Maeve est déjà debout depuis deux heures. Comme tous les matins, elle a son rituel chronométré. Certains trouvent ça psychorigide, mais cela lui procure un certain réconfort. Ajoutez à cela une bonne dose de superstition. Elle est persuadée que sans tous ses rituels, la journée ne pourra être que mauvaise. Il paraît que cela s'appelle la loi de l'attraction, elle s'en fout bien.
Après avoir médité et fait sa séance de yoga, Maeve a pris une longue douche brûlante. Avant, elle devait compter les minutes sous l'eau, mais ce n'est plus un problème à présent. Elle a également tous ses produits luxueux dont elle a toujours rêvé. Après s'être préparée, Maeve a commencé à préparer son petit-déjeuner. Evidemment, il y a une portion pour l'abruti qui dort dans l'autre chambre. Elle ne l'a même pas entendu rentrer hier soir. Il devait être tard. Encore. Sans s'en rendre compte, Maeve tourne plus vite sa cuillère dans son thé. Un soupir s'extraie de sa bouche, avant qu'elle ne la pose dans l'évier. Parfois, Maeve dort dans la chambre de Shõta. Mais pas hier soir. Pas les soirs où il rentre ivre mort de ses soirées. Il arrive qu'elle l'accompagne, mais Maeve préfère les réceptions mondaines aux fêtes improvisées dans un nightclub. Elle n'avait pas non plus envie de voir des filles se frotter à lui comme à chaque fois qu'il sort quelque part. Elle ne voulait pas devoir le porter jusqu'à leur duplex parce qu'il ne tenait pas sur ses jambes. Maeve sait qu'elle est égoïste parfois, mais c'est comme ça qu'elle a survécu jusqu'ici. Et puis, faire semblant à l'extérieur est juste épuisant. Devoir réfléchir au moindre geste lui draine toute son énergie. Au moins, entre ces quatre mus, Maeve n'a pas à prétendre qu'elle est follement amoureuse de Shõta. Même si parfois, la frontière entre la réalité et la fiction devient floue.

Sa tasse de thé entre les mains, Maeve souffle sur le breuvage avant d'en boire plusieurs gorgées. Son regard est attiré par l'horloge magique sur le mur. L'heure tourne et dans trois heures, ils sont attendus sur le plateau de tournage pour filmer plusieurs scènes. Maeve soupire encore. Elle pose alors sa tasse et s'empresse de se diriger vers sa chambre. Elle connait malheureusement trop bien ce chemin. D'un mouvement rapide, elle referme les pans de son gilet autour de sa taille et croise les bras pour les coincer. Du bout du pied, Maeve pousse la porte entrouverte. Ses yeux contemplent la silhouette endormie du jeune homme. ─ Wake up! You are already late. Breakfast iz ready. Aucun mouvement à signaler. ─ Quel idiot.., lance-t-elle en français. Sans plus attendre, elle sort de la chambre pour retourner dans le séjour.
Maeve s'installe sur un tabouret au niveau de l'ilot de la cuisine. Elle ouvre le document attrapé plus tôt et commence à relire ses lignes pour cet après-midi. Evidemment, cela serait plus facile si son co-star daignait travailler avec elle. Il a vraiment le don de la mettre hors d'elle. Shõta est un enfant star, il aura toujours des contrats. Maeve a galéré pour en arriver là. Elle ne peut pas se permettre de perdre ce job.

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Une tempête vient de faire un bruit tapageur dans sa chambre; quand Shōta parvient à décoller les paupières, il regarde la porte d'un air accusateur en ignorant la nausée qui le prend soudainement. "Ugh..." Une main s'écrase sur son visage, sans pour autant parvenir à en chasser les stigmates de la veille. Yamori, qui était en train de dormir sur son torse nu comme tous les soirs, détale sur sa peau jusqu'à son cou puis son visage, recouvrant ses yeux de son petit corps froid. "I'm feeling sick..." Shōta reste quelques instants silencieux, faisant mentalement la liste de ses membres, de ses doigts et de ses orteils (heureusement tous présents) avant d'essayer de se projeter en arrière pour se rappeler de ce qu'il a bien pu faire hier soir.

