BIENVENUE SUR SMOKE & MIRRORS. Un forum Harry Potter alternatif qui diverge du canon à partir du tome 5 où Harry est capturé par les Death Eaters lors de la bataille du Département des Mystères. L'action se situe 12 ans après, en 2008, dans un Royaume-Uni gouverné par Lord Voldemort.

Le forum a pour but d'être collaboratif et possède donc un système de collaboration participative où tous les membres peuvent proposer des nouvelles annexes, évènements, voire même des idées de personnages pour les futur.es joueur.euses !

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 hospital for souls (ben + sulpicia)

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Flashback décembre 2003.


a constellation
of half-lives.
C’était entre chien et loup, le monde en suspens — pas un souffle, pas un bruit. Le vacarme inquiétant de l’allée des embrumes s’était étouffé, finalement, alors que la lune avait disparu pour laisser place à la grisaille. C’était comme si l’univers tout entier avait offert son dernier soupir et qu’il ne restait plus après lui que les fantômes d’un passé lointain. Pourtant, rien n’avait changé. Pas vraiment. Les oiseaux de nuit étaient partis se coucher, et ils t’avaient laissée seule, encore, routine infernale qui prenait place tous les matins. Dehors il n’y avait plus que les pauvres âmes perdues, les mendiants, les gens qui n’avaient nulle part où aller. Bientôt les rues seraient foules, certains cherchant futilités, et d’autres ayant un dessein plus douteux. Étrange, alors, que cet endroit devienne foyer, troquant des gants de cuir contre ceux du métier.

On t’avait souvent demandé pourquoi. Pourquoi les morts, pourquoi eux, pourquoi pas autre chose — à ça, tu répondais toujours qu’il fallait bien trouver sa place quelque part. Comment leur expliquer ton attirance pour les myocardes qui ne battaient plus ? C’était… peine perdue. La chair était froide, mais tu jurerais qu’il s’y cachait quelque chose.

Bouches cousues, revêtis, les yeux aussi vides qu’on pouvait l’imaginer, c’était toujours comme ça que commençaient tes journées. Parfois, il n’y avait personne dont s’occuper — mais ces jours-là, tu t’extirpais gracieusement du manoir familial, préférant l’étrangeté du silence face à ce qu’on pourrait te dire. Te reprocher. T’exiger.

“À nous deux.” C’était une pauvre sorcière étendue sur la table, pas plus vieille que ton aînée. Là où les attaques contre les moldus faisaient rage, les sorciers semblaient diminuer de nombre à vue d’oeil, sans raison, tombant tous les uns après les autres. Certains se donnaient la mort par désespoir, d’autres périssaient dans des accidents mortels. Mais peu importe : ici, ils avaient tous la même identité, tous le même nom. Ou plutôt, ils n’en avaient aucun. Ils se ressemblaient, tous gelés et pâlots, tous infiniment silencieux. Ils n’avaient rien à envier au commun des mortels, si calmes et paisibles, loin de tout ce qui pouvait troubler la chair et l’esprit. Ils n’avaient plus à s’inquiéter pour rien. “Qu’est-ce qui a bien pu t’arriver.”

Et puis, la clochette de l’entrée tinta curiosité. Tu tournas la tête vers le couloir, si étroit et sinueux qu’il en semblait presque piégé ; tu n’avais aucun rendez-vous, aujourd’hui, et tu n’attendais pas âme qui vive. Les amis se faisaient rare, ces derniers temps, si amis il y avait, alors qui pouvait bien se balader dans une ruelle sombre avant même que le soleil ne se lève ?

Tu jetas tes gants dans la poubelle. À l’évidence, c’était la mort qui rôdait. Tu ne connaissais qu’elle. Mais au détour du couloir, la silhouette qui examinait les alentours se fit soudainement familière. Un froncement de sourcils, bref, faiblard, comme pour témoigner d’une amertume mal cachée. Tu n’avais pas besoin de voir son visage pour savoir que c’était lui ; au fond, tu l’aurais reconnu les yeux fermés. “Ben,” un maigre souffle, hésitant, peut-être de peur que l’impression ne soit fausse. Mais c’était bien lui, là, inchangé, fatigué par le poids de ce qui ne se dit pas. “Qu’est-ce que tu fais ici ?” Une surprise trop flagrante, des yeux fuyants, l’envie probablement de rendre la pareille, d’offrir une épaule froide et tendue. C’était ce que tu voulais faire, d’abord, mais ta bouche tressaillait d’incertitude, luttant pour ravaler des mots que la fierté refusait. “Ça fait bien longtemps.” Le ton lourd de reproches mais les yeux tendres, il était difficile de lui en vouloir : il semblait troublé, plus qu’il ne l’aurait normalement laissé paraître, assez pour que les masques tombent.

De marbre, tu attendais. Tu attendais qu’il ne baisse la garde en premier, qu’il ne montre faiblesse avant que tu le fasses ; tu voulais gagner ce jeu stupide après toutes ces années, au moins ça. Si tu ne pouvais lui en vouloir de s’être éclipsé, tu pouvais néanmoins essayer. Il fallait qu’il se brise en premier pour que tu t’adoucisses à ton tour. Et même si personne ne regardait, même si le monde semblait vidé de son essence, de la chair qui grouillait à droite, à gauche, les vieilles habitudes vous laissaient tendus, prudents, prêts à retourner à leur place à la moindre nécessité.

