Un froncement de sourcils ennuyé accompagne Corban Yaxley alors qu'il quitte le bureau d'Abbas en claquant la porte. Le Directeur du Département des Mystères n'a pas besoin d'alerter son secrétaire pour que ce dernier pense à raccompagner le chef de la VB jusqu'à la porte du Département pour la lui ouvrir avec une clef-squelette - il a déjà fallu l'accompagner au sein des Mystères, un fait pas très apprécié par un Corban préférant manifestement faire comme si il était capable de faire quoique ce soit seul. Abbas a peine plus de sympathie pour son jeune frère Kalen, un invité récurrent à la table du dîner des Shafiq et un grand ami d'Elisabeth, mais Corban est un peu plus facile à cerner que son cadet. Ses émotions se lisent partout sur son visage et dans son regard, et même si il ne l'avait pas écouté, même Abbas aurait bien fini par comprendre qu'il était frustré.

Il pousse un soupir en levant une main vers son visage, se pinçant l'arête du nez avec force avant de laisser ses doigts glisser dans ses cheveux noirs. Abbas n'est manifestement pas un très bon patron: il laisse à ses employés tout le soin d'accomplir leurs projets en temps et en heures, du moment qu'ils ne dépassent pas leurs budgets et qu'ils le laissent plus ou moins tranquille. Ce à quoi s'adonne le Directeur du Département dans son bureau est un mystère pour tous et pour lui aussi. Abbas passe le plus clair de son temps à lire, à méditer, et à lire les divers rapports qui font leur chemin jusqu'à son bureau avant d'y apposer sa signature. Des journées bien remplies, somme toute.

C'est pour ça qu'il est particulièrement fatigué à l'idée de devoir aller échanger quelques mots avec Markus von Bäume - mais il n'a malheureusement pas le choix.

Abbas resserre nerveusement sa cravate autour de son cou en se relevant, lissant sa chemise sur son torse et réattachant le bouton de sa veste en sortant de son bureau. Comme attendu, son secrétaire n'est nulle part et il n'a pas le loisir d'échanger quelques mots réconfortants avec. À la place, après une énième main passée dans ses cheveux, Abbas s'engage dans les longs couloirs étroits et labyrinthiques du N9 qu'il connait comme le dos de sa main, usant de sa clef-squelette dorée pour aller de salle en salle jusqu'à l'espace de travail de monsieur von Bäume.

Le léger dégoût qu'il ressent à l'idée d'y mettre les pieds est repoussé au fin fond de lui, et c'est avec une expression lisse qu'il regarde Markus travaille pendant quelques secondes avant de s'éclaircir la gorge pour l'alerter de sa présence. "Monsieur van Bäume?" appelle-t-il d'un ton laconique, lui offrant un petit sourire quand son employé se tourne vers lui. "Auriez-vous quelques minutes à m'accorder?"

Quelques secondes s'égrennent paresseusement dans un silence d'or, Abbas en profitant pour rassembler ses pensées en se faisant la réflexion que Markus n'a peut-être pas appris les mêmes codes sociaux que lui. « C’est Von Bäume. » Le jeune homme est aussi sympathique qu'une porte de prison, mais qu'importe à Abbas qui fronce les sourcils sans comprendre. "Hm, très bien." Il n'entend pas vraiment la différence et penche la tête sur le côté, faisant quelques pas de plus dans la pièce alors que Markus se lave les mains puis leur tire deux tabourets. Il est encore en train de retourner dans sa tête cette histoire de patronyme en s'asseyant, adressant une caresse au mobilier câlin comme si il était bel et bien vivant.

Les sourcils d'Abbas se froncent de plus belle en voyant von Bäume sortir une cigerette et l'allumer. Son nez se froisse, tout comme sa sensibilité à cette odeur néfaste et infecte qu'il méprise, et ses grands yeux humides débordent d'un mélange de pitié et de désapprobation silencieuses. Toutefois, le directeur des Mystères est bien trop timoré pour faire la quelconque remarque, semblant aussi habitué à avoir des responsabilités qu'à avoir la Marque du Lord sur le bras ou la bague de l'Élite autour du doigt. « C’est à quel propos ? - C'est à propos de notre collaboration avec le département de la Justice Magique, plus précisément la Wizard Defence Values Brigade." Abbas s'éclaircit la gorge, balaye l'air d'un air affecté quand la fumée violette s'approche de lui, et baisse les yeux sur le dossier noir qu'il a posé en équilibre sur ses genoux croisés.

