L'allée des embrumes. Rien que ça. Seamus a attendu qu'il fasse quasiment nuit pour s'y rendre, le capuchon de sa cape bien remonté sur sa tête et les doigts plus serrés que jamais sur sa baguette. Il fait attention où il met les pieds, conscient du monde qui l'entoure et du danger que ça représente. Peut-être qu'il peut se narguer d'avoir le courage des Gryffondors, certains appelleront ça de la stupidité pure et dure, et comment leur donner tord dans cette situation ? Peut-être un brin déçu de ne pas avoir eu les informations nécessaires la dernière fois, Seamus s'est dit qu'il aurait un peu plus de chance sur l'Allée des Embrumes. Comme si un rassemblement de l'Ordre y était prévu. C'est prévu qu'il ne reste pas longtemps, un simple aller-retour, à la recherche de quelque chose capable d'attirer son attention, et il repart. Voilà tout. C'est donc avec cette idée en tête que le lion s'aventure dans l'allée, qui n'a plus l'air aussi miteuse qu'il y a quelques années, arborant avec fierté leurs enseignes de magie noire. A donner froid dans le dos.

Après une bonne poignée de minutes passées dans l'allée des embrumes, Seamus se rend compte qu'il ne trouvera pas d'informations sur quoi que ce soit, pas aujourd'hui, et se promet de revenir demain ou au courant de la semaine. Il se promet de ne pas attendre les bras croisés qu'on lui tombe dessus. Sans un bruit, il fait demi-tour, son regard observant toujours autour de lui, plus concentré que jamais, et il s'apprête à transplanner lorsque son regard s'arrête sur quelque chose. Une masse indistincte dans une allée. Pendant une seconde, son coeur rate un battement et Seamus se demande s'il ne s'agit pas de quelqu'un de l'ordre, quelqu'un qui a besoin d'aide. Il fait un pas dans la direction de l'allée mais s'arrête net. Et si c'était un piège ? La paranoïa semble s'installer dans son cerveau et Seamus attend une seconde, deux, trois, et finalement secoue la tête. La personne a bougé, un grognement lui parvient et Seamus voit enfin de qui il s'agit, il reconnaît ce visage.

Ollivander. Son cerveau assimile rapidement la nouvelle et Seamus pousse un léger soupir. Le teint du garçon est beaucoup plus livide que d'habitude, pendant une seconde il se demande s'il n'a pas affaire à un vampire, encore, et se demande si tous les visages connus du passé ont fini de ce côté là, avant de finalement faire un pas en avant. Visiblement, Ollivander n'arrive plus à se lever du sol et ses yeux se ferment sans arrêt, comme s'il manquait d'énergie pour les tenir ouvert. Seamus observe la scène en seconde et se détourne ensuite, tournant le dos à son ancien camarade qui prônait la pureté du sang à tout va durant leurs années à Poudlard. Et si cette information été resté inchangée, il aurait certainement transplanné sur le champs. Pourtant, le statut d'hybride révélé il y a quelques années du Poufsouffle le tient sur place, le pousse à réfléchir aux conséquences et à la vie qu'à du mener Neal.

Seamus serre ses dents. "Merde." Il marmonne en se tournant finalement à nouveau vers Ollivander et se rapproche rapidement de lui pour s'accroupir à ses côtés, sa baguette restant tout de même entre ses doigts, fermement. "Hey, Ollivander, tu m'entends ?" Le lion reprend en venant claquer ses doigts libre près de son visage pour avoir une réaction et l'observe une seconde en se mordant l'intérieur de la joue. "Ca va ? C'est quoi ton problème ? Et qu'est ce que tu fous ici, bordel." Seamus continue dans un grognement avant de regarder autour de lui, c'est clairement pas l'endroit où il doit se faire remarquer.

Il regardait le fleuve rouge remonter d’aval en amont, de ses veines vers la poche de plastique suspendue au-dessus de sa tête, et son regard se perdait dans le vague. Tout n’était que poussière, que sourire édenté, que contrebande de sang et que gallions sales dans l’arrière-boutique de l’apothicaire. Mais bientôt Neal aurait son loyer à payer. Pour le reste, il volerait la nourriture sur les marchés moldus, en deux ou trois sortilèges informulés. En parlant de victuailles, il aurait adoré qu’on lui serve un verre d’eau. L’apothicaire lui prenait de plus en plus de sang, tandis que la rétribution était de moins en moins importante ; pourtant les problèmes d’argent de Neal, eux, ne se résorberaient jamais sous ce gouvernement. Il n’était après tout qu’un animal bien utile, et toute émancipation lui vaudrait d’être dénoncé, sa boutique confisquée, et mis encore une fois au banc de la société magique. SA société. Celle que jadis il avait appelé de ses vœux et qui aujourd’hui lui échappait des mains, en un écran de fumée pitoyable.

