« Tiens, mon amour, tu as fait tomber Gustave. » chuchota Fleur, reposant dans le petit lit le doudou de Hope. Il s'agissait d'une petite peluche toute simple, représentant un chien aux poils gris. C'était un cadeau de Gabrielle, offert pour la naissance de sa nièce. Elle lui avait donné le nom du chien qu'elle et Fleur avaient lorsqu'elles étaient petites, disant que cette peluche le lui rappelait. Et c'était vrai. Fleur resta quelques instants à observer sa fille serrer le petit chien entre ses petites mains potelées, souriant de ses petites dents encore éparses. Déjà presque dix mois s'étaient écoulés depuis la naissance de la petite. Neuf mois qui avaient chamboulé la vie de Fleur comme jamais elle n'aurait cru. Et pourtant, ces dernières années aveint été le théâtre de bien des changements. Elle avait vu le monde sorcier changer. Et rien de ce qu'elle avait connu autrefois ne semblait exister. Comme si les ténèbres avaient envahi le monde, absorbant dans sa noirceur la moindre once de lumière. Des années d'errance, de combats et de rêves paraissant chaque jour plus utopiques. Puis elle était arrivée. Un jour de février. La petite Hope. L'espoir. Et ce fut comme un rayon de soleil, perçant les nuages sombres d'un ciel obscur.

Avec Hope, Fleur avait découvert de nouveaux sentiments. Des émois qu'elle pensait ne jamais vivre, elle la Delacour si fière. Parmi ces émotions, il y avait la peur, irrépressible. La peur de ne pas être une assez bonne mère, de ne jamais être à la hauteur. La peur tellement viscérale de perdre ce petit trésor, fruit de l'amour. Mais il y avait aussi le bonheur. Le genre de bonheur qui rend tout le reste insignifiant, celui qui dessinait un sourire béat sur son visage quand elle la regardait. Une joie que jamais Fleur n'aurait cru connaître, elle qui se pensait si dure. Ainsi, malgré les difficultés qui ne cessaient de s'accumuler, entre la malédiction qui les avait frappés, la révélation de l'existence des Battues, la démission de Kingsley et autres chamboulements, Fleur avait l'impression d'avoir vécu dans une bulle un peu à l'écart.

Cela faisait neuf mois presque jours pour jours, et Fleur ne parvenait toujours pas à réaliser. Les événements récents qui avaient tant ébranlé l'ordre et le monde sorcier lui semblaient parfois si lointains, et parfois tellement proches qu'elle en cauchemardait la nuit. Et quand ça lui arrivait, elle fonçait à chaque fois vers le lit de Hope, comme pour s'assurer qu'elle était encore là, bien en sécurité et à l'écart de tout ça. Heureusement, il y avait Jo. Son repère dans tout ça, comme une ancre pour l'aider à se raccrocher à cette réalité qui lui échappait. D'ailleurs, songea-t-elle, se détachant de la contemplation de Hope pour regarder l'horloge sur le mur, il ne devrait pas tarder à arriver. Fleur lança un dernier regard vers la petite, occupée à mâchouiller l'oreille de Gustave, avant de se lever et de faire marcher d'un coup de baguette sa bouilloire. Prête à accueillir son meilleur ami.

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« C’est tout ? Faisait remarquer le vampire, son voisin de pallier, en constatant la malle posée dans le couloir en face de l’entrée. Oui, je voyage léger, tu sais. -  Et c’est une page qui se tourne. J’espère que tu viendras nous rendre visite. - Évidemment, déjà pour la pleine lune, comme toujours et je dois voir comment poursuivre les formations de duel, mais maintenant que vous avez Javier ici, vous avez un autre auror pour vous aider. -  Je vois que tu laisses tes livres ? - Oui, ceux que j’ai déjà lus et dont je n’aurais pas besoin. Sers-toi et fais tourner les autres. Un coup de baguette et la petite pile de vêtements disparaissaient dans la malle. On va s’en griller une en bas ? -  Let’s go. » Après trois ans passés à Sweet River, il était soulagé de pouvoir quitter les lieux sans qu’ils ne soient en feux ou qu’il parte avec le poids du silence, de l’amertume, et pouvoir parler de retour, de visite. Il avait même un léger pincement au cœur, car après tout ce temps, il avait créé des liens fort avec les membres de Sweet River, il savait que certains comptaient un peu sur lui et sa présence, mais son départ était aussi un signe de changement, d’évolution.

Johannes était heureux, mais ce n’était qu’une étape, il y avait encore du travail pour l’intégration des hybrides, conscient que ce n'était pas seulement au sein de l’Ordre qu’il devait penser, mais au-delà. C’était une étape, un soulagement que la pression ait fini par avoir le résultat désiré, de voir d’autres hybrides choisir de partir pour une autre planque, pendant que d’autres restaient à Sweet River. Johannes voulait rester optimiste que les choses continueraient de l’avant que les changements qui commençaient à se faire au sein de l’Ordre permettraient de resserrer les liens entre eux, malgré les événements qui secouaient l’Angleterre dernièrement avec les glitch magiques.