Avec une grimace, il se relève ensuite, Yamori filant dans sa nuque, et sort du lit. Un lancinant mal de tête s'installe déjà à l'arrière de son crâne mais qu'importe: dans un geste rodé par l'habitude, il ouvre le tiroir de sa table de nuit et en sort une potion rose pâle préparée par Sita, qui finit dans son gosier d'une traite. Le temps qu'il aille se mettre de l'eau sur le visage dans la salle de bains, il se sent déjà un peu mieux, et au moins plus à même de pouvoir soutenir la moindre conversation avec Maeve.

Il lui adresse un sourire éclatant en arrivant dans la cuisine. "Good morning, sunshine." Entre eux, il y a des jours avec et des jours sans. Surtout des jours sans, certes, où ils se piétinent dessus en se plaignant de tout, passant manifestement beaucoup trop de temps ensemble pour parvenir à bien s'entendre. Mais les jours avec... sont tendres et vulnérables, appréciables. Et rassurent Shōta quant au fait que Maeve finit toujours par lui pardonner.

En passant derrière elle pour aller se faire un café, il fait mine de se pencher pour lui embrasser le crâne mais s'arrête à dix centimètres de sa tête et embrasse l'air. Il ricane en se dirigeant vers la cafetière encore tiède - une autre marque d'attention de la part de sa colocataire, qui elle boit du thé. Shōta se serre une tasse et s'assied devant son assiette déjà préparée, sans faim ni appétit, et en regarde les ingrédients d'un oeil morne. Il a trop abusé sur l'alcool hier soir. Il n'a pas le droit de manger.
Alors plutôt que de se nourrir, il lève les yeux vers Maeve, remarque ce qu'elle est en train de faire. "Need some help with your lines?" crâne-t-il d'un ton un rien sarcastique, comme si lui n'avait pas besoin d'aide et la science TBTW infuse.

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Comme toujours, Maeve s'est limitée à sa tasse de thé. Avant, elle buvait du café mais il paraît que ce n'est pas bon pour son apparence. Cela rendrait les dents jaunes, à ce qu'ils disent. Pourtant, elle aurait bien besoin de caféine ce matin, au moins pour supporter la gueule de bois de Shõta et sa douce (non) compagnie. Il est plus difficile pour elle, de limiter ses repas quand elle n'a que du thé à disposition. S'autoriser des écarts, c'est prendre le risque de prendre du poids. Maeve ne peut pas se le permettre. Après des années à galérer, elle n'a pas envie de tout perdre parce qu'elle a mangé un biscuit. Dans le monde du show business, plus qu'ailleurs, l'apparence est au centre de tout et son corps est son outil de travail. Avec le temps, Maeve a plus de facilités à contrôler son alimentation. Préparer un petit-déjeuner est devenu un réflexe depuis qu'elle vit avec Shõta. Lui non plus ne mange pas beaucoup, Maeve l'a remarqué mais s'est bien gardée de dire quoi que ce soit.

Concentrée dans ses révisions, elle ne fait pas attention à l'arrivée du jeune homme. Elle n'était pas certaine de le voir avant l'enregistrement des nouveaux épisodes. Maeve entend vaguement son bonjour, ce à quoi elle répond d'un vague geste de la main. Les humeurs de Purville, très peu pour elle. Néanmoins, Maeve ne peut nier le sourire qui commence à se former à la comissure de ses lèvres, après avoir entendu le mot sunshine sortir de sa bouche. Sourire qu'elle se garde bien de révéler, gardant son visage vissé aux pages noircies de lines. ─ You should drink tea instead. Coffee makes you even more unbearable. Elle ne lève toujours pas sa tête, mais sait qu'il est en train de se préparer du café. Elle pourrait décrire, les yeux fermés, ce qu'il fait à chaque heure de la journée. Arrivés à ce stade, il est peut-être temps qu'ils arrêtent la cohabitation. L'odeur du café chaud chatouille ses narines et la met automatiquement de mauvaise humeur. Elle en rêve, mais c'est interdit désormais.

