novembre 2007

Lorsque Leonor ouvre les yeux, ça lui prend plusieurs secondes pour se rappeler où elle se trouve. Chez Lou à Sweet River et plus précisément dans le lit de Cormac. Lorsqu’elle a su qu’il y avait une partie de Liverpool diffusée à la radio, elle s’est imposée à Lou pour qu’ils l’écoutent ensemble. Comme avant, quand les choses étaient plus simples. Depuis qu’elle a traversé les barrières magiques, elle n’a pas eu la chance de passer du temps avec son ami d’enfance. Rien de mieux que du sport pour y remédier. La chose qui les a toujours reliés. C’est dans ces moments-là que Lou est le plus volubile, même s’il se garde toujours une petite gêne, au contraire de Leo qui crie, saute et invective quand il y a un mauvais call ou une faute. Elle a aussi fait la rencontre de Dean et Cormac, deux autres passionnés de foot et elle s’est bien amusée. Une soirée loin de celles du Théâtre, plus calmes. Lou, scotché à son portable, s’est retiré dès la fin de la partie et Dean a suivi quelques minutes plus tard. Elle a discuté pendant près d’une heure avec Cormac jusqu’au premiers signes de fatigue. Il lui a gentiment offert quand il a été décidé qu’elle resterait pour la nuit ça serait trop de trouble de la faire sortir avec les systèmes de sécurité toussa.  Elle voulait gagner la couche en bonne et due forme dans un combat à mains nues – le premier au sol gagne – mais il a insisté et elle n’a pas refusé. Elle pense plutôt qu’il a eu peur de perdre.

Elle se lève et s’étire longuement en observant la pièce minimalement décorée. Elle saute du lit pour mieux épier. Une chambre de mec, désordonnée, rien sur les murs, des papiers et autres trucs pas intéressants sur le bureau, sauf une photo de lui et d’une fille qu’il enlace un sourire franc sur le visage. Mignons qu’elle pense. Elle ne savait pas qu’il avait une petite-amie, il ne l’a pas mentionné de toute la soirée. Elle hausse les épaules et remet le cadre à sa place. Elle aurait dû se sentir gênée de se trouver dans l’antre d’un type qu’elle a rencontré la veille, mais ça l’amuse plutôt. Il ne lui aurait pas offert son lit s’il avait eu des trucs à cacher. Son regard se porte finalement vers la petite horloge. 6h08. Elle pourrait sauter sa course du matin, mais son corps et surtout ses jambes lui crient de sortir.  Et puis, elle en a envie aussi. Elle sait que si elle n’y va pas, elle va s’en vouloir pour le reste de la journée. Elle allait être revenue avant que les garçons se réveillent. Elle enlève le t-shirt qu’elle a emprunté à Cormac et remet ses vêtements de la veille – un legging noir et un chandail à capuchon bleu et attache sa tignasse brune avec un élastique. Elle ouvre la porte qui grince légèrement, passe sa tête dans l’ouverture. Elle sort en retenant son souffle pour ne pas réveiller les occupants. Ce n’est pas tout le monde qui est lève-tôt et hyperactive comme elle. Sur la pointe des pieds, elle se dirige vers la porte d’entrée. Bien sûr, il fallait que la chambre soit celle complètement à l’opposée, si bien qu’elle doit traverser la petite maison au complet sans faire de bruits. Elle fait attention de ne pas se prendre les pieds dans les trucs qui trainent au sol, s’arrête chaque fois que le plancher craque en faisant une grimace et levant les yeux vers le canapé où est affalé Cormac et prie mentalement pour ne pas le réveiller lorsqu’elle enfile ses chaussures. Elle ouvre la porte doucement et la referme de la même façon.

Une fois à l’extérieur, Leo prend une grande bouffée d’air frais. Il ne doit pas faire plus de sept degrés. Avant d’entreprendre sa course, elle prend le temps de s’échauffer. Elle saute sur place, bouge la tête et les poignets. Étire ses bras et ses jambes et se met finalement en marche.

