avec le temps va tout s'en va. (jorah)

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Avec le temps va tout s'en va.

fin juillet 2007, Fawkes learning center w/ @Johannes Runcorn

D'abord, il y a le silence. Presque assourdissant après le fracas de la bataille. Tu as l'impression qu'il résonne dans tes oreilles, comme un acouphène fait de cris et de craquement sinistres. Ou alors c'est du au sang qui s'écoule de ton oreille droite, tu ne sais plus vraiment quel choc t'a infligé ça. Tu es hagarde, comme une biche qui a réchappé à un chasseur et qui ne sait plus où aller pour se sentir en sécurité. Autour de toi, ça s'active. La Fawkes est en train de se transformer en hôpital de fortune : les tables sont dressées de part et d'autres des différentes pièces pour y poser les blessés, Molly Weasley vocifère contre ceux qui ne vont pas assez vite à son goût et les quelques personnes avec des compétences de médicomagie s'affairent autour des blessés. Tu slalomme entre les silhouettes hébétées pour entrer dans la cuisine et te passer de l'eau froide sur le visage. Il faut te ressaisir, ce n'est pas ainsi qu'on t'a formé. Le sang séché de tes tempes se mélange avec l'eau claire, tu la regardes un instant s'écouler sur la porcelaine, essayant d'y visualiser les souvenirs de cette affreuse journée afin de les voir disparaître dans le conduit.

Tu n'en est pas à ta première bataille, loin de là. Mais celle-ci te pèse plus que les autres. Tu as le sentiment d'être à la croisée des chemins, entre celle que tu as été et celle que tu as choisi d'être, et que cette journée en fut la clé de voute. Pendant tes années en tant que Handler, tu en as vu des horreurs, tu as même participé à nombre d'entre elles. Mais rien ne dépasse ce que tu as vu à Gracefield. Ils sont faciles à reconnaître, les anciens prisonniers. Maigres et blessés pour la plupart, ils regardent autour d'eux avec méfiance, comme s'ils ne réalisaient pas qu'ils sont maintenant libres. Comme si on allait soudainement les enchaîner, comme s'ils avaient peur du jour. Heureusement, il y a aussi de la joie, celle de Kad qui a retrouvé son frère par exemple te réchauffe le coeur.

Tu ne parviens pas à célébrer, malgré les retrouvailles, malgré l'espoir qui éclaire les yeux de certains. Ton esprit reste embrumé par ce que tu as vu et par la désagréable sensation d'avoir pris part à tout ça. Les gens que tu as combattu, les death eaters qui t'ont attaqué furent il n'y a pas si longtemps tes collègues. Si tu n'avais pas suivi Samuel, tu aurais peut-être été parmi eux, à traiter des êtres humains tels des animaux. Emportée par ce gouffre sans fin dans lequel tu avais choisi de plonger. C'était ça le pire, on ne t'avait pas forcé la main. Tu avais choisi ton destin. L'agitation qui règne à la Fawkes t'oppresse et tu décides de sortir. Pour respirer. D'un pas rapide, tu traverses le couloir puis quitte la demeure, t'éloignant de quelques mètres au niveau d'un des nombreux arbres qui jouxtent le domaine. La brise légère d'un soir d'été gallois vient caresser ta peau encore humide, y laissant une sensation de froid bienvenue. Derrière toi, une présence. En tant qu'auror, on t'a appris à écouter ton environnement et à ne pas se laisser surprendre. Par réflexe, tu te détournes, baguette en avant comme s'il s'agissait d'un ennemi. Quand ton regard croise celui de Johannes, tu abaisses ta baguette. « Désolé, vieux réflexe. J'ai eu un bon professeur. »

Les souvenirs de vos moments partagés te reviennent en mémoire, ceux d'un mentor et de la jeune fille idéaliste, ceux d'une voie toute tracée qui fut brisée, ceux d'une confiance bafouée. Quand Johannes a quitté le ministère, tu t'étais sentie abandonnée, délaissée par celui qui t'avait tant appris. Pourtant aujourd'hui, tu réalises à quel point tu t'étais trompée. Et à quel point il devait être déçu. « L'élève quant à elle, a encore des choses à apprendre. » On ne cesse jamais d'apprendre, dit-on, et celui qui croit savoir n'apprend plus. « La dernière fois que nous nous sommes retrouvés que tous les deux, tu m'annonçais que tu quittais le ministère. Beaucoup de choses ont changé depuis, et nous avons même eu l'occasion de nous battre de nouveau ensemble. » La honte s'empare de toi et tu baisses les yeux en sentant tes joues s'empourprer. Vous vous étiez revus depuis ce jour, lors des quelques visites de Johannes à Dagobah, mais jamais vous n'avez eu l'occasion de vous retrouver seuls. Tu as l'impression d'être de nouveau une jeune aurore idéaliste face à celui que tu admirais et qui était devenu un ami en plus d'un mentor. « Contente de voir que tu t'en es bien sorti, certains n'ont pas eu cette chance. »

- fiche sur base des codes ls de s&m // crédit image (@michaelburnhamsource) -

avec le temps va tout s'en va

We’re here for a reason. I believe a bit of the reason is to throw little torches out to lead people through the dark.