L'assiette de Shõta, qui trône sur le plan de travail, reste désespérément remplie. Maeve n'y fait même plus attention. Tout ce qu'elle espère, c'est qu'il lui fiche la paix pour au moins une heure. Maintenant qu'il est dans la même pièce qu'elle, Maeve a l'impression d'étouffer et de se sentir oppressée. Sa simple présence l'agace au plus haut point. Il lui a manqué hier soir. Elle ne le lui dira pas, évidemment. Il ne prend rien au sérieux, et même si elle aime ce trait de sa personnalité, elle le déteste tout autant.
Visiblement, Purville n'a pas l'air décidé à la laisser tranquille. Sa question tombe mal. Maeve racle sa gorge et étirer les articulations de sa nuque. Elle lève enfin son visage de ses lines et se tourné légèrement dans la direction de Shõta. ─ If I needed help, I wouldn't ask you. But thank you very much for your generous offer, Your Majesty Purville. Elle mime une pseudo révérence, avant de se décaler de nouveau et de se replonger dans son travail. Sa tête est posée contre la paume de sa main. Evidemment, Maeve n'arrive plus à se concentrer correctement. ─ You shouldn't have partied last night and come home so late. It iz bad for your body, lance-t-elle avant d'humidifier son doigt pour passer à la page suivante. En disant ça, Maeve donne presque l'impression de s'inquiéter pour lui, presque. ─ Anyway, you do what you want. Az long az it doesn't affect my career.

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Avec un temps de retard, Shōta s'empare de sa fourchette et commencer à faire la technique ultime de celui qui ne veut pas manger sans qu'on lui pose la moindre question: il attrape un ingrédient, le pousse de l'autre côté de l'assiette, aplatit un peu de porridge, crève le jaune de l'oeuf au plat. N'importe quoi pour créer une illusion de dynamisme et de normalité à cette table du petit-déjeuner. À force de vivre avec elle, il sait que Maeve a remarqué, mais elle n'a jamais rien commenté ou dit à ce propos. Il lui en est très reconnaissant, il n'aime pas en parler. La voix insidieuse de sa mère qui lui rappelle ces règles (tu n'as pas le droit, pas de deuxièmes parts de gâteau, pas le droit à l'écart, boissons zéro ou rien, il faut être parfait, parfait, parfait) existe encore entre ses deux oreilles, lui revient souvent dans ce genre de situations. Et il sait qu'il n'est pas le premier à souffrir à avoir ce genre de questionnements en étant dans le showbusiness... Maeve aussi saute des repas. Il n'en dit jamais rien.

Un silence accueille sa question alors que Maeve se redresse, et que Shōta continue de danser avec les aliments dans son assiette. "If I needed help, I wouldn't ask you. But thank you very much for your generous offer, Your Majesty Purville." Il renifle en levant les yeux au ciel. "Ha-ha." Cette blague est vieille et nulle, mais elle semble toujours autant s'en amuser. "You shouldn't have partied last night and come home so late. It iz bad for your body." Shōta arque les sourcils en l'entendant, une vague d'inconfort venant se glisser sous sa peau avec ce qu'elle vient de dire. "Anyway, you do what you want. Az long az it doesn't affect my career. - Yeah exactly. I do whatever the fuck I want, sweetheart, thanks." Sa voix est un peu plus sèche et mesquine que d'habitude - Maeve semble avoir touché une corde sensible, alors que Shōta reste généralement moqueur, rieur et insouciant dans leurs multiples joutes verbales.

"I know what I'm doing. You should beg for my help, you new money-smelling newcomer, and be grateful when I offer," crâne-t-il d'un ton pincé. "You're the liability to my career, I'm the one who's taking risks with you. You...? Not so much. You got nothing to your name. I should be worried." Piqué à vif, Shōta attrape sa tasse de café et se relève d'un mouvement brusque avant de faire un geste général vers sa plastique parfaite - pectoraux bien dessinés, abdos rutilants, hanches fines en V, le tout sous une peau mouchetée de grains de beauté et sans l'ombre d'un poil. "Also I think I'm fine. Please do remember that you think so too, when I get you wet and moaning when you're pathetically lonely in bed and craving for company," assène-t-il d'un ton joyeux et d'un clin d'oeil mesquin, en reculant d'un pas pour retourner dans sa chambre.

