RODOL-WHO ?! Tu n’arrivais pas à croire que ce gueux ait finalement servi ton secret sur un plateau d’argent à ton hound. Et ce, certainement dans une tentative désespérée de jouer les intéressants et de recentrer l’attention sur sa misérable petite personne, qui n’allait pas tarder à se faire une place de choix sur ta liste noire. Sans oublier que si tu venais à glisser innocemment l’information à Rabastan -ce qui arriverait tôt ou tard, les doloris allaient certainement fuser à travers tout le manoir Lestrange. Désormais folle furieuse, plus encore que lorsque Boris avait découvert ton secret, la peau de ton visage d’ordinaire si pâle affichait une teinte dangereusement rosée. « Tu ne crois quand même pas que l’on va tous se réunir autour de la même table. Mon père serait offensé de devoir faire face à un homme de son âge bien plus séduisant que lui. » Et qui avait l’audace de frayer avec sa fille par la même occasion. Boris ayant un don pour poser les bonnes questions au bon moment, tu en oublias un instant tes envies de faire de Rodolphus Lestrange ton inferius, pour venir te refocaliser sur le reste de ta tenue. Les chaussures, oui, certainement LA pièce pour trancher et venir parfaire ta tenue. Tu ouvres un tiroir long de deux mètres dans un geste quelque peu théâtral pour accentuer l’indécence de ta collection de chaussures. Dans ce dressing, tu avais largement de quoi rhabiller le Ministère tout entier pour l’hiver. Alors que tu jauges d’un regard méprisant la paire de chaussures qu’il avait essayée quelques instants plus tôt et que tu finirais sûrement par offrir à quelqu’un que tu n’aimais pas maintenant qu’il avait fourré ses petons dedans, tu tentais de te rappeler qui était Reinir. « Mais non ! Ne me dis pas que tu t’es tapé le beau-frère de Travers ! » Oups, tu avais finalement jeté ton dévolu sur le mauvais hound de la brigade. Bon pas grave, mais du coup tu ignorais que tu ne savais toujours pas qui était Reinir. Tu l’avais peut-être su un jour hein, mais ce genre de détails s’oubliaient si vite. « Tu plaisantes, chéri ? Je vois pas comment tu pourrais un jour être le moche du couple. Bon d’accord, tu as le teint un peu trop pâle pour les critères de beauté actuel, mais à part ça et tes quelques rides naissantes, je te jure que ça va. » Tu n’étais d’ailleurs pas peu fière d’avoir le chien le plus reluisant et le mieux odorant de toute la Values Brigade. Tout le monde ne pouvait pas se targuer d’un tel exploit. Tu attrapes finalement la paire d’escarpins rouges que Boris te tend fébrilement après que tu aies proposé de lui offrir ta robe. Son émotion te rappelait vaguement celle d’un elfe à qui l’on offrait une chaussette dans l’un de ces films sorciers de noël, désormais interdits par le gouvernement. Il ne te vint pas un seul instant à l’esprit que son émoi puisse être dû à la mention de Wolfram. « Depuis quand tu as un père toi ? J’en ai jamais entendu parler. Il fait quoi de sa vie ? » Pas que tu sois véritablement intéressée, mais disons que s’il te racontait le pire des drames familiaux, ça t’aiderait à te sentir moins mal face à tes propres sentiments parricides. « Ces chaussures sont plutôt pas mal ouais. Mais tiens à propos de voler des culs, je viens de penser à un truc ! Si tu as envie de taper dans une catégorie un peu moins… animale que la tienne, je pourrais t’emmener faire un tour dans l’établissement de mon oncle. Ce n’est pas vraiment le genre d’endroit que j’approuve mais je crois que pour toi ce serait l’idéal. Faut vraiment que tu te détendes avant d’avoir de nouveaux cheveux blancs. »

« Mon père serait offensé de devoir faire face à un homme de son âge bien plus séduisant que lui. » Oof, tu ouvres des yeux immenses, n’essayant même plus de te retenir de t’esclaffer. « Attends, ils ont le même âge ?! » que tu éructes, rebondissant sur sa blague. La Uli qui n’y allait pas de main morte à propos de son père était sans doute ta Uli favorite -et c’est dire que cette Uli là faisait concurrence avec la Uli partageant son petit-déj. L’avantage, c’est qu’avec elle, Wolfram n’était plus une peine de coeur, statut actuel « c’est compliqué », mais simplement un père infernal et qui voulait tout contrôler ; la base, quoi.

