ptsd

Cam n'a pas encore totalement réussi à s'adapter à ce nouveau rythme. Professeure McGonagall l'avait prévenue mais compiler les cours de la journée et les cours particuliers du soir la laisse souvent exténuée quand vient le moment de s'affaler sur son vieux matelas. Et elle est crevée, évidemment, mais quand sa tête s'enfonce dans le coussin et que ses poings se serrent autour du drap ... Rien ne se passe. Fucking nada. Les grains de sable qui lui grattaient les yeux rougis se dissolvent, plus l'envie de s'endormir. Ptêtre que Jax a raison et qu'elle devrait aller voir quelqu'un, un professionnel quelqu'un ; mais l'idée de faire confiance à n'importe qui à ce point et parler (véritablement parler) de tout ce qu'il s'est passé depuis la DHS lui donne un goût de cendre dans la bouche. Cam est pas certaine d'être prête. Alors, il lui reste deux options : 1) rester dans son lit, tourner et se retourner jusqu'à ce que le sommeil la rattrape peut-être, si elle a de la chance. 2) ou se lever, attraper ses clopes et un vieux briquet à moitié vide et s'asseoir sur le perron. Dans un soupir, Cam choisit la deuxième option.

Assise sur les marches du manoir - qui est devenu son spot attitré depuis cette première fois où un cauchemar l'a réveillée en sursaut avec les cheveux se collant à son front - Cam fume. Elle aspire sur le petit bâton puis recherche la fumée blanche pour qu'elle se dissolve dans l'atmosphère. L'ambiance est plus calme depuis que la plupart des blessés ont été soignés, retapés et envoyés dans leurs planques respectives. Cette solitude retrouvée n'est pas pour lui déplaire. ainsi, la jeune femme peut plus aisément se détendre et se laisser aller. Ressent moins le besoin de rester à l'affut et sur la défensive.

Néanmoins, quand un bruit se fait entendre alors qu'elle vient d'allumer sa seconde cigarette (la première à peine écrasée sous sa basket, rougeoyant encore) ses épaules se tendent. Se soulèvent d'un coup sec tandis que son visage se tourne en direction du bruissement de l'herbe sous des pas. Mais ce n'est que Noah. "Oh, it's you," chuchote-t-elle quand il s'arrête à quelques pas d'elle (cinq ou six pas au plus) "What are you doing here at this unholy hour? You're not with Obe?" Sa tête se penche un peu sur le côté, comme elle le fait à chaque fois quand Cam ne sait pas à quoi s'attendre, suspicieuse et interrogative. Mais pas agressive si on arrive à dépasser l'extérieur froid qu'elle dégage. C'est Noah, elle connaît Noah, et si avec les années son prénom n'a été que trop souvent associé à des souvenirs glaçants, il reste un visage familier. Il n'y en a plus trop de ce genre de visages dans sa vie. C'est Noah, un ami autrefois, un garçon qui la faisait rougir et sourire et qui prenait son visage dans ses mains avec une douceur que Cam n'a plus jamais ressenti. Elle lui en veut toujours d'être parti sans elle, d'avoir choisi Obe plutôt qu'elle - même si elle comprend, même si elle s'en veut plus à elle qu'à lui en vrai. Elle lui en veut de faire partie des seuls souvenirs agréables qui lui restent et d'être un témoin silencieux de tout ses propres changements. Car quand elle plonge son regard dans ses yeux clairs, Cam croit y voir l'adolescente qu'elle était, celle qui n'existe plus et qu'elle n'retrouve plus. Et elle le déteste pour ça aussi sans réellement lui en vouloir du tout.

Noah s’était réveillé sans trop savoir pourquoi. Il savait qu’il n’y avait pas toujours de raison, que parfois les humains fonctionnaient simplement comme ça. Lui et Obelia ne dormaient plus séparément depuis un moment, et il était vrai que les choses n’étaient pas toujours immensément confortables, mais c’était un prix peu cher payé pour avoir Obelia à ses côtés chaque jour et chaque nuit. Il était resté un moment allongé à ses côtés en attendant que le sommeil lui revienne avant que son impatience ne gagne le meilleur de lui. Il avait quitté le lit et la chambre le plus discrètement possible avec la ferme intention de ne pas partir longtemps. Il savait qu’Obelia détestait se réveiller seule et il la comprenait parfaitement.
Il s’était naturellement dirigé vers l’extérieur du manoir, parce qu’il n’y avait pas grand-chose d'autre à faire. Il savait que les dirigeants de l’école n’appréciaient pas que les élèves sortent de leur chambre à des heures tardives, mais Noah avait atteint la majorité nationale et jugeait donc qu’eux et leurs règles pouvaient bien aller se faire voir.