« Lève toi ! ». Neal sentit qu’on le soulevait par magie. Il n’arrivait pas à ouvrir les yeux. Le son du pas lourd de l’apothicaire sur le parquet usé lui parvint aux oreilles. Nul doute qu’il avançait dans l’espace. Par intermittence, comme une ampoule qui clignote, il perdait la notion même de conscience. Ces black-out répétitif lui fatiguait l’esprit. Il y eu un bruit de clochettes étouffées puis un courant d’air, celui d’une nuit d’été particulièrement lourde. L’air se dégagea de ses odeurs sanguines, de fer et de chair, pour revêtir celui de l’humidité lourde d’un Londres brumeux. « Sale déchet, sors d’ici et… » Le jeune homme se sentit projeté contre le pavé, incapable d’avoir une réaction combattive. Il se laissait juste faire. « … n’oublie pas ça ». Un rire gras résonnait dans l’allée des embrumes puis disparut dans un bruit de porte que l’on ferme sèchement. Tâtonnant dans le soir tombant, Neal mis la main sur une bourse. Il prit de longues minutes avant d’en deviner le contenu : 3 pièces d’or et 1 pièce d’argent. L’hybride poussa un très court cri aigu. S’il avait la tête plongée dans l’eau à ce moment-là, on aurait sans doute pu entendre l’insulte qu’il venait de prononcer. Mais le langage d’en dessous les eaux ressemblait à des complaintes d’harpies hors des lacs et des mers.

Sans grande une partie de son sang, Neal Livingston avait beaucoup de peine à retrouver ses forces. Ses origines d’être de l’eau semblait toujours refaire surface lorsque le corps de l’homme était au bord de l’anémie. Le sorcier se traina comme il le pouvait jusqu’à une ruelle, le plus loin possible de l’apothicaire. L’absence de lumière dans les vitrines lui indiqua que l’heure tournait, beaucoup plus vite que sa conscience intermittente ne le lui permettait de voir. Il entendit quelqu’un, des pas dans le lointain, qui s’approchait. Neal se hissa contre une façade pour s’asseoir, se forçant à ouvrir les yeux. Un monde flou se dressait devant lui et sa tête n’arrêtait pas de tourner. On lui parlait, d’une voix qu’il eut du mal à identifier au départ. Agrippant le col de l’inconnu, il approcha son visage à quelques millimètres de l’importun, afin de l’observer nettement, afin de savoir qui était cette masse indistincte que son corps meurtri ne pouvait regarder sans tourner de l’œil. Cette position, et sa poigne faiblarde, ses yeux écarquillé lui donnèrent l'air d'un fou.

Comme un électrochoc, il fit le rapprochement entre ce visage dans le noir et le petit garçon qui faisait sans cesse exploser des choses aux tables de la Grande Salle. Le halfblood Seamus Finnigan. Non, ce genre de gens n’avait pas le droit de poser leurs yeux sur lui. La honte lui donna une décharge d’adrénaline. Neal Livingston prit appui sur son ancien camarade de classe pour se lever puis il semblait vouloir fuir. « Dégage ! Laisse-moi ! » Dans son esprit, il n’arrivait pas à bouger. En réalité, il titubait rapidement dans la ruelle, allant de droite à gauche, parfois en arrière, cognant les murs de briques sales. Il criait des « Non, non, non » effrayés, presque déments. Mais toute cette agitation ne lui prenait que davantage d’énergie. L’ancien Hufflepuff arrivait à deux pas de sa boutique lorsqu’il s’écroulât à nouveau, violemment, s’écrasant le crâne contre le pavé et dégobillant son maigre repas…

