“Me neither,” Kamala sourit. Elle est un peu nerveuse, mais elle sourit. C’est un peu puérile, mais le fait que pour lui aussi, ce soit la première fois… Ça la rend encore plus heureuse. Simon est beau, et en plus de ça, il est bienveillant. Il y a quelque chose de profondément chaleureux chez lui : on ne peut que l’aimer. Kamala est sûre que les autres filles (et les garçons aussi) l’ont remarqué. C’est presque un miracle que personne n’ait réussi à capturer son affection avant elle. Elle en ressent une certaine fierté, qui serait d’autant plus douce si la honte de mentir à Simon ne venait pas gâcher un peu le tout. Kamala met cet élément de côté, elle maintient la culpabilité sous l’eau, ne garde que sa joie à la surface. Elle aura le temps de penser au reste plus tard : maintenant, elle veut juste être égoïste.

Les grands yeux noirs de Kamala scrutent ceux, tous aussi noirs, de Simon. “Can I kiss you?” demande-t-il, comme si c’était normal. Elle est désarçonnée par la question, et elle garde le silence, le temps d’assimiler. Il lui a demandé s’il pouvait l’embrasser. ”Y-- Yes. Of course you can.” Son cœur s’emballe alors que son visage approche, et les yeux de la brune tombent sur ses lèvres. Elle ferme les yeux quand elles se posent sur les siennes. Le silence de la cuisine pourrait être étrange, mais pour Kamala, ce silence et le battement de son cœur, c’est la bande son de la liberté. Elle rend à Simon son baiser avec une douceur qui lui est peu familière. C’est la première fois qu’on l’embrasse comme ça, et vraiment, vraiment, elle comprend désormais les gens qui lui disaient que c’est différent, quand on embrasse quelqu’un qu’on a vraiment envie d’embrasser.

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1996 Il est presque une heure du matin quand Kamala et Thierry quittent la maison des Wen, après un long dîner qui les a laissés avec un grand sourire sur le visage. Ils remercient chaleureusement toute la famille de les avoir accueillis pour la soirée en quittant l’allée pour rejoindre leur maison. Il fait très chaud, même à cette heure.
Thierry était déjà proche des Wen avant que Kamala débarque dans sa vie, mais depuis l’été dernier, les liens entre le vieux français et ses voisins se sont renforcés. D’après ce que Kamala a compris, ils ont même dîné ensemble régulièrement, toute l’année. Ça lui fait plaisir de savoir que Thierry n’est pas tout seul, qu’il peut compter sur eux.
”You really like him.” fait le français quand ils arrivent enfin devant la porte de la maison. ”Shut up!” Le petit vieux lâche un rire et ils entrent tous les deux dans le hall. Kamala s’empresse de dire bonne nuit, et commence à monter les escaliers. ”Kamala. You can use the front door you know.” Elle s’arrête au milieu des marches. ”What--” Il la regarde avec un air exaspéré. ”I wasn’t born yesterday.” Kamala ne comprend vraiment pas comment il fait ça. Ils sont extrêmement différents, tous les deux, mais parfois il semble lire dans son esprit comme s’ils avaient toujours vécu ensemble. Elle soupire et descend les quelques marches pour retourner dans le hall. ”Be careful, ok? I know all this is fun but… I don’t want you guys to get hurt.” dit Thierry, sans détour, comme si c’était quelque chose de simple, de dire ces choses-là. Kamala le regarde, un peu surprise. ”He won’t hurt me.” ”Oh, I know that.” répond-t-il immédiatement. ”But you know what I mean. It’s a dangerous game.” Elle le regarde, se contente d’acquiescer. Thierry lui offre un petit sourire et se traîne jusqu’à la cuisine, où il va sûrement fumer une dernière cigarette avec un café avant d’aller dormir.
Kamala essaie de ne pas trop penser à ce qu’il lui a dit en prenant une autre apparence pour passer inaperçue jusqu’à la maison des Wen. Elle se fait la plus discrète possible quand elle se rapproche de la maison et qu’elle escalade la façade, en s’aidant des pierres, jusqu’à la fenêtre de la chambre de Simon, qui est grande ouverte. Elle atterrit comme un chat à l’intérieur de la pièce, sous les yeux surpris du jeune homme. Elle se redresse et se recoiffe un peu. ”Hey. Told you I could do it.” dit-elle avec un air malicieux dans le regard. Elle fonce dans ses bras. ”Now we have the whole night to ourselves.” dit-elle avec un soulagement qui peut s’entendre.

Simon avait toujours apprécié les nuits d’été, d’autant plus lorsque Kamala et Thierry se joignaient à eux pour dîner dans le jardin familial, et la présence de la jeune fille était certainement l’un des points les plus agréables. Malgré tout, Simon avait toujours aimé l’été. Il savait qu’il était chanceux, que la raison pour laquelle les étés lui paraissaient si doux était parce qu’il pouvait retourner dans sa famille, amener Sohan avec lui pour quelque temps et passer le reste du temps avec Kamala. Depuis qu’ils s’étaient rencontrés deux ans auparavant, Kamala était devenu un symbole de la liberté des vacances d’été, de la douce chaleur qui prenait place en Angleterre et de toute cette atmosphère qui semblait presque irréelle, éloignée de la routine habituelle, de l’odeur un peu rance des salles de classe et des futiles disputes qui prenaient toujours des proportions désastreuses. Tout semblait plus agréable et plus simple à la fois.

