Only chains and broken bones
Ain't got no place to call a home
So come on Lord, what you waiting for?
The devil's going to make me a free man
The devil's going to set me free

Minuit tombe sur la ville, la couvrant misérablement de son halo de désespoir et traînant les dernières âmes vives assez folles pour se perdre dans les ruelles ténébreuses vers le purgatoire. Le monstre vire et chavire dans le silence et la pénombre, se perd et flâne dans les veines les plus sordides et putrides de Londres. Son sifflement, aussi angoissant que terrifiant, résonne dans un écho glaçant. Macabre symphonie qui l’accompagne et se perd dans l’obscurité comme un souffle honni.

Un léger tremblement continue de s’emparer de sa main, la faisant tressauter pendant le reste du chemin. Le roi des enfers a l’habitude de sentir sa chair frémir après qu’elle ait ôté la vie. Des pensées clairsemées viennent secouer ses pensées, réminiscences de la soirée venant de se dérouler. Les images s’enchaînent et se déroulent dans un fil sanglant, il revoit sa proie au sang impur le fuir, sa silhouette longiligne se perdre dans la sylve dans l’espoir de ne pas périr, puis, dans un geste désespéré, sa baguette se tourna vers Dante, mais l’éclat émeraude du sort fatal vint bientôt la frapper. La poupée est tombée et ne se relèvera plus jamais. Le sort s’est perdu qu’il dira, le sort a eu celle qui le méritait qu’il assurera. Une âme de plus qu’il envoie dans les tréfonds des enfers, alors que jour après jour, la sienne se déchire et se morcèle. La culpabilité ne vient pas hanter le handler, au contraire, il n’a de cesse d’être fasciné par ces pantins désarticulés à qu’il ôte la vie avec une facilité éhontée.

La carcasse du vautour finit par terminer sa route par une dernière ascension, le menant tout droit vers la cause de son futur trépas. Anthea. Sa fiancée. La poupée qu’on lui a attribuée, celle à qui l’on veut le lier pour l’éternité, sa poupée cinglée. Sans même chercher à frapper, il se glisse et s’immisce dans son antre comme s’il était chez lui. Quelques flammes dansent et valsent sur les mèches embrasées de quelques bougies qui se décomposent lentement au rythme des cascades brûlantes de cire qui les fuient. Elle est là. « Anthea ? » Silence, rien d’autre que le silence. Mais Dante sait où elle est, parce qu’il la connaît comme s’il l’avait créé dans son cabinet de curiosités, parce qu’ils sont aussi sombres, aliénés et dérangés l’un que l’autre, parce que leur faim ne peut être assouvie que par le biais de plaisirs malsains et inhumains. Alors il s’approche de l’antre proscrit, la pièce de tous les interdits, là où elle entrepose le plus taré de tous ses secrets, là où elle expose sa chose. Objet de curiosité, un peu humain, un peu selkie, un peu rien, un peu tout, mais surtout rien. La poupée tourne dans la pièce, ses mèches chocolatées tourbillonnant autour de son faciès si parfait. Celle qui deviendra sa femme est dotée d’une beauté qu’il ne pourra jamais nier, mais il ne la trouve jamais aussi belle que lorsque les flammes de sa folie et de sa furie s’épanouissent cruellement dans ses orbes, comme lors de cette nuitée. Ô il ne cessera jamais d’être fasciné par cette princesse damnée. Ses prunelles d’azur glacées retombent bientôt sur l’aquarium dont le vide inquiétant vint bientôt l’oppresser, une vacuité synonyme d’une liberté que la Rowle avait prohibée. « Que s’est-il passé ici ? » Encore le silence, juste le silence. La chose n’est définitivement plus là, la chose a été perdue. « Je n’y crois pas. Elle t’a filé entre les doigts.» Constat glaçant, constat pensant. Dans une infinie lenteur, il sent la rage s’éprendre de son carmin, la colère foudroyer son âme, et plus que tout, la déception faire chavirer son âme. Peut-être qu’elle est pas à ta hauteur Dante, peut-être que c’est juste une gamine qui ne mérite même pas ton glorieux intérêt.. Les doigts du monstre qui s’enroulent autour du menton de la coupable, pour lui murmurer des douces paroles au goût de venin qui déclencheront, il le sait, une guerre sans fin. « Voilà ce qui arrive lorsqu’une gamine ne prend pas garde à bien ranger ses jouets. Elle les égare. » Un léger sourire trop parfait au coin des lèvres pour provoquer, un léger brasier de folie dans les opalescences pour menacer la poupée qui a osé échouer.

Il fait encore nuit quand tu te réveilles. Il te faut pas bien longtemps pour capter que quelque chose ne va pas. Un sixième sens, peut-être. Toujours est-il que tu sens ta nuque se raidir et tes sens en alerte avant d'entendre le bruit, distant, d'une fenêtre qui se ferme. Tu te relèves, presque instinctivement, et sors de ta chambre vêtue de ta chemise de nuit. T'observes la pièce à vivre, scrutant chaque recoin avec attention. Mais rien. Rien d'autre que le silence et l'obscurité à peine perturbés par le bruit des moteurs et la lueur des lampadaires en contrebas. Mais tu n'es pas dupe. Dans un mouvement brusque, tu ouvres la porte de la chambre de Noûr à la volée et tu t'engouffres à l'intérieur.

La cage est vide.

La porte en métal, légèrement entrebâillée, grince en se mouvant faiblement, comme pour te narguer.

