You got to die a little if you wanna live

@Maureen Ward

Il y a une grande satisfaction à être celui chargé de l’Airlock. Accueillir de nouveaux membres dans les rangs de l’Ordre du Phénix est définitivement plus gratifiant que de jouer au maton, plus que de se servir de ses talents pour extorquer des informations et presque torturer. Il a changé, sa vision aussi. C’est aussi suffisamment satisfaisant de travailler à accélérer le processus de triage, d’investigation et de validation de ceux qui désirent rejoindre la résistance, qu’importe leurs raisons. Des réfugié·e·s, membres de famille qu’on tente de mettre à l’abri, hybrides et maudit·e·s à la recherche de mieux, membres d’une société civile dont la rigueur totalitaire ne fait que s’amplifier, né·e·s-moldu·e·s auxquels il réserve ses plus beaux sourires aux dents acérées. Ceux qui ne se doutent pas que sous le triangle marron qui décore la joue du Mirabal, sous les airs désormais toujours un peu féroces, se cache un des leurs.

La plus grande satisfaction, bien sûr, est celle qui l’habite, ce matin, alors qu’il arrive à la chambre réservée à Maureen Ward le temps de son séjour ici (on dirait qu’il gère un hôtel)(... kinda, tho). Une élasticité dans le pas inégal, dans la détente des épaules et des traits toujours un peu épuisés. Quelque chose qui fend sa bouche en sourire dès qu’il ouvre la porte, après avoir cogné quelques coups réglementaires pour annoncer son arrivée. Le sourire plisse jusqu’aux rides aux coins de ses yeux, là où la bonne humeur a davantage marqué les traits que la tristesse, fort heureusement.

Ce n’est pas un secret qu’il a manoeuvré pour que la dame n’ait pas à patienter trop longtemps avant de pouvoir rejoindre pleinement la résistance, et pas uniquement comme réfugiée comme lors des jours et semaines qui ont suivi la libération de Gracefield. Il y avait une grande résignation sur le visage de la demi-Vélane lorsqu’elle est arrivée à l’Airlock. Arrivée seule, sans le concours de son époux, ce qui est certainement ce qui a le plus surpris ― et surtout, inquiété ― le lycanthrope.

Il n’aurait jamais pensé Glenn capable de laisser sa tendre et chère dans un tel choix.

L’Américain sourit donc à son amie, s’il a bien le droit de la nommer ainsi. Il l’espère, après toutes les épreuves. Ses bras s’écartent et le ton calme est victorieux : « C’est le grand jour, Maureen. » Celui où, enfin, elle peut sortir d’ici.

You got to die a little if you wanna live

@Dani Mirabal

Quelques coups donnés contre le bois de la porte lui font quitter son miroir des yeux. Un dernier sourire à celui dont le reflet apparaît sur la surface lisse de l’accessoire, et elle met un terme à la communication avec Glenn. C’est à peine s’ils ont eu le temps d’échanger deux mots, ce matin. Déjà hier, elle aurait dû l’appeler. Résignée, elle se lève pour aller ouvrir la porte, elle le recontacterait plus tard pour lui donner de ses nouvelles. Peut-être de meilleures que celles qu’elle pensait lui transmettre aujourd’hui, qui sait.  

Depuis qu’elle a été contrainte de rejoindre l’Airlock, la demi-vélane ne s’est pas particulièrement épanchée sur les détails de sa présence. La situation la contrarie, n’importe qui la connaissant l’aura vu. Elle s’est renfermée, protégée à sa manière de la blessure causée par le fait qu’elle ait dû laisser derrière elle sa famille. Faye aura tenté d’en savoir plus, Javier se sera étonné de la voir seule, Dani aussi. A tous, elle aura répondu que c’était ce qu’il y avait de mieux à faire, que ce n’était rien, que ça lui passerait. Les autres Travellers n’ont pas cette contrainte qu’elle a. Eux, n’ont pas été marqué de la même manière. Ils n’ont pas à se priver de liberté quand ils peuvent encore sortir dans les rues sans craintes. Même Glenn, peut se le permettre, alors à quoi bon l’en empêcher ? Les points sensibles identifiés auront été bien vite écartés de leurs conversations, permettant à Maureen d’afficher une bonne humeur apparente. A défaut, un sourire quand on la croise.

Sans grande surprise, c’est Dani qui apparaît dans l’encadrement de la porte, un sourire contagieux dessinés sur les lèvres, les bras grands ouverts. Elle n’a pas le temps de le saluer, qu’il lui annonce ce qu’elle attend depuis plusieurs jours, quand elle s’attendait plutôt à ce qu’il lui propose une énième activité pour la distraire. Soudainement gagnée par sa bonne humeur, elle s’avance pour le serrer dans dans ses bras. Sincèrement heureuse de savoir qu’elle va pouvoir quitter les lieux.