On continue sur votre lancée de pitreries, du côté de la brigade, cette fois-ci. « Quoi ? Le beau-frère de Trav-... Nan, nan, j’crois tu confonds ; Reinir, c’est un loup, là, qu’est toujours en train de sourire comme un illuminé et d'me mater le boule ! ... Et qui porte des kilts. » Tu étais toujours en train de chercher quel hound pouvait faire office de beau-frère à Marlon, hormis éventuellement Siegfried. Mais ça parle rides, désormais, alors il faut que tu rattrapes. « Oooh girl, on en reparle dans vingt ans des rides, quand j’aurais pas changé d’un poil et que ce sera toi qui seras devenue la sugar mommy… » Tu es quasiment certain qu’elle vieillira aussi bien que les aînés de sa famille. Tu envisagerais peut-être de lui faire du gringue à ce moment-là…

Tu es de nouveau en train de zyeuter le contenu de ses armoires, histoire de ne pas passer le reste de l’après-midi la taille enroulée dans ta cape. Le sujet se corse ; on avait pourtant dit pas les papas… Ou si, peut-être que les papas, après tout. « Alors, au risque de te décevoir, jusqu’y’a pas si longtemps, j’étais un sorcier comme toi, hein… et pour ta gouverne, même si j’suis aussi canon que Vénus, j’suis pas né dans un coquillage… » Tout de suite, quand on parlait de ton père, ça jasait avec plus d’amertume. « Bah écoute, franchement, j’en sais trop rien, de ce qu’il fait… Du commerce, j’crois ? » Histoire d’expliquer pourquoi il était jamais là, en particulier ces derniers temps, où il battait des records en termes d’absentéisme. Tu sors un chapeau que tu coiffes sur ta raie impeccable. Tu te tournes enfin vers elle alors qu’elle change de sujet, good thing.
Tu manques de t’étouffer avec ton propre souffle. Oh boy, elle était pas prête pour ce que tu allais lui dire… Et d’ailleurs, tu aurais peut-être dû l’en informer plus tôt. « Alors, de deux choses l’une » Tu te contorsionnes presque, te bouffant les lèvres pour pas te marrer. « L’établissement de ton oncle comme tu le dis si bien est littéralement… réservé aux hybrides… Enfin aux mecs qui veulent se farcir de l’hybride… » Et tu en savais quelque chose parce que « Et euh secundo, y’a peut-être grave moyen que j’ai déjà vu de l’intérieur à quoi ça ressemblait parce que… y’a peut-être moyen qu’j’ai un taf, là-bas ? » Tu la jauges avec toute la méfiance dont tu es capable, mort de rire à l’intérieur que tu es. « C’est genre… pour arrondir les fins de mois, tu vois ? J’veux dire ; mon premier job, c’est toi, tu passes en prio’, tout ça… C’est pour ça que j’me suis dit que c’était pas utile de… t’informer… Me tape pas, s'te-plaît. »

