the fuck you think you're doing? What are you doing ?, retourne-t-il, alors qu’il trouve définitivement plus surprenant qu’elle l’empêche de tabasser un membre de l’Ordre du Phénix que le contraire. Know your fucking place. Oh, great. Encore une affaire de louvette attachée à la hiérarchie. Il n’en sera jamais sauf. For something called “No Safety For Wizards”, there is an awful lot of safety involved », ironise Baruch en léchant le sang chaud, frais, qui a généreusement coulé le long de son gant jusqu’à son poignet.

Il l’aura eu, son nipperkin de sang.
Il sait bien que ça n’aurait jamais été assez.

Diana tente une dernière fois de parlementer, d’avoir ce qu’elle désire de la façon pacifique, et le vampire n’a pas besoin d’un quelconque troisième oeil pour prédire la suite. Il ne peut pas comprendre le sort lancé par le jeune homme, mais l’effet est immédiat. Baruch s’accroupit pour abaisser son centre de gravité, pour ne pas tomber alors que le sol tremble sous leurs pieds, puis se transforme en mer violente. Ses doigts frôlent la terre, ses yeux ne quittent pas la silhouette qui s’enfuit à l’opposé de leur trio, le lynx sautant avec agilité entre les langues herbeuses qui se soulèvent en vagues menaçantes. « There he goes. » Presque déçu de constater que les parlementeries inutiles de l’humain et de la Halfer n’ont pas eu l’effet désiré, d’un côté comme de l’autre. Déçu de lui-même, d’une certaine façon, alors qu’auparavant, il aurait été le premier dans la position raisonnable et pacifiste. Le monde a bien changé, toutefois, et Baruch n’est plus uniquement un vampire.
Il est un limier.

« I will let you secure the bag, dearests », assure-t-il avec un clin d’oeil aux deux jeunes femmes, avant de transplaner et de réapparaître plus loin sur la terre mouvante, presque au niveau d’où le fugitif est rendu. L’odeur du sang un marquage impossible à cacher pour le sorcier affamé, pour l’animal qui saura toujours se repérer tant que l’autre portera ce parfum délicieux. Il a promis à Diana de ne pas mordre, mais il n’a pas promis de ne pas jouer. Derrière les verres fumés, les prunelles devenues immenses jusqu’à ne laisser de ses iris qu’un mince croissant sombre. « Secare Profundus. » Le lynx saute, évite de justesse l’éclair rougeoyant, ne laissant que quelques touffes de poil flotter dans l’air, là où le sort a rasé une ligne nette sur le dos de la bête. Et le vampire à nouveau de disparaître.

tw: crude language, violence

Le sol se souleva brusquement sous leurs pieds, emportant avec lui un Lee agile et rapide en dépit du violent coup qu'on lui avait administré. Sav se ramassa souplement, son équilibre et sa vivacité décuplées par la potion dans ses veines, attrapant le bras d'Aoife qui tanguait au passage – des années de surf à Pholobos Bay lui permirent de dompter la vague de terre sans trop en souffrir sur l'instant.

C'était de la faute du vampire : à lui répondre, il avait détourné son attention de Paws juste assez pour qu'il leur échappe.

Avec sa nonchalance et ses sourires d'intouchable, Baruch lui portait sur les nerfs depuis son arrivée. C'était le souci, dans leur meute : entre les vampires tricentenaires et les vieux Alphas, on se devait de tenir la bride avec une fermeté que Sav confondait parfois avec une violence pure – et souvent inutile, au-devant de ces personnalités qui avaient vu, au minimum, le double d'années qu'elle.
Numa aurait su faire ; Numa aurait su lui parler, éviter les remarques épineuses de Baruch ou à défaut, finir par calmer ces insubordinations qui n'avaient rien à faire sur le terrain. Cette certitude fit d'autant plus bouillir Sav, au devant du regard sombre de Baruch, peu impressionné par son intervention – au moins n'avait-il pas bouffé Lee, aurait-elle dû se dire. Mais ce n'était pas là son problème : Sav voulait lui faire manger la poussière, et lui apprendre qui était la cheffe.

Rien à voir avec un flagrant complexe d'infériorité, ou l'impression de perdre pied depuis qu'on l'avait placée à la tête de leur bande.

"I will let you secure the bag, dearests." Le clin d'oeil acheva de la mettre dans une colère noire. "Fucking asshole", siffla-t-elle entre ses mâchoires serrées, à l'emplacement où Baruch se trouvait encore une seconde plus tôt. Elle allait se le faire, elle allait lui en foutre plein le cul, du risque et du danger. "You get the fucking bag", ordonna-t-elle à Aoife sans un regard, en sortant sa baguette. Puis elle transplana sans demander son reste.