T'attires que les pires, Seamus. Voilà ce qui tourne dans la tête de l'irlandais alors qu'il voit le visage d'Ollivander face au sien, quand il voit la pâleur affolante, comme s'il était malade. Pendant une seconde le lion ne peut s'empêcher de se demander s'il s'agit du résultat d'un sortilège, s'il doit l'aider et l'emmener quelque part en sûreté. Cette réflexion ne dure vraiment qu'une seule seconde, elle a à peine le temps de traverser son esprit que l'ancien Poufsouffle attrape déjà le col de sa cape et la serre. Par réflexe, Seamus dégage la baguette de sa poche pour la pointer sur lui et se mord l'intérieur de la joue. Mais il se rend bien vite compte que ça ne sert à rien, la poignée de Neal est plus que faible, et l'air sur son visage terrifiant. "Bordel-" Le sorcier marmonne en le sentant le rapprocher de son visage, s'il peut se tenir le plus possible éloigné ça ne serait pas sans refus, c'est sûr, mais il ne se recule pas pour autant et laisse le loisir à Ollivander d'observer son visage. Un temps ridicule s'écoule avant que la réalisation soit évidente et que le brun ne se recule soudainement.

La seconde d'après il est debout, après avoir pris appuis sur lui, et se met à déambuler comme un dément. Seamus est prêt à parier qu'il s'agit d'un sortilège, peut-être même de celui d'Impero, et pourtant, dès que le sorcier se met à parler face à lui, un doute s'installe. Le sortilège Impero n'a pas réellement ce genre de résultats et les souvenirs restent assez marqués dans son esprit, dans sa chaire aussi. Sans vraiment avoir le temps de faire quoi que ce soit, voilà que Neal se met à déambuler dans l'allée et son air de dément risque clairement d'attirer l'attention sur eux. Sa baguette pointée sur le sorcier, Seamus s'apprête à lancer une formule magique pour le calmer, parce qu'il en a marre de voir tout le monde lui tourner le dos et l'ignorer, qu'il commence à en être fatigué. Malheureusement, il n'a pas le temps de prononcer la moindre formule qu'il voit le corps d'Ollivander s'effondrer.

Et son crâne claquer contre le sol.

Pétrifié pendant une seconde, de peur de voir des choses bien trop inquiétantes, Seamus ne bouge pas, mais juste après Neal se met à rendre et le Gryffondor se bouge presque automatiquement. "Merde, merde, merde, t'attires les cas, vieux." Qu'il se souffle à lui-même avant de s'approcher de Neal et de se rendre compte qu'il est en train de lui faire un malaise et Seamus est pas du genre à le laisser claquer dans la ruelle. Aussitôt, il s'approche de lui et observe son crâne sans oser le bouger. Il semble aller plutôt bien de ce côté mais le lion glisse sa baguette le long de son corps, insistant un peu sur sa tête, tout en se concentrant sur le sortilège appris au sein de la résistance. Une invention de Hermione, quelque chose qui permettait de détecter les blessures graves. Puisque sa baguette ne semble pas s'affoler, Seamus en déduit que la blessure à la tête n'est pas si importante et qu'il peut manipuler le sorcier sans trop de risques.

La seconde d'après, ses mains fouillent les poches du Ollivander, tout en jetant des coups d'oeils par-dessus son épaule, au cas où ils auraient de la visite. Finalement il trouve un petit carton, sobre, qui annonce un salon de tatouage au nom de... Neal Livingston. "On a des choses à cacher?" Il glisse vers le corps inconscient avant de relever ses yeux sur la boutique qui se trouve au-dessus de leurs têtes et est presque content de voir qu'il s'agit de la sienne. Seamus pointe sa baguette sur la porte la seconde d'après. "Alohomora." Il murmure, félicitant de voir que Neal ne verrouille pas plus que ça, et pointe sa baguette vers le corps de Neal. "Levicorpus." Le corps s'élève et entre dans la boutique, dirigé par la boutique de Seamus qui entre à son tour, refermant la porte derrière lui avant d'observer l'intérieur des lieux. Son regard s'arrête sur un aquarium contenant deux strangulots et il ne peut s'empêcher de hausser un sourcil, on fait mieux comme compagnie, non ?