C'est inutile, tu le sais déjà, mais tu cours hors de la pièce et tu retournes chaque coin de ton appartement avec une démence dans le regard, une folie dans les gestes. Et puis tu finis par jeter un coup d’œil par la fenêtre. Il n'y a personne. Juste des badauds qui déambules dans la nuit en titubant.

Tu cries. De rage. Brute.
Tu cries à pleins poumons, à en perdre halaine.
Et tu balances un vase ancien et précieux par terre, juste parce qu'il était à proximité.

Tu le regardes voler en éclats mais ça n'est rien comparé au chaos qui te consume actuellement. Des flammes glacées qui te mordent les entrailles. Le goût amer de la trahison dans la bouche. Et la peine, cette sensation étrangère, qui te noue déjà la gorge.

Y a comme un vide dans ton âme. Comme si on venait d'arracher un bout de toi. C'est plus qu'un simple affront. Ce n'est pas juste le fait d'avoir été assez bête pour te laisser berner par une sale hybride.

C'est aussi une vraie perte. Bien plus forte que ce que t'avais ressenti pour Omar. Quelque chose que t'étais pas prête d'imaginer. Encore moins d'avouer.

Tu retournes dans la salle maudite telle une furie. Puis tu fais des tours comme une lionne en cage, incapable de réfléchir, incapable de comprendre. Complètement en proie aux sentiments. Le fait même de ressentir quelque chose t'arracherait presque un sourire de satisfaction, un soupire de soulagement. Un peu comme lors de ta grande rencontre avec le léviathan.

T'entends même pas Dante entrer. Tu continues de ruminer lorsque ton fiancé finit par te rejoindre dans la pièce. “ Que s’est-il passé ici ? Je n’y crois pas. Elle t’a filé entre les doigts. ” Tu ne lui accordes même pas un regard. Comme s'il avait son mot à dire. Comme si Noûr était son jouet, à lui aussi. T'as pas besoin de l'entendre geindre, ça ne t'intéresse pas. Y a qu'une personne qui occupe tout ton esprit, et c'est Noûr. Mais tu sens bientôt la poigne glacée de l'homme se serrer sur ton visage. “ Voilà ce qui arrive lorsqu’une gamine ne prend pas garde à bien ranger ses jouets. Elle les égare, il te crache à la gueule. ” Tu le repousses vivement, tes prunelles soudainement animées par les flammes d'une rage dévastatrice. Puisque tu ne peux pas mettre la main sur celle qui mérite punition, puisqu'il est impensable que tu acceptes ta part de responsabilité, ce sera Dante qui portera la croix du plus grand échec de ta vie. Juste parce qu'il est à proximité, lui aussi.

“ Et toi, où étais-tu ? ” Tu t'approches de lui de ta démarches féline, tu l'observes comme si t'étais prête à le dévorer en une bouchée. “ Tu viens me faire la morale alors que tu ne sais rien. ” Tu lui tournes autour. Tu sais qu'il est dans le même état que toi. Et ça t'agace un peu plus car il n'a pas le droit d'être en colère. Noûr était à toi. A toi seule. Mais tu sens que c'est ce dont tu as besoin. De sa violence. De sa furie. Pour te punir. Pour laisser libre cours à ta folie.

“ Dante, le grand sorcier, qui a pour plus grand accomplissement un tout petit cabinet dans lequel il fait mumuse avec ses potions. Mais par contre, quel grand donneur de leçons. ” Tu te rapproches encore, et ta main vient enserrer sa gorge, tes serres ses planter dans sa chair. “ Tu n'es rien, Dante. Tu n'es personne. Alors ne viens pas me faire la morale. ” Puis tu t'en vas, parce que tu sais qu'il aura toujours l'ascendant sur toi, physiquement. Tu ne fais que le provoquer. Mais t'aimes ça, en venir aux mains. Bien plus qu'à la baguette. C'est presque animal. Parfait pour virer l'autre sardine de ton esprit.

“ Peut-être que si tu avais été là, aussi, au lieu de rôder dans la nuit, peut-être que tu aurais servi à quelque chose, pour une fois, et qu'elle ne se serait pas enfuie. ”

Only chains and broken bones
Ain't got no place to call a home
So come on Lord, what you waiting for?
The devil's going to make me a free man
The devil's going to set me free

Les notes de leur désastreuse symphonie aux accords d’ultraviolence sont graves et s’accordent avec la venimeuse tension qui n’a de cesse de prendre de l’ampleur dans ces minutes aux allures d’heures. Elle monte et gravite autour de leurs carcasses déchaînées, jusqu’à faire vibrer la pièce avec dangerosité, jusqu’à s’éprendre d’une Rowle enragée. Et Dante s’en délecte sans même chercher à s’en cacher, sans même culpabiliser d’alimenter ce feu pourtant si périlleux. Il jette de l’essence dans le brasier pour le simple plaisir de la voir s’embraser, pour contempler avec satisfaction et délectation les flammes de l’incandescence danser dans les opalescences brûlantes de sa fiancée.