Elle finit par le relâcher, rajuste sa tenue, qui n’a rien à voir avec les tenues autres résistants. Le tissu est trop élégant, l’ensemble fait trop habillé. Elle a même récupéré quelques bijoux, très sobres, eux. Seules les chaussures, des bottines pour le moins classiques, pourraient se fondre dans la masse. Mais en la voyant ainsi habillée, on note une différence avec les autres. Une de plus. Faye n’avait d’ailleurs pas manqué de le faire remarquer. Elle allait sortir du lot. Mais puisqu’il était impossible pour elle de sortir sans attirer l’attention, elle s’en était remise à Grainne pour refaire sa garde-robe à leur retour. La Lynch avait alors fait les placards d’anciennes collections dans les locaux de Witch Weekly pour elle. Dans son sac de voyage, elle avait donc emporté ces nouvelles tenues. Certaines très simples, d'autres moins.

« Attends, tu me promets que c’est vrai ? » Dani lui avait promis que son séjour serait de courte durée, qu’il ferait tout pour l’écourter au maximum. « Non pas que je n’aime pas l’Airlock, c’est -  c’est sympathique comme endroit. » Définitivement pas le terme qui convient. « Enfin, c’est pas mal. » Elle a connu pire, bien pire. Elle a vu mieux, aussi, c’est une certitude. Cette planque de l’Ordre se situe entre les deux. « Mais je commençais à en avoir assez de tourner en rond. » Elle aura eu beau recevoir de la visite, pouvoir retrouver quelques amis qui lui auront changé les idées l'espace de quelques heures, le sentiment d’être un oiseau en cage de l’aura pas quitté un seul jour pendant la dernière quinzaine. « Merci. » conclue-t-elle comme pour se sortir de sa justification bancale.

Maureen s’écarte finalement pour le laisser rentrer. La chambre est très sobre, et elle n’y a apportée aucune touche personnelle. Son passage n’est que temporaire, inutile de s’embêter à le faire. « Quel est le programme, maintenant ? » Ayant à présent la certitude qu’on ne la mettra pas dehors, il lui faut faire face à l’horizon plein d’inconnues qui se profile. « Dis-moi juste que j’en ai terminé avec leurs interrogatoires. » Elle en assez de répondre aux mêmes questions. Assez de sentir un autre esprit s’immiscer dans le sien quand elle aura répondu avec franchise la raison de sa présence – de son retour, même.

Au scepticisme de Maureen, Dani oppose un rire lége. En toute confirmation que oui, il dit bien la vérité, ce n’est pas une mauvaise blague, une tentative mal placée du pire humour possible dans les circonstances. Il lui rend son étreinte avec joie et se retrouve, lorsqu’ils se séparent, à effectuer des gestes semblables aux siens ― l’élégance de la Vélane n’est pas une surprise, autant que son propre besoin d’être habillé un tant soit peu proprement. Son fils a abondamment roulé des yeux lorsqu’il a demandé s’ils avaient des chemises, des vestons, des cravates, qu’il pouvait emprunter. Il lui a tout de même ramené ce qu’il voulait d’une friperie. « Non pas que je n’aime pas l’Airlock, c’est -  c’est sympathique comme endroit. Enfin, c’est pas mal. Oses-tu remettre en question mon hospitalité ? », fait mine de s’outrer l’Auror, la main plaquée au niveau du cœur, apparemment bLeSsÉ par les insinuations de la sorcière.

La chambre est sobre, les quelques affaires de son amie à peine défaites. Elle est prête à quitter. « Dis-moi juste que j’en ai terminé avec leurs interrogatoires. C’est terminé. Tu nous as dit tout ce qui était nécessaire. » Ses collègues se sont chargés des premiers interrogatoires, ceux de surface, et le lycanthrope a pris en main celui plus en profondeur, afin de dénicher ce qui pouvait ne pas avoir été dit. Il n’a pas tout révélé à sa hiérarchie, habitué aux secrets qu’on ne veut pas révéler et qui, malgré tout, atterrissent dans son esprit grâce à ses dons, à sa magie. Il a simplement confirmé que Maureen Ward était une bonne recrue, qu’elle était là en amie, en résistante, et qu’ils pouvaient lui faire confiance. Pas seulement parce qu’à ses côtés, il s’est battu pour sa vie et sa survie, et qu’il n’hésiterait pas à le faire à nouveau.