Mais pendant une seconde, gelée dans le temps, un voile de tristesse passa dans ton regard. Comme il était odieux et difficile de faire croire à Ben qu’il ne t’avait pas manqué, et usant d’essayer de croire à ta propre mascarade. Un soupir, une mèche derrière l’oreille, une pincée d’inquiétude. Toi et l’affection n’aviez jamais été amies, mais tu voulais presque le serrer dans tes bras. C’était si inattendu, si inespéré.

Les mots se bousculèrent au bord de tes lèvres. Les choses que tu avais voulu lui dire tout le temps qu’il était ailleurs, les secrets que tu n’avais pu lui confier en son absence, et surtout, surtout, le réconfort inavouable de le revoir. Mais au lieu de retrouvailles larmoyantes, le coeur pincé, tu déglutis, ravalant ta joie comme pour être prudente. Après tout, c’était peut-être un faux espoir. “Tu as besoin de mes services ?” Une formule simple, professionnelle, parce que tu te devais de l’être, et tu ne voyais pas pour quelle autre raison il serait revenu ici — mais au fond, au fond, tu attendais qu’il ne t’offre le feu vert pour redevenir toi-même. Cela faisait bien trop longtemps que vous ne l’aviez pas été. Un vieil ami, enfin retrouvé, mais pour combien de temps.
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Mes condoléances. Il acquiesce, remercie. Quel homme courageux, votre père. Il acquiesce, serre des mains. Quel héritage… Mais vous saurez le rendre fier, Benjamin. Il fait des signes de tête, on tapote affectueusement ses épaules. C’est presque devenue une chorégraphie, et il commence à la maîtriser à merveille. C’est fatiguant, de recevoir tous les amis, employés, anciens camarades d’école de son père. À vrai dire, Benjamin n’avait pas vraiment conscience que son père connaissait autant de monde, avant qu’il ne meure. Il a eu beau le seconder depuis sa sortie de Poudlard et observer ses relations avec toute la société sorcière, il ne s’attendait pas à ce que tant de monde débarque au manoir Rosier, avec des cadeaux, des gâteaux, des souvenirs. C’est étrange : il continue de se retourner pour chercher l’approbation de son père, pour voir dans ses yeux s’il fait le bon choix, mais il n’y a plus personne. Et pour la première fois de sa vie, les adultes le regardent vraiment dans les yeux. Jusqu’à maintenant, on ne voyait que son père, et il se contentait d’être en retrait, à observer, prendre des notes, être poli. Mais maintenant, c’est lui qui récupère le titre de Monsieur Rosier, et il a déjà l’impression qu’un énorme poids s’est abattu sur ses épaules.

Sa mère n’est pas vraiment en état de recevoir les divers invités qui défilent depuis près d’un mois. Elle fait des efforts, mais il est rare qu’elle tienne plus de dix minutes en leur compagnie. Inévitablement, elle demande à ce qu’on l’excuse et va se terrer dans la chambre qu’elle partageait avec son mari désormais disparu. C’est étrange, de la voir comme ça -- elle est devenue un véritable fantôme. Les parents de Benjamin n’ont jamais été des parents exemplaires, et le jeune homme a compris avec les années qu’ils étaient devenus parents plus par obligation que par véritable désir -- mais s’il y a une chose qu’ils ont réussi à lui apprendre, c’est qu’on peut s’aimer, vraiment. Fergus et Jieun s’aimaient. Profondément. Passionnément. Au point qu’ils ont toujours eu du mal à faire de la place à leurs enfants. Benjamin est donc profondément inquiet : que va-t-il advenir de sa mère, maintenant que son père est parti ? Va-t-elle seulement réussir à survivre sans lui ? Il n’en a aucune idée.

Mais il se doit de lui laisser du temps. Alors il se charge d’accueillir les invités, de faire la conversation, de signer les papiers et les d’accepter les cadeaux. Il se sent comme un automate, qui répète systématiquement les mêmes mots, qui enchaîne en boucle les mêmes gestes. Il est fatigué, profondément fatigué. Mais pourtant, il ne trouve pas le sommeil. Ses nuits sont courtes, pleines de questions existentielles et de peurs irraisonnées. L’idée même d’éteindre la lumière l’effraie : c’est comme si l’obscurité rendait la pression qui s’est abattue sur ses épaules un peu plus lourde, un peu plus oppressante. Alors il lit, il quitte le manoir aux aurores pour traîner dans les rues vides du Londres sorcier, et parfois même du Londres moldu.
Il observe les passants, s’imagine à leur place, pense à s’enfuir, aussi.

Mais il ne peut pas, il ne peut pas fuir, parce que tout repose sur lui désormais, et en premier lieu l’énorme fardeau qu’est l’entreprise familiale. La vérité, c’est qu’il ne s’était même pas posé la question quand son père est mort : il était persuadé que la direction de Rosier Events irait à son oncle, Aloysius. Mais quand les agents du ministère sont venus présenter le testament de son père, il est complètement tombé des nues (et Aloysius aussi). Maintenant, il faut qu’il devienne un patron en l’espace de quelques semaines. Il faut qu’il ait les épaules, qu’il soit à la hauteur. Son père comptait sur lui, lui faisait confiance, sinon il ne lui aurait jamais légué la plus grande oeuvre de sa vie. Benjamin se demande quand même ce qui est passé par la tête de son père : ils n’ont jamais été très proches, tous les deux. Et puis son père a très clairement observé ses périodes de faiblesse, celles pendant lesquelles il doutait que le chemin qu’il suivait était le bon. Vraiment, aucun homme sensé n’aurait confié une telle entreprise à un gamin aussi instable. La seule explication qu’il ait trouvée, pour l’instant, c’est que c’était un moyen pour son père de s’assurer que Benjamin ne dévierait pas du chemin qu’il avait prévu pour lui. Tout comme à l’époque, quand il l’a encouragé à prendre la marque.
Foutue prison dorée.