Une première fois, juste à côté du lynx, qui bondit sous l'éclair rouge lui filant sur le dos – la deuxième fois, elle rajusta sa trajectoire, et apparut sur la route de la bête, qui fit aussitôt mine de bifurquer vivement. "Lux Fugax." Sa baguette produisit un puissant flash, comparable à celui d'un appareil photo faisant la taille de la lune. Et sans attendre Sav, à moitié éblouie par son propre sort, pivota pour prendre son élan et décocha un coup de pied direct pour cueillir l'animal.

tw: violence

Le lynx file entre les vagues de terre se soulevant sous ses pattes, déséquilibré parfois par le sac dont il tient toujours férocement la bandoulière entre ses crocs, qui rebondit et s'accroche mais qu'il ne peut pas abandonner, qu'il refuse d'abandonner.
L'humain laisse complètement place à l'animal, habitué après tout à y passer des jours entiers: il y a quelque chose de presque rassurant à mettre ses pensées et soucis et de côté pour se concentrer sur son instinct, des perceptions tellement impossibles à comprendre sous forme humaine. L'animal saute et court et chercher une voie de sortie, se dirigeant lentement mais sûrement vers la lisière de la forêt où il sera plus simple de se cacher; quoiqu'il n'ignore pas que le sang qui a durci sur les poils de son museau et qui en coule toujours abondamment incitera le vampire à le suivre.

L'animal saute sur le côté et se met à filer dans l'autre direction à l'apparition dudit vampire sur sa route, et se contorsionne pour éviter le sortilège brûlant; un gémissement sourd lui échappe, quoique ses crocs ne se décrochent pas de la bandoulière en cuir, et il bifurque toujours dans la direction générale des arbres pour filer. La conscience émoussée de l'humain lui souffle que, peut-être, si il tarde assez, alors les autres se réveilleront et viendront l'aider. Le lynx, lui, laisse son instinct décider pour lui.
Une autre silhouette, un flash, nouvelle contorsion fluide et en plein saut entre deux mottes, une botte qui s'écrase dans son flanc. Pas le choix, cette fois, il rugit de douleur en s'écrasant parterre, une ou deux côtes cassées déjà, l'anatomie féline n'étant pas faite pour survivre à de telles attaques. Le sac finit quelque part dans la terre, mais il n'y fait pas attention.

L'instinct lui hurle de se remettre à courir, de laisser le sac, et d'abandonner. Un lynx sait choisir ses combats, et il sait qu'il va perdre. Cette fois Lee laisse un peu de l'humain revenir, et se convainc de, énormes pattes à peine posées sur le sol, sauter en avant malgré les tâches noires de sa vision.
Ses griffes attrapent un morceau de chair, mais il n'essaye pas d'attirer son adversaire au sol avec lui, il sait que c'est inutile: il pèse à peine vingt kilos sous sa forme animale. Alors à la place, les pattes bougent aussi vite que possible, remontent des jambes aux hanches au ventre, lacérant tout ce qui passe dessous avec violence alors que lynx essaye de se hisser à la gorge de Diana pour la lui arracher avec ses crocs.

Ses griffes profondément enfoncées sur sa taille sont brusquement arrachées quand il sent un sort le cueillir de plein fouet et l'écarter brusquement de sa victime. Il vole avant de s'écraser dans un bruit de craquement d'outre-tombe sur le sol: le reste des côtes de son flanc gauche. Il rugit, il vocifère, il hurle à la douleur, il grogne, il se débat mais rien n'y fait: la baguette pointée sur lui d'Aoife le maintient au sol, aux prises avec des liens invisibles. "I-I-I have the bag - Sav, are you okay?" entend-t-il entre deux filets de douleur, le faisant se débattre de plus belle et lentement se retransformer dans l'espoir d'attraper sa baguette.

tw: violence, sang

La bête a évité son sortilège, mais n’évite pas le coup de pied de Diana qui l’arrête en pleine course. Le Lux Fugax l’a tout autant surpris et même bien abrité derrière ses lunettes de soleil, le vampire a besoin de quelques secondes pour se remettre de la lumière vive. Quelques secondes bien suffisantes pour que l’Animagus se jette sur leur cheffe, avant que les deux autres hybrides présents puissent réagir.

Les sorts d’Aoife et lui se conjuguent et cueillent le lynx au ventre, l’expédient bien plus loin que prévu, avec une violence non négligeable. Le craquement est nettement audible pour ses oreilles sensibles, annonciateur des blessures qu’ils ne peuvent pas voir.