« Et toi, où étais-tu ? Tu viens me faire la morale alors que tu ne sais rien. » Elle le repousse et ça l’attire. Elle enrage et ça l’amuse. Elle le provoque de toute sa haine et ça comble les meurtrissures de sa propre rage. Créature presque aussi féroce que lui, le prince des vices infernaux a enfin trouvé une poupée à sa mesure. Une femme à la noirceur aussi obscure et ténébreuse que peut l’être la sienne. Une femme qu’il n’aimera probablement jamais, mais qui pour l’éternité continuera de le fasciner. Suis-je simplement capable d’aimer ? Les traits d’une autre princesse Rowle s’imposent à lui, alimentent avec une force inouïe le bûcher de sa fureur et sont renvoyés dans les réminiscences enterrées de ce passé qu’il désire plus que tout oublier. Comme si ces secondes damnées n’avaient jamais existé, il se concentre de nouveau sur son présent ardant, sur Anthéa, celle qui est là, celle qui ne l’abandonnera pas. Dangereusement, elle lui tourne autour, inlassablement elle joue les vautours. « Dante, le grand sorcier, qui a pour plus grand accomplissement un tout petit cabinet dans lequel il fait mumuse avec ses potions. Mais par contre, quel grand donneur de leçons. » Il sent ses serres se refermer avec une violence éhontée, à la fois sur un égo qui ne supporte pas d’être blessé et sur un cou qu’elle n’aurait jamais dû oser toucher. Dante et ses rêves un peu trop grands, Dante et ses projets qu’il ferait tout pour réaliser, Dante et ses ambitions qui le poussent lentement vers son éternelle damnation. Elle cherche toutes les nuances de sa colère, elle cherche à ce qu’il lui offre la plus grande des punitions, ce qu’il fera sans vraiment poser de questions. « Tu n'es rien, Dante. Tu n'es personne. Alors ne viens pas me faire la morale. » Voilà ce qu’elle crache à celui qui se pense roi, à celui qui pense être tout, à celui qui pense être mieux que toi. « Peut-être que si tu avais été là, aussi, au lieu de rôder dans la nuit, peut-être que tu aurais servi à quelque chose, pour une fois, et qu'elle ne se serait pas enfuie. »

Les mots de trop, les mots qui résonnent en écho. « Fais attention à tes mots Rowle. » Le venin de ses propres palabres qu’il susurre pour la menacer, pour lui faire prendre conscience du danger, pour simplement l’empoisonner. Il avance sur sa proie, il cherche à la mettre aux abois, il espère briser le moindre de ses émois. Et là, entre le mur et sa propre carcasse, il l’emprisonne. « J’ai capturé, torturé et tué plus de personnes que tu ne peux l’imaginer. Crois-moi tu aurais adoré voir cela, mais tu ne supporterais pas être à leurs places. » L’azur céruléen de ses orbes qui se perd dans le saphir obscur des siens. Ses doigts frôlent sa mâchoire, encore, avant de se perdre sur sa gorge, pour l’enserrer légèrement. Le démon pourrait serrer, ne plus lâcher et la sentir s’éteindre avec lenteur et douleur contre lui, il pourrait la briser avec tellement de facilité. Mais il ne le fera pas, il jouera, la provoquera, la malmènera, mais jamais il ne la tuera. Alors il la relâche, simple poupée de chiffon qu’il laisse tomber, à qu’il offre une nouvelle liberté bien loin d’être méritée.

La bête s’éloigne, envoie sa cape valser contre un meuble, avant d’attraper sa baguette pour la laisser danser librement entre ses mains. « Je ne suis pas responsable de ton incompétence notoire. Tu n’es qu’une sombre idiote, qui n’est même foutue de garder une cage fermée. » D’un coup de pied, il referme la porte de la cage damnée. Le bruit résonne comme pour marquer sa faute, pour faire tinter son douloureux échec. La poupée s’est ratée, la poupée doit faire face à son insuccès. Il ne la laissera pas faire retomber le prix de son revers sur lui. Elle doit payer, elle doit assumer. « Et puis tu sais, je suis un excellent traqueur, alors, peut-être que je me mettrais à sa recherche… » Ses mots retombent dans un silence pesant et angoissant. Le monstre excelle dans son univers, lorsqu’il traque, pourchasse et attrape les ennemis de la société. L’instinct de la bête qui ne s’apaise jamais, à peine combler par les prises qui s’entassent et s’écrasent dans son palmarès. L'hybride a osé s'échapper, l'hybride les a leurrés, l'hybride doit être brisée.

Dante se glisse derrière elle, se faufile contre son corps gracile. Le ventre de la bête, contre le dos de la poupée, ses bras qu’il enserre avec fermeté alors que ses lippes frôlent son oreille. L’étreinte pourrait être romancée à souhait, si elle n’envoyait pas autant d’étincelles malsaines empreintes d’une dangerosité empoisonnée qui ferait frissonner d'effroi le moindre de leur spectateur. « Si je le fais, évidemment je la trouverais. Alors, peut-être que je jouerais avec à mon tour et que je ferais avec elle des choses que tu n’as jamais osé faire. Qu’en dis-tu Anthéa ? Après tout, tu seras bientôt ma femme, nous devons tout partager n’est-ce pas ? » Le serpent susurre ces doucereuses morsures pour la blesser, pour la provoquer et il sait particulièrement où frapper.

Tu trembles presque de rage. La sensation est si forte qu'elle te dépasse. Elle te consume. C'est la première fois que ça t'arrive. La colère, c'est peut-être le seul sentiment que tu ressens régulièrement, mais jamais à ce point là. C'est habituellement une colère douce, un agacement lattant, une frustration de ne pas avoir immédiatement l'objet de tes désirs. Mais pour la première fois de ta terrible existence, te voilà tout simplement enragée. La sensation est enivrante. Elle te monte à la tête et tu te sens plus vivante que jamais. C'est comme si les flammes qui t'animent venaient s'immiscer dans tes veines, et brûler tout sur leur passage. C'est plus simple de laisser la colère t'emporter que de faire face aux réels sentiments qui menacent de te faire imploser. C'est plus simple de blâmer Dante que de penser au vide laissé par Noûr avec son départ. Tu nages en terrain inconnu, désormais, celui dompté par les sentiments que tu as toujours été incapable de ressentir. Et t'as beau aimer cette sensation de vie que ça te procure, tu détestes ça tout autant. Car cette peine que tu n'as jamais ressentie, tu te la prends désormais de plein fouet.

