d'aussi loin qu'il se souvienne, son beau-père a toujours été là, bien qu'il n'ait pas pris son nom. une figure paternelle bienveillante contrastant avec celui qui les avait abandonnés. aujourd'hui il sait que sa fuite était justifiée. danger. mangemort. il était de sang pur. traitre à son sang. mais irresponsable, où était-il quand dean a reçu sa lettre d'admission, quand ses pouvoirs ont commencé à se déchaîner, lorsque la maison familiale ne s'est plus avérée être assez sécurisée. mort, certes, mais surtout sans avoir laissé la moindre aide, le moindre mot, le moindre pardon. une rancune qui secoue le gamin encore aujourd'hui. tout aurait été différent, s'il avait eu, rien qu'une preuve, rien qu'une explication. peut-être la guerre aurait-elle était plus clémente avec lui. peut-être même n'aurait-il pas été scolarisé  à poudlard, choisissant de découvrir une magie plus brute, un contrôle plus poussé de la métamorphose, une lecture plus sage des étoiles et des astres. l'envie de retrouver ses racines s'est toutefois évaporée, remplacée par d'autres combats. une, deux, trois, quatre années se passent sans trop d'accrocs. petit-déjeuner, cours, dîner, dortoir, une routine réglée comme du papier à musique. et puis la première expérience de la discrimination, de la peur au ventre parce qu'on n'est pas né comme il faut. l'incertitude quant à sa protection face au tueur de la chambre des secrets. et s'il était considéré comme né-moldu après tout? l'étau se resserre et avec le retour de voldemort, les couloirs se font de moins en moins sûrs, les regards de plus en plus suspects. mais rien ne l'alarme plus que ça, rien ne le prépare aux années à venir; toujours innocent, contemporain de harry sans vraiment partager sa vie, ses craintes. pas hors de danger mais suffisamment transparent pour ne pas être entraîné dans les tracas de l'élu [...] suiveur, aveugle, idiot, naif; et pourtant, il tient bon. face au silence de seamus et à ses regards lourds de reproches, aux quelques pics qu'il accuse sans broncher. il croit harry. c'est une sorte d'instinct. et puis peut-être ce pressentiment que s'il n'agit pas pour la cause des nés-moldu, personne ne le fera, que s'il ne prend pas part à ce combat, il aura fait le mauvais choix. il n'est pas un lâche. et celui qui a causé la fuite puis la mort de son père était bien destiné à revenir, dean n'en a jamais douté. corps et âme, il a rejoint la lutte, sans pour autant ignorer les messes basses et les objectifs cachés de ce qu'on lui demandait. malgré le soutien de seamus après la reconnaissance de ses torts, rien n'y a fait. sorcier de seconde zone, indigne de confiance. il s'est tu, sachant que raison il devait bien y avoir pour ce silence pesant. il n'a pas pris part à la bataille du département des mystères, c'est là que s'est faite la fracture, déchirant pour longtemps le lien qui l'unissait avant à l'armée de dumbledore. peut-être harry aurait-il toujours été parmi eux, s'il avait été là. personne ne le saura jamais. s'ils l'ont aidé à s'échapper avant de se faire attraper au pied du poudlard express, s'ils l'ont aidé à rejoindre un campement plus sûr, la graine de la discorde était plantée, n'attendant que son moment pour germer.



les sorts fusent, il se cache derrière un bureau et attrape le parchemin qu'il est venu récupérer avant de transplaner. c'en est fallu de peu, encore une fois. ted l'attend de l'autre côté, baguette pointée vers lui. l'habituelle question, la méfiance dans le traits tirés. dean soupire et répond calmement. il doit presque tout au vieux sorcier qui l'a accueilli comme son propre fils. seulement quelques semaines qu'ils ont enfin rejoint un des campements de l'ordre et il a à peine le temps de se reposer. mais tout va bien, il a pu rejoindre les anciens de l'armée de dumbledore, tous sains et saufs. mais même l'esprit de communauté n'aura pas réussi à dissiper les doutes qui l'habitent, la fatigue rampante dans ses membres. chair à canon manipulé par le cercle plus important, bien qu'il ait été là depuis le début, sacrifié par ceux qui en savent plus que lui. mais c'est de bonne guerre, après tout, il n'était pas là pour protéger harry au département des mystères. il ne peut s'en vouloir qu'à lui même. alors il obtempère, accepte de risque sa vie pour des objectifs dont il n'a pas connaissance. il fait confiance à neville et aux autres. [...]
