Venus, le dossier toujours en main, commence à jouer avec, laisses ses doigts glisser le long des feuilles en écoutant ce que Peter peut bien avoir à dire pour sa défense. Elle le regarde et essaye d'imaginer ce qui a pu lui arriver depuis la dernière fois qu'elle la vu. Elle en connait les grandes lignes, bien sûr, mais ce sont les détails qui l'intéressent. Qu'est ce qu'à bien pu être sa vie depuis tout ce temps ?

"Protection..." Il semble atteint par quelque chose. Venus fronce un peu plus les sourcils. "You have to understand Venus... The Lord, he- he can never die. All the Order's doing is just- wasting their time. He cannot die. You can kill him all you want... If you ever manage to. He'll be back. He will always be back." Alors ça, c'est nouveau. Venus ne s'attendait clairement pas à ce genre de réponse, mais dans un sens, elle peut comprendre ce qu'il veut dire par là. C'est comme une sorte de pouvoir symbolique qu'aurait Voldemort, une soif de violence et une haine tellement vivaces qu'elles sont assez pour le maintenir en vie. Du moins elle l'espère. L'alternative serait... glaçante.

"So why? Why would you keep fighting if you've already lost? I promise you Venus. You have already lost." ça, c'est moins nouveau. Venus a entendu cet argument une bonne centaine de fois. Ce n'est pas rare d'entendre un prisonnier assurer à ses geoliers que c'est lui, le vrai vainqueur, une sorte de méthode pour se rassurer, garder l'espoir, du style "on est au fond du trou mais ce n'est qu'une mauvaise passade." Dans la bouche de Peter, cependant, les mots sonnent différement et Venus se retrouve une nouvelle fois à réévaluer ce qu'elle avait pris pour acquis. Parce que quand il lui dit ça, elle pourrait facilement le croire.

C'est pour ça qu'elle doit l'arrêter. Le laisser parler semble trop risqué. Il prend les devants et elle ne devrait pas le laisser faire. Elle vaut pourtant mieux que ça en interrogatoire, sait très bien ce qu'elle doit faire pour obtenir ce dont elle a besoin. Lui aussi apparemment.

Elle s'apprête à l'interrompre, prend sa respiration pour se lancer mais Peter continue de la devancer.

"It's just a masquer- OH SHUT UP RICK!"

Les mots de Venus meurent sur ses lèvres alors qu'elle dévisage Peter, bouche bée. Ses yeux ne le lâche pas une seule seconde alors qu'il baisse la tête. Elle voudrait dire quelque chose mais quoi ?

"I- Rick? What?"

"There is so much that you don't know Venus," Peter reprend, relevant à nouveau la tête vers elle et Venus ne peut qu'acquiescer. "Clearly," elle accepte sèchement, se débarrassant enfin du dossier en le jetant par terre. Le prénom - Rick - semble encore planer dans l'air, lourdement. "Trust me. You don't want to die. You don't even want to die a hero. You don't know... If you saw what I saw, you wouldn't want to die for anyone. Especially not for a cause that's already doomed. If you stay... If you stay you'll die. You'll die for people who don't care if you live or not." Venus déglutit, le discours de Peter faisant mouche bien malgré elle. Elle est assez adulte pour reconnaître qu'elle sait que pour l'Ordre sa vie ne vaut pas plus que la réussite de la Résistance et elle ne serait pas assez égocentrique pour s'en offusquer. Mais elle peut reconnaître - au moins en secret, dans sa tête, juste pour elle - qu'elle ne souhaite pas donner sa vie pour l'Ordre.

Et aussitôt, elle a un peu honte d'avoir oser le penser, si bien qu'elle manque presque les derniers mots de Peter. Presque.

"But I do."

Venus ne bouge pas d'un pouce. Depuis le début de l'interrogatoire, elle se prend virage après virage avec Peter, de brusques soubresauts qui lui font perdre tout professionnalisme. Elle ne sait, une nouvelle fois, pas quoi répondre à ça, ces trois petits mots rendant sa gorge incroyablement sèche. Elle ne sait pas à quoi Peter joue mais elle n'aime pas ça. Du tout. Alors, elle fait ce qu'elle sait faire de mieux, ce qui lui vient si facilement qu'elle n'a même pas besoin d'y réfléchir, comme si c'était inné. Elle se braque.

"That's... a beautiful speech, Peter. But why don't you let me decide what I want? You don't get to decide that what you feel is universal. You don't even know what I did, what I went through. Or even why I'm here, with them. You care if I live?" Elle demande, sa voix se cassant un peu. "Since when have you cared about anything but yourself? I'm not some pawn you can use for your next trick."

