scary people

Don't be afraid of the monsters Or the vultures in the sky, See the static on the TV Feel the violence of the night. We fight that fire with fire, because it's all that we got. Our love is burning so bright it can light 'em up. We stick together, we do this forever, Nothing can stop us now, now, now. We live in a scary time, scary place, scary people. Once you cross that line, no going back.

- février 2008 -
tw: violences physiques, asservissement, dissociation mentale
Carrow Manor est calme.
Carrow Manor est toujours très calme.

Comme un monstre proéminent installé là depuis la nuit des temps, fort de ses festins macabres et siestes perverses. Il n’y a toujours que quelques fenêtres où la lumière brille, même en journée car la lande est sombre, et quand la nuit tombe d’autres choses encore brillent ; des lueurs inquiétantes qu’on évoque tout bas dans le petit village moldu en contrebas - de puissants sortilèges d’illusion font croire aux villageois que la colline n’abrite qu’une ruine et certaines de ses légendes les plus abjectes.

Mais, à quelques occasions, le calme de Carrow Manor se brise quand soudain des cris le transpercent. Ce sont souvent ceux des victimes de ses occupants, et parfois ceux de ses occupants eux-mêmes. Celui que vient de pousser Abram est entre le rire discordant et l’enthousiasme affolant. Car oui. Abram a la capacité de rire et de s’enthousiasmer. Même si les bruits qu’il produit alors, et le masque qui s’affiche soudain, n’ont rien d’humains.

Il ouvre à la volée la porte du sous-sols du manoir, une lettre à la main, et traverse le long couloir menant jusqu’au hall d’entrée de son pas cassant mais vif. Il faut qu’il partage la bonne nouvelle avec sa sœur. Elle ne pourra que le rejoindre dans son engouement et savourer avec lui cette victoire douce-amère sur les ennuis qu’Ils (la majuscule générale et unanime des Mangemorts) essuient depuis de trop longs mois - la prise de Gracefield, la mort de cette raclure de Flint, la disparition de Potter, et combien d’autres emmerdes encore à rincer. Abram arrive dans le boudoir affublé de son odieuse risette et s’apprête à interrompre sa sœur comme il le faisait auparavant mais se confronte au vide et au silence. Amabella n’est pas là. Amabella n’est plus là depuis quelques années déjà, se souvient-il peu à peu, tandis que son bras se baisse et que ses ridules se dégradent les unes après les autres. Abram reste un moment coi, incapable de se souvenir ni du jour, ni du mois, ni de l’année dans laquelle il se trouve, puis hausse un sourcil déconfit, laissant ses allures lasses le rattraper après cette folle course.

Ça lui arrive, parfois, se souvient-il tout à coup.
D’être un putain de ravage.

"Longbottom", appelle-t-il d’abord, laissant sa voix nasillarde traîner dans l’air comme une lame émoussée. Abram serre un peu plus la lettre entre ses doigts arachnéens. Il pivote sur lui-même, observant par-delà le boudoir les couloirs qui s’étendent dans le reste de l’aile et comme il n’y a pas de réponse, il récidive. "Longbottooooom." Rugissement long et lent, plein d’aigreur et d’impatience. Toujours rien. Le mage noir se sent couler dans le coaltar de ses vices ; la colère est facile, du plus loin qu’il puisse se souvenir c’est le premier, et peut-être le seul sentiment qu’il ait jamais ressenti et qui l’ait jamais fait se sentir vivant. "LONGBOTTOM", hurle-t-il finalement, crachats de venin postillonnés sur moquette et traces d’horripilation sur les portraits qui portent à leurs oreilles des mains craquelées par le temps.

Quand le petit Neville - qui ne l’est plus tant, ils grandissent si vite ! - apparaît enfin à l’encadrement de la porte, un sortilège le propulse instantanément aux pieds d’Abram, l’échine si basse et courbée qu’il pourrait lécher le sol et son microbiote. "What did I tell you?" Le bout de la botte d’Abram trouve le menton de Longbottom qu’il relève très légèrement, de sorte à ce que leurs yeux puissent se croiser. Ce doit être très pénible pour son captif, attendu que le sortilège d’attraction le contraint encore au ploiement. "I hate to repeat myself, you piece of shit." La botte se lève encore, rendant intolérable l’étirement cervical qu’il inflige au petit Neville. Abram a très envie de continuer. De lui briser la nuque - d’une manière si lente et si aérienne que ça changerait de ses boucheries. Son bras s’abat plutôt, d’un geste rapide de la baguette qui lacère le beau visage de l’éphèbe. Abram n’a jamais aimé le beau.

