my demons are chasing me and they're doing the naruto run
tw alcool, état d'ébriété, pensées morbidesL'intérieur de la poubelle qui lui a refilé Fried est soudainement très intéressante. Bien plus que ce qu'il baragouine. Qu'est-ce qu'il parle le vieux (mais elle adore toujours autant l'écouter, bien qu'elle ne le reconnaîtra jamais et qu'elle lève tout le temps les yeux au ciel comme s'il n'était qu'un vieux prêt à lui faire la morale jusqu'au lever du soleil)(l'angoisse quoi). "
Quand t’auras mon âge, tu comprendras que t’auras plus rien à perdre, et tu seras sûrement même plus confiante que moi. En attendant, tu peux monter sur le ring avec moi et apprendre quelques mouvements. Ça te ferait pas de mal et ça t'aiderait à gagner en assurance." À la première partie de sa phrase, elle a envie de ricaner pour la simple et bonne raison qu'elle ne se voit pas vivre aussi longtemps. À vrai dire, ça serait un miracle qu'elle passe les trente-cinq ans. Mais ça, elle le garde bien pour elle - Angel est trop alcoolisée pour qu'en plus Fried vienne lui faire la morale sur la valeur de la vie (de toute façon, est-ce qu'il lui ferait même la morale? ils doivent bien avoir le même genre de pensées tous les deux)(c'est pas un truc de selkie, ça?). "
Ah non et si je finis défigurée, je vais gagner ma vie comment moi? Déjà que leur putain de tatouage m'a gâché la vie..." Et avec une vigueur encore plus attisée par l'alcool, Angel secoue la tête (un peu trop fort, d'ailleurs: elle voit des étoiles et a soudainement envie de vomir, elle va même presque se saisir de la poubelle mais la sensation lui passe).
Toute sa concentration est encore une fois fixée sur la poubelle (putain y a combien de paquets de clope là-dedans? il s'enfile tout ça par semaine le selkie? pas étonnant qu'il sonne comme un aïeul à chaque fois qu'il ouvre la bouche pour lui faire la morale, le vieux fossile (
non derogatory)). "
Je t’assure que les Bahamas sont surcotés. Ça vaut pas les plages de la mer Baltique." Fried connaît tout un tas d'endroit: elle a souvent écouté ses anecdotes, et ses (més)aventures. Mais là où d'habitude Angel est curieuse, il n'y a que du vide dans son regard. Ses ongles (parfaitement manucurés, merci bien) s'agrippent à la poubelle et elle fait une espèce de grimace, signe que les neurones tentent de se connecter (avec grande difficulté). "
C'est où ça la mer Balistique?" Elle bute sur le nom, s'y prend à deux fois pour le prononcer correctement (et se trompe quand même). Pourquoi est-ce qu'il faut toujours que le marin lui parle d'endroits inconnus au bataillon? (Et puis, qu'est-ce qu'il peut y avoir de mieux comme destination que les Bahamas, franchement?).
Sa petite histoire a l'air d'amuser Fried, même si elle est trop loin pour pouvoir réellement apprécier son sourire, ou n'importe qu'elle émotion du selkie. Elle a juste envie de
dormir (ou de vomir, ou les deux). "
Un Bloody Mary ? T’as rien trouvé de mieux que cette histoire bancale pour me réclamer un cocktail ?" Offensée, elle gonfle les joues et pointe un index accusateur dans la direction du vieux marin. "
C'est un fantôme vieux shnock. Tu m'prends pour une ivrogne ou quoi? J'connais autre chose que des cocktails quand même."
But your are a drunk. La flamme s'éteint aussitôt pour se métamorphoser en une petite flaque d'eau toute triste, le genre de petit point d'eau qui se forme au pied d'une gouttière après une pluie torrentielle. Des vestiges, des débris, des déchets - un peu de tout, trop d'on ne sait pas quoi. Et les trois mots qui passent les lèvres de la harpie alcoolisée: des mots qu'elle n'aurait jamais prononcé dans son état normal, ce qui les rend d'autant plus sincères.
Il y a un long silence durant lequel Angel se dit qu'il n'a pas dû l'entendre, et tant mieux. Aucun des deux renégats ne bouge et le tableau semble se figer (elle se demande même si elle ne s'est pas enfin endormie). Mais Fried finit par se pencher par dessus la table pour essuyer du plat du pouce les quelques larmes qui commencent déjà à se former et couler.
Traitors. "
Toi aussi, Kleine. Toi aussi." Les mots lui font l'effet d'une tornade et, pendant un instant, elle revoit le visage (flou) de son père. Lui aussi a déjà dû la réconforter avec la même tendresse, mais ça ne l'a pas empêché de la laisser derrière quand il s'est barré (et ce qu'elle aurait aimé partir avec lui!). Maladroitement, Angel pose sa main sur celle de Fried qui est occupée à sécher ses larmes, et elle secoue faiblement la tête (pas trop fort, ou elle risque vraiment de vomir).
"
Menteur." La réponse est soufflée du bout des lèvres, douloureusement. Angel tapote la main de Fried comme on tapoterait la tête d'un labrador qu'on affectionne particulièrement (ça rend les paroles un peu moins amères). Elle somnole un peu plus, l'alcool et la fatigue commencent enfin à avoir raison d'elle. "
Tu vas m'oublier toi aussi." On s'y fait, à force. C'est plus facile de faire face à la réalité le plus tôt possible, de ne rien attendre des autres. Au final, quand on accepte que les gens ne sont que de passage dans notre vie, c'est moins douloureux d'accepter leur départ. "
Mais c'est pas grave, j't'en veux pas." Et elle sourit - les derniers mots sont aspirés par le sommeil qui l'attrape enfin.