Alors que tu croyais être enfin parvenue à saisir les nuances de l’humour britannique, la réaction de Boris te laisse penser que ta plaisanterie suintait encore la rigidité germanique. Tu hausses les épaules d’un air désintéressé avant de lui répondre platement. “J’en sais trop rien, je disais ça comme ça. Tu crois que je suis du genre à demander la date de naissance de tous les mecs que je m’envoie ?” Tu ressens comme un léger pincement au cœur en évoquant Rabastan en ces termes si peu élogieux, et surtout en le fondant dans la masse de ces amants insipides dont Dante Burke caracolait en tête. D’autant plus, que tu étais justement du genre à stalker tes partenaires avec un souci du détail assez marqué pour en devenir inquiétant. Un sens du détail que tu semblais justement partager avec ton hound, qui n’avait pas son pareil pour décrire le moindre individu. Aussi, finis-tu enfin par mettre un visage sur le nom de Reinir. Tu n’avais jamais bien compris pourquoi une boule de poil puante arpentait les couloirs du Ministère en kilt, sous ton regard empli de jugement. C’était à se demander s’il s’était évadé de l’aile psychiatrique de Sainte-Mangouste ou si son handler avait un penchant prononcé pour le carnaval. “Oui bah tu pourrais lui offrir un relooking à ton Reinir là, parce qu'avec son kilt on dirait Langford se rendant à sa prochaine beuverie. Mais attends, ne me dis pas que tu n’es pas au courant pour le beau-frère de Travers !” Un sourire carnassier se hisse brusquement sur tes lèvres alors que tu te retiens de justesse de frotter tes mains l’une contre l’autre, en signe de ta jubilation. Pour une fois que Boris semblait ne pas être au courant de quelque chose que tu savais toi... Tu l’aurais bien laissé mariner quelques instants de plus, mais il était trop dur de garder le secret. “C’est Jonah Abbott, le petit brun ténébreux. C’est un loup je crois, ou quelque chose dans le genre.” Si les détails t’importaient peu, ta brève description du hound laissait penser que tu aurais pu en faire ton quatre heure avant qu’il ne soit souillé par le sang de la bête. “Moi devenir une sugar mommy ? Fais pas comme si tu n’étais pas au courant pour mes daddy issues. C’est bien notre plus gros point commun. D’ailleurs, si tu pouvais te taper n’importe quel employé du Ministère, ce serait qui ?” La question était autrement plus croustillante que l’évocation du père de Boris, qui semblait tragiquement banal. Pauvre homme. Oh tiens, une paire de bottes en écailles de dragon, tu croyais les avoir égarées. Écoutant alors Boris d’une oreille distraite, tu t’accroupis et retournes les chaussures dans tous les sens pour juger de leur état, avant de finalement les lui jeter à la figure avec une brutalité, jusqu’alors insoupçonnée, ou presque. Tu te relèves tout aussi brusquement et le fusilles du regard sans transition. “Tu travailles pour mon oncle et aucun de vous deux ne juge utile de m’en informer ! Arschgeigen !” Une réaction outragée saupoudrée d’une douce insulte, qui signifierait, si on la traduisait mot pour mot, culs de violon. Cela n’aurait aucun sens dans la langue maternelle de ton Dracula, mais pour toi il s’agissait d’un qualificatif très juste lorsqu’il fallait les décrire, lui et ton oncle. “Qu’ai-je donc fait pour mériter un hound aussi ingrat ? Après tout ce que j’ai fait pour toi, je croyais qu’on était enfin arrivés à construire quelque chose de solide, tous les deux.” Posant la main sur ta poitrine pour renforcer ta petite sortie dramatique, tu restes bouche bée pendant quelques secondes, avant de te rapprocher de lui et de lui arracher le chapeau dont il avait osé s’affubler. “Tu ne mérites même pas de porter les collections d’il y a trois ans.” Ce constat en disait long sur l’état de la blessure causée par sa trahison. De tous les von Bäume qu’il aurait pu te préférer, Engel était le dernier auquel tu aurais songé.

« Nan j’crois, le kilt, c’est le truc le moins pire, chez lui… » Mais déjà, Uli ne t’écoute plus, trépignant d’impatience à l’idée de larguer sa prochaine bombe. Tu fais genre, tu ne la remarques pas, comme si ce genre de bassesse pouvait t’atteindre, alors qu’en vérité, tu te nourrissais des ragots du Ministère comme du sang de vélane (à défaut de sang de vélane, d’ailleurs, cette merde coûtait la peau des yeux). Et voilà que ça tire à vue sur les Abbott maintenant. Tu ne remets pas tout de suite un visage sur le pauvre Jonah, mais sa potentielle condition de loup te suffit à faire une croix dessus. Sans même avoir croisé ta route, le pauvre garçon se retrouve cancelled. Bah, tu ne pouvais pas non plus te souvenir de tout le monde, et surtout pas des loups. Tu te souvenais déjà trop de leurs odeurs, à tes dépens, c’était pas pour apprendre leurs profils Witch-tinder en plus de ça. Ceci dit, tu vois bien où Ulrike veut en venir.