@Norah Rowland / end july 2007

« Jo, va te reposer, ça fait des heures que tu es là. - Je sais. » Répondait Johannes distraitement, son regard venant croiser celui de son frère qu’il assistait depuis qui l'avait ausculté et confirmé qu'il était en état d'aider. Revenu de Gracefield avec des blessures mineures et quelques bleus, Johannes avait encore l’adrénaline au beau fixe et les sens en alerte. La Fawkes était en branle-bas de combat, il y avait eu des morts suite à leurs blessures, d'autres dont la vie ne tenait qu'à un fil, et surtout, il y avait des personnes qui manquaient. Et malgré les retrouvailles et soulagement, entendre qu'il y avait des personnes qui manquaient, sans savoir s'ils étaient vivants ou morts. La nouvelle de la mort de Lee en particulier s'était dispersée comme une traînée de poudre. Il savait aussi que Baruch avait été arrêté et il cherchait des informations au sujet des autres membres de la NSFW, mais aussi les Avengers. Il venait de déposer le chocolat chaud au patient d’Elias, préparer par ses soins, précisant que c’était de la part de Vanessa qui était débordée par les soins. « Va prendre l’air, ou te détendre un peu, tu as encore les pupilles de la taille d’une soucoupe, tu t’es nourri ? - Oui, oui. - Écoute, je termine ici, puis je vais prendre une pause, je viens te chercher quand je reprends. » Johannes n’allait pas insister, il pouvait toujours retourner en cuisine pour préparer un autre chocolat chaud, ou alors aller se fumer une cigarette. S’avouant vaincu, un léger sourire au bord des lèvres, Johannes quittait alors la pièce. Il savait que son frère avait raison, il devait prendre le temps de respirer, d’emmagasiner ce qui s'était passé. Il repensait alors au vampire, Herbert (s'il se souvenait bien), qui avait mordu son amie dans un espoir de la sauver, à la course pour rejoindre la plage sous les sorts fusant de tous les côtés.

L’excitation descendait un peu, alors que la brise de l’extérieur venait l’envelopper, contrastant avec l’humidité de l'intérieur. Il sortait de la poche arrière de son jean le paquet de cigarettes, et son briquet, la flamme venant éclairer son visage fatigué, marqué par les dernières heures. Il prenait une inspiration, il avait décidé qu’il ne retournerait pas au Raven’s Nest sans plus d’information pour Numa. Et surtout, sans savoir ce qu’il en était des blessés, des mourants et de la marche à suivre ensuite. Un retour sur l’île peut-être pour récupérer des survivants ? Risqué avec les potentiels mangemorts qui feraient certainement de même.

Son regard se perdait sur l’orée de la forêt, la brise apportant l’odeur familière de Norah et il décidait alors d’aller dans sa direction. La retrouvant quelques mètres plus loin, la baguette levait dans sa direction alors qu’il s’apprêtait à la saluer. « Wow there, on ce n’est que moi. » Faisait-il remarquer en riant doucement, il n’était pas le seul encore sur ses gardes. Un sourire s’esquissant sur ses lèvres, à la remarque de la brune, il avait de son mieux à l’époque, jusqu’à son départ du ministère. Elle ajoutait qu’elle avait encore des choses à apprendre et Johannes avait envie de lui dire qu’ils pouvaient se retrouver de temps en temps si elle avait besoin lorsqu’il venait leur rendre visite. Johannes avait été heureux d’apprendre qu’il faisait équipe avec elle et Sam, tous les deux, avait d’ailleurs gérer pendant cette soirée. C’était vrai par contre, qu’ils n’avaient jamais eu l’occasion de se parler en tête-à-tête depuis son départ. « Oof, tu m'envoies dix ans en arrière sans aucune pitié. S’exclamait-il en riant doucement, baissant les yeux un peu, il avait été fidèle à lui-même, laisser Norah faire un choix, qui été le sien et il était heureux de la savoir ici aujourd’hui. On avait quelques trucs à se dire ce jour-là, il relevait les yeux vers elle avec un sourire. Et peut-être un peu plus aujourd’hui. Ce qui s'était passé après son départ, la fuite de Norah et Samuel, les Avengers, la transformation de Johannes, et Gracefield. « Contente de voir que tu t'en es bien sorti, certains n'ont pas eu cette chance. - Je suis heureux de te voir aussi, vous êtes au complet de votre côté ? Demandait-il curieux de savoir si elle avait des nouvelles, pour échanger quelques notes. Et toi, comment tu te sens ? »