Finalement, le lion avise un canapé sur lequel il envoie se poser doucement le corps et se retourne vers la porte pour pouvoir la verrouiller avec davantage de sortilèges qu'un mineur. Lorsque c'est fait, il se dirige à nouveau vers le canapé, attrapant une bassine qui sert à nettoyer les aiguilles, et vient la caler près du visage de Neal. Au cas où. Sa baguette s'active déjà à ses côtés pour amener à sa portée de quoi nettoyer le visage du sorcier et préparer un thé. Il laisse le linge mouillé sur le front de Neal après l'avoir passé sur son visage et s’assoit au sol, à côté du canapé, avant de récupérer une tasse de thé, l'autre flottant toujours à leurs côtés en attendant que Neal se réveille.

Il semblait que le linge mouillé sur son front imbibait sa peau d’eau avec une vitesse particulièrement étrange.  Le sang hybride des tritons réveillait certains mécanismes de survie, comme l’hydratation. Neal reprenait peu à peu des couleurs, gémissant un peu en portant sa main sur la bosse qui déformait son visage. « Excellent… » marmonna-t-il, dépité, sans remarquer Seamus Finnigan, assis non loin de lui. Il entendait les bruits des strangulots qui se heurtait à l’épaisse vitre de leur aquarium. Poppy et Pippo, les deux créatures aquatiques, restaient la seule compagnie quotidienne du jeune homme depuis que son statut de sang avait été dévoilé par ce fichu test du gouvernement. Privilège des êtres de l’eau, les strangulots se tenaient tranquille d’habitude et se laissaient volontiers caresser par l’hybride. En échange de ces attentions chaleureuses, ils offraient tout deux leur encre, qui servait à faire un encre magique d’excellente qualité pour les tatouages. Une aubaine que, malheureusement, les clients n’appréciaient jamais à sa juste valeur.

Neal gigota un peu, faisant tomber la bassine, et entrouvrit les yeux, toujours meurtris par une vilaine migraine d’origine inconnue. Il sentait son corps se guérir petit à petit de ses aventures, autre avantage d’être un « animal ». En se redressant, le sorcier remarqua la présence de son ancien camarade de classe. Il écarquilla les yeux et chercha sa baguette dans sa veste. Pas de chance, il l’avait laissée dans l’arrière-boutique avant de se rendre chez l’apothicaire. C’était une précaution plutôt maligne : peu de sorciers en ce bas lieu qu’était l’allée des embrumes rencontreraient quelques scrupules à voler la baguette d’un hybride. Il y tenait beaucoup trop pour la laisser en des mains miteuses, malveillantes à ce point. « Je peux savoir ce que tu fais ici Finnigan ? » En réalité, il se remémorait déjà ses déambulations démentes dans l’allée. « Et puis surtout, qui t’as demandé de prendre soin de moi ? Je n’ai pas besoin d’un sale sang mêlé pour rentrer chez moi. » Son ton était arrogant et il n’arrivait toujours pas à cacher son dégout paradoxal pour les sorciers qui n’étaient pas purs. « J’espère que t’as rien touché, sinon je te crève les yeux... »

Il essaya de se lever mais ses forces n’étaient pas encore suffisantes pour se faire. Neal grimaça comme s'il s'était piqué les fesses sur une punaise « … quand je pourrai me relever. » Il se pencha juste en avant pour attraper une couverture en patchwork, troué par les mites, et s’en recouvrit. Sa main attrapa le thé, et il souffla sur la fumée qui s’en échappait, jetant des petits regards d’enfant perdu à Seamus. « Pas la peine d’avoir pitié. D’habitude, je peux très bien me réveiller dans le caniveau et revenir tout seul ici. Pas besoin du bon samaritain, ok ? ». Le linge mouillé, les gorgées brulantes de café et les gargouillis familiers de Pippo et Poppy semblaient l’apaiser, et lui redonner de plus en plus de couleurs. On devinait sa consistance mince, malnutrie, mais robuste dans l’épreuve. Ses cheveux ternes reprenaient les teintes d’un brun terreux mais profond, brillant. Son regard fané se réveillait dans des teintes attirantes. Il y avait quelque chose de surnaturel chez ses héritiers du sang des êtres de l’eau. Il paraissait toujours plus jeune que son âge, jouvence héréditaire précieuse dans les ténèbres. A y regarder de plus près, on devinait pourtant les stigmates d’une vie de vagabond. On devinait aussi la peur d’un adulte trop vite parti de la maison, encore trop jeune pour faire face à la déchéance et aux misères d’une vie de marginal.