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8h15 Ben s’est faufilé dans l’ambiance étrange mais familière de l’allée des embrumes, ses traits cachés par la capuche de sa cape, rabattue sur sa tête. Il sait qu’il ne devrait pas être là -- il n’ose même pas imaginer ce qui se dirait si quelqu’un le reconnaissait. Heureusement pour lui, le racisme ordinaire des londoniens jouerait probablement en sa faveur : combien de fois a-t-il été confondu avec l’un de ses cousins, ou avec l’un des membres aléatoires d’une des familles japonaises, vietnamiennes ou chinoises venues s’installer à Londres ? Il ne les compte plus. C’est tout de même avec précaution, et un dernier regard derrière lui qu’il passe la porte de la petite boutique dans laquelle il n’est pas rentré depuis… des années.

Ben a l’impression qu’il revient des années en arrière, en s’invitant en ces lieux. Après une inspiration, il retire sa capuche, et observe autour de lui. L’endroit est plus exigu que dans ses souvenirs, pour une raison étrange. Il entend du bruit, au fond, et décide de laisser la propriétaire des lieux venir à lui, en espérant qu’elle ne lui demande pas de partir dès qu’elle le verra. ”Ben,” Il esquisse un faible sourire. Sulpicia semble hésiter, comme si elle n’était pas sûre qu’il soit vraiment là. Il ne peut pas lui en vouloir : il est vrai que sa présence est un peu improbable. “Qu’est-ce que tu fais ici ?” demande tout naturellement sa vieille amie. “Ça fait bien longtemps.” Plutôt oui. Trop longtemps, même. Il ne peut s’empêcher d’observer la brune, à la recherche de changements, de détails prouvant qu’elle n’est plus la même qu’à l’époque où ils étaient vraiment amis. Mais il ne voit rien : Sulpicia a toujours ce regard un peu tendre, toujours la même élégance, et il ne peut s’empêcher de penser qu’elle lui a manqué. Ça lui fait du bien, ce visage familier au milieu de la tempête.

Sulpicia reste pourtant distante - et il ne peut pas la blâmer. “Tu as besoin de mes services ?” Il expire un petit rire triste, et baisse les yeux sur ses mains jointes devant sa cape. « On peut dire ça, oui. » Il pince les lèvres, ne sait pas trop par quoi commencer. « Est-ce que… » Il jette un regard par-dessus son épaule, en direction de la devanture de la boutique. « Est-ce que tu penses qu’on pourrait parler ? En... hum… privé ? » Il n’est pas à l’aise, toujours flippé à l’idée que quelqu’un le surveille. Il relève finalement les yeux vers son ancienne amie, avec un air désolé dans les prunelles. « Je débarque un peu à l’improviste, excuse-moi. Si tu as besoin de travailler je peux me mettre dans un coin. » propose-t-il, soucieux de ne pas donner l’impression qu’il attend qu’elle mette tout en parenthèse pour lui. « J’ai… J’ai besoin de ton aide. » dit-il d’abord, mais le manque de sommeil et la solitude pesante qui le tenaillent depuis des jours ont raison de lui, et ses yeux s’embuent un peu. « Non, en fait… En fait j’ai vraiment besoin d’une amie. De mon amie. » avoue-t-il, incapable de garder plus longtemps la façade qu’il sert à tout le monde depuis le jour où son père est mort.
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Ben est bien là, après des éternités à ne pas l'avoir été, et il revient comme une fleur pour quémander son aide. Pourquoi, elle l'ignore, mais difficile de rester de marbre face à son tourment. « En privé ? » qu'elle marmonne tout bas, sans comprendre. La pièce était vide, à l'exception du mort dans l'arrière-boutique, qui ne pourrait répéter leurs secrets qu'au silence, et les ruelles dehors étaient presque désertes. Sulpicia s'offusque sans rien dire, s'apprête à lui rappeler qu'ils sont déjà seuls, mais il continue, la voix suppliant presque, et elle tente d'en ignorer l'urgence tant elle lancine.

Il a l'air de Ben, mais rien ne sonne comme il le devrait. C'est de la tristesse, peut-être bien, de celle qu'elle observe souvent durant les cérémonies, et puis une pointe d'autre chose, un mélange infernal de nostalgie et de culpabilité. Du moins, c'est ce qu'elle se dit, c'est ce qu'elle espère. Le mal en elle voudrait qu'elle se rebelle contre celui qui l'a oubliée, qui l'a laissée derrière – elle pourrait lui rendre la pareille, épaule froide face à sa demande, une sentence qu'il n'aurait que méritée. Pourtant elle hésite, trop tendre pour quelques privilégiés, fragile quand on s'ouvre à elle.

