Le retour à une vie normale avait été étrange, ça faisait plusieurs semaines déjà (mois même, mais il avait perdu l'habitude de garder la notion du temps sur l'île) et Andy avait encore du mal à se faire à vivre de nouveau en ville. Les cauchemars n'avaient pas cessé de hanter ses nuits depuis son retour et même le lit confortable fourni par Rizwan ne pouvait rien pour lui faire passer une nuit correcte. Il sursautait au moindre bruit plus fort que les autres, s'attendait à entendre le bruit des cloches à tout instant, il baissait les yeux dès qu'il sentait des regards un peu trop insistant posé sur lui dans la rue (soit n'importe quels regards en fait), rasait encore plus les murs que ce qu'il ne faisait avant. Les crises de paniques ne se faisaient que plus nombreuses depuis qu'il était revenu, après chaque sortie en dehors du loft, ou tout autre visites d'inconnus, les gens l'angoissant encore plus qu'avant il n'arrivait jamais à s'imaginer que tous ceux qu'il croisait n'allaient pas l'attraper et le renvoyer là-bas, ou dans un endroit pire encore. Alors il ne sortait presque pas, de toute façon, même sans trouble anxieux généralisé, ce n'était pas tellement conseillé dans sa situation de se promener trop longtemps de partout. Il devait être encore plus recherché que la première fois maintenant Andy en fait, il en était ra-vi (non). Garçon qui occupait donc ses journées comme il pouvait, il s'était improvisé chef personnel chez Riz, ça aussi ça lui avait fait bizarre de retrouver une vraie cuisine, de ne plus avoir peur de manquer de nourriture, ne plus manger ce qu'on lui donne sans faire le difficile, il avait même repris son régime végé aussi - après de trop nombreuses années d'entorses - à moitié imposé à son hébergeur par la même occasion. Puis ça lui avait manqué aussi de ne plus pouvoir cuisiner (entre autres choses, genre la liberté et la sécurité) et peut-être qu'il en faisait un chouïa trop du coup, pour compenser toutes les années sans pouvoir faire à manger correctement. Il avait donc emballé les madeleines dans un tupperware, avant de programmer le four pour les lasagnes du dîner. Capuche rabattue sur le visage en sortant de l'immeuble, boîte à gâteaux dans une main, portable à clapet dans l'autre pour vérifier l'heure en se rendant au parc du quartier. « Hey. » Il lança en s'approchant d'une silhouette connue. « Comment tu vas ? » Demandé en s'asseyant à côté de Mallo. « Tiens, j'ai fait ça ce matin. » Il lui en lui tendant le tup, prunelles passant de la brune aux promeneurs, garçon pas tellement détendu, mais c'est rien c'est la rue, il a l'habitude à force.

Les choses rentraient dans l'ordre, à peu près, un peu trop lentement à son goût et même si sa magie était quasi revenue à la normale, Mallory sentait que son séjour à Gracefield n'avait pas été qu'un genre de parenthèses dans sa vie. Il y avait eu des conséquences, pour elle, pour les autres et elle avait raté des coches. Cela l'angoissait plus qu'elle ne l'aurait voulu, plus qu'elle aurait aimé le laisser paraître. Résultat, elle braillait encore deux fois plus que d'habitude et repoussait les retrouvailles. Que ce soit avec sa famille ou même avec Andy. Alors que ce dernier avait fait parti de sa vie pendant près d'un an en quasi non stop. Besoin de souffler qu'elle s'était dite, non-autonomie de transport en plus de cela vu que le transplanage déconnait salement et qu'elle n'aimait pas demander aux gens de faire taxi (parce qu'elle n'aimait pas être suivie, ne faisait véritablement confiance qu'à Arthur et Vanya à la planque, leur en demandait suffisamment). Elle avait cependant fini par l'appeler parce qu'il lui manquait ce con. Et apparemment elle lui manquait aussi vu que le rencard fut vite fixé.

Elle n'avait pas remis les pieds à Londres depuis un moment, avait enfilé sa plus belle tenue de moldue stylée (paire de Vans, pantalon large - tous les pantalons étaient larges sur elle, poids initial toujours pas retrouvé -, ceinture à clous), espérait que tout irait bien. Il n'y avait pourtant pas de raison pour que ça se passe mal, Andrew-libre ne devait pas être très différent du Andrew-prisonnier. Cela la rassura un peu maintenant qu'elle zonait dans le parc où ils avaient rendez-vous. « Hey. » Voix familière, silhouette familière également. "Andyyyy !" Pas de remarque sur son hypothétique retard, elle le prit plutôt dans les bras dans la seconde. "Oh, tu sens moins le fauve ! Tu t'es enfin mis à l'hygiène ?" nargua-t-elle avant de s'écarter un peu pour l'observer de haut en bas, essayant de déterminer s'il avait une meilleure mine qu'aux Battues ou pas. Dur à dire, il avait la tête enfoncée dans sa capuche. « Comment tu vas ? » Soupir excédé, elle leva franchement les yeux au ciel. "Les gens et les étoiles se sont alignés pour me faire chier, faut que j'te raconte mec, ça va paaas du tout !" Elle ne se lança pas tout de suite dans les explications, il fallait toujours laisser les moins bavards s'exprimer en premier sinon ils réussissaient à se faire oublier. « Tiens, j'ai fait ça ce matin. » Tupperware récupéré et entrouvert pour regarder ce qu'il y avait dedans, sourire ravi. "Merci ! T'es trop gentil !" A deux doigts de lui faire un nouveau câlin en remerciement mais cette fois, elle se souvint qu'Andy n'aimait pas forcément ça. Andy qui semblait tout nerveux par ailleurs. "Tu veux qu'on se balade ? Ou qu'on se cale dans un endroit plus calme ?" Comme au bon vieux temps sur l'île, où ils avaient leur liste de coins calmes d'où on les débusquait rarement quand ils voulaient se  mettre à l'abri. Le "bon vieux temps". "Tu vas comment toi ?" Air un peu soucieux, elle avait cru repérer des cernes sous la capuche, en avait un peu aussi.