Neal baissa le regard vers le sol, fuyant la confrontation avec Seamus, trop honteux pour quitter son thé et sa couverture. Il murmura, aigre : « Tu peux te marrer, et pour ta gouverne : je ne suis plus Ollivander ».

C'est le bruit de la bassine qui tire Seamus de ses pensées -dont la plus pressante étant 'barre-toi d'ici avant que ça te retombes dessus'- qui se met à sursauter et se tourne vers Neal, un sourcil haussé. Lorsqu'il le voit chercher sa baguette, Seamus retient un léger soupir et voit que, finalement, il ne l'a pas sur lui, ce qui semble tourner à l'avantage de l'irlandais qui tient toujours la sienne dans sa main libre. Et avant même que le lion n'ait pu dire quoi que ce soit, Ollivander est déjà parti dans un flot de paroles sans nom, laissant Seamus perplexe une seconde. Du moins jusqu'à ce qu'il entende la remarque concernant celle de son sang et une pointe de colère naît en lui, grandit d'un coup alors qu'il fronce ses sourcils. "Ca te vas bien de dire ça, je me demande comment tu fais pour rentrer chez toi si t'acceptes même pas ton propre sang. Tu trouves pas que c'est une connerie qui a assez duré ? Ne me dis pas que les sorciers ne te traitent pas comme un moins que rien maintenant que ton sang est mêlé et que tu es un hybride." finit-il par cracher, sans ces propos complètement idiots il n'y aurait même pas cette guerre, déjà.

L'énième menace tombe et le regard de défis de Seamus se pose sur lui, prêt à en découdre, ça lui plairait bien d'arracher des yeux à lui aussi. Mais Ollivander retombe lourdement dans le canapé, visiblement bien trop faible pour faire quoi que ce soit. Un ricanement s'échappe des lèvres du Gryffondor alors qu'il secoue la tête. "Je serais déjà parti, ne t'en fais pas." Il rajoute finalement, trouvant l'idée plus qu'intéressante, pour sa propre survie déjà. Pourtant, il ne bouge pas, reste installé sur le sol de la boutique, son regard suivant Neal qui attrape a présent une couverture et la tasse de thé qu'il a préparé. Au moins il n'est pas révulsé au point de ne pas boire ce qu'il lui prépare. Sans un mot, cependant, Seamus porte la tasse à sa bouche et en prend une gorgée à son tour.

Il y a autre chose aussi qui calme Seamus et qui l'incite à rester installer ici, c'est les regards que lui lancent de temps à autre le sorcier, des regards qui n'ont rien de sûr, qui semble exprimer le désarroi de Neal. "Je n'ai pas pitié." Seamus commence en soufflant un peu sur sa tasse et prend une gorgée de son thé avant de hausser légèrement un sourcil. "Je suppose que tu sais ce qui fait un bon Poufsouffle non ?" Il commence, accompagnant ses paroles d'un mouvement de menton, même si bon, clairement, les exemples qui lui viennent dans l'immédiat ne sont pas les mieux, à commencer par la traîtrise de Boris qu'il garde toujours, presque avec une rancune bien jalouse. "Ce sera pas une surprise de t'apprendre que le Choixpeau a hésité une bonne minute à me mettre à Poufsouffle ou Gryffondor." Il annonce simplement, pour faire comprendre où il veut en venir. Ce n'est pas de la pitié, une simple loyauté qui le raccroche à aider n'importe quel visage qu'il connaît et qu'il ne peut se résoudre à laisser derrière. Pas quand on ne lui a pas donné les raisons de le faire, tout du moins. Et même si Ollivander a toujours été un con de première classe, il n'a jamais rien fait qu'il lui valait de rester couché dans le caniveau.

Alors que ses lèvres retrouvent la tasse de thé, il hausse un sourcil face à la révélation du Pousouffle, qui semble soudainement aller en accord avec le nom sur la carte et l'enseigne de la boutique. "Je vois." Seamus murmure, le regard un peu perdu face à lui, et prend finalement une autre gorgée de thé. Le liquide brûlant passe rapidement dans sa bouche et bientôt il n'en reste plus rien. Dommage. "Et qu'est ce qui te met dans cet état, du coup ? Pourquoi t'étais étalé dans le caniveau et pourquoi ce n'est pas la première fois ? Dans quoi tu traînes encore..." Le Finnigan rajoute dans un léger soupir avant de reposer la tasse vide à ses côtés sur le sol et remonte son regard sur Neal, se mordillant l'intérieur de la joue en voyant son regard fuyant. "J'espère que t'as conscience que je ne vais pas te juger ou me moquer de ton sang, on est pas tous comme toi." Il fait remarquer, une pointe de sarcasme dans la voix.