Ce genre de choses ne l'aurait sans doute pas touchée habituellement. Les pleurnicheries, les niaiseries, elle n'en avait jamais voulu. Mais c'était Ben, et une part d'elle avait il y a longtemps abandonné l'idée qu'il reviendrait vers elle un jour. Son orgueil lui crie que sa venue est égoïste, et elle l'écoute en penchant la tête sur la côté, pesant le pour, pesant le contre. Sulpicia réalise un peu trop tard que ses yeux se sont faits humides, et elle cherche dans ses souvenirs pour trouver pareille occurrence, mais rien. Les gens comme Ben n'avaient pas le droit de se montrer vulnérables, et peut-être était-ce pour ça qu'il avait insisté pour qu'ils soient seuls, à l'abri de tout regard. S'en rendre compte la déboussole, la choque presque, et elle comprend qu'elle ne sait pas comment consoler quelqu'un – même après avoir vu endeuillé après endeuillé dans ses sombres cérémonies sorcières.

« Ton amie ? » qu'elle commence, un peu plus sèche qu'elle ne l'aurait voulu. « Alors je suis encore ton amie, après tout ce silence ? » Elle croyait qu'il l'avait oubliée. Peut-être était-ce le cas. Peut-être n'y avait-il plus qu'elle, un dernier recours, une seconde option. L'idée l'attriste, mais elle la sait possible, les humains sont bien vils. Cependant, elle songe à Ben, à leurs bons moments passés ensemble, même si la plupart demeuraient dans l'ombre. Il n'était pas de ceux qui se jouaient d'autrui, du moins pas de ceux qu'ils avaient un jour aimé. C'était une amitié dangereuse, mais elle y avait tenu aussi fort qu'elle pouvait, malgré les gouffres et les différences, quitte à se brûler les doigts. Ses souhaits étaient exaucés, lui revenu, alors pourquoi crachait-elle ?

Elle ne put s'en empêcher, venin encore nécessaire, des mots qu'il valait mieux laisser aller s'ils ne voulaient pourir à l'intérieur. « Alors le grand Benjamin Rosier n'a personne d'autre sous la main ? » un rire jaune qui résonne en blessure. Sulpicia avait bien espéré qu'il viendrait plus tôt. Il avait probablement eu ses raisons, et elle comprenait. Mais la chose demeurait douloureuse.

Puis elle lâcha un long soupir, fixa le sol un instant comme pour réfléchir. Son ton devint doux, faute à moitié pardonnée, elle rageusement attendrie par les yeux de Ben. « J'ai appris. Pour ton père. » Nul besoin de prendre des gants, ils ont fait bien pire. « C'est sûrement pour ça que tu es ici, hein ? » qu'elle devine, sans vraiment savoir pourquoi il aurait besoin d'elle dans une période de deuil. Elle n'apportait soutien à personne, elle, elle se contentait de rendre service aux morts. Mais Ben était bien vivant, et elle ne savait quels mots choisir. Elle ne lui offra aucune condoléance, elle ne savait que trop bien à quel point ces mots pouvaient s'avérer vides de sens. Au lieu de ça, elle s'avança avec hésitation, puis posa une main délicate sur son épaule, comme pour établir le pardon, comme pour lui rappeler qu'elle était là, qu'elle l'avait toujours été, et que, naïvement, elle le serait peut-être toujours. « Tu peux pleurer, avec moi. » Un sourire se fend, triste et timide, et elle laisse tomber le masque.
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« Ton amie ? » Il capte la rancune sans qu’elle ait à prononcer un mot de plus, et ne peut pas dire qu’il est surpris. Comment pourrait-il même lui en vouloir ? Il l’a complètement laissée de côté depuis que l’algorithme a révélé qu’elle n’avait pas les conditions requises pour faire partie de la société dans laquelle ils ont grandi. « Alors je suis encore ton amie, après tout ce silence ? » Il ne peut s’empêcher d’avoir envie de répondre un Évidemment! sans hésitation, sans détours… Parce que c’est la vérité pour lui. Quand bien même ils ne se sont pas vus depuis longtemps, quand bien même la vie les a mis sur deux chemins différents, elle a toujours été une amie à ses yeux. L’une des seules personnes qu’il n’ait pas été forcé de fréquenter, l’une des seules personnes qu’il a laissé entrer dans sa vie par choix et pas par obligation. Parce que oui, même quand ils étaient tous les deux officiellement sang-purs, Benjamin n’avait pas l’impression de devoir être ami avec Sulpicia. Il se sont toujours appréciés sincèrement - du moins c’est ainsi qu’il le ressent - et il s’est toujours senti à l’aise avec elle. Et dieu que les personnes avec lesquelles il se sent à l’aise sont rares. Les membres de sa famille n’entrent certainement pas dans cette case, à part peut-être Celyn, son cousin avec qui il a grandi et partagé sa scolarité à Poudlard. Après tout, Celyn a été suffisamment loyal pour taire l’un des plus gros secrets que Benjamin ait jamais eu alors qu’il avait toutes les raisons de le trahir… Ça prouve quelque chose. En dehors de lui, il y avait Sulpicia, et Sohan. Sohan, qui a lui disparu de la circulation depuis des années maintenant. Benjamin n’a absolument aucune idée d’où est passé l’ancien Serpentard, qui avait réussi à creuser suffisamment pour rencontrer le vrai Benjamin, celui qui ne se cache pas sous des conventions et un air avenant mais lisse.