Il continuera de l’abîmer sur Neville Longbottom.
Jusqu’à ce que le laid et le repoussant prennent aussi racine sur lui.

"Now, make yourself useful and--" Abram s’interrompt, levant le regard vers le plafond. Il a entendu une chaise se reculer dans ce qui se trouve être la salle d’étude. Comme quand il est arrivé dans le boudoir et que sa lucidité s’est faite apathique, il contemple un long moment le plafond d’un air absent. Oui. Alecto, bien sûr, oui. Alecto est de retour. Abram baisse son regard, piqué par une lueur nouvelle, et finit par le reporter sur le captif, toujours à ses pieds, toujours plié, contraint et sanguinolant. Serait-ce des sanglots, qu’il entend ? Ou son imagination lui joue d’agréables tours ? "Oh man up, Longbottom." Il jette sa botte en direction de la mâchoire, un coup de pied qui envoie définitivement Neville contre la moquette. Qu’est-ce qu’il peut détester les traîtres et toustes celleux de l’âge qu’auraient pu avoir ses filles. Les lèvres d’Abram épousent une grimace bouffie de mépris. Il s’approche, range sa baguette, et sans plus de manières saisit Longbottom par le col en l’obligeant à le suivre dans sa nouvelle déambulation.

"The work is almost complete", annonce-t-il de sa voix ennuyée. Il est à la porte de la salle d’étude, la lettre dans une main, Neville dans l’autre, et regarde Alecto comme s’il ne la voyait pas encore tout à fait - Abram a plus l’air de parler pour lui, comme il l’a probablement fait pendant toutes ces années quand Amycus était mort, Amabella mariée et Alecto f--f--f--[blocage]. Ses billes noires enlacées de cernes s’égarent quelques secondes à droite de la joue d’Alecto, tandis qu’il précise, la voix soudain feutrée, habitée. "The Pit…" Un sourire agressif et horriblement joyeux traverse son visage creux. Puis se désarticule alors qu’il reprend, regardant cette fois sa sœur droit dans les yeux, parfaitement conscient de sa présence. "Come and visit the site with me." Il fait une pause. "With us!..." Longbottom est lourd. Il apprécie chaque kilo de ce poids pesant dans sa main serrée autour du col. "I think you might like it, sister mine." Abram est toujours bizarre quand il dit ça. On dirait qu’il pisse sur leur lien de parenté en même temps qu’il l’auréole d’un dévouement impérissable.

Il est content qu’Alecto soit là.
Il l'avait déjà oubliée.

TW: drogue, dépendance, asservissement, violence, dissociation mentale, détresse totale

“ Merci maman. ” Neville sourit mais son sourire ressemble davantage à une grimace. Il tient dans son poing fermé un bout de papier métallique, un emballage de Ballongomme du Bullard dont les franges argentées s'échappent d'entre ses doigts. “ Merci maman, répète-t-il en basculant d'avant en arrière. ” Il a un air ahuri et les yeux écarquillés comme s'il venait de recevoir le grand prix de la foire locale. Ses iris bleus vrillés sur le contenu de sa main affichent une certaine mélancholie. “ Je suis désolé maman, je suis désolé. ” Il se balance de plus en plus fort, de plus en plus vite, ses genoux recroquevillés contre sa poitrine. “ Merci maman... Je suis désolé... ” Il regarde loin devant lui, comme au bout d'un long couloir. Ce qu'il y voit semble le bouleverser. “ Je suis désolé- ” Sa voix se brise et il est secoué de sanglots, sa tête plongée entre ses jambes, son poing toujours serré sur le bout de papier.