Et puis y a Dante. Dante et son sourire narquois. Dante et sa mégalomanie. Dante qui se croit toujours supérieur à toi. Dante que tu ne supportes pas.

“ Fais attention à tes mots Rowle. ” Tu l'as piqué. Très bien. A ton tour d'arborer le sourire narquois de celui qui domine. A ton tour de t'amuser de la faiblesse du monstre qui se tient en face de toi, désespérant de se montrer menaçant. Il ne te fera jamais peur, Dante, car des deux fous tu penses remporter la palme. Alors, quand tu sens son corps chaud venir t'emprisonner contre le mur glacé de ton appartement, tu ne démords pas de ton air suffisant. Au contraire, votre danse enflammée est probablement le seul remède à la peine qui te tord l'estomac. “ J’ai capturé, torturé et tué plus de personnes que tu ne peux l’imaginer. Crois-moi tu aurais adoré voir cela, mais tu ne supporterais pas être à leurs places. ” Tu peux pas t'empêcher d'être légèrement aroused en pensant à ce qu'à pu faire Dante à toutes ces personnes. Peut-être que pour votre lune de miel, il te partagera ça. Pour l'heure, tu te contentes de lâcher un rire au nez de sa menace. S'il pense qu'il t'impressionne...

Alors tu sens sa main enserrer de nouveau ta gorge. Tu vois dans son regard que ce n'est que de la provocation. Néanmoins, la sensation est désagréable. Plus que l'absence d'air, c'est l'absence de contrôle qui te dérange. Te savoir à sa merci t'es tout bonnement insupportable. Tu comptes les jours avant ta première séance avec Nadia. Tu comptes les jours avant de pouvoir enfin maîtriser cette foutue magie sans baguette. Tu as su venir à bout d'un léviathan adulte... Dante ne devrait pas résister bien longtemps.

“ Je ne suis pas responsable de ton incompétence notoire. Tu n’es qu’une sombre idiote, qui n’est même foutue de garder une cage fermée. ” Voilà ce qu'il ose te cracher à la figure. Au fond de toi, tu boues. “ La cage était fermée, tu grondes. ” Tes yeux ne quittent pas le sorcier qui se pavane dans l'espoir de te faire craquer. Il joue avec le feu, et il le sait. Et il aime ça. Il fait claquer la grille métallique de la cage de Nôur, et le bruit résonne dans l'appartement, sonnant le glas de ton âme à l'agonie.

Puis le pire arrive. “ Et puis tu sais, je suis un excellent traqueur, alors, peut-être que je me mettrais à sa recherche… ” Tes yeux sont exorbités par cette peur nouvelle. Tu l'observes avec une haine et une crainte qui ne feront que le satisfaire, tu en as bien conscience. Tu le laisses s'approcher de toi et tu sens bientôt son corps se coller à ton dos, et son souffle chaud suinter jusqu'à ton oreille. Il t'enserre, persuadé que tu es sa chose, bien loin de se douter de la tempête qui s'annonce pour lui. “ Si je le fais, évidemment je la trouverais. Alors, peut-être que je jouerais avec à mon tour et que je ferais avec elle des choses que tu n’as jamais osé faire. Qu’en dis-tu Anthéa ? Après tout, tu seras bientôt ma femme, nous devons tout partager n’est-ce pas ? ” Les mots de trop.

“ Ne l'approche pas. ”

Le ton est lourd et sans appel. “ Ne l'approche pas. ” Tu te dégages avec force de son étreinte dominatrice et tu lui fais face. Tu sembles avoir enfin repris tes esprit, sa menace agissant tel l'électrochoc dont tu avais désespérément besoin. “ Elle est à moi. Elle est à moi et rien qu'à moi. ” Tu te mets à rôder autour de ta proie. “ Si tu oses mettre une main sur elle... ” Alors quoi ? Pourquoi tant d'intérêt pour une simple hybride à qui tu étais prête à cracher au visage pendant des mois ? “ Je te jure que ta vie sera un enfer. Tu ne me connais pas. On ne se connait pas. Tu te vantes d'avoir torturé et tué de nombreuses personnes ? Mais tu n'as aucune idée de ce dont je suis capable. Tu n'as aucune idée de ce que j'ai déjà fait. Tu n'as aucune idée de ce que je suis capable de te faire. ”

Tu es glaciale. Un retour à la normale, une reprise de contrôle qui te rassure. Le high de sentiments que t'as pu ressentir est déjà passé, laissant place à ton intelligence calculatrice et à ton sang-froid inhumain. Tu pars t'installer confortablement sur l'un des fauteuils en velours de ton salon. “ Et puis Dante... ” Tu croques dans une pomme qui trônait dans une corbeille de fruits posée sur la table, pour l'effet dramatique. Puis tu pointes ta baguette vers ton fiancé, et fait apparaître une bague qui s'enroule telle un serpent sur son annuaire gauche, et qui se resserre, lui laissant à peine de quoi faire circuler le sang. “ Toi aussi, tu es à moi. ” Peu importe ce qu'il croit.