"J'ai reçu la visite de monsieur Yaxley, Corban, qui est venu me communiquer sa déception quant aux résultats de vos petites... expérimentations." Abbas ouvre le dossier et se met à parcourir le rapport de Yaxley, ainsi que celui de ses employés, d'un regard analytique, avant de tendre le tout à Markus. "Vous pouvez imaginer que c'était plutôt désagréable." Il lui adresse un sourire affable qu'il veut complice mais qui est aussi fade qu'inutile face à l'indifférence de Markus. "J'aimerais que vous... régliez la solution... je sais pas, peut-être recommencer depuis le début, out améliorer vos résultats... faire quelque chose, en somme, pour corriger le tir." Quoi exactement, Abbas n'en a pas la moindre foutue idée. Il est un expert de la magie de l'esprit, pas du séquençage des génômes des hybrides! "En êtes-vous capable?" demande-t-il ensuite, simplement et frontalement, comme souvent.

Markus rit un peu, entre deux volutes de fumée, ce qui fait se froncer les sourcils d'Abbas qui est quant à lui terriblement sérieux. Abbas lève une main hésitante vers le noeud de sa cravate en velours pour l'ajuster d'un air gêné en s'éclaircissant la gorge. « Ça dépend, monsieur Yaxley Corban est-il capable de garder les Hounds qu’on lui envoie à la Brigade ? » Abbas hausse une épaule sans vraiment saisir le sarcasme dégoulinant pourtant de la voix de von Bäume. "Je crois que c'est son problème, et non le mien." Abbas est bien content quand il peut blâmer les autres, que ce soit sa famille, ses employés ou ses confrères Mangemorts: il n'est qu'un pauvre administrateur dans cette affaire, et il n'a rien demandé à personne. Ce n'est pas si difficile à comprendre.

(Dans un recoin de sa tête, il pense à la déception presque palpable de Penny face à son comportement de lâche; il repousse sa voix pleine de reproches tendres avec habitude, et la barricade derrière un mur d'Occlumancie en béton armé.)

Abbas attend toujours la réponse à sa question d'un air un peu boudeur et embêté, espérant avoir l'air encourageant « Aucun résultat n’est garanti, dans nos expériences, pas même la survie. Le but de surveiller nos cobayes une fois ceux-ci réintégrés au sein de la Values Brigade est de pouvoir améliorer nos travaux. De quoi est-il déçu, ce cher Corban ? - Monsieur Yaxley," le réprend Abbas avec douceur, "est déçu de la performance générale, du fait que les sujets ne soient pas complètement obéissants et évidemment, le délai entre commande et réception." Il est si facile d'en parler comme des objets, de la marchandise pour laquelle il n'a ni affect ni intérêt, détaillant posément le visage de Markus en se demandant bien ce qu'il peut se passer derrière ses grands yeux noirs.

Il serait facile d'y glisser et d'en retirer ce qu'il désire, mais Abbas s'abstient. "Je vais être honnête avec vous, Markus, vous allez devoir corriger le tir." Cette expression, encore (il l'a préparée avant de venir, sans trop savoir lui-même ce qu'il veut dire par là). Très corporate. "Je comprends votre... désarroi, Markus - je me permets -, je sais aussi que c'est frustrant. Au-dehors, les gens ne comprennent pas vraiment ce que nous faisons ici. J'ai besoin que vous me disiez si il y a quoique ce soit qui peut être fait pour, eh bien, corriger le tir. Vous voyez ce que je veux dire?"

« Je vois. » Une vague de soulagement s'abat sur les épaules d'Abbas, qui se détendent d'un coup et le forcent à se renforgner légèrement. Sur les coins de ses lèvres, quelque chose ressemblant à un fin sourire joue, une ombre bien vite ravalée  par la prétension qu'a le Directeur des Mystères à l'affabilité. "Parfait, parfait," marmonne-t-il, estimant (espérant) le sujet clos. Il a donné ses ordres nébuleux, a transmis ses attentions impossibles, il est désormais libre de ne plus avoir à souffrir la présence de van von Bäume plus qu'il n'en faut.