Le vampire finissait par s’excuser en voyant l’heure. Il avait été invité pour le thé chez Fleur et Bill Weasley, et il ne voulait pas arriver en retard. Sa meilleure amie ne le louperait pas et comme ils ne s’étaient pas vu depuis un moment, et il ne voulait pas lui donner une raison (de plus) pour lui tirer les oreilles. Il appréhendait un peu la visite, la planque était devenu son refuge pendant le printemps, et même pendant qu’il logeait les fugitifs de la NSFW durant l’été. Ce n’était qu’après l’attaque de Little Italy, qu’il n’avait pas pu venir aussi souvent qu’il l’aurait souhaité (et la fuite de Baruch, mais il ne voulait pas y penser), cette invitation tombait donc à pic. Johannes avait hâte de voir sa meilleure amie, prendre de ses nouvelles et de la petite Hope et peut-être qu’il croiserait Bill éventuellement, s’il restait assez longtemps peut-être.

Le vampire avait transplané pour rejoindre Shell Cottage (d’habitude, il y allait plutôt à vol de corbeau), toujours soucieux de s’assurer qu’il était bien seul avant de pénétrer dans le périmètre de la planque, les mains dans son éternel manteau et le pas vif afin de rejoindre l’entrée. Il donnait deux légers coups à la porte, celle-ci s’ouvrant sur son amie, il esquissait un sourire. « Salut Fleur, saluait-il d’une voix douce, un sourire sur ses lèvres, avant d’être distrait par la petite qui secouait les bras. Et coucou toi ! S’exclamait-il tout en rejoignant le lit. Han, mais tu grandis à vue d’œil dis moi, et regarde tu as pris tout le charme de tes parents. Il rigolait, jouant avec la petite un instant avant de se tourner de nouveau vers son amie. Tu as l’air bien, qu’est-ce que tu racontes ? »

Le vampire n'avait pas pu encore lui annoncer pour la Fawkes, mais peut-être qu’on l’avait déjà mis au courant, Bill peut-être l'avait entendu, les bonnes nouvelles circulaient vite au sein de l'Ordre (comme les mauvaises). En tout cas, il était heureux de pouvoir retourner entre les murs de l’école, d’assister Minerva pendant ses cours en plus des stages d’animagie. Et surtout, ça lui permettrait d’occuper son esprit, de ne pas penser à autre chose que ses cours, ses élèves et l’Ordre, pour ne pas penser au reste. Pour ne pas penser à eux. Pour ne pas penser à lui.

Prendre un thé entre amis,  c'est un moment des plus anodins pour la plupart des gens. Un instant de partage, simple. De ceux que tout à chacun aime à partager, échangeant des derniers cancans une tasse fumante à la main. Pour Fleur, cet instant avait perdu sa saveur avec le temps. Après tout, les ragots d'autrefois avaient fait place aux nouvelles de mort, de terreur. Les affres de la guerre étaient sur toutes les lèvres, arrivant dans les discussions aussi aisément que la pluie et le beau temps. Et pourtant, avec Jo, Fleur parvenait parfois à ne plus songer à cette guerre sans fin. Même si le sujet de la guerre finissait toujours par arriver au fil de leurs discussions. Et justement, alors que Fleur venait de lancer la bouilloire d'un coup de baguette, voici que la voix de son ami se fait entendre. Un sourire se dessine sur les lèvres de Fleur. Un sourire sincère, alors que Johannes la salue. « Salut Fleur ... Et coucou toi ! Han, mais tu grandis à vue d’œil dis moi, et regarde tu as pris tout le charme de tes parents. Tu as l’air bien, qu’est-ce que tu racontes ? » Fleur observe en silence Jo qui s'approche de Hope, laquelle tend ses bras en souriant. Elle est attendrie par ce spectacle empli de douceur et d'amour. Sa petite fille et son meilleur ami, un tableau presque féérique, apportant un peu de lumière dans cet océan de noirceur.

« Salut Jo, cela me fait plaisir de te voir. » répondit Fleur, attirant vers elle deux tasses qu'elle remplit de thé. « Salut Jo, cela me fait plaisir de te voir. Et à Hope aussi, pas vrai ma chérie ? » Elle marque une pause, passant une main dans les boucles rousses de la petite Hope qui rit aux éclats. Une petite rouquine, comme toute Weasley qui se respecte, bien que dans ses expressions et la forme de ses grands yeux pâles, Fleur y reconnaît les traits des Delacour. « Ça va. Je n'aurais jamais cru qu'être mère bouleverserait autant mon quotidien. J'ai à peine le temps de me laver les cheveux, et je ne saurai même pas dire la de quand date ma dernière nuit de plus de quatre heures. Mais je suis heureuse. Je n'imagine plus ma vie sans Hope. Ça me semble impossible. » Elle détourna les yeux de la petite, les plongeant dans ceux de Johannes. « Elle me rend si heureuse. Même si je ne peux m'empêcher d'avoir peur pour elle. »

Elle boit une gorgée de thé, observant en silence Hope. Elle est encore si petite. Totalement innocente. Dans son monde, tout n'est que découverte et amour. L'ordre n'est rien de plus que des gens qui la prennent dans leurs bras en souriant lorsque sa mère la trimballe au fil des planques, ou lorsqu'ils se rendent au Shell Cottage. La guerre, la mort et les ténèbres n'existent pas dans ce monde-là. Elle n'y a pas sa place. Parfois, Fleur se dit que donner naissance à un enfant dans ce contexte n'est que folie. Puis, elle regarde Hope et toutes ces pensées disparaissent. Et laissent place à cet amour inconditionnel. Et à cette peur, profondément ancrée. « Et toi ? Comment ça va ? Si tu savais comme je suis heureuse pour la Fawkes. Ça doit tellement te changer ! »

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