Only chains and broken bones
Ain't got no place to call a home
So come on Lord, what you waiting for?
The devil's going to make me a free man
The devil's going to set me free

« Ne l'approche pas. » Les palabres qu’elle répète, inlassablement, dans l’espoir de le faire ployer, de le plier à la moindre de ses volontés. Mais Dante est un insensible et indocile insensée. Lorsqu’elle se détache, elle le pousse à s’approcher, lorsqu’elle lui targue de se tenir éloigner de l’objet de son désir inavoué, elle le précipite sur lui. « Elle est à moi. Elle est à moi et rien qu'à moi. » Le roi des enfers laisse celle qui sera un jour sa reine, divaguer, se perdre autour de lui, rôder près de sa carcasse de damné. Elle est la proie qui se veut vengeresse et chasseresse, mais elle est à lui, définitivement à lui. L’azur de ses opalescences poursuit ses traits, traque la moindre de ses pensées, la plus petite vétille de l’une de ses émotions non édulcorées, parce que la Rowle n’est qu’entièreté, dans sa folie, dans ses ténèbres, elle lui offre sans même y penser des parts de son âme calcinée dans leurs intégralités. « Si tu oses mettre une main sur elle... » La menace plane un instant, dangereusement, sournoisement, puis fend l’air, violemment, subitement. « Je te jure que ta vie sera un enfer. Tu ne me connais pas. On ne se connaît pas. Tu te vantes d'avoir torturé et tué de nombreuses personnes ? Mais tu n'as aucune idée de ce dont je suis capable. Tu n'as aucune idée de ce que j'ai déjà fait. Tu n'as aucune idée de ce que je suis capable de te faire. » Parce qu’elle est capable de faire régner la peur et l’horreur, parce qu’elle est un monstre dénué de toute empathie parce qu’elle est comme moi.

L’atmosphère se couvre de givre, ses palabres glacent leur environnement, ses gestes suffisent à couvrir de gel la pièce. Ils ne sont finalement faits que de ça Dante et Anthea, de feu et de glace. Inlassablement, réciproquement, diablement, ils jouent, blessent et brûlent avec des éléments contraires pour mener à bien leurs petits jeux pervers. « Et puis Dante... » Il ne cille pas, il reste là, simplement à l’observer, à la disséquer de ses prunelles incendiées par la curiosité. La baguette de la poupée ne suffit pas à le faire bouger. Il ne tremble pas. Il ne tremblera jamais. La bête est sculptée dans le marbre, immobile, il sait qu’elle ne le tuera pas. Elle oserait, elle pourrait tenter, il la sait capable de tout, mais pas en cette nuitée. « Toi aussi, tu es à moi. » Un autre que lui aurait chavirer à l’entente de ces palabres, mais un autre que lui serait certainement capable de sentiments, doté d’humanité, et cet autre n’était définitivement pas Dante Burke. Une sale bête qui pouvait sentir la moindre fibre de la diablerie avec laquelle elle avait paré sa déclaration. Une possessivité empoisonnée. Une possessivité qui suffisait à l’étouffer. Sa rétine qui retombe lourdement sur la bague trônant misérablement à son doigt. Emprisonné et enchaîné à un destin qu’il avait voulu et désiré, par simple volonté d’oublier une femme qui ne lui serait jamais destinée, pour perpétuer son impérissable dynastie sacrée. Pourtant, il ne pouvait s’empêcher d’exécrer la simple idée d’être lié à une femme, aussi sordide et belle soit-elle, pour une éternité aussi peu désirée qu'elle était qu’indéterminée.

Prestement, avec le flegme qui lui colle à la carcasse, le monstre s’adosse au mur tout en la fixant. Ardant. Dévorant. Effrayant. Ses doigts effleurent doucement le métal détesté avant qu’il ne finisse par susurrer. « Et si je savais ce dont tu es capable Anthea ? Si j’en avais totalement idée ? Si je connaissais sur toi des faits importants, comme des détails infimes ? Si la moindre de ces zones d’ombre, au lieu de m’effrayer, m’attiraient un peu plus vers toi, me fascinaient ? » Parce qu’elle était devenue au fil des semaines, l’objet de sa fascination, parfois même de son respect. Parce qu’elle était à bien des égards aussi cabossée que lui. Une âme morcelée, incendiée, déchaînée, qui ne répondait qu’à ses propres lois infernales. Il ne l’aimerait certainement jamais, elle n’était pas elle, elle n’était pas Isaura, mais il finirait par la respecter, parce que nulle autre qu’elle ne pourrait un jour régner sur les enfers à ses côtés. Cependant, un fait continuer de le déranger, de ronger et il ne pouvait s’empêcher de continuer à la faire enrager. « Qu’est-ce que tu as Anthea ? Tu t’es attaché à cette saleté d’hybride ? Tu es beaucoup plus faible que ce que je croyais. » Il se fichait de la chose, elle pouvait bien finir sa destinée dans les fonds obscurs de la Tamise ou torturée jusqu’à ce qu’elle finisse par se briser dans son entièreté, jamais il ne la pleurerait, jamais il ne la regretterait. Mais il ne pouvait supporter qu’Anthea macule leurs noms de honte. Il ne pouvait supporter qu’elle fasse preuve de faiblesse pour s’attacher à cette chose qui ne méritait même pas le respect. Il ne pouvait supporter que cet être, à peine humain, qui n’était rien, se soit joué d’eux pour reprendre une liberté qui lui avait été confisquée à jamais. Il ne pouvait supporter que sa fiancée l’entraîne dans les bas-fonds de l’accusation, qu’elle fasse de lui le coupable parfait, alors qu’il ne faiblissait jamais. « C’est si décevant. »