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Maeve sirote de nouveau son thé, comme si de rien n'était. Elle a l'habitude de lui lancer des piques et qu'il les lui renvoie avec plaisir. C'est pour ça, qu'elle ne fait pas attention à sa réponse. Maeve se contente d'arquer un sourcil à son juron suivi d'un sweetheart. Classique Purville. Concentrée sur ses lines, elle ne le voit pas bouillir sur place et prête à cracher son venin sur elle. Leur relation est compliquée. Dire qu'elle l'a détesté dès le premier jour est un euphémisme. Shõta n'est qu'un gamin pourri gâté et bien trop arrogant pour son propre bien. Il se voile la face en sortant à droite et à gauche, en buvant et en se plongeant à corps perdu dans le travail. Maeve connaît bien ce chemin, parce qu'elle l'emprunte elle aussi parfois. S'ils se disputent autant, c'est parce qu'ils se ressemblent. Parfois, Maeve a l'impression de regarder dans un miroir quand elle l'observe. Ils sont trop similaires pour leur propre bien. L'ambiance est souvent tendue, mais elle peut aussi être tendre et bienveillante. Ce qui n'était qu'une pseudo relation, pour faire grimper les audiences de leur série, est devenue bien plus que ça. Maeve ne sait pas comment qualifier ce qu'ils sont. Deux personnes qui se sentent seules, et qui apprécient la compagnie de l'autre. Au fil des mois, des années, ils se sont habitués à leur présence. Si tout devait s'arrêter demain, Maeve ne sait pas comment elle réagirait. Elle dit souvent qu'il l'agace, que ce contrat l'emprisonne, mais le retrouver chaque soir est devenu un rituel dont elle ne peut plus se passer. Maeve sait que ce n'est certainement pas réciproque de son côté. Les sentiments, qui germent en elle, sont compliqués et la déception que cela ne soit pas réciproque serait pire encore que de se retrouver seule par la force des choses.

La situation est réglée pour elle. C'est pour ça, qu'elle manque de cracher son thé lorsqu'elle l'entend continuer son monologue de fils à maman dont l'ego a été piqué. Ce n'est pas nouveau. En revanche, la méchanceté sincère dans ses mots, la volonté d'absolument lui faire mal en retour, ce n'est pas particulièrement dans ses habitudes. Leurs joutes verbales sont toujours théâtrales et dramatiques, rarement aussi blessantes. Outch. Maeve se retourne aussi sec. ─ Shut the fuck up! You know very well that you need me. Your fucking azhole ego pretends otherwize, but without me, there's no story, no show, nothing. Sans s'en rendre compte, Maeve s'était levée pour lui faire face au moment où il se lève brusquemment. Comme toujours, il va fuir le conflit après avoir vidé son sac. Dans ces moments-là, Maeve sait qu'elle ne pourrait jamais rien construire de sain avec lui. Et ce constat lui brise le coeur.
Shõta s'arrête pour montrer sa plastique parfaite, ce qui lui arrache un soupir d'agacement. Maeve ne baisse pas son regard et continue à le fixer droit dans les yeux. Alors qu'elle pensait qu'il avait enfin fini avec son bullshit, Purville remet une couche. Sa réflexion lui arrache un rire étouffé entre ses lèvres. Elle lui tord aussi l'estomac. Cela lui fait mal, plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Comme si de rien n'était, Shõta lui lance un clin d'oeil et se dirige vers sa chambre. Maeve reste quelques secondes immobile, à cause du choc, avant de le suivre d'un pas déterminé. ─ If I remember correctly, I made you cum more than once and you liked it. I don't give a shit about your fucking dick! I really don't need it. Maeve est arrivée à sa hauteur, alors que sa chambre n'est qu'à quelques enjambées. ─ If you are hurt by something you just fucking say it. This, this iz bullshit! And you're a fucking jerk.

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Shōta n'est pas fou au point d'exposer sa nuque et son dos à Maeve; elle n'en profiterait que pour y enfoncer un poignard, il en est persuadé, et il sait qu'elle fera mouche quoiqu'il arrive. Malgré eux, à cause de tout le temps qu'ils ont passé ensemble, ils ont appris à se connaître un peu trop. Elle connait ses faiblesses, les boutons sur lesquels elle peut appuyer pour le faire dérailler, et lui aussi en retour. C'est une sensation désagréable, qui parle d'une vulnérabilité qu'il n'est pas sûr d'être en mesure d'offrir sans y risquer sa peau.
Mais c'est aussi étrangement... réconfortant, d'une certaine manière. Qu'il la connaisse et qu'elle le connaisse en retour. Parfois, Shōta peut presque prétendre que ça veut dire qu'elle le comprend.