« Je n’ai jamais été un bon Hufflepuff » commence-t-il, tiquant à la remarque de Seamus. Rien n’était plus vrai à ce moment que cette affirmation .Neal n’avait jamais été un travailleur acharné. Il était très intelligent mais fainéant. Seul ce qui le passionnait pouvait le sortir de son flegme et attirer suffisamment son appétit de petit génie pour l’occuper des mois entiers. Il avait été d’une loyauté sans borne envers les Highflyers. Encore aujourd’hui, leurs thèses sectaires empoisonnaient son esprit. Plus que de la loyauté, cela s’était muté en aveuglement, jusqu’au déni parfois de sa propre condition d’hybride. Rien de glorieux donc à porter les couleurs d’Helga Hufflepuff tant il semblait que le Choixpeau s’était complétement planté en l’envoyant dans les caves de Poudlard.  Neal Ollivander, de son nom quand il fut réparti, avait tout d’un garçon juste et patient. Les mauvaises rencontres, l’appartenance à une sorte de « famille » qui l’aimait inconditionnellement, la peur de l’abandon aussi avaient perverti son cœur. Les Highflyers en étaient pour beaucoup quant à son destin de sorcier au cœur velu. Cependant, il n’en était pas une victime. Il s’était laissé porter par le mouvement quand d’autres lui tendaient la main pour se sortir d’un tel bourbier. Et quel bourbier. Aucun Highflyer aujourd’hui n’appartenait à son monde. Ils s’étaient déchirés et rien ne pourrait plus les raccommoder. C’était peut-être mieux ainsi…

Il rêvait où Seamus lui racontait sa vie ? Neal se foutait pas mal de l’histoire d’un Chapeauflou en ce moment. « Tu cherches à me dire quoi là, Finnigan ? Que parce que ce stupide chapeau a hésité, alors tu es comme moi ? ». Il finit de boire son thé d’une traite et se redressa encore un peu. Neal n’allait pas devenir un agneau pour du thé et une compagnie. Pas encore du moins. Chaque parole, il la ressentait comme une menace. La solitude le rendait paranoïaque et la vente de son sang irascible. « Je survis Finnigan, voilà ce que je fais. Tu crois qu’on se bouscule ici pour se faire servir par une saleté d’hybride ? Non. Alors je trouve du pognon ailleurs, là où on veut bien de cette malédiction. » Des larmes de rage se mêlèrent à de la tristesse, mais il se refusait à les laisser couler. Neal était un jeune homme bien trop digne et fier. C’est ce qui restait de son éducation. Pour le reste, il avait tout perdu à cause des mensonges de son père. Autrement, il n’aurait sans doute pas eu la même vie. Il n’aurait pas rejoint un groupe de sang pur intolérant et violent. Il n’aurait pas eu honte de son homosexualité et de sa différence. Peut-être même aurait-il été ami avec Seamus. Et tout aurait été différent.

« Heureusement que personne n’est comme moi. Je fais pitié. » Il se leva et disparu dans l’arrière-boutique d’un pas élégant mais un peu raide. « Suis-moi beau gosse » cria-t-il d’une voix neutre alors que le bruit d’une trappe qu’on soulève résonna dans le silence du soir. Neal descendit une dizaine de marche taillée dans la pierre pour arriver dans une cave cachée. L’intérieur ressemblait aux caves de Hufflepuff, remplies d’objets de cuivres, d’épaisses couvertures en patchwork et de deux grands canapés de cuir en parfait état. « Les moldus sont si faciles à voler. Mon sang pour payer le loyer, mon temps libre pour voler mon confort ». Il se dirigea vers ce qui ressemblait à un atelier de fabricant de baguette. Il n’avouerait jamais prendre plaisir à exercer en cachette le métier de son père. Et pourtant, il ouvrit un placard d’où tombèrent quelques bâtons de bois d’où s’échappèrent de la fumée et des étincelles. Neal les ramassa avec précaution, comme s’il s’agissait de ses propres enfants, et les enferma à nouveau dans le meuble. Il en sortit au préalable une carafe de whisky pur-feu et deux verres. « Meilleur que le thé non ? »