La bête tombe à ses côtés, leurs carcasses qui se frôlent, leurs épidermes qui s’électrisent, embrasés par ce simple toucher, empreint de tant de dangerosité. « À toi ? Je ne serais jamais vraiment à toi. Jamais. Par contre, toi, tu m’appartiens pour un sacré paquet d’années. » D’un sort, il fait valser la bague de son doigt pour qu’elle vienne orner la main de sa fiancée. « Et puis Anthea… » Un léger ricanement déchire ses lippes, avant qu’il ne dérobe sa pomme pour mordre dedans. « À ta place, j’éviterai de me menacer, tu me pousses encore plus à la retrouver. »

La statue de marbre qui te fait face pose sur toi le regard dément que tu lui connais bien. Le regard qui t'as poussé à accepter l'union entre vos deux famille. Le regard qui t'as fait te sentir proche de lui, pour la première fois. Celui de la bête, celui qui n'éprouve aucun sentiment, en dehors de la perverse satisfaction de tourmenter ses proies. Ce regard, tu lui rends sans sourciller, le sourcil arqué, provocateur. Dante caresse l'anneau de vos futures noces damnées, et tout son être émane d'une satisfaction perfide qu'il s'apprête à te renvoyer en pleine face. Il a encore une carte à jouer. “ Et si je savais ce dont tu es capable Anthea ? Si j’en avais totalement idée ? Si je connaissais sur toi des faits importants, comme des détails infimes ? Si la moindre de ces zones d’ombre, au lieu de m’effrayer, m’attiraient un peu plus vers toi, me fascinaient ? ” Ta curiosité est piquée. Tu décroises les jambes, te penches un peu plus en avant pour le toiser depuis ton trône de velours. “ Comment ? ” Puis l'impensable s'immisce sournoisement dans ton esprit, une idée qui vient glacer tes veines de reine des abysses. Il y a cette sensation, étrange, incontrôlable, que tu ressens parfois, qui te plonge dans tes souvenirs. La même sensation que tu as éprouvée en étant proche du Seigneur des Ténèbres. Mais ce n'est pas possible... Pas après tout ce temps ? Tu restes impassible, mais ta baguette laisse échapper quelques étincelles. “ Si tu sais autant de choses sur moi que tu le prétends, j'imagine que tu sais quel sort je réserve à ceux qui me trahissent. ” Et lire dans tes pensées, pénétrer ton esprit est bien une trahison que tu ne saurais pardonner. Encore moins à l'homme qui partagera ta vie, qui te donnera un enfant, qui est enchaîné à toi pour le restant de l'éternité. “ Tu joues avec le feu, Dante. ” La menace est dite sur le ton de la conversation, et tu croques une nouvelle fois dans la pomme que tu tiens dans ta main. C'est presque nonchalamment que tu poursuis, le ton toujours aussi froid. “ Mais je n'ai rien à cacher. Si ça peut te donner l'impression d'avoir une longueur d'avance. ” Tu décides de ne pas rentrer dans son jeu. Quand bien même l'idée qu'il puisse ainsi mettre la main sur ton intimité te rend verte de rage, tu ne lui donneras pas la satisfaction de céder une nouvelle fois aux sentiments. Il n'y a plus rien qu'il puisse dire qui te fera flancher.

“ Qu’est-ce que tu as Anthea ? Tu t’es attaché à cette saleté d’hybride ? Tu es beaucoup plus faible que ce que je croyais. ” Tu arques un sourcil. Une partie de toi sait qu'il a raison, mais ta fierté t'aveugle et tu ne saurais lui concéder ce fait. “ C’est si décevant. ” Tu laisses échapper un rictus. “ Je me fiche bien de te décevoir. Ta vanité, ta tendance à être persuadé que tu es toujours en contrôle alors que tu n'es qu'un pantin mégalo, tout ça me déçoit aussi. Mais il faut vivre avec. ” Tu hausses les épaules, puis croques à nouveau dans la pomme. “ Et je ne me suis pas attachée à elle. ” Mensonge. “ Elle était à moi. Je n'aime pas perdre ce qui est à moi. ”

Tu vois la bête s'approcher de toi, tu sens son corps frôler le tien alors qu'il s'assoit à tes côtés. “ À toi ? Je ne serais jamais vraiment à toi. Jamais. Par contre, toi, tu m’appartiens pour un sacré paquet d’années. ” Nouveau rictus alors que tu sens l'alliance épouser ton propre doigt. “ Tu t'entends ? "Non, c'est pas moi, c'est toi." C'est pas comme ça que ça marche, chéri. ” D'un sort, tu fais de nouveau apparaître une alliance sur le doigt de ton fiancé, scellant symboliquement les chaînes qui vous uniront bientôt pour la vie. “ Tu es autant à moi que je suis à toi. ” Et tout autant que lui, ça te déplaît. “ Et puis Anthea… ” Il croque dans ta pomme, le miroir parfait de ta personnalité si dramatique. “ À ta place, j’éviterai de me menacer, tu me pousses encore plus à la retrouver. ” Tu souris, las de cette conversation. Malgré cette peur que tu n'expliques pas, tu décides de lâcher la bête. Tu saisis avec force la mâchoire du monstre et le tourne vers toi, vos deux visages à quelques centimètres seulement. “ Alors vas-y. Fais d'elle ce que tu veux. S'il n'y a que ça pour te rendre heureux. ”