Parfois. "Shut the fuck up! You know very well that you need me. Your fucking azhole ego pretends otherwize, but without me, there's no story, no show, nothing." Elle n'a pas tort, mais le sourire mesquin et arrogant qu'arbore Shōta, froid dans sa cruauté, ne laisse rien en voir. Il sait qu'il pourrait se débarasser d'elle, recommencer toute cette charade avec une autre. Avant, il aurait presque pu en avoir envie: la promesse de ne plus jamais avoir à souffrir sa présence aurait été une bénédiction à ses yeux. Aujourd'hui, il n'en est plus si sûr.
Maeve le suit dans l'encadrement de la porte de sa chambre, et Shōta a l'impression d'être en train de gagner la manche - elle répond toujours à ses caprices, même quand ceux-ci se réduisent à la simple envie de l'énerver parce qu'il se sent vexé, vulnérable et ridicule. Maeve a vraiment ce talent de le faire se sentir tout petit.

"If I remember correctly, I made you cum more than once and you liked it. I don't give a shit about your fucking dick! I really don't need it." Shōta renifle en l'entendant. "Yeah, right," siffle-t-il sans pitié, ne bougeant pas d'un poil alors qu'ils sont si proches qu'il peut sentir l'odeur de son shampoing et de son thé émaner d'elle. "If you are hurt by something you just fucking say it. This, this iz bullshit! And you're a fucking jerk. - No, you are." Okay, ce n'est sans doute pas sa répartie la plus mature ou pertinente, mais qu'importe. "Fuck you. Keep your advice to yourself, I don't fucking need it. My life is none of your business. You hear?" Même si ils vivent ensemble. Même si ils sont en couple. Même si...

Les yeux noirs de Shōta dévisagent Maeve, s'attardent un peu sur ses lèvres bien dessinées qu'il connait par coeur - que ce soit sur le plateau de tournage, à la maison ou sur les tapis rouges, il a eu tout le loisir de les explorer à de nombreuses reprises, à son rythmne ou à celui des caméras cristal.
... même si il l'aime bien, au final. Qu'il pense à elle souvent, s'inquiète pour elle, la cherche dans la foule quand ils sont séparés. Même si elle est la seule personne dans sa vie qui peut le comprendre. Qui essaye de le comprendre, d'une manière que Sita ne pourra jamais atteindre. "Fuck you," répète-t-il d'une voix rauque, et il baisse les yeux en serrant les poings avec humeur. Quand il relève les yeux, Maeve est toujours là et elle est tellement proche et Shōta se déteste tellement qu'il déferle comme une vague sur elle, prenant son visage entre ses mains pour l'embrasser brusquement et avec impatience, ainsi qu'un rien de self-loathing lui brûlant l'estomac.

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Il n'aura fallu que quelques minutes à Shõta pour mettre Maeve dans tous ses états d'âmes. That's what he does. He drives her crazy. Every fucking time. Impossible de se retenir d'hausser le ton ou d'être vulgaire. Il induit quelque chose en elle, quelque chose de mauvais, de néfaste. Il a ce pouvoir malsain sur elle. Cette emprise qu'elle nie avec ardeur, parce que cela reviendrait à reconnaître que Shõta compte plus que ce qu'elle ne veut bien l'admettre. Reconnaître qu'elle tient à lui ouvrirait une brèche vulnérable. Lui laisser l'occasion de lui faire mal, vraiment mal n'est pas envisageable. Maeve sait qu'il est capable du pire. Le garder à distance est encore la meilleure des solutions. Se persuader que tout ça ne tient qu'à un morceau de papier est tellement plus facile. Cette relation n'est qu'une partie de leur job. Quand cela ne sera plus nécessaire pour la pour la production, tout s'arrêtera.
Mais tout n'est pas si simple. Obviously. Maeve s'est habituée à la présence de Shõta, à son rire ennuyeux et son odeur convenable. Dans ces moments-là, elle a l'impression se sentir son cœur se briser en un millier de morceaux. Ce n'est plus une question d'ego. Ca ne l'a jamais été à dire vrai.