« Alors le grand Benjamin Rosier n'a personne d'autre sous la main ? » Il ne sait même pas quoi lui répondre, les mains enfoncées dans son grand manteau noir. La vérité, c’est que non, il n’avait personne d’autre. Pas juste sous la main : il n’a personne tout court. Il n’a jamais eu personne à part elle, Sohan et Celyn, et ce qui le tracasse, ce n’est certainement pas quelque chose qu’il peut évoquer avec son cousin. Benjamin se prépare à formuler des excuses, mais Sulpicia soupire et reprend la parole avant qu’il ait eu le temps de trouver ses mots. « J'ai appris. Pour ton père. » Il relève les yeux. « C'est sûrement pour ça que tu es ici, hein ? » Il aimerait que les choses ne soient pas aussi évidentes. Il aimerait lui dire qu’il est venu la voir parce qu’il avait juste envie de passer, mais ce serait mentir. Il ment déjà beaucoup trop au quotidien pour mentir devant elle.

Alors qu’il ne s’attend pas à grand-chose de plus, elle avance et pose une main sur son épaule. Ce geste est simple, mais c’est comme un tsunami pour le jeune homme. Parce que le geste est sincère, et qu’il vient de quelqu’un qui aurait dû trop lui en vouloir pour faire quelque chose comme ça. Sulpicia est passé outre sa rancune pour lui offrir ce simple geste de confort, et ça compte beaucoup plus que toutes les autres condoléances reçues depuis quelques jours. Il inspire un grand coup, afin de réfréner les larmes qui menacent de monter. « Tu peux pleurer, avec moi. » dit-elle, comme si elle avait lu dans ses pensées.

Les yeux avec lesquels il la regarde sont un peu humides, c’est clair. Mais il ne veut rien laisser paraître, même si elle lui a dit qu’il pouvait. Il n’aime pas pleurer devant les autres. Il n’aime pas pleurer tout court, et comme un idiot, il réprime, pensant que c’est ainsi que tout va s’arranger. « Merci. » dit-il simplement. D’un coup de baguette, il teinte les quelques fenêtres qui pourraient révéler leur rencontre à l’extérieur, et quand il est sûr qu’on ne peut les voir, il pose sa main sur celle que Sulpicia a posé sur son épaule et la serre un peu. « Je suis désolé. » finit-il par dire. « Je suis un idiot. » admet-il en ne lâchant pas son amie des yeux. Il veut qu’elle comprenne qu’il n’a pas peur de s’excuser. Qu’il ne le dit pas juste pour la forme. « Je t’ai laissée tomber au moment où tu avais le plus besoin de moi. » Le monde est tombé sur la tête de son amie, deux ans auparavant, et au lieu de la soutenir, il s’est protégé. « J’ai été égoïste, j’avais peur, et je le regrette. » Il lance un regard à l’entrée. « J’ai toujours peur. Je suis toujours lâche. » fait-il en penchant la tête sur le côté. Il n’y a qu’à elle qu’il peut dire ça. Avouer ça. « Mais il n’y a qu’à toi à qui je peux parler, que toi vers qui je peux me tourner sans jugement. J’aurais dû le réaliser plus tôt. Je sais que c’est égoïste de ma part de venir comme ça, pour ça. » Il baisse un peu les yeux par terre. « Qu’est-ce que je peux faire pour que tu me pardonnes? » demande-t-il, même si ça a l’air complètement désespéré. Il n’est plus à ça près : elle l’a bien compris, qu’il était désespéré.
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Elle le regarde sans comprendre. Même quand elle était sang-pur aux yeux avides du reste du monde, personne ne lui avait jamais demandé une telle chose. Un pouvoir immense au creux de la main, le rôle de bourreau ou de miséricordieuse, tout ce qu’elle pourrait imaginer dansant sous ses yeux gamins. Que faire pour qu’elle lui pardonne ? Sulpicia, l’orgueil comme seconde peau, aurait probablement dû y songer dans son silence pénible, s’imaginer mille châtiments pour que Ben regagne son estime — mais elle n’était pas de ceux qui, déraisonnables, demandaient monts et merveilles pour une faute qui s’avérait humaine.

Pas que l’amertume s’en soit allée, elle le sentait bien, là, au creux du ventre comme une vilaine blessure qui ne cessait d’enfler et enfler encore. Le pouvoir de tout décider lui démange le cœur, et elle retient les usages inférieurs du pardon que certains, trop naïfs, louent ici et là. Le pardon n’a jamais été sa chose à elle, trop fière pour absoudre, trop vive pour oublier ; alors elle n’en fait rien, gardant le feu au bord des lèvres comme pour le punir encore et encore. « En effet. » Elle n’offre rien de plus que la vérité, acceptant les excuses sans pourtant s’en contenter, quand finalement revient la douleur des années passées, de cette solitude mortifère dans laquelle elle se perdait jour après jour. Les alliances du temps de Poudlard n’avaient plus lieu d’être, elle ancienne leader oubliée par la mauvaise nouvelle faisant ravage dans le monde sorcier : jamais on n’avait envoyé une seule lettre, souhaité le moindre bonheur. Oubliée, c’est ce qu’elle était ; perdue, ce qu’elle était devenue. Trop lucide, Sulpicia n’avait pas une seule fois espéré qu’on franchisse sa porte pour lui donner excuse après excuse, pas plus que de signer une lettre en son nom pour qu’une chouette anonyme vienne déposer miracle à sa fenêtre. Non, elle savait bien comment fonctionnait le monde. Un monde auquel elle avait cessé de faire partie depuis longtemps, vivant comme marginale auprès de ceux qui ne pouvaient plus lui reprocher quoi que ce soit. Un mort, c’est un mort, qu’elle se répète tous les matins en peignant des chevelures fades, en passant des doigts gantés le long de mâchoires inertes.