Il avait été surpris de voir une silhouette assise sur les marches lorsqu’il avait ouvert la porte et avait presque tenté de reculer avant de réaliser qui était la personne en question. Il s’était approché lentement de Camilla. Leur relation était toujours un peu étrange, même si tout leur petit groupe s’était rapproché à nouveau, Noah savait que les fantômes du passé régnaient toujours. “Oh, it's you”, elle lui dit lorsqu’il arriva à une distance plus raisonnable d’elle. “Yeah, nice to see you too,” il lui répondit avec un léger sourire. Cam avait beaucoup changé depuis leur temps à la DHS, lui aussi sans doute, mais il ne savait pas si c’était aussi flagrant que pour Cam dans ces moments là. “What are you doing here at this unholy hour? You're not with Obe?” elle lui demanda rapidement. “Couldn’t sleep,” il marmonna à moitié en retour, “and she’s sleeping, I didn’t want to wake her up,” il ajouta sans trop s’attarder sur les détails. Il n’était pas certain que Camilla veuille réellement avoir des informations sur le temps qu’ils passaient ensemble (beaucoup) ou sur comment leur relation se passait. C’était un peu étrange pour lui de lui en parler, et il était probable qu’elle ressente la même chose. “Can I sit?” il demanda après un moment, attendant la réponse de sa camarade avant de prendre place à ses côtés. “What about you? What brings you here at this time?”

“Couldn’t sleep, and she’s sleeping, I didn’t want to wake her up,” Cam opine du chef de l’air de celle qui comprend, ce qui est le cas au moins en partie. Elle non plus n’arrive pas à trouver le sommeil, peut-être pour des raisons différentes mais ça n’a pas réellement d’importance. Elle croit savoir quelle est la relation entre Obe et Noah, sans en avoir jamais parlé à l’un ou l’autre, parce que ce sont pas ses oignons et qu’elle est pas aussi proche d’eux qu’auparavant. A vrai dire quand Obelia lui a donné son maillot, c’était la première fois que les deux jeunes femmes passaient autant de temps ensemble deux à deux. Et pour Noah, elle sait même pas si c’est arrivé plus que quelques minutes en passant. Si on lui demandait ce que son ancien ami fait de ses journées, Cam serait bien infoutue de répondre. “Can I sit?” “Sure,” répond-elle en faisant un geste large du bras qui tient une cigarette bien entamée avant que celui-ci ne finisse sa course sur un de ses genoux plié. “What about you? What brings you here at this time?” Cam le regarde s’installer, les yeux plissés avant de répondre après un peu trop de temps. “Couldn’t sleep either. I-I don’t sleep a lot. Couple of hours here and there,” qu’elle murmure en prenant une bouffée de sa cigarette avant de l’éteindre sous sa chaussure. She runs away from her nightmares. In a way, she's still running. “Want a smoke?” Cam lui tend le paquet avant d’en allumer une autre. Ca finit toujours pas lui brûler la gorge quand elle les enchaîne comme ça et demain matin, Cam se lèvera avec une douleur au niveau du thorax et la bouche pâteuse, mais demain ça lui paraît loin et pour l’instant fumer est la seule chose qui lui reste pour se distraire de ses angoisses nocturnes et du tremblement de ses mains.

Une seconde passe. Une autre. Une minute. Deux peut-être. Et le silence. Cam sait pas par quoi commencer. C’est comme si toutes les pensées qui lui passent par la tête les emmèneraient sur des terrains dangereux. Remember when I acted like a bitch? Remember when you ditched me? How did you survive? Sometimes, I think I haven’t, like I’m dead but it hasn’t reached my brain yet. Half the time I don’t know if I’m happy to see you and Obe. I missed you so much. Sa main tremble et tout son visage se ferme. Ca la fait chier Cam de pas pouvoir parler normalement, comme les autres font. De laisser les silences s’installer, Que ça lui prenne des plombes pour juste dire. “I’ve started a night course with professors McGonagall and Runcorn.” Et de souhaiter immédiatement disparaître six pieds sous terre comme si le fait de parler de trucs qui lui tiennent à cœur viendrait les lui arracher.