─ Fuck you! Elle le pointe du doigt en même temps qu'elle lui crache ses insultes au visage. ─ Your life iz literally my fucking business, you idiot! Chacun de ses faits et gestes a un impact sur sa vie, sa carrière. Qu'il prétende l'inverse prouve à quel point il peut être stupide parfois. Même s'il rêve que leurs vies ne soient plus entremêlées, c'est toujours le cas. ─ I fucking live here! We're a fucking couple, Purville! Qu'il l'accepte ou non, c'est comme ça que fonctionne leur vie depuis longtemps déjà. En tout cas, tout ça n'avait pas l'air de le déranger pendant qu'il la baisait. Evidemment.
Le volume sonore descend, mais la tension est bel et bien présente. Maeve ne baisse pas son regard et compte bien obtenir des excuses. A défaut, elle ne sera pas celle à terminer la conversation en premier. Il pensait s'en sortir en fuyant, raté. S'il ne résout pas le problème de fond, ces disputes continueront à arriver. Et Maeve n'est pas certaine d'y faire face encore longtemps.

Poings serrés, elle continue à lui tenir tête même s'il fait vingt centimètres de plus et qu'elle doit se faire mal au cou. S'il l'énerve autant, c'est aussi parce qu'elle l'aime plus que prévu. Même quand il est un véritable connard, Maeve ne peut pas totalement le détester. Impossible.
Les traits de son visage se détendent lentement, jusqu'à ce qu'il l'insulte encore. Elle se mord l'intérieur de la joue, tout en se retenant de ne pas lui envoyer son poing dans la figure. Heureusement pour lui, ils tournent un peu plus tard et un cocard ferait mauvais genre. Lorsqu'il se rapproche d'elle, Maeve sent sa respiration s'accélérer à mesure que sa stupide odeur embaume ses narines. D'un geste brusque, il la colle contre lui et l'embrasse abruptement. Le baiser ne dure qu'une seconde. Maeve se détache de lui et le pousse de ses mains. ─ Asshole! Ses sourcils sont si froncés, qu'ils vont finir par lui créer des rides. Maeve le pousse une nouvelle fois. De quel droit se permet-il de la traiter comme de la merde puis de l'embrasser ? ─ Fuck you! En deux pas, Maeve se rapproche de nouveau de lui, prête à l'insulter, le frapper, n'importe quoi. Elle mord sa lèvre par réflexe. Après un long regard, elle l'embrasse. ─ I hate you, lui crache-t-elle au visage, avant de reposer ses lèvres contre les siennes.

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C'est arrivé comme ça les première fois: sous le coup de l'émotion (généralement la colère), ils finissaient par être tellement à vif qu'ils se perdaient l'un contre l'autre dans un abandon vulgaire et intense. Quand Maeve et lui se disputent, Shōta a l'impression d'être mis à nu, flagellé, écorché morceau par morceau - qu'il n'y a qu'à elle qu'il a montré toute cette vulnérabilité. Il l'aime malgré lui pour ça; il la déteste plus encore pour ça aussi.

Maeve le repousse rapidement, avant même qu'il ait pris le temps de s'attarder sur ses lèvres. Shōta bouge à peine, arque les sourcils dans sa direction. "Asshole!" Elle le pousse, et Shōta se laisse reculer jusqu'à être acculé contre le mur près de la porte de sa chambre, ses yeux noirs deux éclats arrogants la défiant (la suppliant de ne pas) de le laisser seul. "Fuck you! - You wish," raille-t-il d'un ton mesquin, ses épaules se tendant quand Maeve se rapproche, prête à le frapper. Mais elle hésite et puis, elle l'embrasse, Shōta se penchant immédiatement vers elle pour sceller leur étreinte, un bras s'enroulant autour de sa taille. "I hate you." Un rire silencieux éclate sous les côtes de Shōta en l'entendant, quand elle lui siffle ça au nez entre deux baisers. "Yeah," souffle-t-il en retour. "I know." Sa haine veut dire plus pour lui que tous l'amour de ses fans.

Sa tête lui fait un mal de chien, mais les vagues de mal-être le tourmentant depuis son réveil difficile se calment peu à peu au rythmne des baisers qu'il échange avec Maeve. Shōta la serre contre lui avec force, lui laisser à peine le temps ou l'espace de s'éloigner, ayant besoin de la sentir proche de lui, de profiter pleinement de la silhouette de son coeur remplissant la sienne, ses lèvres contre les siennes, son souffle se mélangeant au sien.