L’habitude fait rage et elle hésite, l’envie de le tourmenter pointant du coin de l’oeil. Mais qu’aurait-elle à y gagner ? Ben s’offrait d’ores et déjà à ses caprices, acceptant une quelconque sentence pour se repentir de ses fautes, et c’était bien plus qu’elle n’avait espéré. Alors elle se concentre sur la chaleur de sa main contre la sienne, se rappelle qu’il n’y a de vrai que lui et elle, ensemble finalement, comme un de ces dénouements auxquels elle n’a jamais cru. « C’est vrai. J’avais besoin de toi. » Elle aurait bien cité le nom de ceux assez courageux pour rester près d’elle en temps de tempête, mais il n’y avait eu personne. Même son paternel, rude et cruel, avait trouvé bon de faire l’absent, tournant son dos à ses filles qui n’avaient pourtant rien demandé. La faute venait de la mère, ainsi il n’avait pas eu à se reprocher d’autre faute que d’avoir choisi le mauvais parti, même s’il n’aurait pu le deviner. Le sang souillé, pas moins fier pour autant, les filles Weir s’étaient retrouvées seules. Pas plus solidaires, Sulpicia le mouton noir dont on évitait de prononcer le prénom. Les larmes ne viennent pas, peu importe à quel point les souvenirs se sont vifs et réels dans des yeux fragiles. Endurcie par la vie, trop habituée aux coups et aux insultes, aux regards dégoûtés jetés vers elle, et même Ben frappé par la malchance n’aurait suffi à la ramener à la vie. Après tout elle n’avait jamais aimé le père de Benjamin, pas plus que son propre père. Comment pouvait-elle pleurer la perte d’hommes comme eux, brutaux et impitoyables ? Mais peu importe.

Une dernière pression dans ces mains qui se tiennent et elle reprend la sienne, époussette sa robe et réajuste distraitement le col ancien de sa sous-chemise. « Tu sais comme moi qu’on ne revient pas à en arrière. » Faute d’avoir les artéfacts nécessaires, ou faute de pouvoir imaginer une vie un brin différente, on se contente du présent, même si ça n’est pas grand-chose. « Mais c’est bon. Pas besoin de te faire souffrir davantage. » Au fond elle se délecte d’être en position de pouvoir, en terrain connu, sa poigne légèrement plus forte que celle de Ben en ce jour si fébrile. Il aurait si facile de lui faire du mal si elle l’avait voulu, lui reprocher plus encore que ce qu’elle avait déjà laissé paraître dans son regard amer. « Les promesses n’ont pas de véritable valeur sans les serments inviolables qui se font de mise, et je n’ai pas non plus espoir qu’une famille de sang-pur comprenne à quel point ces années ont été rudes pour les gens comme moi. » Un soupir, alors qu’elle regarde ailleurs, ces murs noirs et poussiéreux qui semblent se refermer sur elle parfois. « Je veux juste ton honnêteté. » De tous ceux qu’elle connaissait, il était peut-être le plus authentique, même si ses concurrents ne faisaient pas fort effort. Les camaraderies de Poudlard oubliées depuis longtemps, et le monde trop solitaire pour que quelqu’un ne daigne lui accorder une seconde.

« Ça t’affecte tant ? La disparition de ton père, je veux dire. On sait tous les deux que nos familles ne sont pas des plus faciles. Je ne t’aurais pas jugé si tu te sentais… tu sais, soulagé. » C’est ce qu’elle, elle aurait ressenti, en tout cas. C’était sans compter sur leur peau endurcie au fil des années, fabriqués dans la roche pour ne jamais flancher devant la faiblesse. « Alors qu’est-ce qui ne va pas ? » Ou peut-être que c’était elle qui ne fonctionnait plus si bien, à force de manipuler des corps sans vie, de côtoyer cette mort couleur émeraude que le reste du monde semble redouter si fort. Puis elle la reconnaît, la peur du faux pas, celle-là même qui l’avait poussée à obéir aux ordres des mages noirs devant sa soeur. Elle non plus, n’avait pas été irréprochable. Le savait-il ? Était-il ici en toute connaissance de cause ? Alors pas besoin de s’excuser. Sulpicia avait fait bien pire que de balayer une amitié par fierté.
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La fierté, c’est un sacré sujet, chez les Rosier. Quand Benjamin fait ou dit quelque chose, il doit l’assumer parfaitement, même s’il sait qu’il est en tort. Tout, sauf reconnaître qu’on s’est trompé. Tout, sauf avouer devant quelqu’un d’autre qu’on n’a pas pris la bonne décision. Son père n’a jamais été un symbole de pardon ou de bon sens : Benjamin l’a vu plus d’une fois dans des situations délicates, à devoir justifier ses gestes et ses paroles en s’enfonçant dans des mensonges pour la simple et bonne raison qu’il était hors de question de reconnaître qu’il s’était trompé. Le sang pur, l’argent et la réputation de la famille ont toujours joué en sa faveur, et c’est ainsi qu’il a élevé son fils également. Il ne faut pas s’excuser : tout ce que tu fais, tu le fais dans ton bon droit, et les autres n’ont pas le droit de te juger. Même devant les personnes qui lui sont le plus proche, ses cousins, Benjamin n’a pas l’habitude de s’excuser. Alors forcément, demander son pardon à Sulpicia, c’est un sacré pas pour lui. Il ne sait pas si elle s’en rend vraiment bien compte. Si elle se rend compte à quel point ce n’est pas anodin, ce qu’il fait là tout de suite.

