Bête, proie, prédateur. Les iris d’acier du chercheur parcourent la salle. Il a beau porter une blouse blanche, il n’est pas dupe. Il régit toujours au gré des mangemorts, son handler le surplombant. On ne peut pas refuser de tel plaisir aux voyeurs. Perseus prépare quelques fioles qu’il agite nerveusement. C’est lui qui se servira de cobaye, ainsi qu’une invitée qu’il connaît bien, pour l’avoir connue lorsqu’il était encore un bambin. « Sienna. Prends place, je t’en prie. » annonce-t-il l’air sombre. Malgré les apparences, ils n’ont pas le choix. Il gante ses mains et réalise un instant le chemin parcouru depuis son départ de Johanessbourg. Le médicomage qu’il était lui semble bien loin. Les recherches qu’il dédiait à sa fille ont soudainement changé de teneur. Méconnaissable, Victor Frankenstein se laisse dévorer par sa propre créature. Le coeur du lupin tambourine contre son poitrail. Ils s’apprêtent tous deux à communier avec la pire partie de leurs êtres, ou la meilleure selon Sienna. Elle semble rayonner à ses côtés, tandis que lui-même n’est pas rassuré du sort qu’il leur réserve. La honte se lit sur son visage. Plus encore que la douleur, il redoute d’apprécier ce qui les attend. De se délecter d’un rôle qu’il aura refusé toute sa vie durant. Nez-à-nez avec elles, il ne peut plus échapper à ses craintes de jeune sorcier. Il ploie le genoux et se fait esclave du lord tandis qu’il administre sa préparation au vampire. « Comment te sens-tu ? » s’enquiert-il en prenant quelques notes, croisant timidement son regard ambre. Il aimerait la prendre dans ses bras et sceller leurs retrouvailles dignement, mais il fait preuve de retenue. Il prend une inspiration lorsqu’on le coupe: « À ton tour, Greyback. » La voix de son handler retentit dans la pièce. Retirant ses lunettes de l’arche de son nez, il s’injecte alors le second mélange, s’engouffrant lentement dans un songe familier et rassurant. Une chimère au goût de sang. L’immortelle lui a souvent fait les louanges du sentiment qui lui enserre soudainement le coeur. C’est comme s’il coulait au fond du Styx, oubliant soudainement le nom de sa propre fille. L’animal s’éveille en lui et l’invite au meurtre. Lentement, ses phalanges frôlent la peau froide de son vis-à-vis, et les gants le quittent. La caresse griffe, et s’accompagne d’un gémissement étourdissant. Les handlers ricanent car ils ignorent encore la suite des événements. La concoction commence à faire son effet, et la danse macabre des deux créatures ne fait que commencer.

Elle a retenu un rictus amusé lorsque son Handler lui a expliqué ce qu’elle allait faire aujourd’hui. Jouer les cobayes. Sienna ne s’est pas retenue de provoquer, évidemment, n’ayant aucune envie de laisser le Handler croire qu’il l’avait réduite à néant. L’autre commençait à prendre la confiance, il valait mieux lui rappeler par moments qu’elle n’avait rien d’une docile biche qui couinait à la moindre menace d’utilisation du glyphe sur sa nuque. Alors elle a montré les crocs, a commencé à feindre de se sentir insultée par cette annonce d’utilisation de son corps comme d’un tube à essai. Le Handler, qui commence à connaître la réputation fortement sombre de son Hound, n’a pas reculé mais a porté machinalement sa baguette sur son poignet, faisant mine d’être prêt à y recourir.

Alors elle s’est adoucie -seulement en apparence.

Allons, ils étaient entre personnes civilisées, il n’y avait pas le moindre besoin de recourir à ce genre de menaces stériles. Le tout en laissant sous-entendre qu’elle pourrait passer outre l’enchantement du glyphe histoire de le saigner à blanc. Toujours toute en amabilités, la Sire.

Toujours est-il qu’elle pénètre enfin dans l’espèce d’arène à deux niveaux de ce niveau du Ministère de la Magie. À l’étage, à les surveiller tout en étant à l’abri du moindre accident : leurs Handlers. À son niveau, ayant vieilli, mais reconnaissable tant dans l’odeur corporelle que dans les traits du visage, le jeune Greyback, fils d’un autre vieux camarade de lutte. Il est devenu homme (loup), Perseus, constate-t-elle sans se départir d’un rictus satisfait. Vêtue d’une longue robe de sorcière aussi rouge que le sang, la pâleur de la vampire ressort d’autant plus que le carmin répond à ses cheveux roux épars sur ses épaules pour l’occasion. Tandis qu’elle semble se réjouir -à vrai dire, elle ignore ce qu’il est censé tester sur elle- Perseus tire une gueule de six pieds de long. Charmant.

Elle s’installe là où il lui indique, tend son bras blanc pour qu’il lui inculque le traitement de cheval qu’il a concocté. Le liquide lui semble brûlant, vis à vis de son sang plutôt bas en température. De l’œil, elle suit un trajet imaginé qui va de son bras vers son épaule et revient se loger au creux de ses seins -qu’un décolleté en dentelle encadre avec force sulfureuse. Elle s’attendait à ce que la mixture fasse effet immédiatement, et un instant, lorsqu’il lui demande comment elle se sent, elle voudrait lui dire que rien n’a changé. Or, l’instant d’après, elle inspire profondément, cille un instant pour rouvrir des paupières sur des iris passés au rouge. Les canines n’ont pas changé d’aspect, toujours pointues et avides de se planter dans quelque carotide. Mais les veines de son interlocuteur sont terrain interdit, sans quoi ce serait leur mort à tous deux qu’elle scellerait.
Sienna reste assise, le temps que son corps s’habitue à ces nouvelles sensations, sens décuplés et instinct chasseur renforcé. Elle comprend la nécessité d’une certaine expérience pour faire cet essai : sans contrôle aucun sur ses envies et ses pulsions vampiriques, elle aurait signé la fin de l’expérimentation par un mouvement d’humeur. Elle s’immobilise tandis que Perseus approche une main de son derme rosi par les pulsations du sang plus rapides que d’habitude, statue marmoréenne qui semble rougir sous le contact. Le Grand Âge est ainsi ici un avantage certain et elle sent la Bête face à elle vrombir.

Le rassurer, d’abord : « Je me sens très bien, Perseus. », dit-elle tout bas, murmure que leurs Handlers n’entendront pas, à moins de lancer un Sonorus. Lentement, la statue se lève de sa chaise, ses mains qui viennent prendre celles du lycan. « Un loup-garou et une vampire. On croirait que nos responsables souhaitent que l’on s’entretue. », sa voix, neutre pour un humain, semble chantante pour qui a les sens décuplés à l’instant présent. Et d’ajouter : « Fais-moi confiance. »
Elle semble voir irradier de son compagnon d’infortune une forme d’aura animale qui ne demande qu’à sortir. Et pour éviter que le contrôle n’échappe à Greyback fils dans un sens qui ne lui plairait pas, elle sort sa baguette et en profite pour transformer la chaise sur laquelle elle s’était assise un temps, en un cerf aux bois encore très courts. L’animal ne bouge pas : forcément, transformer un objet inanimé en être vivant a son utilité, mais elle n’a pas cherché à doter ledit chaise-cerf d’un quelconque cerveau -les plaisirs de la transfiguration, vraiment. « Pour tes notes, je crois que j’arriverais à anticiper le moindre de ses mouvements, s’il décidait de bouger… Et toi, qu’est-ce que ça t’inspire ? »