Simon et Kamala étaient devenus encore plus proches, aussi. Et il passait le plus clair de leur temps ensemble, sous les regards amusés de leurs proches. Il n’en avait jamais été embarrassé, mais c’était toujours étrange de savoir que ses parents, son frère et Thierry pouvaient imaginer ce qu’il se passait entre eux, que ce qu’ils essayaient vaguement de garder secret ne laissait en réalité aucune place au doute.

Ils s’étaient quittés à la fin de leur dîner, ce soir-là, Kamala et Thierry étaient rentrés chez eux alors que les Wen s’étaient préparés à aller se coucher. Ils avaient prévu de se retrouver, plus tard. Kamala lui avait assuré pouvoir se faufiler jusqu’à sa chambre sans aucun problème et Simon ne l’avait crue qu’à moitié. Il savait qu’elle était capable de beaucoup de choses, mais cela semblait peut-être un peu trop gros. Il était tout de même resté dans un état expectatif, regardant les minutes passer atrocement lentement en espérant entendre un bruit, un quelconque signe de la présence de la brune. Étonnement, il ne l’avait pas remarquée quand elle s’était glissée par sa fenêtre ouverte. Il avait presque sursauté en laissant ses yeux tomber sur elle. “Told you I could do it,” lui avait-elle dit, et Simon s’était contenté de lui sourire en l'accueillant contre lui. “Now we have the whole night to ourselves,” - “Yes,” il lui avait répondu en soupirant contre ses cheveux. “I’m so glad you came.” Ils n’avaient pas énormément de moments où ils n’étaient que tous les deux, pas assez en tout cas, et chaque minute passée en sa compagnie était précieuse aux yeux du Serpentard. Il déposa un léger baiser sur ses lèvres, une chose qui était à présent devenue une habitude pour eux. “So, what do you want to do?” il lui demanda, “I would suggest staying up all night but it’s probably not the best idea,” il ajouta avec une légère grimace, imaginant la tête que ferait son père s’ils les trouvaient tous les deux épuisés le matin venu.

“Yes, I’m so glad you came.” Kamala laisse Simon l’embrasser sans même ciller une seule seconde, détendue comme elle n’aurait jamais pensé l’être avec quelqu’un un jour. C’est étrange, d’embrasser quelqu’un comme ça en vrai. Que les baisers n’appellent pas autre chose de manière non-négociable. C’est étrange, que ces gestes aient un sens pour elle. Maintenant qu’elle prend vraiment des habitudes avec Simon, elle se demande comment elle va réussir à supporter qu’on l’approche autrement le reste de l’année. Le fait est qu’avant lui, elle ne se posait pas de question quant à son quotidien et à son travail - c’était comme ça. Maintenant qu’elle a découvert que ça, ça existait… Cela remet tout en perspective. C’est terrible. “So, what do you want to do?” demande-t-il quand leurs lèvres se séparent. “I would suggest staying up all night but it’s probably not the best idea,” Kamala le serre contre elle, puis se redresse un peu, les bras toujours fermement refermés autour de la taille du jeune homme. “Really? I actually think it’s a terrific idea.” dit-elle en haussant légèrement les épaules. “I have a suggestion.” ajoute-t-elle avec un sourire. “I think we should sneak out.” dit-elle sans même tourner autour du pot. Elle hausse les sourcils, cherche une réaction dans le visage de Simon. “I think we should spend the night out as if there was no tomorrow. Make the most of it.” ajoute-t-elle, confiante.

Bien sûr, c’est peut-être un peu trop demander. Elle a l’habitude de traîner dehors, au point qu’elle n’a plus vraiment peur de la nuit ni des personnes qu’on peut rencontrer. Elle sait se défendre, Kamala, et s’il y a quoi que ce soit, elle pourra défendre Simon, elle en est convaincue. Bien sûr, cela ne se ferait pas sans quelques… surprises pour son amoureux, mais Kamala est sûre et certaine que ça ne pourrait pas en arriver là. Ils sont deux adolescents, c’est presque normal de faire le mur au moins une fois, non ?

Elle le regarde avec des yeux plein de défi. “So, what do you say?” demande-t-elle. “We could find some snacks… Wander around… I heard there’s a lake nearby… A lot of options.” Elle hausse les épaules. “And we wouldn’t have to worry about waking up your brother or your father.” Elle espère qu’il dira oui, parce qu’elle a des tas de scénarios dans la tête, avec tout ce qui est à leur portée. Le risque que les Faces soient dans les parages est vraiment faible, surtout à une heure pareille. Kamala n’est pas du tout flippée à l’idée qu’on puisse la trouver hors de la maison de son client, en train de fuguer. Le risque est minime.

“Of course we could stay inside if that’s what you want… But you know, I think it could be fun.” Depuis qu’ils se connaissent, ils sont restés coincés dans le périmètre de la maison de Thierry et de celle des Wen, ou du quartier, à l’exception de cette fois où Thierry les a emmenés tous ensemble, avec Kad, dans un parc d’attractions un après-midi. Kamala a envie de voir Simon loin de tout ça. “Come on, it would be fun.” l’encourage-t-elle.