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Avec le temps va tout s'en va.

fin juillet 2007, Fawkes learning center w/ @Johannes Runcorn

Le temps file à une vitesse folle, semblable à une flèche tirée d'un arc ancestral. Inarrêtable, et n'hésitant pas à trancher l'air et les chairs sur son passage. Et alors que tu viens de te battre contre une ombre plus sombre encore que les pires cauchemars, ton passé te saute à la gorge à la manière d’une bête blessée qui assène une dernière attaque plutôt que de se laisser aller à l’agonie. Il prend la forme de tes regrets, de tes angoisses, de tes mauvais choix. Il prend la forme de ces gestes que tu n’as osé faire, de ces mots que tu n’as pas prononcés. Il prend la forme de ce mentor que tu n’as pas suivi. Tu revois la jeune fille idéaliste, celle qui se rêvait super héroïne. La Norah qui avait intégré le ministère de la magie avec des rêves plein la tête et la volonté de sauver le monde. Là-bas, tu avais cru toucher ton rêve du doigt, devenir enfin celle que tu avais tant idéalisée. Tu parles ! Par tes choix, tu étais devenue le super vilain des comics moldus que tu dévorais étant enfant. Et d’excuses, tu n’en avais aucune.

Johannes n’a pas changé, si ce n’est les quelques mèches poivre et sel qui parent ses tempes. Son rire et son regard sont les mêmes que ceux que tu as connu : bienveillance, patience et empathie. Toutes ces qualités qui faisaient de Johannes un auror exceptionnel en plus d’un mentor inoubliable. Sur son visage épargné par le temps, tu y vois les traces du temps et des épreuves. Ainsi que cette même lueur que tu peux parfois lire dans les yeux de Samuel. Est-ce propre aux vampires ? Ou bien est-ce celle que gardent les hommes qui ont souffert et qui chaque jour se battent contre leurs démons ? « On va bien, aussi bien qu’on le peut dans ces circonstances. » Mais tu sais que plus rien ne sera comme avant. L’horreur de ce que vous avez vu. Les blessures à panser. Les cauchemars à apaiser. Ce que vous avez vu sur ces îles des horreurs restera à jamais gravé dans vos esprits.

Comment tu te sens ? Tu as toi-même du mal à mettre des mots sur ce que tu ressens. « Je me sens ... abîmée. » Épuisée de corps et d’esprit. Un acouphène, sûrement dû à ta plaie, grésille dans ton oreille depuis la bataille. Tu as l’impression de te mouvoir comme une personne âgée, comme si le moindre mouvement demandait beaucoup trop d’énergie à un corps que toute force a quitté. « J’ai l’impression que je ne serais plus jamais la même, physiquement et mentalement. » En tant que auror puis handler, tu en avais vu des horreurs, tu en avais vécu des batailles. Mais là, c’était différent. Plus personnel d’une certaine manière. « Je suis heureuse que l’on soit parvenu à libérer la plupart des prisonniers. Mais je ne peux m’empêcher de me dire que d’une certaine façon, j’ai participé à ces horreurs. Et ça me bouffe. » À peine ces mots prononcés, que tu es prise d’une nausée. Comme si, enfin dire à voix haute ce que tu ressens depuis que tu avais appris l’existence des jeux de l’horreur avait ouvert les vannes. Tu t’agenouilles, croisant les bras et mettant un instant ta tête entre tes genoux. Tu souffles un instant avant de relever la tête vers Johannes. « C’est drôle, mais tu es la première personne à qui j’en parle. Même chez les avengers ils ne le savent pas. » Tu n’es pas du genre à te confier. Puis au sein de la bande, tu es comme une maman. Tu dois être là pour écouter les autres et non l’inverse.

