(1974) naissance à Macao. Père inconnu, mère escort -début d’existence pas très bling-bling, si ce n’est l’éclat des bijoux en toc de sa mère.

(automne 1978) Fei ne rentre pas. Un soir, ce n’est pas alarmant ; elle le laisse parfois seul, il peut contacter Liu en cas d’urgence. Un soir et une journée ; vers la moitié de cette dernière, il a un peu faim.
Puis deux soirs.

A l’aube du troisième, Liu arrive sans qu’il ait besoin de l’appeler. Quelque chose cloche. Liu peste -elle doit aller travailler. Elle le prend avec elle, et le dépose quelque part. Elle s’engueule avec un type trapu, qui s’énerve aussi, et lui dit d’arrêter de s’énerver en s’énervant encore plus ; Liu le laisse (en levant un doigt vers le type), et le type le regarde, soupire, et l’amène à un autre type. Ce type-là lui s’énerve moins -il ne s’énerve à vrai dire pas du tout, et ne parle pas non plus, jusqu’à ce que l’autre se taise.

(décembre 1978) Sa mère est morte. Elle l’est vraisemblablement depuis la nuit où elle l’a laissé seul ; son corps a été retrouvé dans la baie. Personne ne semble particulièrement surpris par la découverte.

(1979) On a toujours besoin d’un gosse pour informer, se faufiler, faire passer des messages trop sensibles pour les pattes des piafs. Liu l’a gardé avec lui à Macao, et Hongzhang rend des petits services pour les Wang. Ziwen l’engueule souvent, lui dit qu’il est qu’un sale petit merdeux intenable -mais pas Wei, quand il vient rendre visite de Hong-Kong. Wei au contraire, a l’air de s’intéresser à ses turbulences (il a même ri, quand il a mordu Ziwen lors d’une de ses visites). Ce qu’il préfère, c’est quand on l’envoie dans le quartier des casinos. Putain, comme ça brille ! Il retrouve un peu l’éclat des bijoux en toc -dans celui des vrais des dames. Y’a même des blondes -des vraies blondes ! Les cheveux de sa mère aussi étaient en toc.

(1980) Hongzhang pleure : Liu n’est pas venue avec eux à Hong-Kong, et maintenant ils signent des papiers de merde, dans un grand bureau rempli de fumée. Merde, putain, gueule, chier, bite ; Hongzhang fait le tour des gros mots qu’il connaît quand Ziwen lui chope le bras pour lui dire de se calmer. « T’es un Wang maintenant, tu la boucles ! » « J’ai pas envie d’être un Wang, fils de pute ! » Tiens pute, il l’avait oublié celui-là. Ziwen part d’un éclat de rire. « Non mais c’est qu’il a du culot le bâtard ! Allez va faire un bisou à ton nouveau papa, gamin, et va faire tes valises. »

(1980 - quelques jours après les papiers) C’est leur nouveau chez eux ; ils s’entassent entre Wang dans un appartement qui donne sur le gros fleuve, au milieu de la ville. Y’a pas la mer, et y’a pas de gratte-ciels non plus -tout est atrocement plat ; on parle la langue des casinos dès qu’on sort de China Town. Hongzhang reste con devant toutes ces blondes (y’en a partout, et même des blondes-oranges !) et les gens ont du mal à comprendre son nom ; ils froncent les sourcils, se taisent, balbutient ou s’essaient avec plus ou moins de certitude à des sons qui n’ont rien à voir. Les blondes aussi, elles galèrent ; ça commence à le gonfler quand on l’appelle Hongzhang, même au sein du clan –« c’est Zhang putain ! ». Et puis un jour dans la rue, il entend une dame qui engueule son fils. « You should be ashamed of yourself, Martin Baxter ! » Martin. Baxter.
Martin.
Martin Wang.

Les blondes après ça, passent moins de temps à froncer le nez pour comprendre son nom -plus à sourire, et c’est toujours bon pour le business de faire sourire les blondes.

(1981) « Tu t’es battu ? … Zhang, tu t’es battu ? » « Aïe ! » « Tu t’es battu petit con ? » « Ouais. » « Non. C’était pas se battre, ça, c’était se faire défoncer la gueule comme une petite merde. » « Ils étaient quatre, c’est pas ma faute. » « C’est entièrement de ta faute. Quand on sait pas se battre et quand on est qu’un contre six, on se casse, débile. » « Ziwen. » « Hm ? » « J’ai toujours trouvé que Hongzhang et toi aviez beaucoup de points communs -c’est la raison pour laquelle vous vous entendez si bien depuis le premier jour, n’est-ce pas. » « J’m’appelle Zhang, putain ! » « Il a l’air d’accord. C’est toi qui vas lui apprendre les Arts. Dans dix ans, il prendra ta place ; autant former ton successeur comme tu l’entends, n’est-ce pas ? » « Mais… » « C’est un ordre. » « Bien. C'est toi le chef, après tout. »

