(quidditch world cup) crossroad puzzle (alastar)

(QWC) crossroad puzzle

Je n’aurais manqué ça pour rien au monde. La quatre-cent-vingt-cinquième Coupe du Monde de Quidditch, qui se déroulait en Australie, touchait à sa fin et la finale était ainsi disputée dès ce matin (enfin, fin d’après-midi en Australie, décalage horaire oblige). Avec l’obligation de me rendre en Angleterre pour le boulot et les restrictions britanniques de portoloins vers l’étranger, j’avais décidé que je regarderai ce dernier match dans un pub de Londres, et j’avais profité de l’occasion pour relancer un vieux camarade joueur de Quidditch qui m’avait bien encouragée quand j’avais pu le rencontrer, à la Coupe du Monde de 1998 disputée aux États-Unis, juste après avoir signé le contrat avec les Chicago Puckwoodgenies. Ça faisait bizarre, parfois, de se dire que j’avais, dans mes connaissances, un joueur d’échelon international, mais en général, quand je retrouvais Alastar, on s’encombrait pas trop de hiérarchie. Surtout que, depuis mon accident, le contrat avec les Puckwoodgenies avait été annulé, et la carrière de joueuse de Quidditch pro était désormais oubliée.

Après m’être renseignée et avoir obtenu confirmation de la part d’une assistance de prod’ travaillant pour la BCBC, j’avais fini par proposer à Al’ qu’on se retrouve devant le Quality Quidditch Supplies, dans le nord de Diagon Alley. L’International Quidditch Association y organisait un visionnage collectif de la retransmission par ondes cristal de la finale, dans leur arrière-boutique qui avait été soumise à un sortilège d’extension, histoire de pouvoir accueillir plus de dix personnes seulement. L’écharpe aux couleurs du Burkina Faso sur les épaules -achetée à la retransmission de leur demie-finale contre le Japon, que j’avais vue aux States, tellement ils étaient bons- j’avais donc retrouvé le sportif professionnel et, bras dessus, bras dessous, on avait pénétré dans la boutique d’accessoires de Quidditch. Donnant mon nom et le sien, pour qu’on vérifie qu’on s’était bien inscrits au préalable, j’en profitais pour regarder les autres noms écrits, en déchiffrant à l’envers l’écriture très soignée d’une plume à papotes appliquée. Étant en Angleterre, il y avait peu de chance pour que ça m’inspire particulièrement, mais on savait jamais, des fois que des joueurs connus assistent aussi au match.

Notre inscription confirmée, on finit par rejoindre l’arrière-boutique où, pour sûr, il y a bien trois centaines de sièges confortables qui sont installés, avec peut-être un tiers de la salle déjà occupée par des fans de Quidditch. La salle se remplit d’ailleurs assez vite, et bientôt la retransmission commence, et les voix de Miranda Llewellyn et de Dominic Swirl, les commentateurs britanniques, saluent l’audience de la BCBC et commencent à commenter ce que l’on voit sur la vitre de projection. Lorsque les équipes pénètrent sur le terrain, l’audience s’échauffe un peu, certains sifflant l’Attrapeuse de l’Équipe de France, Cybèle Peltier, aux cheveux noirs coupés très courts et à la mine concentrée. J’aurais des trucs à redire sur la réalisation et le montage, mais je me concentre assez vite que le match plutôt que sur la forme des ondes cristal. On peut dire que les Français sont favoris, vu leur victoire à la Coupe d’Europe, deux ans plus tôt. Mais quand les Burkinabés rentrent sur le terrain, en tourbillonnant, c’est plus fort que moi, et me voilà à rugir comme d’autres dans l’assistance. Et de me tourner vers Alastar, avec un grand sourire, parce que mine de rien, regarder ça avec lui, ça me permet quand même d’oublier un peu les emmerdes qui ont entaché mon arrivée en Grande-Bretagne. « Bon, on avait dit quoi, déjà, en terme de pari ? T’es toujours sûr que les Français vont bouffer les Burkinabés ? Parce que je maintiens ma mise, hein. J’suis sûre que les Burkinabés l’emportent, avec bien cent points d’avance. » Des étoiles dans les yeux, la voix chantante, ouais, franchement, ça se sent que je suis transportée par cet évènement. « Ça pique un peu de se lever pour 9h du mat, hein, mais ça vaut le coup. J’suis contente d’être là avec toi. », lui souffle-je tandis que les équipes se disposent dans les airs l’une face à l’autre tandis que l’arbitre, l’Italien Massimo Falcone, arrive sur le terrain suivi de ses assistants.