Quand ils se détachent enfin, Shōta balaye les traits de Maeve d'un regard impatient, sa main posée sur le bas de son dos l'attirant un peu vers lui alors qu'il fait un pas de côté pour commencer à aller à reculons dans sa chambre. L'invitation est équivoque, pense-t-il, tout comme son regard interrogateur - il fait ainsi preuve d'une prévenance qu'on lui connait mal, mais il sait que Maeve l'appréciera. "We have some time," essaye même-t-il de la convaincre, se rapprochant d'elle pour coller son corps à moitié nu contre le sien, ses lèvres venant tracer une ligne de baisers le long de sa mâchoire et de son cou, une rangée de dents taquinant la forme de sa gorge. Une de ses mains trouve celle de Maeve, et il noue leurs doigts avec une force non-nécessaire, comme si il avait peur de la perdre ou, pire, qu'elle se détourne et s'enfuit loin de lui à toutes jambes. Shōta est possessif et demandeur, terrifié qu'elle finisse par un jour décider qu'elle en a marre de lui, de ce contrat stupide et de cette vie maladroite qu'ils sont parvenus à se construire à deux. Il sait aussi qu'il n'a absolument rien à lui ouvrir: qu'il est aussi creux et superificiel que son image médiatique laisse imaginer, et qu'elle finira, comme tout le monde, par s'en apercevoir.

Alors il lui donne la seule chose qu'elle veut de lui: de la chaleur et des baisers, de plus en plus pressants alors qu'il remonte vers ses lèvres pour les capturer de nouveau avec ardeur, guidant la main libre de Maeve sur son torse avec impatience. "Sorry for snapping." Le murmure pourrait presque être un rêve, soufflé entre deux respirations brûlantes, et Shōta le ravale bien vite en écrasant de nouveau ses lèvres sur celles de Maeve en la guidant vers son lit.

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Maeve n'aime pas Shõta. Elle le déteste, elle vient de le lui dire. Et il le sait. Elle le hait mais elle l'embrasse. Parce qu'il est tellement plus facile de se cacher derrière le sexe, que de parler de sentiments. Pourtant, ils se sont racontés des choses intimes, des choses personnelles dont ils sont les seuls détenteurs. Jamais rien au sujet de leur relation. Après tout, ce cinéma n'est destiné qu'à servir leur carrière. Il n'y a rien de plus. Il ne peut rien y avoir de plus. Ensemble, ils ne sont qu'un chaos destructeur. Ils ne pourront jamais construire une relation saine et un avenir durable. Tout repose sur un contrat. Alors Maeve préfère lui hurler dessus avant de s'abandonner à ses lèvres. Parce que c'est plus facile.

Shõta s'assure qu'elle ne s'éloigne pas trop de lui, en pressant sa main contre le bas de son dos. Elle ne compte de toute façon pas s'en aller tout de suite. La conversation a pris une tournure bien plus intéressante, comme à chaque fois qu'ils se disputent. Purville ne met pas longtemps avant de lui confirmer la suite logique des choses. Il ne précipite néanmoins pas la suite et s'arrête presque pour être certain qu'elle partage la même envie que lui. — I know, glisse-t-elle entre deux baisers contre l'ossature de sa mâchoire. Qu'il se soucie d'avoir son consentement lui fait plaisir. Cela le rend dix fois plus désirable à ses yeux. Shõta continue à embrasser chaque recoin de sa peau et Maeve ne peut s'empêcher de retenir quelques soupirs. Elle laisse une main se balader contre son dos, y enfonçant subtilement ses ongles. Lorsqu'il attrape son autre main et la serre, Maeve se joint à lui pour serrer la sienne à son tour. A cet instant, ils sont tous les deux terrifiés à l'idée que cet instant se termine. Parce qu'il n'y a que dans ces moments-là, qu'ils arrivent à exprimer ce qu'ils ressentent l'un pour l'autre. Maeve est trop attachée à Shõta pour imaginer une vie sans lui. Et pourtant, cette relation est fragile et instable, suspendue à des instants comme celui-là.
Après de longues minutes, il retrouve ses lèvres avec passion et se joint à lui. Maeve ne peut pas s'empêcher de rouler des yeux, lorsqu'il essaye de prendre le lead en posant sa main libre contre son torse. Alors, Maeve s'empresse de la faire glisser sur ses fesses pour les pincer. — I know, but please shut up Purville. Elle libère ses deux mains et en profite pour le pousser en direction sur son lit. Elle défait le lacet de sa robe, qui tombe rapidement sur le sol. — Enjoy the show! Maeve se pavane quelques secondes, avant de le rejoindre en se mettant au dessus de lui. Cette fois, c'est elle qui décide de passer ses mains contre son torse. Elle prend le temps de l'observer un peu. Maeve ne résiste pas longtemps avant d'encadrer sa mâchoire de ses paumes et d'embrasser ses lèvres. Son tour est venu de parsemer sa peau de baisers. Son coeur bat la chamade, alors qu'elle réalise qu'ils évincent encore une fois la vraie conversation pour s'abandonner l'un à l'autre dans une étreinte pressante.