Elle n’a même pas encore répondu, mais Benjamin se rend compte qu’il se sent déjà un peu mieux. Dire à haute voix ce qu’il pense de lui-même dans cette histoire, ça a enlevé un tout petit poids de ses épaules, déjà, même si ça n’excuse en rien son comportement. « En effet. » commence-t-elle, et il ne sait pas trop bien ce qui va suivre. « C’est vrai. J’avais besoin de toi. » C’est un nouveau poids qui s’ajoute à sa culpabilité. Il sait qu’elle a raison de le lui dire. Après tout, il vient lui-même de le reconnaître. Mais que ça sorte directement de la bouche de Sulpicia, ouais, ça lui fait un peu plus mal que quand ça sortait de sa bouche à lui. Une part égoïste de lui aurait aimé qu’elle lui dise qu’elle n’a pas souffert de tout ça, et qu’il peut arrêter de jouer les gamins désolés parce qu’elle s’en fiche. Mais ça aurait été trop facile, et il ne mérite clairement pas la facilité, après avoir agi comme un lâche. Alors il accepte avec un silence la déclaration. Elle avait besoin de lui, il l’a laissée -- il assimile son erreur. C’est arrivé, il ne peut pas revenir en arrière, il peut seulement faire mieux, désormais. Et c’est pour ça qu’il est là : pour faire mieux. « Tu sais comme moi qu’on ne revient pas à en arrière. » finit-elle par dire, faisant écho à ses pensées. « Mais c’est bon. Pas besoin de te faire souffrir davantage. Les promesses n’ont pas de véritable valeur sans les serments inviolables qui se font de mise, et je n’ai pas non plus espoir qu’une famille de sang-pur comprenne à quel point ces années ont été rudes pour les gens comme moi. » Ça aussi, ça lui fait mal de l’entendre. Les gens comme moi. La distance claire est mise, et il sait très bien que ce n’est pas Sulpicia qui l’a tracée, cette frontière, mais bel et bien la société à laquelle il participe au quotidien. Il y a quelques temps encore, Sulpicia était des leurs. Il y a quelques temps encore, ils formaient tous une communauté sorcière diverses, même si des discriminations et préjugés hérités de l’histoire existaient toujours. Mais maintenant… Maintenant on a créé des limites entre les gens, entre les mondes. Il est du bon côté de la barrière, est privilégié au quotidien et, c’est vrai, il en profite, même s’il n’en est pas particulièrement fier. Entendre Sulpicia mettre un mur entre elle et ceux qui étaient les siens avant… Ça lui fait un drôle d’effet. Peut-être parce que, justement, il n’a pas eu l’habitude de se confronter à d’autres gens que ses camarades sang-purs, depuis que les lois du nouveau gouvernement sont passées. Elle a raison, il ne peut pas comprendre ce qu’elle traverse, mais en tous cas, il se sent mal. Ça ne suffit pas, mais ça fait déjà une différence par rapport à tous ceux qu’il connaît qui sont juste indifférents à tout ça. « Je veux juste ton honnêteté. » Il se contente d’acquiescer, comme une promesse silencieuse - même si ce n’est pas aussi radical qu’un serment inviolable.

« Ça t’affecte tant ? La disparition de ton père, je veux dire. On sait tous les deux que nos familles ne sont pas des plus faciles. Je ne t’aurais pas jugé si tu te sentais… tu sais, soulagé. » Il est mal à l’aise devant cette remarque, et passe une main dans ses cheveux comme pour chasser la gêne. Il est venu là pour être honnête non ? Alors pourquoi se sent-il aussi mal, comme si son père pouvait entendre ce qu’il confie à Sulpicia. L’habitude d’être surveillé, probablement. « Alors qu’est-ce qui ne va pas ? » Benjamin soupire, et enfonce un peu plus les mains dans son grand manteau. Il finit par s’adosser au mur, et par poser la tête contre celui-ci. Je… Ce serait mentir de dire que je ne suis pas soulagé. avoue-t-il à voix basse, toujours un peu fébrile à l’idée qu’on puisse l’entendre. Mon père… Enfin tu sais bien, il n’a jamais été un père exemplaire. C’est un euphémisme. Fergus était un père absolument nul. Et encore, Sulpicia ne sait pas tout : elle ne sait pas comment il a écarté sa grande soeur, comment il l’a fait passer pour morte parce qu’elle avait la malchance d’être cracmole. Mais tant qu’il était là, eh bien… On ne me regardait pas tant que ça, tu vois ce que je veux dire ? On surveillait un peu mes fréquentations, mon allure, ma manière de m’exprimer… Mais on n’attendait pas de moi que... Il s’interrompt, et sort ses mains de ses poches pour aller passer ses doigts sur la marque qui orne son bras. Il m’a nommé héritier de Rosier Events. Je ne comprends pas pourquoi. Il était censé nommer mon oncle! C’était une évidence! dit-il en frappant plusieurs fois légèrement sa tête contre le mur derrière lui. Pourquoi moi ? Je ne comprends pas. Je ne comprends vraiment pas. Il ferme les yeux. Maintenant qu’il est mort… Ça va être à moi de faire la réputation de la famille. Auprès des sorciers mais aussi auprès du Lord. explique-t-il.