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Alastar est un patriote. Un fier patriote. Jamais il ne regrette son appartenance au meilleur bout d’île de cette planète, à l’Irlande du Nord. Un peu anglais, beaucoup irlandais, une identité égalée par nul autre. Porter les couleurs de son pays l’emplit de joie, et il n’a pas connu plus grande fierté que lorsqu’il a pris la robe de capitaine de son équipe nationale. Mais tout de même, une si petite contrée… Il ne regrette jamais son appartenance mais il se surprend à rêver à une Irlande unifiée quand les coupes du monde viennent, et qu’ils se font parfois éliminer un peu trop tôt, n’étant pas capables de collectionner des joueurs aussi talentueux que la république. Pour autant, bien qu’il ait dû refermer ses valises et rentrer d’Australie plus tôt qu’il ne l’aurait voulu, il ne manquerait la finale pour rien au monde, c’est ça la passion. Auparavant il serait resté à l’étranger jusqu’à la fin de la coupe, aurait regardé le match en personne, scandant avec le reste du stade. Le gouvernement n’autorise plus ce genre de choses, l’attrapeur devra se contenter d’une retransmission, mais ce sera en direct, quoi qu’il en coûte. Même s’il faut se saouler la gueule à la bière à 9h du matin. Bah quoi ? On ne regarde pas une finale de coupe du monde de Quidditch en buvant du jus de fruits ou de la bièraubeurre.

C’est habillé aux couleurs du Burkina Faso, leurs couleurs peintes grossièrement avec du maquillage sur son visage, qu’il est sorti de chez lui ce matin. Moira avait failli pleurer en le voyant étaler les peintures, désolée de ne pas pouvoir assister à la finale en live, retenue par ce rendez-vous professionnel qu’elle ne pouvait pas décaler. Il a bien essayé de la consoler mais, de la tête aux pieds en supporter, c’était assez difficile et un peu hypocrite. La plupart des sorciers sur le Chemin de Traverse sont dans leur attirail habituel mais on croise de temps en temps des groupes parés aux couleurs de la France ou du Burkina Faso, les uns le sifflant, les autres poussant des cris de joie. En voyant cette agitation de bon matin il a une pensée fugace pour sa mère, qui doit être bien contente que l’Irlande du Nord ait été éliminée, la dispensant d’avoir à regarder le match parce que ses fils sont dedans. Devant la boutique Quality Quidditch Supplies, le Fawley retrouve Tina Barksdale, une américaine qu’il a rencontrée durant la coupe du monde précédents aux Etats-Unis, et c’est en duo infernal, parés de rouge, vert et d’étoiles jaunes, qu’ils pénètrent dans la boutique. Une fois leurs sièges trouvés le voisin qui s’installe dévisage un instant l’irlandais, le scrutant, essayant sans doute de déterminer si, sous ce maquillage, c’est bien lui. Finalement il tente sa chance, demande un autographe, et coup de bol, ce n’était pas un sosie. Alors comme on le lui demande, Alastar lui signe son bout de papier puis se tourne à nouveau vers sa compagne. « Regarde moi ça, on ne peut plus aller nulle part tranquille, quel monde. » qu’il plaisante, se taisant bien vite quand l’équipe française arrive sur le terrain. Il ne s’abaisse pas, lui, à siffler leur attrapeuse, qui est une fille assez sympa, bien qu’un peu étrange et sans doute trop coincée. Ils se joint en revanche aux cris de joie que déclenche l’arrivée des burkinabés sur le terrain. Dans la salle, peu sont favorables aux bleus. Pas étonnant en Angleterre.

« Bon, on avait dit quoi, déjà, en terme de pari ? T’es toujours sûr que les Français vont bouffer les Burkinabés ? Parce que je maintiens ma mise, hein. J’suis sûre que les Burkinabés l’emportent, avec bien cent points d’avance. » Bien que cela lui fasse mal au cœur, le nord-irlandais doit maintenir son pari. Il est corps et âme avec l’équipe d’Afrique qui a fait une percée fulgurante et inattendue cette année mais ces damnés européens sont doués, et leurs statistiques sont bien plus stables. Leur défense est impénétrable depuis que leur nouvelle capitaine est arrivée. « Les grenouilles sont trop bien préparées, ça fait vingt ans qu’ils attendent ce match, et je fais confiance à Peltier. » Les feux d’artifices exotiques sont finis, les équipes s’alignent. La tension monte, le volume des conversations baisse dans la salle. « Ça pique un peu de se lever pour 9h du mat, hein, mais ça vaut le coup. J’suis contente d’être là avec toi. » Avec un grand sourire il passe un bras autour de son épaule et la serre contre lui. Ouais, lui aussi, il est pas mécontent d’être là avec l’américaine ce matin, même dans cette arrière-boutique qui a une vague odeur de cirage. L’arbitre fait un petit discours. Forcément, toujours un italien au milieu, et jamais prêt à fermer sa gueule alors qu’il sait très bien qu’on n’attend de lui que l’annonce du début du match. Enfin, le coup de sifflet. Le silence flotte un instant dans la foule, accrochée à l’écran, aux gestes des joueurs. Les français prennent le souaffle, au fond de la salle quelques encouragements heureux, pour le reste, ça grommelle surtout. La tension monte, monte… « C’est pas vrai… » Le gardien burkinabé arrête le Souaffle du bout des gants, déviant la balle de sa trajectoire qui frôle l’anneau de droite, chute vers le sol et est récupérée par un poursuiveur rouge et émeraude. « J’ai bien cru que ça allait marquer en moins de deux minutes. Faut qu’ils se ressaisissent. »