(1985) Un con lui demande si sa lettre est déjà arrivée. « Ma lettre de quoi ? » Martin, à onze ans, met déjà du gel magique pour tenir ses cheveux en arrière, et fronce les sourcils d’un air perplexe, même quand il n’y a aucune raison de l’être -ça lui donnerait l’air cool, en attendant d’avoir du poil au menton. C’est le con qui a l’air perplexe quand il reprend. « Ta lettre pour Poudlard. » « Ah. » Martin hausse les épaules, et coule un regard à Chen, qui met trois plombes à choisir une plume -il se demande sûrement de quelle manière il va se la mettre dans le cul, en rentrant. « On va pas à Poudlard chez nous. » « Ah. Où est-ce que vous apprenez la magie, alors ? » « Ben… Y’a le bouffon qui m’apprend des trucs. » Il fait un signe dans la direction de Chen. L’autre con n’a pas l’air convaincu. « Mais moi ça m’intéresse pas trop la magie, c’est chiant, les baguettes ça me gave. » Ça n'a l'air d'intéresser vraiment aucun Wang, à vrai dire ; aux baguettes et aux sorts classiques, ils préfèrent l'encens magique, les calligraphies incantatoires, l'art du combat où se mêle le Qi -on préfère leur enseigner les règles du mah-jong et de l'extorsion de fonds, plutôt que de faire briller le bout de sa baguette magique. « Il n’y a pas de… D’école, là d’où vous venez ? » Martin fronce les sourcils et regarde le type, cette fois -d’un air de dire qu’il est con. « Ben si. C’est juste qu’on y va pas. » Trop con. « Je vais chez Honeydukes. », fait-il en cantonais. « Hm. Pas de vol, Zhang. » Dans le dos de Chen, Martin décoche un majeur à la Liu. Le con ouvre des yeux grands comme des soucoupes ; pas sûr qu'on leur apprenne ces politesses-là, à Poudlard.

(1990) Il reçoit officiellement la marque du clan. Feng accapare l’attention avec son putain de lézard -mais Martin fait désormais partie de la cour des grands ; la marque fraîche sur son torse.

(1992) Le clan Wang se détache officiellement de la Main Dorée. La fête est encore plus grandiose qu’un Nouvel An à China Town -allégresse.

(automne 1998) Voldemort au pouvoir. Les Wang profitent de la confusion générale pour faire fructifier leurs affaires -on a d’autres chats à fouetter que de s’occuper du trafic d’opium, et le trafic d’armes magiques, particulièrement des baguettes, prend son envol avec la persécution des Nés-Moldus. Ceux du clan sont relégués aux coulisses moldues, disparaissant brusquement aux yeux du monde sorciers ; certains l’acceptent sans rechigner (après un entretien persuasif avec Zhang), et d’autres tentent de filer en douce, pour Hong-Kong. Ziwen en fait partie.

Wei y envoie Martin. Ce dernier, à son retour, est promu Red Pole – chef des armées du gang. Un général du crime, en quelque sorte. Zhang aurait aimé recevoir le titre de Ziwen autrement qu’en le dégommant, quelques jours plus tôt. Il a encore son sang sur les mains.

(novembre 2001) Ce fils de pute (ou cette pute fils de pute -ça marche aussi !) de Jack a essayé de se casser. Comme ça. Comme s’il démissionnait de chez Wang après avoir trouvé un meilleur taf -un taf de tafiole ! Non mais il a cru quoi le connard ? Qu’il suffisait de leur mettre un mot pour être rayé de la liste de leurs collaborateurs ? Martin réunit une petite équipe, et décide de rendre visite à Jack, au bar.
Ils repartent après s’être assurés qu’il n’était pas tout à fait mort -Martin, généreux, lui a même laissé l’usage de ses membres ; il se garde sa teub pour la prochaine fois où il recroisera sa route de tapette.

(2006) Wei est mort –vive Wei, comme ils disent. Martin n’a jamais capté le délire. Vive quoi, exactement ? Il est mort, ce fils de pute -assassiné comme un connard. Zhang se sent con d’avoir pu croire qu’il était invincible -qu’il était encore un putain de modèle après tout ce temps, après toutes les conneries qu’il a pu lui faire gober (avant de les lui sortir du gosier par la force, l’enculé !), après toutes les débilités suffisantes qu’il lui a balancées, avec son air de sage descendu du sommet de la Montagne de Merde des Grands Maîtres de l’Existence. Putain, ils se sont bien faits tous couillonner ! Wei est mort, et il les laisse comme des cons, avec le gang, le vide, leurs merdes.

Le fils de pute ! Rien que pour ça, Martin se laissera pas faire -il va prendre le deuil et la lui mettre à l’envers. Putain ! Il va même prendre la place de N2 sous le nez de pleureuse de Sen, et leur montrer ce que c’est qu’un putain de général ! C’est lui qui décide de ce qui lui arrive, merde !

(été 2006) L’Opaleye est à lui. Wei voulait pas qu’il le gère –« les affaires, c’est pas ton domaine » lui avait-il répondu avec sa voix tranquille de connard des Montagnes. Maintenant qu’il est mort et que Chen chiale sa race, il a rien à y redire, le con ; ça y est ! La boîte est à lui, il fait ses deals, y’a même moyen de se dégoter des trucs sympa en arrière-salle.