L’odeur du sang de Diana est aussi douceâtre que répugnante, sa nature de Halfer teintant l’hémoglobine qui aurait autrement été si délicieuse. La moitié humaine suffisamment forte pour aiguiser son appétit, néanmoins. Une part mesquine de lui, aussi, qui se dit que Diana comprendra ainsi peut-être sa bêtise de ne pas avoir mis le Phénix hors d’état de nuire lorsqu’ils en avaient l’occasion, au lieu de papoter. « I am watching him », assure-t-il à Aoife, pointant sa propre baguette sur le lynx pour prendre le relai, pendant que la potionniste se penche sur Diana pour vérifier son état. L’animal n’a pas raté son coup, dans sa fureur, et la terroriste n’en récoltera sans doute que davantage de cicatrices. Davantage de trophées à exposer, obtenus sous les griffes d’un de ses anciens alliés. L’ironie ne le quitte guère. Baruch s’avance et s’accroupit aux côtés du félin, de la créature mi-humaine, mi-animale, qui se tortille en vain contre le sol, se bat contre les liens magiques et invisibles qui l’immobilisent, et guette la transformation totale.

Dès que le sorcier a entièrement quitté l’épaisse fourrure grise et rousse, un simple « Accio wand » règle le problème de cette main qui glisse centimètre par centimètre vers sa baguette. Le bois d’ébène est presque tiède, sous ses doigts froids. « You will not need that », assure-t-il avec douceur, empochant l’arme à l’intérieur de ses longs vêtements. Il pourrait la briser, sous son regard impuissant, et prendre plaisir à voir la rage se dessiner sur ses traits, rugir dans sa bouche. Ou tout simplement partir sans la lui rendre. La patiente Lady Di ne risque pas d’être d’accord avec cette initiative non plus, bien tristement… ou elle voudra le faire elle-même, qui sait ? Il n’est pas contre admirer le fruit de sa propre colère et d’un désir de vengeance dont il ne peut pas deviner toutes les ramifications. Puis, avoir quitté les rangs de l’Ordre du Phénix ne signifie pas qu’ils doivent entièrement les saboter.
Juste assez.

« If I could, I would drink you dry », souffle-t-il, non sans regret dans sa voix et sur ses traits à demi dissimulés. Il se relève et appuie son pied sur les côtes cassées, et lentement y met son poids, ses yeux sombres fixés sur le visage tordu de douleur. « What do you want to do with this lad ? », lance Baruch aux deux dames. Le laisser partir si simplement, à peine amoché, dépouillé de ses biens ? Ou lui laisser quelques souvenirs supplémentaires de leur entretien ?

Ils étaient sensés endormir le camp, attraper les ressources et se tirer - Aoife avait voulu rester un peu étudier les effets de sa potion sur les membres de l'Ordre, et Sav comme d'habitude avait voulu se plaindre que ce n'était pas suffisant. Rien n'était jamais suffisant à ses yeux, de toutes manières. Au moins, Baruch était présent et apportait un peu de légereté à la situation - et un eye candy très apprécié par Aoife.
La situation dérape avec l'arrivée d'un membre de l'Ordre - et pas n'importe lequel, Lee.

La baguette d'Aoife tremble légèrement alors qu'elle maintient avec l'aide de Baruch le lynx au sol. Elle l'a vu à de nombreuses reprises sous cette forme, à Sweet River surtout quand il venait tenir compagnie aux loups se transformant lors des pleines lunes. Il fait partie de l'Ordre, il est un traître à ses propres idéaux, un énième soldat aveugle et inutile qui mériterait mieux de rester sur la touche. Aoife n'aime pas voir un ancien ami souffrir, mais elle aime encore moins ce qu'il représente. Elle ignore si il mérite de souffrir ainsi, mais elle espère que ça pourrait lui faire ouvrir les yeux sur la triste situation de l'Ordre... « I am watching him. » Aoife ne se fait pas prier et sans un regard pour Baruch, se jette sur Sav. "Oh dear." Elle pince des lèvres en plongeant la main dans la sacoche qui ne quitte pas sa hanche quand Sav l'emmène en mission - de quoi la doper un peu plus au besoin, et de quoi aussi gérer ces situations.