Maeve n'aime pas Shõta. Pourtant elle ne supporterait pas qu'ils se séparent. Elle le déteste mais l'idée qu'il soit avec quelqu'un d'autre lui donne envie de vomir. Maeve le déteste, parce que c'est ce qu'elle doit ressentir à son égard. Ils ne sont pas faits pour être ensemble. Shõta ne respecte que le contrat. Il ne serait jamais intéressé à elle en dehors de ce foutu morceau de papier.
Elle s'arrête subitement dans sa lancée. Impossible de continuer. Même le sexe ne lui semble plus être la solution à tous leurs problèmes. Elle ne l'aime pas. Pourtant Maeve a des sentiments à son égard et elle en est terrifiée. — I'm sorry, I can't. Elle se relève rapidement, cherchant maladroitement ses vêtements.

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"I know, but please shut up Purville." Shōta sourit légèrement en l'entendant, malgré lui, malgré le pincement sur ses fesses, malgré le fait qu'il sait que cette situation n'est ni optimale ni saine pour l'un comme pour l'autre. Mais à quoi bon s'en soucier tout de suite? Il rit un peu quand Maeve le pousse sur le lit et la regarde, avec un air adorateur, se débarasser de sa robe. Ses yeux sombres la détaillent avec avidité, explorent son corps qu'il connait par coeur. Assis sur le bord du lit, ses mains derrière lui pour se soutenir, Shōta regarde Maeve comme si il n'avait jamais connu la moindre autre femme et comme si elle était le centre de son univers. "Enjoy the show! - Oh, I am," ronronne-t-il en réponse, nouant ses bras autour d'elle quand elle le rejoint sur le lit.
Il se laisse retomber en arrière, elle sur lui, ses mains caressant ses côtes, ses hanches, ses fesses. Il sourit, languide, sous l'attention des yeux, des mains et des lèvres de Maeve, répond à ses baisers quand elle l'embrasse enfin.

Leurs corps se connaissent parfaitement, maintenant. Shōta caresse doucement le bas de son dos, glisse son autre main dans ses cheveux, ses lèvres embrassant celles de Maeve avec fermeté et assurance. Une de ses jambes se glisse entre les siennes, il la serre contre lui, sent déjà son érection se réveiller... "I'm sorry, I can't." Et puis le vide. Maeve s'est échappée de son étreinte et s'est glissée en dehors de ses draps en un instant. "What?" Shōta rit un peu, sans joie, en se redressant sur ses coudes pour la regarder ramasser ses vêtements. "Come on, Maeve. Come back." Il rit, un peu, amusé par la soudaine brusquerie maladroite de Maeve qui tourne dans sa chambre comme un lion en cage. Mais malgré son ton plaintif et amusé à la fois, Maeve se tourne à peine vers lui.

"Wait, are you serious? Are you fucking serious?" Shōta ne rit plus. Il fronce les sourcils et se lève pour s'approcher d'elle. "Come on, don't be silly... what are you doing?" Il arque un sourcil en tendant la main pour attraper le bras de Maeve, grognant quand elle l'esquive. Il trouve ça ridicule et incompréhensible. Ils ont fait ça des milliers de fois, qu'est-ce qui l'embête, là, tout de suite? "What the fuck, Maeve?" gronde-t-il d'un air irrité. Il ne comprend pas ce qu'il se passe et essaye de sourire mais n'y parvient pas, la regardant plutôt ramasser sa robe avec des yeux exorbités et confus. Quand il s'approche, elle recule presque alors Shōta fait la seule chose qui lui vient à l'esprit: il la contourne pour se placer entre elle et la porte de sa chambre. "What the hell is going on?"