Un rictus étire les lèvres de Seamus lorsqu'il entend le sorcier lui confirmer qu'il n'était pas un bon Poufsouffle et il hausse légèrement des épaules. "Je ne pense pas que le Choixpeau place au hasard, il n'y a pas de ligne de conduite efficace pour chaque maison mais il y a des attraits qu'on y retrouve. On a déjà vu un Gryffondor s'enfuir ? Rarement, et pourtant me voilà." Il ajoute dans un murmure avant de se mordiller légèrement la lèvre, son regard fixé sur le mur face à lui. Jusqu'à ce que le Livingston ne le dire de ses pensées pour lui demander s'il était en train d'insinuer qu'ils étaient pareils et Seamus grimace clairement en reportant son regard vers lui. "T'as cru que j'étais là pour un pep talk ou quoi ?" La surprise passe quand même sur son visage ensuite, il faut dire qu'il ne s'attendait pas à ce que Neal lui pose cette question et en vienne à cette conclusion. Non, Seamus était loin de vouloir lui remonter le moral ou lui dire qu'ils se ressemblent car il sent bien  que rien ne les rapproche. Son regard remonte sur Neal qu'il observe en silence ensuite alors qu'il fait disparaître leurs tasses d'un coup de baguette lorsque les deux sont vides. Une habitude de devoir toujours tout nettoyer derrière soi, ne donner aucun signe de vie, comme si on n'avait jamais existé finalement. A cette pensée, le lion retient un soupir et préfère se concentrer sur son ancien camarade face à lui.

Les questions se pressent contre ses lèvres et il ne peut les retenir, il se demande bien à quoi ça rime de le retrouver à moitié mort dans une ruelle quand même. Il écoute la réponse un peu brusque de Neal et hoche finalement de la tête en retenant un autre soupir. "Je vois. Et je suppose que tu ne peux pas te faire une place au ministère ?" Le temps a tellement changé en un an que Seamus n'est plus vraiment au courant de tout, à dire vrai, c'est comme s'il mettait les pieds dans un nouveau monde, un monde familier mais hostile. L'impression de marcher sur des oeufs. Mais c'est lorsque Neal dit qu'il fait pitié que Seamus hausse un sourcil, ce sont des mots qu'il pensait ne jamais entendre dans la bouche de l'ancien Ollivander. Sans vraiment rajouter, de peur de se prendre un revers fulgurant, le Finnigan observe Neal se lever et s'avancer dans l'arrière boutique. Il analyse sa façon de marcher, se demande s'il a encore assez de force pour réellement pouvoir se déplacer comme ça, et fini par hausser ses sourcils en l'entendant l'appeler. Un léger sourire se dessine sur ses lèvres sans même qu'il ne s'en rende compte et se lève finalement, sa baguette toujours fichée entre ses doigts. Au cas où.

Le Gryffondor arrive pile à temps pour voir Neal disparaître dans une cave certainement secrète et il s'approche pour y jeter un coup d'oeil avant de soupirer. Par réflexe, il jette un regard derrière lui et resserre ses doigts sur sa baguette avant d'emprunter les quelques marches qui l'emmènent dans le cave à son tour. "Oh." Seamus souffle sous la surprise des éléments qu'il retrouve ici et jette un rapide coup d'oeil autour de lui avant de laisser poindre un léger sourire moqueur. "Et moi qui m'attendais à des instruments de torture." Sans plus attendre, le blondinet s'approche d'un instrument en cuivre et l'observe avec attention. Les canapés ont l'air bien confortable et, pendant une seconde, Seamus se surprend à vouloir s'y installer. "Tu es donc devenu un voleur, qu'est ce que c'est charmant." il commence en laissant glisser ses doigts sur l'un des accoudoirs et hausse un sourcil. "J'en suis presque excité." Une pointe de moquerie perce dans sa voix alors qu'il redresse ensuite son regard vers Neal pour voir ce qu'il fait, toujours un peu sur la défensive, il n'est pas réellement sûr de comprendre exactement le climat actuel entre le Poufsouffle et lui. Ca a l'air d'être  plus que délicat.