Only chains and broken bones
Ain't got no place to call a home
So come on Lord, what you waiting for?
The devil's going to make me a free man
The devil's going to set me free

La vipère est simplement là, face à lui, prête à morceler sa carne en un millier de fragments damnés. Elle est sa parfaite synthèse, le reflet d’onyx de son âme, la parfaite folie qui complète la sienne. Elle est celle l’ayant concilié avec les serments éternels, parce qu’il le sait, personne ne lui conviendra jamais, personne si ce n’est-elle. « Je me fiche bien de te décevoir. Ta vanité, ta tendance à être persuadé que tu es toujours en contrôle alors que tu n'es qu'un pantin mégalo, tout ça me déçoit aussi. Mais il faut vivre avec. » Le monstre gronderait presque à l’entente de ces palabres, qu’elle lui crache au visage avec une fierté qu’elle ne cherche même pas à masquer. Seulement, il préfère se perdre dans les braises aliénées qui dansent dans ses opales déchaînées. Elle est celle avec qu’il n’aura jamais peur d’être aussi dangereux que ténébreux, elle est celle qu’il n’aura jamais peur de briser, parce qu’elle est tout aussi dérangée qu’il ne l’est, elle est celle qui ne courbera jamais l’échine face à sa dangerosité. Elle le fascine et l’attire, elle lui rappelle celle à la crinière dorée, tout en la lui faisant oublier. Elle est celle qui se doit de ne pas le décevoir, parce qu’il l’a choisi, elle. Il le sait, elle est celle qui est faite pour régner à ses côtés. « Et je ne me suis pas attachée à elle. Elle était à moi. Je n'aime pas perdre ce qui est à moi. » Les lippes du monstre accentuent le rictus qu’elles formaient, alors qu’un léger rire, aussi mauvais que léger, s’en extirpe pour résonner dangereusement dans la pièce qui pendant l’espace de quelques semaines s’était muée en une prison aux barreaux empoisonnés. « Fais attention à ce que tu fais. Je n’hésiterai pas à briser ces fiançailles si mon nom est entaché par le scandale. » Jamais il ne pourrait supporter de voir son nom maculé par les impiétés de celle qu’il allait épouser. Jamais il n’accepterait d’être aux yeux de tous, l’homme le plus bafoué et cocu d’Angleterre. Il ferait payer une telle indignité et le prix serait celui de l’écarlate rouillé. « Être attiré par une misérable et infâme hybride, c’est pathétique. » Une légère grimace qui bafoue ses traits, parce qu’il ne peut concevoir que des personnes de leur dignité puisse être attirées par une telle déchéance. « Tu t'entends ? "Non, c'est pas moi, c'est toi." C'est pas comme ça que ça marche, chéri. »

Et pour la première fois en cette nuitée, le monstre sent son contrôle légèrement lui échapper, la colère doucement gronder et l’envie de la dominer revenir le noyer. « Je m’entends parfaitement et tu ferais mieux de m’écouter. Je n’accepterai pas que celle qui porte mon nom ait la réputation d’être la femme la plus facile à obtenir de Londres. C’est bien clair ? Surtout pour une hybride qui a préféré décamper plutôt que de rester avec toi. Moi je suis là, avec toi, je n’ai pas fui ce que tu es et je ne le ferais jamais. » Les prunelles du vautour retombent sur l’alliance qui vient se dessiner autour de son annulaire. La promesse d’un avenir qu’ils partageront à deux. La promesse d’un futur composé d’un Hadès réincarné et d’une Perséphone plus sulfureuse qu’elle ne l’a jamais été. « Tu es autant à moi que je suis à toi. » À elle. Il n’avait jamais appartenu à personne, pas même à Isaura et cette simple idée le tétanisait, mais refusant de l’avouer, il préféra balayer rapidement cela de ses pensées. « Si tu es à moi, suis mon exemple et sois un modèle de vertu. » Et pour la première fois, la Rowle lui arrache un véritable sourire emprunt d’une sincérité presque inquiétante. Le prince infernal était bien loin d’être un modèle d’abnégation et de pureté, bien au contraire, il lui arrivait encore de flâner dans les draps d’autres poupées ou de rêver à la silhouette maudite d’une autre Rowle. « Alors vas-y. Fais d'elle ce que tu veux. S'il n'y a que ça pour te rendre heureux. » Face contre face, les démons se toisent et se provoquent et le fils des abysses approche un peu plus son faciès du sien, jusqu’à entrechoquer leurs fronts, jusqu’à se faire frôler leurs venimeuses lippes, simplement pour murmurer contre la douceur des siennes. « Ce que je veux Anthea, c’est que tu ne cherches pas à te brider face à moi. Je veux que tu libères l’entièreté de tes ténèbres en ma présence. Je suis aussi sombre que toi ma belle. » La pulpe de ses lèvres qui frôle sa joue pour venir mourir contre son oreille et pour souffler des mots qu’il ne pensait pas prononcer un jour. « J’apprécie particulièrement te voir muter en chauve-furie et je ne compte restreindre aucun de tes excès tant que tu ne salis pas ma réputation. J’ai besoin de quelqu’un sur qui je puisse compter. Je n’accepterai aucune trahison. Je suis tien et tu es mienne. » Comme pour sceller ce serment, qu’il veut inviolable, le diable s’empare des lippes de la cariatide. C’est l’union prohibée par la raison de deux pécheurs qui espèrent avoir un jour l’univers à leurs pieds.