“ Longbottom! ” Voix lointaine qui ne lui évoque rien d'autre qu'une terreur viscérale. Son cœur s'arrête et son regard fixe à nouveau loin devant lui. Comme un gibier venant d'entendre le mugissement de son prédateur, Neville reste un instant immobile, le cœur battant à tout rompre, la respiration lourde. Il n'est pas là. Il n'est pas là. Il n'est pas là. “ Longbottooooom. ” Comme s'il attendait ce second appel, Neville se met alors à regarder frénétiquement autour de lui. La réalité s'ancre peu à peu dans son esprit, bien loin du calme blanchâtre de l'hôpital, et se mue en une obscurité étouffante qui lui rappelle où il se trouve réellement. Son regard finit par tomber sur l'emballage dans sa main - celui-ci n'était pas le fruit de son imagination - et il le lâche comme s'il était couvert de venin. “ LONGBOTTOM! ” La voix glaçante d'Abram Carrow résonne dans le manoir tout entier, jusqu'au plus profond de sa moelle. Presque indépendamment de sa volonté, Neville se lève. Son corps endoloris le lance atrocement mais il l'ignore. Les séquelles des nombreuses substances qu'on lui fait ingérer le tirent. Son esprit est un nuage nauséabond de souvenirs réels et inventés, d'images qu'on lui inculque de force, de beauté consumée par l'atroce. Il n'a plus la force mentale de discerner le vrai du faux, le bon du mauvais, aussi rejoint-il maladroitement la source de ces vociférations.

Propulsé aux pieds du mangemort avec une violence inouïe, Neville sent le poids du monde écraser sa nuque jusqu'à ce que ses lèvres gouttent chaque particule de poussière couvrant le parquet. Il n'a plus la force de lutter. “ What did I tell you? ” Tête tournée vers le haut d'un coup de botte, Neville plonge dans l'orbite obscur de son bourreau, happé par ses pupilles sombres comme s'il glissait dans un gouffre, comme s'il tombait dans le néant. “ I hate to repeat myself, you piece of shit. ” Neville émet un grognement. La douleur infligée à son corps et à sa nuque est insupportable. Il sent tous les muscles de son cou tirés jusqu'à leur paroxysme et a l'impression de sentir ses os se frotter les uns aux autres. Pendant un instant, il songe qu'il va mourir. Comme ça, lamentablement, au pied d'un Carrow. Comme si tout ce qu'ils avaient fait, tous leurs efforts et tout leur acharnement, comme si tout ça n'avait servi à rien. Comme si l'AD, comme si l'Ordre et les horcruxes n'avaient plus de sens. Et puis il se rappelle que les Carrow sont avant tout des sadiques et il sent des griffes marquer son visage. Il sent une brûlure insoutenable sur sa joue et un liquide chaud qui perle déjà le long de la plaie. “ Now, make yourself useful and-- ” L'esprit trop embrumé par la douleur, Neville n'entend pas tout de suite ce qui accapare l'attention de son tortionnaire. A la place, il sent une vague d'angoisse le saisir. Il se revoit dix années en arrière, abîmé par la baguette d'un autre Carrow, observant ses amis souffrir eux aussi. Il songe à Ginny et à Luna, il songe à Dean et Seamus, il revoit leurs visages encore poupons qu'on était en train de priver d'innocence. “ Oh man up, Longbottom. ” La violence du coup qu'il reçoit dans la mâchoire lui arrache un glapissement. Il ne s'était pas rendu compte qu'il s'était remis à sangloter mais le choc et la douleur arrêta net ses lamentations.

C'est tout juste si ses pieds le portent. Par deux fois, il manque de tomber en trébuchant sur un tapis, à peine rattrapé par le col et la poigne ferme du mangemort. Neville n'est plus qu'un cadavre sale et ensanglanté qu'on aurait animé comme un pantin. Il n'a plus de volonté, plus de force, et plus aucune notion de la réalité. Il perçoit la voix de Carrow comme s'il se trouvait à l'autre bout d'un long tunnel et ses pupilles dilatées observent le sol sans jamais ciller. Il n'a même pas encore remarqué la présence de l'autre sorcière mais un mot semble bloqué dans son esprit. “ The pit, fait-il dans un grognement à peine perceptible. The pit. ” La peur se peint sur son visage, puis une forme de lassitude. Ses jambes se dérobent sous son poids et il pend à présent pas le col, comme accroché aux volutes métalliques d'une lustre ancien. “ Why is it always me? ” Son murmure plaintif grince comme un crapaud coasse. “ Why is it always me? ” Son visage s'adoucit quelque peu, comme si malgré tout son esprit le plongeait dans un souvenir mélancolique, à défaut d'être heureux.