« Attends, du coup, le mec avec son mariage qu’a merdé là, Marlon Consanguin Pur Travers, il s’est genre maqué avec une meuf qui a un cousin loup ? » Tu hausses un sourcil, reprenant ta respiration. « Et c’est même pas genre… un secret ? » Tu hoches la tête, passablement impressionné par ce culot. « Bah après j’le comprends, il veut un peu varier les mélanges… » Parce qu’il ne fallait pas non plus que tu oublies de te foutre d’elle sur ce point-là. « Parce qu’à ce stade, excuse-moi, mais on a l’impression que genre vous êtes tous un peu cousins, t’sais… » C’était d’ailleurs pendant ce mariage que tu avais appris, en laissant traîner ton oreille, que Sid était genre l’ancêtre des Travers, ou un bail du genre… Terrible ; il y avait vraiment des licences sang-mêlé qui se perdaient !

Ceci dit, ce n’est pas de cette attaque qu’elle se venge en te balançant une botte dans la figure. Le talon bute contre ta marque, la rendant à peine plus rouge qu’elle ne l’est déjà. « Hé oh, on se calme ! » couines-tu en massant ta pommette douloureuse. « Ouin, ouin, personne me dit jamais rien ! Tu crois j’fais quoi là ? » Tu lèves les yeux au ciel, sidéré, la laissant te débarrasser de ses fringues. Tu te mets donc en branle pour te rhabiller un poil, au cas où elle décide que ça dégénère et ne te vire de sa chambre. « C’est tout récent, j’te signale ! J’voulais pas te teaser avant que j’sois sûr, je sais pas ! S’il m’avait pas pris, j’aurais eu l’air d’un con- » et autant dire que t’avais pas non plus eu l’air très fin quand tu avais croisé Wolfram, à la sortie de ton entretien. « Et puis de toute façon, compte pas sur moi pour te faire des ristournes, t’es déjà assez saucée comme ça… »

Vous restez un moment silencieux, vu qu’il n’était pas question que l’un de vous deux ne s’excuse. Tu es le premier à céder, en revenant sur sa précédente question, à propos de qui tu voudrais te taper au Ministère. Tu ne pouvais pas partir sans au moins répondre à ça. Ça ne t’arrive pas souvent de réfléchir pour de vrai, mais quand c’était le cas, c’était bien au profit de ce genre de question de la plus haute importance. Tu tritures pensivement les boucles de tes chaussures. « Et pour ta gouverne… si j’devais me taper quelqu’un au Ministère… J’pense ce serait » ton père, ton père et oh, encore ton père. « Farrow… Lance Farrow là, c’est un gratte-papier de je sais plus quel département… Mais uuf, he’s fine… » Tu la zyeutes de côté, en attendant de voir si elle allait daigner répondre à son tour, ou si elle faisait définitivement du boudin.

“Nan c’est carrément le frère de sa femme qui est un hound. Après il le crie pas sur tous les toits et puis, des Abbott, il doit bien y en avoir un paquet. Mais j’ai mené ma petite enquête.” Pas peu fière d’être parvenue à débusquer un secret qui n’en était pas vraiment un, tu savais mettre en scène tes réussites. “Je ne suis pas sûre qu’il apprécie beaucoup varier les mélanges, comme tu dis.” Un air de dégoût étire les traits de ton visage alors que tu reprends son expression. “Après tout, il vient de prendre la tête de l’ASAP. La lune de miel n’a pas dû être aussi réussie que cela.” En toute honnêteté, si hypothétiquement parlant, Rodolphus venait à avoir le malheur d’être transformé en bête sauvage, rejoindre l’ASAP serait la dernière chose à laquelle tu penserais. Même pas respect pour Boris, tu avais renoncé à en devenir membre, c’est pour dire. “Tu crois pas si bien dire. Il me semble qu’on a un lien de parenté genre hyper hyper éloigné avec les Travers.” Etrangement, avouer cette drôle de vérité te déplaît quelque peu, aussi prends-tu bien soin d’accentuer l’éloignement de la parenté en question. Mais tu n’as nullement le temps de t’attarder sur ces touchantes histoires d’arbres généalogiques. Voilà que ton hound se décide enfin à t’avouer ce qu’il manigançait quand il était trop occupé pour répondre à tes hiboux à deux heures du mat. S’il croyait que t’allais payer pour le voir dandiner ses petites fesses maigrichonnes, il se trompait sur toute la ligne. “Oh mais ne t’en fais pas, je ne risque pas de venir te voir. Je te rappelle que tu n’es pas mon genre.” La moue boudeuse, tu lui lances un dernier regard empli de dédain avant de te laisser emporter par ta curiosité. “Mais bon, si tu as besoin d’inspiration pour ta chorégraphie, tu sais où me trouver hein. D’ailleurs, j’espère bien que tu me montreras ton numéro en avant première. Faudrait pas que tu te ridiculises devant la haute société.” La haute société, c’était vite dit. S’il y avait sûrement des sorciers de sang-pur qui se rendaient dans le bordel de ton oncle, ce n’était certainement pas le haut du panier, mais plutôt des lignées crasseuses telles celles des Crabbe ou des Prewett. Mais une fois n’est pas coutume, la discussion glisse de nouveau sur une pente plus croustillante, qui te fait vite oublier ta rancoeur à l’égard de Boris. “Lance Farrow ? Non je connais pas. Il doit pas avoir un poste très important.” Loin de toi l’idée de lui confier que tu avais croisé le dit Farrow à la réunion du Syndicat à laquelle ton oncle t’avait conviée il y a peu. Mais disons que tu n’avais pas non plus vraiment eu l’occasion d’être présentée au reste de l’assemblée. Empêcher Engel de massacrer la petite blondinette sur place t’avait suffisamment occupée. “Tu sais, je t’en aurais sûrement pas voulu si tu avais cité quelqu’un d’autre…” L’espace d’un instant, tu le fixes du regard, tout en gardant le silence comme pour ménager un suspense que toi seule trouvait exaltant. “Genre Rabastan.”