Votre danse enflammée dure depuis un moment désormais, mais le temps qui coule inlassablement depuis que ton jouet s'est échappé de sa cage semble se dissoudre dans la tempête. Détester ton futur époux est le remède idéal pour te faire oublier la peine et la honte de ton récent échec. Sur lui, tu peux déverser toute ta colère et il te la rendra intacte. Tu peux l'accabler de tous les maux sans qu'il ne s'avoue jamais vaincu. Il est le seul à te résister, le seul à te comprendre, le seul à rivaliser avec ta propre folie. Tu le sais, en dépit de tout, il est celui qui t'est destiné depuis le début. Le monstre qui réveille le tien. La bête qui te dévorera si un jour tu faiblis. “ Fais attention à ce que tu fais. Je n’hésiterai pas à briser ces fiançailles si mon nom est entaché par le scandale. Être attiré par une misérable et infâme hybride, c’est pathétique. ” Nouvel élan de rage. Ton regard le foudroie, tes oreilles sifflent. Comment ose-t-il ? Comment ose-t-il insinuer une chose pareille ? Peut-être ne te vexerais-tu pas autant, s'il n'y avait pas là une part de vérité. “ Shut your mouth. ” Le ton est glacial, tranchant, aussi vif que si tu l'avais giflé. “ N'insinue plus jamais une chose pareille. Je ne saurais désirer une femme, qui plus est une hybride, tu m'entends ? Et ton nom ne sera entaché que si tu laisses ce malheureux incident s'ébruiter. ”

“ Je m’entends parfaitement et tu ferais mieux de m’écouter. Je n’accepterai pas que celle qui porte mon nom ait la réputation d’être la femme la plus facile à obtenir de Londres. C’est bien clair ? Surtout pour une hybride qui a préféré décamper plutôt que de rester avec toi. Moi je suis là, avec toi, je n’ai pas fui ce que tu es et je ne le ferais jamais. ” Ton regard est toujours aussi dur, car tu ne supportes pas ses insinuations. Mais une partie de toi se radoucit, sans que tu ne puisses rien y faire. Parce que tu sais que derrière ce brasier qui vous consume, derrière toute cette violence que Dante peut bien te cracher à la figure, c'est aussi ce qui se rapprochera le plus d'une déclaration de sa part. Et n'est-ce pas ce que tu as toujours voulu ? Avoir quelqu'un qui ne faillira pas. Quelqu'un qui restera à tes côtés, en dépit de tout. Tes prunelles fermement ancrées dans celles du prince des enfers, tu lui réponds. “ Alors ne me quitte pas Dante, ne me quitte jamais. Car jamais je ne te pardonnerai. ” Le ton est sans appel, la menace est sourde, mais par la même occasion, on entend presque tes failles se dessiner dans tes propos. L'assurance d'une fidélité éternelle, tu ne l'as jamais eu. Pas avec ta mère, pas avec tes frères, ni William, ni Noûr, ni aucun homme. C'est la première fois qu'on te promet un "toujours". Et tu te prends à espérer, bien malgré toi. Tu ne pardonneras jamais à Dante s'il venait à briser cette promesse.

“ Si tu es à moi, suis mon exemple et sois un modèle de vertu. ” Tu manques de t'étouffer, mais pour la première fois, il t'arrache un rire, un vrai. “ Si c'est de ta vertu dont je dois m'inspirer, alors je n'ai pas trop de souci à me faire. ” S'il y a bien une chose que tu aimes chez Dante, c'est de le savoir aussi dérangé que toi. C'est de savoir qu'il laisse sa folie le guider, comme toi. Alors sa vertu... “ Et ne crois pas que j'ignore qu'il t'arrive de coucher avec d'autres sorcières. Je l'accepte, car notre accord tacite me convient bien, mais il marche dans les deux sens. Et puis, j'ose espérer qu'elles n'ont pas l'audace de croiser mon chemin. ”

Vous vous faites face désormais, une tension électrique dans vos deux corps déments. Contre tes lèvres, Dante vient murmure : “ Ce que je veux Anthea, c’est que tu ne cherches pas à te brider face à moi. Je veux que tu libères l’entièreté de tes ténèbres en ma présence. Je suis aussi sombre que toi ma belle. ” Tes pupilles s'assombrissent alors qu'il glisse dans le creux de ton oreille : “ J’apprécie particulièrement te voir muter en chauve-furie et je ne compte restreindre aucun de tes excès tant que tu ne salis pas ma réputation. J’ai besoin de quelqu’un sur qui je puisse compter. Je n’accepterai aucune trahison. Je suis tien et tu es mienne. ” Tu observes ton prince des enfers. Peut-être que tu ne connaîtras jamais les sentiments. Peut-être que ton époux, tu ne l'aimeras jamais comme on l'attend de toi. Mais en cet instant, alors qu'il t'accepte pleinement, tu peux dire avec certitude que tu n'as jamais autant aimé quelqu'un. Tu sais qu'une seule trahison de sa part brisera l'équilibre fragile de votre union naissante. Mais pour l'heure, il est tien et tu es sienne. Il t'embrasse, et avec fougue tu lui rends son baiser. La main sur sa gorge, tu grimpes sur ses cuisses, pour toujours être celle qui domine. Puisqu'il veut tes ténèbres, il les aura.