 novembre 2007

Leonor n’a pas fait trois pas qu’elle entend la porte s’ouvrir derrière elle. fuck. Elle qui pensait avoir fait attention et ne pas avoir fait trop de bruit. La moldue oublie vite que les habitants de la maison ne sont pas tout à fait humains et qu’ils ont certaines capacités accrues. Comme celle d’entendre à la perfection le moindre petit bruit, craquement ou frottement qu’elle a pu faire entre la chambre et l’entrée. Hier soir, les garçons ont passé près d’une heure à lui expliquer la différence entre un loup-garou et un halfer. Elle n’est pas encore certaine de comprendre, mais soit, il semble qu’elle ait réveillé Cormac qui dormait sur le canapé. "Ouais je…" Elle montre la route du doigt pour le prévenir qu’elle va courir un peu, mais il lui demande de l’attendre. "Eh…okay." qu’elle répond à la porte qui vient de claquer. Elle l’attend en sautillant sur place pour se réchauffer. Il réapparait peu de temps après bien vêtu pour un jogging matinal. "Je voulais pas te réveiller, désolée! Mais, c’est cool que tu m’accompagnes!" Même si elle se retrouve dans un monde complètement différent du sien,  elle n’a pas perdu cette habitude qu’elle traine depuis l’adolescence, alors qu’elle faisait partie de l’équipe d’athlétisme de son lycée. Courir tous les matins est une nécessité, un besoin. Encore plus maintenant qu’elle fait face à beaucoup de changement. Ça lui permet de garder les pieds sur terre, d’avoir quelque chose de son ancienne vie à laquelle se raccrocher et de remettre ses idées en place. Parfois, Alessandro ou Nicholas, ses colocataires du Théâtre, viennent avec elle, mais la plupart du temps, elle est seule. Sans étirement ou échauffement, le sorcier s’élance avec un air de défi et la brune se dit qu’il va vite le regretter.

Spécialiste de course de fond, Leonor trouve rapidement son rythme et suit Cormac qui semble bien connaitre les environs. Elle le laisse s’épuiser, même si elle se dit qu’en tant qu’halfer, il doit avoir beaucoup plus de cardio que le sien qui est assez fort. Elle accélère doucement la cadence. On entend que leur respiration saccadée et leurs chaussures qui frappent le gravier. Elle remonte jusqu’à lui et lui offre un sourire fier lorsqu’elle se retrouve à sa hauteur. Elle fait quelques mètres à ses côtés avant de le devancer sans trop de difficultés. Il l’a rejoint rapidement et la défie pour une course. Elle ne dit jamais non pour ça. "Aller!" Elle n’est pas une sprinteuse, encore moins une grimpeuse, mais elle a gardé assez d’énergie pour la fin. Mais voilà que l’homme la dépasse, un sourire fendant sur les lèvres. "Tu triches!" qu’elle lui lance pour le taquiner. Elle le suit dans son sillage, évitant avec finesse les trous, les rochers et les branches au centre de la piste. Cormac a toujours un peu d’avance, mais elle ne se trouve pas très loin derrière. Elle puise au fond d’elle et va chercher le nécessaire pour rallier la distance qui le sépare de lui. Concentrée, elle presse le pas. Elle se permet de lui donner une petite tape derrière la tête lorsqu’elle passe à côté de lui pour finalement le devancer. Elle se retourne et continue de courir à reculons. "Encore un petit effort!" Elle se remet dans le bon sens et termine la montée dans une accélération finale bien calculée. Au sommet, elle lève les bras au ciel et fait une petite danse de la victoire. "J’espère que tu ne m’as pas laissé gagner!" Difficile à dire alors qu’il a l’air de mourir et qu’elle est à peine essoufflée. "Bien joué!" Il s’assoit sur l’herbe pour reprendre un peu ses esprits. "Quoi déjà? Mais, c’était juste l’échauffement ça!" Un échauffement plutôt ardu, mais elle a encore de l’énergie pour courir encore un petit moment. Par contre, elle s’en veut d’être partie sans un peu d’eau. Elle en aurait bien besoin pour s’hydrater. Elle pose les mains sur ses hanches et reprend son souffle. Cormac les a menés à un très bel endroit qui lui permet d’admirer un joli paysage terni par l’automne, mais qui doit être à couper le souffle en été. Je cours tous les matins beau temps, mauvais temps. Elle hausse les épaules en serrant les lèvres en un sourire. "T’es le bienvenu. C’est plus simple pour toi de me rejoindre à ma planque que moi de venir ici." Elle ne sait pas pourquoi, mais elle se sent bizarre de dire ça, presque mal de ne pas être en mesure de se déplacer comme elle le veut. Machinalement, sa main vient caresser son tatouage sur son avant-bras. You’re special Elle sait qu’elle n’est pas dans son monde et qu’il y aura toujours des petits trucs comme ça, minimes et involontaires, qui vont lui rappeler qu’elle est très fragile. "Oui c’est ça, au Théâtre!" Elle le regarde, incrédule. En avion? Il est sérieux là? Elle éclate de rire. "On m’a déjà donné un portolointruc? Mais sinon j’arrive à me trouver quelqu’un pour transplaner. Ma sœur, Nate, Lou…Je me sens comme une gamine de douze ans qui doit demander à tout le monde de la déposer où elle veut en voiture! Disons que je suis pas très indépendante." Depuis qu’elle est là, elle ne passe pas non plus d’une planque à l’autre et reste la majorité du temps au Théâtre à essayer de se rendre utile avec la technologie moldue. Disons qu’elle essaie de se faire petite auprès de sa famille, déjà qu’elle leur a ajouté un poids sur les épaules en s’imposant dans leur monde. "T’es sûr que ça va? Tu devrais enlever ton pull, t’as l’air d’avoir chaud. Doit bien y avoir une source d’eau dans le coin?"

