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MT - "Sache que quoi qu’il arrive, c’est toujours toi que je choisirais, Freya."
Des vœux lourds de sens, que seuls les deux époux étaient alors à même de véritablement comprendre. La signification dissimulée derrière ces belles paroles laissait entrevoir un crime de haute trahison. Sept mois plus tôt, face à Freya Abbott, devant l’autel célébrant votre union, tu lui avais promis le monde. Promis que l’amour que tu éprouvais à son égard serait toujours plus puissant que ta dévotion au Seigneur des Ténèbres. C’était avec une profonde sincérité que tu avais scellé ton engagement par le biais de ces vœux. Même si, bien sûr, l’espoir de ne jamais devoir te retrouver devant le fait accompli, avait manifestement aidé à formuler tes promesses.


FA - "Je suis prête à partager ces risques avec toi, car malgré tout ce qui nous oppose, je ne me vois plus vivre sans ce qui nous rapproche."
Freya Abbott avait bouleversé ton existence dès l’instant où elle en avait franchi le seuil. Elle t’avait rendu ce qu’une décennie d’emprisonnement à Azkaban t’avait dérobé. L’espoir en tête de liste. Oui, tu avais eu la faiblesse de t’en remettre à l’espoir que ton épouse finisse par ouvrir les yeux, par se rendre à l’évidence. Il n’y avait qu’une seule voie possible pour les sorciers tels que vous : la suprématie. Si Freya avait pu laisser ses principes de côté, et su pleinement embrasser votre destinée, vous auriez certainement pu être heureux jusqu’à la fin de vos jours. Vous auriez pu tout avoir. Pour toujours.

FA - "Une fois que j'aurais parlé, plus rien ne sera comme avant."
L’aveu était tombé tel un couperet, dans cette chambre d’hôpital endeuillée de votre enfant à naître. L’effroi qui t’avait alors envahi en entendant l’immonde vérité te donnait, aujourd’hui encore, la chair de poule. Ton monde s’était écroulé une nouvelle fois. La trahison semblait planer sur l’ensemble de tes relations les plus intimes. Maudit, tu ne connaitrais probablement  jamais le moindre amour innocent. On n’a rien sans rien, Marlon. Point de bonheur sans souffrance.

“J’enverrai la Values Brigade l’arrêter dans l’heure qui suit. Mais personne d’autre ne doit savoir que j’étais au courant. Je ne ferai jamais rien qui puisse nuire au Lord.”
A mesure qu’Abbas Shafiq s'engouffrait dans les limbes de ton esprit torturé, les souvenirs accablants s’enchainaient. Tu revivais ces instants dans la plus grande des fébrilités. Tu ne pouvais lutter contre le légilimens, tu n’en avais ni la force ni les capacités. L’angoisse se faufilait sournoisement jusque dans les profondeurs de ta conscience. Tu étais sur le point de tout perdre, de faire imploser ce pourquoi tu avais été élevé, ce pour quoi tu avais tant sacrifié. Tu étais né pour servir la grande cause. La destinée que Torquil Travers avait bâti pour toi s’articulait autour du Seigneur des Ténèbres et de lui seul. Myrthild avait sa famille, Louis avait Travers Households. Mais toi, sans Lord Voldemort, tu n’étais rien.

“Deux escouades pour le niveau neuf, avec moi, maintenant.”
Aucun ordre ne fut jamais plus douloureux à prononcer que celui-ci. Les bureaux de la Values Brigade ne t’avaient jamais paru aussi mornes, le couloir menant aux ascenseurs n’avait jamais semblé aussi étroit qu’en cet instant. Plus tes pas se rapprochaient d’elle, plus tu avais la sensation de suffoquer. Si tu avais fermé les yeux, tu aurais pu voir les murs se rétracter pour venir se refermer sur toi et t’engloutir dans leurs entrailles.

MT - “Je t’aime, Freya.”
Les portes du Département des Mystères s’ouvrent. Freya Abbott exerce son travail, comme toujours, et tente d’apporter sa pierre à l’édifice pour résoudre les anomalies magiques qui secouent les tréfonds du Ministère. Tu ne croises pas son regard, tu ne peux t’y résoudre. Sa simple présence te donne l’impression d’être foudroyé sur place. Tu tâches de desserrer le col de ton uniforme, mais cela ne t’est d’aucune aide. Tu continues de suffoquer. Les secondes s’écoulent comme si elles étaient devenues des heures. Ton cœur se brise en mille morceaux, alors que tu fais signe aux handlers de la Values Brigade de venir s’emparer de ton épouse.