On aurait pu penser que retrouver sa liberté l'aurait rempli de joie, c'était le cas un peu - beaucoup même d'ailleurs, il était bien mieux ici que sur l'île c'était évident - il avait seulement eu énormément de mal à se réadapter à la vie en société depuis son retour. C'était que déjà la base il n'y était pas tellement adapté, mais alors une pause de quatre ans en full mode survie ça n'avait pas été bon pour ses nerfs et Andrew ne savait plus comment ne pas être angoissé à longueur de journée (est-ce qu'il l'avait su un jour, c'était une autre question). Il dormait mal, quand ce n'était pas les cauchemars qui le réveillaient, c'était son cerveau qui refusait d'imaginer qu'il puisse enfin être en sécurité et que non il ne serait pas réveillé par un son de cloche s'il s'endormait, il ne quittait presque pas le loft, ce qui en soit n'était pas tant un problème avec tout le monde qui y passait, il avait de quoi remonter sa barre de social quand il en avait besoin, puis il prenait moins de risque en ne se baladant pas partout dans la capitale. Et pour ne rien arranger il n'avait jamais autant pensé à l'héroïne ces quatre dernières années que depuis sa libération, à croire que de savoir que c'était tout près de lui, presque à portée de main et qu'il n'était plus tellement en danger immédiat ça avait unmute la petite voix qui lui soufflait qu'une injection ce n'était pas siiii grave. Ça l'était, il voyait des gens pour ça, ses seules interactions sociales en dehors des amis de Riz, d'Aine et de Mallo aussi, parce qu'apparemment il ne devait pas être le seul à avoir des coups de blues.

Uniforme de mec qui disparaît dans le décor d'enfilé, il avait été heureux de retrouver ses sweats et jeans foncés et d'avoir une bonne raison de s'emmitoufler dans des gros pulls et des écharpes qui lui couvraient la moitié du visage. Il attendait avec impatience que l'hiver arrive vraiment, il ne comprenait pas ces gens qui aimaient l'été, le soleil, la chaleur, la plage. Un enfer la plage, pire invention ever, il ne recommandait pas du tout. À peine arrivé au lieu de rendez-vous qu'il avait déjà repéré Mallo, c'était qu'après un an et des patates à la fréquenter quotidiennement il pourrait presque la repérer à l'odeur. "Andyyyy !" Puis du coup elle avait gagné le droit de lui faire des câlins aussi, privilège accordé après qu'elle l'ait gracieusement traîné partout avec elle sur Gracefield ça (certain diront qu'elle était la raison de sa survie, certains se trompaient, il s'en était très bien sorti sans elle aussi). "Oh, tu sens moins le fauve ! Tu t'es enfin mis à l'hygiène ?" Mallo lâché, il était quand même obligé de baisser les yeux pour la regarder, sourire amusé à la remarque. « Oui, j'ai redécouvert ce que c'était que la douche, c'est cool, j'avais oublié que c'était aussi bien. » Il répondit le plus sérieusement du monde, surement parce que ce n'était pas si loin de la vérité que ça en fait. « Puis je suis pas le seul visiblement. » Ajouté avant de prendre des nouvelles de la brune, ça faisait longtemps qu'ils ne s'étaient pas vu après tout. "Les gens et les étoiles se sont alignés pour me faire chier, faut que j'te raconte mec, ça va paaas du tout !" Oula, ça avait l'air dramatique son histoire, il était intrigué maintenant. « Pourquoi ? Il s'est passé quoi ? » Il lui demanda en lui refourguant la boîte de madeleines qui sortaient du four, sourire un poil plus grand en voyant l'air ravi de Mallo. "Merci ! T'es trop gentil !" Petit haussement d'épaule, c'était son passe temps et il fallait bien qu'il trouve comment se débarrasser de tout ce qu'il cuisinait, même avec toute la bonne volonté du monde, Riz et lui ne pouvaient pas tout manger à deux. « De rien, c'est normal. » Il lui répondit, pas mécontent qu'elle se contente de lui faire des risettes cette fois. Sérénité qui n'avait jamais fait partie de lui, Andy avait les yeux qui se baladaient partout autour de lui pour être sur et certain qu'il n'y avait rien de louche. "Tu veux qu'on se balade ? Ou qu'on se cale dans un endroit plus calme ?" Observation des alentours arrêtée pour se retourner vers Mallo. « Ouais, je veux bien marcher un peu. » Il répondit, avant de se mettre en route dans la foulée, il ne fallait pas rester statique trop longtemps, c'était un coup à mal finir encore ça (non il n'était pas parano). "Tu vas comment toi ?" Capuche baissée parce qu'il n'était plus tout seul et donc globalement moins inquiet en général. « Je vais bien, enfin ça pourrait aller beaucoup plus mal quoi. » Il pourrait être mort, en prison, comater sur un canapé avec une aiguille dans le bras, ce n'était pas le cas donc ça allait. « Je suis hébergé chez un ami, j'ai jamais vu un appartement aussi grand de ma vie. On peut passer des jours sans se croiser presque tellement y'a d'espace. Puis je te parle même pas de la vue. » Des heures à observer Londres d'en haut quand il n'arrivait plus à se rendormir, c'était superbe, il ne regrettait même pas les heures de sommeil perdues.