 novembre 2007

Leonor prend souvent pour acquis que les sorciers, surtout ceux qui sont de sang mêlés, comprennent tout ce qu’elle dit. Qu’ils connaissent tous les objets, termes ou expression moldues. Elle ne réfléchit pas avant de parler et elle se prend régulièrement des regards interrogateurs, comme là avec Cormac quand elle parle de voiture. Il sait ce que c’est, mais clairement, il n’est jamais monté dans une. Elle trouve son air mignon et se rend compte qu’elle aussi à des choses à montrer aux sorciers. Elle hausse les épaules lorsqu’il dit que ça craint. Elle apprécie son empathie, mais en même temps, elle savait à quoi s’attendre lorsqu’elle a décidé de venir dans le monde magique. Elle savait qu’elle n’aurait pas beaucoup de liberté et qu’elle dépendrait d’eux, mais ce n’est pas si grave. L’important, c’est qu’elle se trouve auprès d’eux.

Un sourire éclatant étire ses lèvres lorsque le sorcier lui dit qu’il viendrait courir avec elle et l’emmener où elle veut. Elle rougit à son tour. Heureuse d’avoir un trouver un partenaire de course. C’est Alex et Nico qui vont être heureux de ne plus être obligé de l’accompagner. Elle se promet toutefois de ne pas trop abuser de son offre. Ça lui plait néanmoins de s’être peut-être fait un ami, autre que sa famille ou les membres de sa planque. "Pour vrai? Trop bien! Tu vas voir, tu vas retrouver la forme! " Elle serre les lèvres et lève les sourcils en s’empêchant de rire. Il a l’air complètement à terre alors qu’ils ont à peine couru quelques kilomètres. N’est-il pas supposé avoir des supers pouvoirs et être super athlétique dû à sa condition de halfer? C’est ce qu’elle a cru comprendre hier soir lorsque les trois colocataires lui ont expliqué les hybridités. Elle lui demande s’il va bien, parce qu’il a l’air de souffrir. Elle ne sait pas si c’est à cause de la course ou d’autre chose, mais il n’a pas l’air d’aller bien. Son pull ne doit pas aider. Malgré l’air frais de novembre, le soleil leur tombe directement dessus. Il lui répond que tout va bien, pas très convaincu. Leo lui demande tout de même s’il n’y pas de source d’eau proche. Il lui répond par l’affirmative avec une énergie nouvelle et elle ne se fait pas prier pour le suivre. La route est particulièrement sinueuse et accidentée, mais ça la fait travailler d’une autre façon et ce n’est pas pour lui déplaire. Elle se prend quelques branches au visage, elle saute par-dessus les troncs tombés et les flaques d’eau boueuses – son pied droit est d’ailleurs trempé et c’est inconfortable, mais elle ne se plaint pas, ça l’amuse bien au contraire! Jusqu’à ce qu’elle entende l’eau qui coule et qu’elle découvre le petit ruisseau. Elle suit Cormac et s’accroupie à son tour. Elle plonge la main dans l’eau et se mouille le visage, ce qui la rafraichit rapidement. Le sorcier sort sa baguette et par un petit sort apprit de sa mère, réchauffe l’eau. Même si elle n’est plus surprise par les formules magiques, ça la fascine toujours autant de voir les sorciers à l’œuvre et d’assister aux effets de leurs sortilèges lancés. Elle remet sa main à l’eau et sent immédiatement la différence sur sa peau. "Trop génial comme sort! " s’extasie-t-elle, les yeux lumineux. Ses doigts font des cercles dans le liquide tiède, jusqu’à ce que l’homme cesse son sortilège. Le courant revient rapidement froid.

"Disons qu’un bain d’eau froide après une longue course aide à réduire les douleurs musculaires. Alors, non je n’aime pas particulièrement ça, mais on s’habitue. " Elle se relève et enlève ses chaussures et ses chaussettes un air de défi dans les yeux. Elle met ses deux pieds dans l’eau. "C’est même pas froid, je t’assure!" Elle avance de quelques pas et se retourne. "Tu devrais venir, t’as encore le visage tout rouge. Ça te ferait du bien. Aller, viens!" D’un coup de pied, elle l’arrose en éclatant de rire.