Elle vide une fiole de regénération sanguine dans la bouche de Sav avant de s'emparer d'un contenant de dictame qu'elle vide sur les blessures de Sav, les regardant se résorber à un rythme bien trop lent. "Stop moving, Sav, for Pete's sake!" Elle pose une main sur la clavicule de Sav pour l'empêcher de se relever trop rapidement, jetant un regard paniqué à Baruch et à Lee qui se tortille toujours en se transformant de nouveau en homme. Elle est soulagée de voir sa baguette voler en direction de la main du vampire et relâche un peu sa pression sur le corps de Sav, surtout en voyant ses épaisses plaies se recoller lentement, de profondes cicatrices à vif et menaçant de se ré-ouvrir apparaissant à leur place. Elle la laisse se relever et rassemble un peu ses esprits et ses fioles vides avant de se relever à son tour, plongeant déjà la main dans sa sacoche pour préparer une nouvelle potion de Vigueur, au cas où. « What do you want to do with this lad ? » Aoife jette un regard en coin à Sav. "He's- he hasn't done anything, I have the bag, let's go." Elle se penche pour ramasser le sac en question, essaye vainement de gommer les accents désespèrés de sa voix pressante. Lee ouvre la bouche et Aoife n'hésite pas à pointer sa baguette sur lui, au cas où il aurait la mauvaise idée d'empirer sa situation: "Silencio! Let's just go, he's not worth our time, this is- this is Paws we're talking about." Elle se mordille la lèvre en cherchant le regard de Sav, effrayée à l'idée d'y trouver le même grain de folie que chez les Rosier. "We have everything we came here for, let's go."

tw: crude language, violence, blood

"Fucking shit!"

Lee évita souplement son coup de pied, et se jeta sur elle toutes griffes dehors.

Le souvenir écrasa brusquement la réalité à la douleur, et un un instant, le lynx disparut au profit de deux yeux de loup, ses moustaches remplacées par une gueule où luisait une rangée de crocs blancs. La peur au ventre, Sav dégagea un coup de coude dans la tête du félin ; ce dernier s'accrocha à ses flancs, les lames de rasoir s'enfonçant dans son ventre avec une douleur vive, saignant sa chair. Sav l'attrapa par la peau du cou, sa baguette lâchée sous le choc (elle ne l'utilisait au final que peu, pendant les assauts), et se débattit avec lui jusqu'à ce qu'un sort ne fuse brusquement, cueillant la bête – envoyant Sav, sous le choc, cul à terre.

Le temps s'arrêta une brève seconde. C'était comme si sa peau était ouverte, la chair à vif sur l'ensemble de l'avant de son corps, une brûlure où même le contact de l'air lui était insupportable. Sav se retint sur un coude, brisant la bulle créée par le choc, cillant à répétition pour clarifier sa vision, et voir que Lee était au sol, sous le regard de Baruch. Si ce con de suceur de sang n'avait pas commencé à trancher dans le lard, avant ses ordres – "Oh dear." Tandis qu'Aoife fouillait dans sa sacoche, le regard de Sav coula sur ses blessures ; une marée de rouge, répandant une odeur métallique à son nez de louve. "I fucking hate cats." Elle avala la fiole qu'elle lui tendit, avant de ronchonner en sentant la main sur son omoplate. "Stop moving, Sav, for Pete's sake!" "Fuck your Pete", cracha-t-elle en retour, avant de serrer les mâchoires sous la morsure du dictame. Elle n'attendit pas que l'ensemble des blessures se résorbent parfaitement pour se relever, sentant des filets de peau se tisser pour recouvrir à vitesse grand V la chair exposée.

"What do you want to do with this lad?" "He's – he hasn't done anything, I have the bag, let's go", intervint Aoife tandis que Sav se redressait, sa baguette en main. Ses yeux coulèrent jusqu'à Lee, qui avait pris forme humaine et fit l'erreur d'ouvrir la bouche. "Silencio! Let's just go, he's not worth our time, this is – this is Paws we're talking about." Sav fronça les sourcils, n'accordant qu'un bref coup d'oeil à Aoife. "So what?" Paws avec qui ni Savage ni Numa n'avait su s'entendre ; elle avait toujours trouvé sa forme de lynx stupide et particulièrement inadaptée, un OVNI au milieu des loups les nuits de pleine lune – son calme légendaire passait pour une apathie patentée aux yeux de Sav. C'était un humain, un sorcier lambda, qui comme les autres, ne comprenait pas leur cause. "We have everything we came here for, let's go." "You're a fucking pain in my ass, fucker." Les yeux de Sav étaient rivés sur Paws, ignorant délibérément la panique de la Selkie à ses côtés. "Fuck him up", et son regard, brûlant d'une colère froide, remonta jusqu'à Baruch ; elle avait l'intention de ne pas en perdre une miette, et de regarder jusqu'au bout.