Tu ne te lasserais sans doute jamais des ragots de ton handler. Ce qui était bien, avec Ulrike, c'est qu'elle ne s'embarrassait pas de savoir s'il fallait ou non te mettre au courant de ce genre d'embrouilles, surtout quand ça touchait les hautes sphères de la bonne société. Elle devait se douter que tu prenais autant de plaisir à l'écouter qu'elle à les raconter. C'était sûrement la seule fois où tu te la fermais pendant qu'elle parlait, d'ailleurs ; te contentant de parsemer son discours d'admiratives onomatopées ou de haussement de sourcils suggestifs.

« [...] Je te rappelle que tu n’es pas mon genre.
- Ah bah super, sympa la meuf ; tu veux même pas venir soutenir ton hound adoré dans ses flamboyants débuts sur scène !
- Mais bon, si tu as besoin d’inspiration pour ta chorégraphie, tu sais où me trouver hein. [...]
Tu fais dramatiquement volte-face (tu étais toujours en train de plus ou moins faire les cent pas dans la penderie. De l'inspiration pour une chorégraphie ? Toi ? Tu t'esclaffes bruyamment, avec l'élégance d'un éruptif en rut. Désolé, mais tu donnes pas l'impression de savoir super bien danser, qu'on s'le dise. Tu fais quelques pas d'un côté puis de l'autre, secouant ton derrière devant le miroir sur le rythme d'une musique que tu étais le seul à entendre. A la rigueur, t'as dû apprendre les danses de salon un peu chiantes, là, les incontournables pour sang-pur, mais rien de bien sexy quoi... Tu pouvais parler, sachant que, à l'époque où vous étiez encore considérés comme des sang-purs, ta mère s'était fait une joie de t'inculquer les bases de ce genre de sottises, qui n'étaient jamais rentrées dans ta tête, visiblement. Tu mimes un genre de valse, les bras et les jambes rigides, le buste tendu et le dos droit, une grimace déformant ton sourire mutin. Musique de chambre sur fond de Nimbus 2000 dans le cul, hon hon hon... »  

Et comme dit l'adage, on ne change pas une équipe de Quidditch qui gagne, vous revoilà à fantasmer sur les pires figures du Ministère. « Bah Rabastan Lestrange, ça aurait pu le faire, mais j'dois t'avouer que son poste à la tête de la Brigade d'extermination des hybrides me refroidit un peu la couenne, quoi... » Autant dire que, même si tu te régalais du couple idéal que formaient Ulrike et Rabastan, ça t'avait fait un petit coup à ton palpitant ralenti, de savoir que ton handler rêvassait à son prétendant trucidant des hybrides dans un champ de fleurs... Bah, avec un peu de chance, toi, t'étais encore un peu différent.  