FA - "J'aimerais pouvoir fuir, loin de tout ça. Fuir pour ne pas trahir, pour ne pas choisir. Pour qu'il n'y ait plus que nous. Tous les deux contre le monde entier. "

Existait-il pire crime que celui de trahir les siens, avant de les envoyer droit au trépas ? Briser des voeux de mariage et de belles promesses étaient une chose, condamner son épouse à l’enfer réservé aux traîtres en était une autre. Quand bien même, elle ne finirait pas folle ou pire… Freya ne te le pardonnerait jamais. Tu devrais vivre avec cette culpabilité déchirante jusqu’à la fin de tes jours. Avancer sans elle à tes côtés. Tu l’avais déjà fait, avec peine, certes, mais tant qu’il te restait ta carrière, tes privilèges et ta place auprès du Seigneur des Ténèbres, alors tu continuerais à avancer sans Freya. Mais chaque pas sera plus douloureux encore que le précédent, chaque pas te donnera l’impression de mourir à petit feu, d’agoniser. Freya ne t’accordera pas son pardon, tout comme Vivien n’avait pas eu l’occasion de le faire. Tu n’accèderas jamais à la repentance, tu ne connaîtras point ce sentiment de délivrance que seul le pardon pouvait conférer. On dira que tu l’avais bien cherché, que les monstres de ton espèce ne méritaient rien de mieux. Ta famille te jugera une fois de plus, les journaux se tairont probablement durant un temps. Mais le Lord, lui, sera profondément déçu. Tu redoutais sa réaction, bien sûr, mais celle de Freya te donna la sensation d’être brûlé vif par les flammes d’un magyar. Sa question ne sonne pas uniquement comme un reproche colérique, mais bien comme l’expression douloureuse d’une immonde trahison. Tu sens son regard se poser brutalement sur toi. L’éviter est une nécessité.

“Freya Abbott, vous êtes accusée de crime de haute trahison à l’encontre du gouvernement.” Son nom de famille résonne presque avec une once de soulagement. Un soulagement naïf de croire que ton précieux patronyme ne sera pas entaché par la trahison de cette épouse qui s’était toujours refusée à le porter. Si tu savais à quel point je suis navré. Je n’ai jamais voulu que cela en arrive là. “Au vu des regrettables circonstances qui entourent actuellement le niveau neuf, les agents de la Values Brigade vont vous conduire en salle d’interrogatoire au Département de la Justice Magique.” Dans ton antre, Marlon, au plus près de toi. Ainsi, même lorsque l’ensemble des sortilèges d’insonorisation auront été apposés sur sa cellule, tu auras la sombre impression de l’entendre hurler jusqu’à toi. Sa souffrance te hantera jour et nuit, tu en es déjà parfaitement conscient. Si je tombe avec toi, je ne pourrais jamais t’aider à t’en sortir. “Si vous ne disposez pas d’un avocat, nous vous en fournirons un. En raison du statut qui était le vôtre jusqu’à aujourd’hui, vous aurez le droit à un procès équitable.” Mensonges, odieuses calomnies, que tu récites froidement. Telle était la procédure, et tel se devait d’être le comportement d’un directeur de la Justice Magique irréprochable. Je ne te laisserai pas tomber, je trouverai une solution. Tes pupilles assombries demeurent fixées dans le vide, juste au-dessus de la tête de Freya. Tu sais pertinemment qu’il t’est impossible de croiser son regard. Ses yeux t’avaient fait chavirer à de trop nombreuses reprises. Tu ne pouvais plus courir ce risque aujourd’hui. “Si vous souhaitez prévenir des proches, nous leur ferons part de votre arrestation.” Ce dernier mot s’échappe en rampant d’entre tes lippes, il te serre encore un peu plus le cœur. A quoi bon te promettre quoi que ce soit ? Désormais, tu ne me croiras plus jamais.