Mais il voit ensuite quelques prototypes de baguettes tombées au sol, projetant des étincelles lorsqu'elles touchent les dalles froides, et Seamus hausse un sourcil. "Neal !" Il lâche avec surprise, décidé à ne pas le nommer par un nom de famille de peur de faire une connerie, et s'avance pour le regarder ranger les baguettes à leur place. "Je savais pas que tu faisais ça." Un air impressionné semble clairement s'afficher sur le visage du sang-mêlé qui observe l'endroit où  ont disparu les baguettes et l'atelier ensuite dans lequel ils se trouvent. "C'est... tu es doué ?" Seamus demande quand même en se mordant l'intérieur de la joue avant de voir le whisky pur-feu face à eux et il ne peut s'empêcher de sourire à nouveau. Il ne va pas se mentir, ça a été un fidèle ami durant son année en France. "C'est plus fun. Mais tu aurais dû me dire qu'on faisait une petite fête, j'aurais apporté des biscuits apéritifs." Il rajoute dans une pointe de sarcasme et sourit vers Neal, ce sourire de petit con en chef, c'est juste qu'il a du mal à procéder à tout ça, au revirement de situation.

Sur la question concernant le Ministère, Neal Livingston n’avait même pas pris la peine de répondre. Il ne voulait pas entendre parler du gouvernement. Il en avait assez d’être considéré comme un paria, par les agents ministériels, par sa propre famille, tout du moins son père qui ne l’avait pas retenu par médiocrité, par Aleksander aussi… Tout avait tellement changé depuis ce fameux test de sang voulu par Lord Voldemort. Sa vie n’était qu’un mensonge, comme si Rita Skeeter elle-même avait rédigé le livre de son existence. Le tragique s’y mêlait de ridicule, et lui se débattait comme un Strangulot échoué sur une plage. Neal se débattait pour ne pas sombrer, et cela passait par la vente illégale d’un sang dont il était plus que blasé, presque dégoûté parfois, parce qu’il lui avait tout pris. Sans cela, il serait resté peut-être dans la boutique des Ollivander, à fabriquer des baguettes et à acquiescer lorsque le régime politique persécutait les freaks et les impurs. Tout son logiciel avait changé en connaissant la rue, la soif, la faim, le mal être et le rejet d’autrui. Au fond de lui, parfois, il regrettait de ne pas être comme ses anciens amis qui n’étaient pas mis au banc de la société, eux.

« Ne t’excite pas trop. T’es ici juste parce que j’ai besoin d’autre chose que d’eau chaude »  la main leste, Neal servit deux bons verres de whisky. Il n’avait pas assez d’argent pour s’acheter ce genre de breuvage. L’hybride jouait avec le feu en volant ce qu’il possédait désormais. Ce genre de larcins des payaient très cher sous l’actuel gouvernance du monde des sorciers. Le jeune homme s’affala dans un canapé et fixa Seamus avec insistance. Ses joues creusées, ses yeux suspicieux, ses cheveux en bataille et son teint cireux, tout donnait cette impression qu’il était un garçon sauvage, un animal blessé qui n’avait plus confiance en l’être humain. On sentait les gênes de triton ressortir dans ce regard à la fois trop fier et vulnérable, prêt à bondir à la moindre contrariété. Tout cela se cachait si mal dans ses efforts d’hospitalité. Et la fixette qu’il faisait désormais sur Seamus Finnigan n’était pas vraiment conforme à ce qu’il était permis de faire en bonne société. En vérité, il s’en foutait, on était chez lui, sur son territoire.

« La baguette c’est juste pour m’amuser. Elles fonctionnent, elles ont une personnalité et je les connais par cœur. Donc oui, je suis doué. » Il sirota une gorgé de whisky, l’air sur de lui, la voix basse et grave qui était source d’autorité. Neal, déjà à Poudlard, conservait cet air de gamin insupportable, de petit génie de son propre domaine mais de rebelle à tout ce qui n'avait pas grâce à ses yeux. Il n’avait plus rien du corps meurtris retrouvé dans le caniveau. « C’est la seule chose que j’emporterai quand j’aurais décidé de partir d’ici. Elles et mes strangulots. » Il continuait à fixer Seamus. « Et toi, je suppose que t’as rejoint les résistants avec tes potes de Gryffondor ? Vous ne saviez faire que ça vous, être des bien-pensants avec des causes à défendre, hein… » Il continuait à regarder l’autre sorcier, presque sans cligner les yeux.