septembre 2007, The Iron Institution. “ That's... a beautiful speech, Peter. But why don't you let me decide what I want? You don't get to decide that what you feel is universal. You don't even know what I did, what I went through. Or even why I'm here, with them. You care if I live? ” Il ne baisse pas tout à fait les yeux, parce qu'il a envie d'observer ses traits pour mieux comprendre sa réaction. Il ne baisse pas tout à fait les yeux mais il la regarde par en dessous, presque comme il regarde le Seigneur des Ténèbres, tétanisé par l'appréhension du prochain mot. “ Since when have you cared about anything but yourself? I'm not some pawn you can use for your next trick. ” “ You're not a pawn, réplique-t-il aussitôt. ” Or is she? Peter ne sait plus trop. Poussé par son instinct de survie, il est tout à fait dans son intérêt de retourner Venus contre l'Ordre. Il est de plus en plus clair à ses yeux qu'elle est sans doute sa seule chance de s'échapper vivant de cette prison austère, à moins que son maître ne vienne le délivrer, mais il ne compte pas trop là-dessus. Mais Venus, elle ne peut pas seulement être un pion, si ? “ You're the only one- ” Il soupire. “ You're the only one who knows me. Who really knows me, finit-il par avouer. Not just for the clumsy and chubby kid from Hogwarts. The one who always followed James Potter and Sirius Black around. ” Sa mâchoire se serre tandis qu'il pose sur Venus un regard perçant, ne ratant pas la moindre de ses expressions. “ Not just for the one who betrayed his best friends. Not just for the poor wizard who somehow managed to bring the Dark Lord back. ” Il arbore à présent un étrange sourire. “ I am more than that. ” Il se gratte distraitement le crâne. Ses cheveux ont finit par repousser depuis qu'il a cessé d'être un rat à temps complet. “ I know you see me. The real me. Perhaps you don't like what you see but I- I guess I can't loose the only person who knows the whole story. Or at least, the bits that matter. ” Les morceaux qui, d'une manière ou d'une autre, pourraient l'aider à comprendre. A lui pardonner. D'un vrai pardon, et pas de ceux qu'accorde le Seigneur des Ténèbres, car ceux-là sont toujours sous condition. 'Je te pardonne, Wormtail, mais tu dois me donner ta main.' Ou encore 'je te pardonne, mais tu devras servir d'elfe de maison au garçon'. Aussitôt ces pensées traversent-elles son esprit qu'il se met à caresser furieusement sa Marque. “ I'm sorry my Lord, I'm sorry, please forgive me, marmonne-t-il si bas qu'il n'est pas certain que Venus l'entende, et c'est tant mieux. ” Au moins, le Seigneur des Ténèbres lui pardonne. Quelque chose qu'il n'obtiendra jamais de l'Ordre. Pas après tout ce qu'il a fait.

Au bout de quelques secondes, il finit par se calmer. Ses gestes sont de moins en moins frénétique et sa main finit par rejoindre l'autre, ses doigts se nouent entre eux et il reprend enfin la parole, le visage toujours baissé. “ I may not know everything you've been through. I may not know how you feel. But what I know is that I care. I care more than you think. And more than those who pay you for this. ” Il relève le menton en direction du calepin qu'elle tient toujours entre ses doigts. Au fond, il n'en sait rien. Peut-être qu'il y a des sorciers et des sorcières qui tiennent à elle, dans cette prison. Peut-être qu'elle a des proches, dans la résistance. Un mari, des enfants... Peut-être qu'il est encore en train de ruiner la vie de quelqu'un qui lui est cher... Et pourquoi ?

Parce qu'elle est sa seule chance de s'en sortir.

C’est trop, beaucoup trop, Venus ne le supporte presque pas. Elle a les nerfs à vif, son humeur si volatile qu’elle pourrait exploser à tout moment. Comment, elle ne sait pas trop - en général c’est la colère son truc mais là, ça pourrait être n’importe quoi, des cris, des larmes, des tremblements, elle ne sait pas et elle n’a aucune envie de le savoir. “You're the only one- You're the only one who knows me. Who really knows me. Not just for the clumsy and chubby kid from Hogwarts. The one who always followed James Potter and Sirius Black around.” Elle déteste être sensible à ce qu’il dit, déteste comprendre ce qu’il veut dire, mais elle n’a pas la force de le nier, de remettre de la distance entre eux, ce gouffre glacial qui la protège précisément contre… ça, un lien qu’elle n’aurait jamais voulu avoir, qu’elle voudrait couper d’un coup sec, oublier, enterrer. Elle pourrait remettre une couche, le traiter de rat et continuer avec les répliques habituelles mais même lui ne semble plus y croire venant d’elle - ne semble même pas y avoir jamais cru.

“Not just for the one who betrayed his best friends. Not just for the poor wizard who somehow managed to bring the Dark Lord back. I am more than that.”

I know.

I know, I know, I know, I know, I know.

Venus doit se mordre la lèvre pour s’empêcher de le dire. Elle le fixe du regard et donne tout ce qu’elle a pour le voir comme le prisonnier qui est décrit dans le dossier, le lâche, le traître, le rat. Pas Peter, Wormtail.