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@Norah Rowland / end july 2007

« On va bien, aussi bien qu’on le peut dans ces circonstances. - Bien. » Le soulagement palpable du vampire, difficile de toute façon de retenir les réactions positives après des heures ou les mauvaises nouvelles s’enchaînaient, amenant leur lot de questions et de 'et si' qui n’étaient en rien productif, mais flottait dans tous les esprits, le sien y compris. En bon empathe, Johannes ne pouvait pas s’empêcher d’absorber la tristesse et les colères de ses camarades, de le comprendre et apportait, comme il le pouvait, s’ils le voulaient, un peu de réconfort, au moins une oreille, comme une épaule. Et même en étant présent, il souhaiterait pouvoir faire plus, mais il devait s’en contenter, et parfois répéter le process plusieurs fois, avec la même personne. C’était aussi fatigant. Tout aspect de la guerre l’était, et quand elle s’éternisait, la fatigue des troupes, les sauts d’humeurs, les doutes, tout était normal. Ils n’avaient pas le luxe de pouvoir se poser réellement, jamais assez longtemps pour s’octroyer un moment de répit, mais Johannes pensait qu’il était temps que l’Ordre encourage ses membres à le faire. Ils n’étaient bon à rien s’il ne prenait pas le temps de faire leur deuil, de prendre le temps de se ressourcer et voler, même pour quelques jours seulement, un moment où ils pourraient déconnecter de ce conflit interminable.

Lui y comprit.

Les autres d’abord.

Norah lui confiait qu’elle se sentait abîmée, qu’elle ne serait plus la même physiquement et mentalement. « Ce n’est pas qu’une impression, répondait-il d’une voix calme, mais c’est l’âge aussi qui veux ça. » Ajoutait-il avec légèreté, pour la rassurer un peu, parce qu’il était persuadé que c’était le lot de tout le monde, avec le temps, l’âge, l’expérience, les traumas, les guerres, les pertes. Le corps, comme le mental fatiguaient. C’était cela mourir de vieillesse aussi, quand tout cela devenait trop lourd, et qu’on venait s’alléger de nos dernières inquiétudes, avec la certitude que l’on laissait ceux que l’on aimait entre de bonnes mains et armés pour affronter la vie. Johannes pensait que c’était ainsi que sa mère était morte. Sa famille avait tant connu de mort violente, que celle de sa mère, aussi douloureuse fut-elle, restait la plus paisible qu’il eut connue. « Ne fais pas cette tête, tu as encore un peu de temps, ton corps à simplement besoin de repos. » Ajoutait-il en riant doucement. Il comptait bien sur elle pour au moins tenir jusqu’à la fin de cette guerre, peut-être un peu après pour vivre assez longtemps et être témoin d’un vrai temps de paix durable. Lui, il ne savait pas encore s’il serait de la partie, pour le moment, il avait échappé à la mort et il aurait peut-être intérêt à suivre son propre conseil.

« Je suis heureuse que l’on soit parvenu à libérer la plupart des prisonniers. Mais je ne peux m’empêcher de me dire que d’une certaine façon, j’ai participé à ces horreurs. Et ça me bouffe. Johannes perdait le léger sourire amusé sur ses lèvres, pour regarder la jeune femme, Norah... » Et avant qu’il n’est le temps de dire quoi que ce soit de plus, la jeune femme terminait à genou, suivie du vampire qui venait la soutenir avant de lui laisser l’espace nécessaire pour reprendre son souffle. « Ça va aller ? Demandait-il incertain alors qu’elle relevait la tête vers lui. C’est drôle, mais tu es la première personne à qui j’en parle. Le vampire était soulagé, se laissant tomber sur l’herbe, une main sur l’épaule de la jeune femme pour exercer une légère pression. Même chez les avengers ils ne le savent pas. - C’est difficile quand on a un rôle de pilier de confier ses doutes, ses peines, sa culpabilité. Et il savait de quoi il parlait. Je ne vais pas te dire que tu ne dois pas culpabiliser, parce que toi et moi savons que c’est plus compliqué à dire qu’à faire, je ne pense pas que tu sois responsable des actions du gouvernement, ni celle des sorciers qui ont participé à ces jeux. Lui-même était encore au sein de la société sorcière quand ces jeux ont été créés, et on s'était bien gardé de le mettre au courant. C’est vrai que tu as fait le choix de rester, de devenir handler, mais tu as aussi fait le choix de t’enfuir avec Samuel. Je pense que tu devrais apprendre à te pardonner de tes erreurs et à poursuivre ce chemin sur lequel tu t’es engagée à présent. Il esquissait un léger sourire. Et qui te sied beaucoup mieux selon moi. » Évidemment, il n’y avait pas de doute qu’aux yeux de Johannes, Norah avait plus sa place au sein de la résistance, en tant que fugitive que de l’autre côté.

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