(seamus) - j'en ai assez, je me casse.
la première menace qui tombe, et le regard désapprobateur de dean qui suit.
(dean) - arrête tes conneries, et reviens d'asseoir.
il n'a pas le temps pour de tels enfantillages; pourtant ce serait mentir que de dire qu'il n'y a pas pensé. et retrouver ses ancêtres n'a jamais été un rêve aussi intense. il plonge son pinceau dans une tasse d'eau bleutée et soupire.
(dean) - allons seamus, ils ont besoin de nous.
(seamus) - pourquoi ? pour qu'on finisse par crever ici?
(dean) - tu sais que c'est pour la bonne cause
mais la dissuasion n'a duré qu'un temps. que quelques missions qui auront eu la peau du peu de détermination restant en seamus. sans raison concrète de se battre, sinon aider des amis plus hautement placés, des missions à court terme, sans voir le bout de leur labeur.
(seamus) - tu peux venir avec moi, j'ai pas envie de crever pour un objectif que je connais pas
(dean) - tu les abandonnes ?
pour ne pas dire tu m'abandonnes. parce qu'il veut rester, c'est ça la chose juste à faire. tu m'abandonnes, mais il ne le dit pas parce qu'au fond, peut-être qu'il a envie de les abandonner aussi. il se retient. soupire;
(seamus) - je m'en vais demain à l'aube, un bateau m'attend.
(dean) - seamus s'il te plait..
(seamus) - non, toi s'il te plait. je veux pas que tu y passes, pas dans cette guerre. c'est perdu d'avance, tu vaux mieux que ça
(dean) - c'est toi qui vaux mieux que ça
et pourtant il en a envie, de leur tourner le dos, de pouvoir sortir dehors sans se cacher, de ne pas voir son visage placardé sur les murs. il n'est pas un criminel, las de vivre comme tel.
ses affaires sont prêtes le lendemain; mais alors qu'il boucle son sac, sur le pas de la porte, la raison prend le dessus.
(dean) - je peux pas faire ça
(seamus) - hm?
il se lève lentement, fixe l'horizon où le jour n'est pas encore éclos, se tourne lentement vers son ami. les mots lui manquent, les larmes aussi. alors il pose sa main sur l'épaule de seamus et tente un sourire.
(dean) - je peux pas faire ça, mais toi, tu peux.
alors vis pour nous deux, si c'est comme ça que ça doit se finir;
(dean) - prends soin de toi.
les secondes s'écoulent, incompréhension, colère, déception.
(seamus) - prends soin de toi.
un dernier regard et il disparait dans l'encadrement de la porte, sans une dernière étreinte, sans un dernier regard. instinctivement, dean le suit, franchit le portillon et fixe les arbres qui l'entourent; il a déjà disparu. la pluie imbibe son manteau, ruisselle sur son visage. et soudain, il fait plus froid que jamais.


l'étreinte devient familière et pourtant le tonnerre gronde. dans les coeurs et les esprits. il en veut à seamus, d'être parti, au sixième cercle, de n'avoir rien fait pour le retenir. et pourtant c'est chez ginny qu'il vient épancher son chagrin, pour ne pas sombrer, pour ne pas fuir, lui aussi. mais au fond, rien ne change, le déni ne suffira pas, pas sans seamus pour le maintenir à flots. un an, douze longs mois à survivre en ignorant les disparitions de sa petite-amie, les secrets cachés, les regards lourds lorsqu'elle fait référence aux anciens de l'ad, au sixième cercle, et la rancoeur ravalée. il ne peut pas lui en vouloir, et pourtant, il lui en veut; peut-être que si elle avait eu confiance, seamus serait resté. un an de souffrance étouffée, de doutes noyés. et finalement, l'évidence. bien plus que la rancoeur, moindre face à l'affection, il y a la barrière ultime, qui le pousse à se forcer, qui l'empêche de véritablement aimer.
(dean) - je crois que je suis gay, enfin non, je le sais.
silence, puis acceptation; la nouvelle voyage vite. libération, et puis nouveau fardeau; la solitude se fait encore plus pesante maintenant que ses draps sont à nouveau vides. et la rancoeur ne s'essouffle pas, plus guère étouffée par son affection pour ginny, elle est libre de saisir son coeur et ses entrailles comme bon lui semble. et l'envie de rejoindre seamus se fait de plus en plus prenante, de finalement sauter le pas, de fuir de tout. il ne sait pas si d'autres l'ont remarqué, mais le dean autrefois connu pour être calme et docile, n'est plus qu'une bombe à retardement.