« Bon, t'as tout ce qu'il te faut ? Tu te débarrasses de rien ? Tu louches sur une paire de chaussures et un manteau (sans doute trop petit, mais tu paierais avec tes derniers mois de salaire pour le faire réajuster magiquement). Trop hâte de voir ce que ça va donner ta p'tite interview, là, on va se taper des barres... Tu la vois déjà voler la vedette à n'importe quelle autre célébrité qui aura eu l'audace de répondre à un entretien pour ce numéro de magazine, tandis que tu prends le chemin de la sortie. Et toi bah, tâche de pas te taper Rodolphus ! » Tu t'esclaffes, pas peu fier de ta dernière plaisanterie.

Trop maigrichonne, trop pâle, trop hautaine et surtout trop peu docile, tu ne t’étais jamais sentie à l’aise parmi les rangs carnassiers de la haute-société britannique. Aussi, ne manquais-tu jamais une occasion de cracher ton venin sur la réputation pas tout à fait irréprochable de ces gens que ton paternel considérait désormais comme ses pairs. L’Angleterre ne serait jamais ton pays de cœur et tu ne te plierais pas à ses mœurs, quoi qu’en dise Wolfram. Par chance, tu savais pertinemment qu’auprès de ton hound, tu trouverais toujours des oreilles grandes ouvertes, à l'affût du moindre racontars croustillant. Quant à sa langue, elle était tout aussi avare d’histoires racoleuses et elle ne se privait pas de les faire circuler à travers tout le ministère, avec plus ou moins de détails déformés par son imaginaire. “Se trémousser devant tout ce que ce pays a de plus pervers ne correspond pas tout à fait à la définition que je me fais de débuts flamboyants.” Tu as encore du mal à digérer le nouveau choix de carrière de Boris, et surtout le fait qu’il ait comploté dans ton dos avec ton propre oncle. Engel ne perdait rien pour attendre, lui non plus. Il n’y avait pas de raison que Bagshot soit le seul à subir ton jugement. “Eh bien détrompe-toi, espèce de malotru insolent. Bien sûr que je connais toutes les danses bien nommées, mais je n’ai jamais excellé dans le domaine. C’est ma soeur Emilia qui se complaisait à répéter les pas dans la salle de réception de notre ancien manoir.” Quelle cruche celle-là, il fallait toujours qu’elle fasse exactement ce que l’on attendait d’elle. Boring, comme disaient les gens d’ici. “Alors que moi, ce sont d’autre types de danses qui me réussissent… Et je te ferais remarquer que Rabastan les aime beaucoup.” Tu adresses alors un sourire presque complice à ce pauvre hybride blafard que tu ne pourrais jamais ô grand jamais qualifier d’ami, mais dont la présence ne t’insupportait pas suffisamment pour que tu lui ordonnes de partir. D’ailleurs quand on parle du magyar, on en voit la queue pointue. Boris te confie soudain son petit avis au sujet de Rabastan. Tu hausses alors les épaules d’un air tout à fait indifférent, devant ses préoccupations qui te paraissent parfaitement infondées. “Oh tu sais, tu n’as rien à craindre. Tu es un hybride en règles. Rabastan ne chasse que les nuisibles. Et les résistants bien sûr. Parce que les résistants sont des terroristes.” Pour une fois que tu faisais preuve de subtilité et n’avais pas recours à la menace ou l’intimidation pour lui rappeler de ne jamais manquer le moindre recensement… Tu jettes finalement un regard à mi-chemin entre l’exaspération et le dédain à ce nombre insensé de vêtements qui gisaient à même le sol, tout ça parce que tu ne les avais pas trouvés dignes de te couvrir pour ta fameuse couverture de magazine. D’un vague geste de la main, tu fais signe à ton hound de se servir. “Prends ce que tu voudras, j’ai la flemme de les ranger de toute façon.” Un simple sortilège suffirait mais tu jugeais la tâche bien trop ingrate. Néanmoins, tu fus presque plus offusquée par les insinuations de Boris. “Mais comment oses-tu ? Je ne pourrais jamais me taper quelqu’un d’aussi narcissique que Rodolphus. J’aurais l’impression de faire l’amour avec moi-même. Je te laisse bien volontiers baver sur lui. Tu m’accompagneras au shooting, n’est-ce pas ? Il me faut bien quelqu’un pour porter mes habits de rechange.”

FIN