Il rouvre les yeux et tourne son visage grimaçant vers Sulpicia. Comment je suis censé faire ça ? Je voulais même pas prendre la marque. Je voulais juste faire mon boulot, vivre normalement... Il secoue la tête. Au cas où tu ne l’aurais pas compris je panique complètement. ajoute-t-il avec un sourire un peu triste, comme pour détendre l’atmosphère.
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Les mots font écho entre les murs délabrés de la boutique et Sulpicia, la poitrine lourde comme infestée d’énormes cailloux au poids du regret, ne peut s’empêcher de vérifier autour d’eux si une oreille traînerait. Il n’y a personne, bien sûr ; il n’y a jamais personne. Mais par les temps qui courent, on n’est jamais trop prudent, qu’elle se dit, alors même que son ami fait des aveux qui coûteraient bien trop cher, fussent-ils répétés. Sulpicia, peureuse comme tout, n’en dira pas un mot, pourtant. Elle sent bien dans chacun de ses mouvements qu’on ne l’aurait jamais accueillie parmi les rouge et or, qu’on n’aurait jamais fait louange de ses prouesses si braves. C’est injuste, mais c’est comme ça : quand on naît Serpentard, on naît lâche, parce qu’au moment où l’on arrache son premier souffle, si fatidique, si triste, on s’offre une vie de mensonges et de peur, dans l’ombre affamée que projette le Lord, chaque jour un peu plus. Difficile d’y donner son cœur sans se perdre en chemin, elle le sait, elle l’a bien vu. Elle aussi elle s’est perdue. Et si l’on avait approché sa fragile intimité pour la persuader d’espionner son propre parti pour le compte des aurors oubliés, elle n’aurait que pu souffler une excuse en prenant le chemin opposé. Mettre le plus de distance possible entre elle et le bien, de peur qu’on ne la juge, de peur qu’on ne réalise qu’il ne courre dans ces veines glacées que de la honte, et rien d’autre.

Alors, elle comprend. Elle sait comment sont les pères des gens comme eux. Elle sait comment l’on élève les enfants d’hier, les adultes d’aujourd’hui, tous bouleversés par la peur qui les marque. Sulpicia laisse ses yeux observer le parquet poussiéreux, l’ébène terni par les années, puis pousse un fébrile petit soupir.

« Je sais bien, oui. » Impossible de s’en empêcher, quand elle regarde par-dessus son épaule, une fois de plus. « Moi non plus je ne l’ai pas voulue. On peut dire qu’elle est héréditaire, et qu’on est né avec. Ce sont nos familles, nos parents. Nos pères. » Un silence qui veut tout dire, et Sulpicia qui s’oublie un bref instant, à souhaiter la mort de son paternel, lui qui survit à toutes les horreurs du monde. Au moins, celui de Ben était tombé, n’était plus. Au moins, il était libre de son emprise et de son tourment. Et s’il restait tous les autres, au moins, le fardeau qu’était son nom s’était vu allégé par la mort, le cœur un peu moins froid. Elle l’enviait. Quand elle avait entendu la nouvelle, elle s’était d’abord surprise à ressentir cette folle jalousie, sans comprendre pourquoi son père, gargouille des enfers, demeurait toujours si fort, si solide. Elle l’aurait volontiers tué elle-même si elle en avait eu le courage, mais inutile de dire qu’elle n’en avait pas.

« Tu sais, j’ai une théorie. Elle t’a peut-être échappé, c’est vrai. Tu ne t’es jamais dit que tu avais hérité de l’entreprise parce que tu le méritais ? Je veux dire, mon père aurait tué pour t’avoir comme fils. D’ailleurs, il parle souvent de toi, de n’importe qui, de tout sauf nous. Peut-être parce que tu es un homme et pas nous. Mais au fond, je crois qu’ils ont tous conscience que tu es voué à accomplir de grandes choses. Ça n’est pas notre destin à tous », qu’elle rappelle en passant son index sur le meuble le plus proche, relevant un brin de poussière sur le bout du doigt. Elle l’écrase en se frottant les doigts, puis tente un faible sourire. « Tu n’en as pas conscience parce que tu n’es pas comme eux, ceux qui se sont toujours crus au-dessus des lois et des gens. Tu es humble. Du moins, plus humble qu’eux. » Ben était fier, comme n’importe qui de leur espèce pouvait l’être, et elle n’allait pas lui jeter la première pierre. Elle aussi, elle souffrait de cette horrible fierté qu’elle ne parvenait pas à laisser derrière elle. Mais ce qui les rendait différents des autres, c’était leur peur, celle, distillée comme un poison, à laquelle ils s’étaient presque habitués. Une marque qu’aucun d’entre eux n’avait voulue. Alors, elle comprenait. « Je sais que mon entreprise n’est pas de la même envergure, et puis, on m’observe moins qu’on ne t’observe toi. C’est normal, nous ne sommes plus du même rang après tout. Mais si je suis capable de m’en sortir, même rien qu’un peu, alors je ne me fais pas de souci pour toi. »

Et elle sourit, sincère, cette fois, la tristesse bien derrière, parce qu’elle comprend, elle réalise, que Ben a toujours été quelqu’un de fort, quelqu’un qui est censé gagner. Que pas une seule seconde elle n’avait douté de lui, ne s’était inquiétée. Il y avait les gens comme elle, ceux qui subissaient, et puis il y avait les gens comme lui, ceux que la vie poussait vers l’inconnu, cette terre si redoutée qu’elle le savait capable de conquérir, quoi qu’il arrive. « Je crois en toi. Peut-être que ton père y croyait aussi. » Un haussement d’épaules et quelques oui-dires, c’est tout ce qu’elle peut donner, mais elle sait qu’il s’en sortira.
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