L’homme s’appuie contre le fauteuil mis à la disposition de l’occupante de la chambre. La suite des choses est un protocole pas moins serré que son arrivée, son isolement, les interrogatoires. « Je vais t’emmener à la planque qui t’a été désignée. Tu pourras demander à en changer plus tard, si tu n’y es pas bien. Il gratte sa joue marquée du détestable triangle brun qui se perd dans la barbe poivre et sel. C’est celle où j’habite, ainsi que Grant, Javi et plusieurs autres. Tu ne seras pas dépaysée. À moins que t’en aies marre de voir nos gueules. » Le sourire est large et complices. Ses crocs sont acérés, dans sa dentition blanche et égale.

« Considérant tes… talents, tu recevras tes missions des chercheurs de l’Ordre. » Il y aura ça, aussi, à faire. Un survol de la hiérarchie de l’Ordre du Phénix, des missions qui peuvent lui être attribuées, une future visite aux laboratoires de Liverpool. Le tatouage, aussi, qui sera magiquement dessiné sur son bras, énième marque dans la chair. Dani est as gay as they come, mais il n’est pas moins un homme, par définition magique sensible au charme des Vélanes et de leurs descendant·e·s, et il lui vient la réflexion instinctive que c’est un sacrilège, d’ainsi défigurer une telle beauté. Une seconde vague de réflexion avant qu’il se force à sortir de cette contemplation. « Je ne serais pas surpris que tu reçoives des ordres directs de Sofia. »

You got to die a little if you wanna live

@Dani Mirabal

Devant sa réaction exagérée, elle ne peut retenir un sourire franc. Bien sûr que non, c’est même impossible. Il a été l’un des meilleurs hôtes qu’elle ait connu ces derniers mois. Attentionné, pas envahissant, gentil. Du grand Dani Mirabal, en somme.

Rassurée quant au fait qu’elle en a bel et bien fini avec les interrogatoires, elle sent un poids s’envoler de ses épaules. Bien qu’elle se soit pliée à leurs formalités, elle avait jugé toutes ces précautions inutiles dans son cas. Elle n'est pas celle dont ils doivent se méfier. Elle a probablement plus besoin d'eux, qu'eux n'ont besoin d'elle et de ses compétences.

Le dos appuyé contre la porte, les bras croisés, elle écoute avec attention ce qu'on lui réserve. « Je vais t’emmener à la planque qui t’a été désignée. Tu pourras demander à en changer plus tard, si tu n’y es pas bien. » Sans même savoir où elle va loger, Maureen sait qu’elle n’en fera rien. « Ça devrait aller, t’en fait pas. Je m’adapterai. » Il y a très peu de chance pour qu’elle connaisse ou méprise les gens avec qui elle s’apprête à vivre désormais. « C’est celle où j’habite, ainsi que Grant, Javi et plusieurs autres. Tu ne seras pas dépaysée. À moins que t’en aies marre de voir nos gueules. » La surprise est la bienvenue. Des visages familiers, des gens qu’elle apprécie et qui peuvent la comprendre, les compagnons parfaits pour son temps dans la résistance. « Comme si je pouvais en avoir marre de vous ! » Elle roule des yeux et un peu des épaules aussi, un sourire en coin, comme si c’était possible qu’elle se lasse d’eux et de leur présence. Sauf que ça l’est, il leur est déjà arrivé sur l’île de s’écharper les uns et les autres, pour un oui ou pour un non. Rien ne pourrait les prévenir d’une nouvelle discussion animée. Mais elle reste sincèrement heureuse de son affectation. « C’est peut-être vous qui en aurez assez de me voir, en premier. » Il y a de quoi tenir des paris. Avec les années, ils auront formé une sorte de grande famille, unie par leurs idées, mais surtout contre leurs geôliers. Cette fois, leur collocation aurait un goût différent – et pas seulement parce que la cuisine serait bien meilleure.

« Les chercheurs ? » La première idée qui lui vient est égoïste, elle se dit qu’elle sera peut-être en contact avec les génies qui auront élaboré le sortilège qui endort le triangle. Des sorciers qui pourront peut-être lui expliquer comment ils s’y sont pris, peut-être qu’ils élaborent en ce moment un sortilège plus définitif, qui dans l’idéal ferait disparaître le symbole de leur visage à tous. Mais elle tempère rapidement son engouement, ce ne seront probablement pas ces chercheurs-là qu’on lui demandera d’assister. « Ok, très bien. J’essayerai d’être à la hauteur, dans ce cas. » En les rejoignant, elle leur avait bien dit que ses compétences seraient mises à disposition sans trop savoir dans quoi elle s’engageait exactement. Elle les avait déjà fournis par le passé, la différence principale étant que cette fois, le traitement serait direct. Et même avec Sofia, apparemment.

« Tu veux qu’on y aille maintenant ? Tu as peut-être mieux à faire.» Elle désigne d’un geste vague ses quelques affaires. « Ne t'inquiète pas je n’ai pas grand-chose à ranger. » A une époque qui paraît très lointaine aujourd'hui, il aurait pu patienter bien plus longtemps.