“I know you see me. The real me. Perhaps you don't like what you see but I- I guess I can't loose the only person who knows the whole story. Or at least, the bits that matter.” Elle est en train de se laisser berner, de se faire avoir comme une bleue. Elle voit la scène comme une observatrice, à sa place une jeune première qui veut bien faire mais qui se prend les pieds dans le tapis sans aucune remise en question. Elle le sait mais ne fait rien pour se sortir de là parce qu’elle n’est pas une jeune première, elle n’est pas stupide, ni naïve et si elle peut encore douter de lui, c’est qu’elle n’est pas si perdue que ça. Donc elle peut se laisser faire, voir ce qu’il a encore à dire, jusqu’où il est prêt à aller, jusqu’où il est prêt à l'emmener elle et peut être qu’elle pourra en tirer quelque chose.

Venus souffle, fait un pas (métaphorique) en avant.

“Peter, I-” “I'm sorry my Lord, I'm sorry, please forgive me.” Les sourcils froncés, Venus est prête à en faire trois en arrière. What happened to you? elle se demande, pas pour la première fois.

Au final, Peter a raison. Même si ça ne doit pas jouer en sa faveur, personne d’autre que Venus ne devrait s’occuper de lui. Elle est la seule à pouvoir pleinement le comprendre, voir la situation dans son entièreté. Elle connaît intimement une partie du mal qui le ronge. Et c’est peut être là leur porte d’entrée.

“I may not know everything you've been through. I may not know how you feel. But what I know is that I care. I care more than you think. And more than those who pay you for this.”

Venus ferme les yeux, laisse les mots de Peter faire écho à ce qu’elle est incapable de nier. “You care,” elle répète, une fois qu’elle s’est recentrée. “If that’s true, then let’s make it easier for everyone. You’re far from stupid, Peter. You know this is it for you. You’re here and we’re not letting you out any time soon. You know that. So there’s two ways this can go. Either you keep on with this,” elle fait un vague geste vers lui. “You don’t talk to us, aside from spitting those threats or warnings or whatever you want to call them, I never visit your cell again, and I let my colleagues play their game with you.” Elle soupire à nouveau, passe une main devant son visage, et poursuit. “Or, you talk to me. Really talk to me. And I’ll make sure you’re treated well. I’ll be your primary guard and I won’t let any one harm you again.” Elle le regarde longuement, le laisse méditer sur ses mots, puis demande, “So? What’s it gonna be?”

septembre 2007, The Iron Institution. Peter ignore s'il a fait mouche, avec ses élucubrations. Il ignore s'il se fourvoit ou s'il a une véritable chance de s'en sortir, grâce à Venus. Ce n'est que lors que deux petits mots s'échappent des lèvres de la sorcière qu'il relève enfin la tête. “ You care. ” L'ombre d'un sourire vient étirer ses propres lippes, signe d'encouragement pour lui signifier qu'elle a bien compris, que oui il tient à elle, qu'elle l'entend enfin. “ If that’s true, then let’s make it easier for everyone. You’re far from stupid, Peter. You know this is it for you. You’re here and we’re not letting you out any time soon. You know that. ” Si sourire il y avait, il se fane aussitôt, laissant place à une expression mêlant déception, frustration, et l'impression de s'être pris une gifle en pleine face. Était-il stupide d'espérer que son simple petit discours allait lui faire changer d'avis ? Lui faire envisager d'autres possibilités ? Un avenir différent ? “ So there’s two ways this can go. Either you keep on with this. You don’t talk to us, aside from spitting those threats or warnings or whatever you want to call them, I never visit your cell again, and I let my colleagues play their game with you. ” Son cœur est pris dans un étau. Game over. L'idée de finir ses jour dans une cellule de prison fait naître en lui une nouvelle vague d'angoisse. Une terreur déferlant dans ses veines comme une gigantesque vague d'ombre avalant tout sur son passage. Ses oreilles bourdonnent. Non, il fera tout, tout ce qu'il faut. Il lui dira tout ce qu'elle veut entendre pourvu qu'elle ne le laisse pas seul. Pourvu qu'elle n'arrête pas de poser ses yeux sur lui. “ Or... ” Une lueur naît dans le regard sombre de Peter. La partie n'est peut-être pas terminée. “ You talk to me. Really talk to me. And I’ll make sure you’re treated well. I’ll be your primary guard and I won’t let any one harm you again. ” Son cœur accélère. C'est mieux que rien. Définitivement insuffisant, bien sûr. Parce qu'il doit retrouver son maître. Son unique protecteur. Parce qu'il ne peut pas le laisser tomber et le décevoir à nouveau. Et qu'il doit protéger le garçon aussi. Harry... Il a une dette qu'il ne pourra jamais repayer à James, si ce n'est en s'assurant que son fils va bien. Mais il ne peut pas dire tout ça à Venus. Ce qu'il pourra lui dire, en revanche, c'est combien sa captivité va le tuer, à petits feux. Avec les ombres, avec les voix, avec la peur. Il se doute qu'une bonne majorité si ce n'est l'entièreté de l'Ordre n'en a que faire de son avenir. Il peut les comprendre. Mais pour Pettigrew, il est hors de question qu'il reste enfermé ici. Et il commence à croire que Venus non plus, ne souhaite pas sa mort. Que peut-être, elle tient à lui. “ So? What’s it gonna be? ” Après quelques secondes supplémentaires, il relève enfin la tête. “ Okay, soupire-t-il. I'll tell you. I'll tell you everything you want. ”