Le jour se lève à peine, une douce lueur nacrée s’immisce à travers l'entrebâillement des volets. Au dehors, le ressac qui s’abat sur les rochers de la falaise est léger, la mer demeure aussi paisible qu’à votre arrivée. Tu t’éveilles lentement, tu profites de quelques secondes pour t’extirper des bras de morphée en pleine conscience. Tu ouvres précautionneusement les yeux, prenant bien soin de les laisser s’habituer à la luminosité naissante. Un sourire des plus sincères vient se jucher sur tes lippes, alors que tes pupilles commencent à distinguer le visage encore endormi de ton épouse. Pour la première fois depuis des semaines, ses traits paraissent enfin apaisés. Tu l’observes encore quelques instants, dans le plus grand des silences. Ils sont si rares et fragiles, ces moments durant lesquels vous n’êtes qu’harmonie. Freya et Marlon, point de mangemorts ou de résistants, simplement vous deux. Tu le lui avais promis.

Aujourd’hui, les souvenirs de votre voyage de noce ne sont plus que des réminiscences lancinantes. Le regard désabusé de Freya fait peser sur tes épaules le poids écrasant de la culpabilité. Il te faut lutter pour ne pas fermer les yeux et t’abandonner aux récits passionnés de votre passé commun. Lutter pour ne pas franchir la distance qui vous sépare afin de la serrer contre toi. En cet instant, tu n’aspires à rien d’autre qu’à renouer avec le rythme apaisant et familier des battements de son coeur contre le tien, avec l’arôme sulfureux de son parfum au jasmin qui accompagne les baisers que tu déposes dans le creu de sa nuque. Mais aujourd’hui, l’heure n’est plus aux instants d’intimité volés dans ton bureau. Aujourd’hui, vous n’êtes pas seuls. Vous ne le serez même plus jamais. Du coin de l’oeil, tu aperçois les handlers de la Values Brigade se rapprocher de Freya.

Alors que les souvenirs de ces cinq dernières années affluent en une ébullition chaotique et confuse, tes doigts s’enroulent machinalement autour de ta baguette magique.  Les handlers progressent dans ton champ de vision, ils s’immiscent entre Freya et toi. Ils ne devraient pas être là. Tu veux qu’ils disparaissent sur le champ. Qu’ils partent ou qu’ils meurent, peu importe, tu ne veux tout simplement plus les voir. Et pourtant, ils se rapprochent inéluctablement de leur proie. Tu ne veux pas qu’ils posent la main sur elle, tu ne veux pas qu’ils la touchent ne serait-ce que d’un cheveu. Ta prise se resserre autour de ta baguette. Un seul geste suffirait à mettre un terme à leur progression. Le temps, dans la salle de l’Espace, semble s’être figé. Spectateur du drame de ta vie, il attend fébrilement la suite.

Finalement, c’est la voix de l’être aimé, déformée par le sarcasme et la douleur, qui fait redémarrer l’horloge. Ses reproches se changent peu à peu en un cri du cœur, qui lacère alors le tien au fond de ta poitrine. L’espace d’un instant, tes pupilles se parent d’un voile embué. Tu dissimules alors rapidement ton regard et reportes ton attention sur ta baguette magique. Là, dans le prolongement de ton bras, tu apercois les contours sinueux de la Marque des Ténèbres ancrée dans ta chair. C’est pour elle que tu fais tout cela, pour lui. Pour la grande cause de ta vie, pour celui qui t’as sauvé des enfers alors que tu te croyais damné à tout jamais.

Victime d’une anomalie magique ou bien du drame qui se joue au sein de la pièce, le plafond de la salle de l’espace est soudain parcouru d’éclairs menaçants. Mais tu ne te préoccupes guère de ce qu’il pourrait bien se produire. Tu relèves finalement la tête et reviens fixer ce fameux point dans le vide, juste au-dessus de la tête de Freya. “Je lui dirai.” L’impudence dont tu fais preuve est sans égal. Réalises-tu seulement que ces trois mots seraient peut-être les derniers que tu échangerais avec ton épouse ? Tu avais choisi ton camp, tu ne laissais à Freya, pas le moindre espoir auquel se raccrocher. Les Ténèbres avaient fini par ensevelir la lumière.