« Il me faudrait un, ou deux, nouveau cobaye, pour appliquer de nouvelles idées. Pas un membre de la Values Brigade : n’importe quel maudit fera l’affaire. Ceux déjà en circulation doivent être observés davantage, avant qu’on puisse corriger quoi que ce soit. » Abbas penche la tête sur le côté, embêté au début de voir l'entretien se prolonger, puis rassuré par la teneur de la demande de son employé. Rien d'impossible, loin de là. Mais quelque chose d'embêtant tout de même. "Je verrai ce que je peux faire pour vous en procurer plus." Il pourra peut-être aller piocher du côté de Zabini et l'autre Yaxley. Est-ce qu'il pourrait convaincre Blaise de lui céder Alvarez? Ah, un sorcier peut bien rêver... « Il est toutefois possible de les rendre plus obéissants. Ce sera simplement l’affaire de demander à un runiste du bureau d’affiner leur glyphe. Vous pouvez dire ça à Corban. - Je transmettrai l'information à monsieur Yaxley." Étrange gymnastique des sourcils de la part du joueur affable pour rappeler la politesse à Markus.

Il repense, avec une certaine tristesse, à la disparition d'Eun-Ji Rosier - elle avait été invitée par lui-même pour réenforcer les protections du Département des Mystères et par le Lord ensuite pour son espace de travail dans les intestins du Ministère. Il connaît d'autres runistes, bien sûr, et il va lui falloir trouver le.a meilleur.e d'entre eux avec de le.a proposer à Corban.

« Vous, Abbas, » l'interpelle Markus, le tirant de la liste de contacts méthodique qu'il est en train de dresser dans sa tête, et lui arrachant un froncement de sourcils désapprobateur. « Avez-vous une demande particulière ? Vous comprenez bien mieux que Corban ce que nous faisons, ici : c’est l’occasion. » Voilà une exaggération dont ils sont tous les deux douloureusement conscients, mais qu'importe. "Seulement votre respect, mais même moi ne suis pas assez naïf pour espérer y avoir droit un jour." Le ton n'est ni amer ni plein de reproches - plat, peut-être, alors que les sourcils d'Abbas sont désormais haussés dans une expression gentiment défiante. Comme si Markus allait le contredire. "Je ne prétends pas connaître ou véritablement comprendre tout ce qui se passe entre les murs du département. Mes aspirations, académiques et professionnelles, appartiennent ailleurs, monsieur von Bäume." Il revient sur la marque de familiarité qu'il s'est permise plus tôt, n'appréciant pas coment son interlocuteur l'utiilise en retour. "On a vite fait le tour de la salle de l'esprit," déplore-t-il avec une véritable tristesse. "Ce que je veux, c'est que ce département évolue sans heurt, et apporte des réponses aux questions métamagiques et philosophiques de notre pratique magique contemporaine." On le dirait à l'un de ses rendez-vous trimestriels dans le bureau parfumé d'Umbridge à lui implorer un budget plus conséquent pour les mois à venir.

La voix d'Abbas est calme comme la surface d'un lac alors qu'il se détourne de l'allemand, laisse ses yeux sombres explorer le laboratoire distraitement. "Et ce que je désire par-dessus tout, c'est servir notre Seigneur des Ténèbres." Les yeux d'Abbas reviennent à Markus, pénétrants et intenses, sa main disparaissant tranquillement dans sa poche pour effleurer sa baguette. Legilimens, lui hurle son esprit. Fais-le, fais-le, fais-le.
Ah, comme Abbas regrette Poppy, en train de libérer une autre ville moldue à l'autre bout du pays - elle seule pourrait vraiment comprendre la profondeur de la tentation de fouiller les pensées du monde autour de lui à chaque contrariété. "D'où notre collaboration avec la Justice Magique. D'où notre besoin de corriger le tir. D'où vos futurs résultats efficaces et pertinents que je me ferai un plaisir de présenter pour vous." Un sourire, timide et bienveillant, étire les lèvres d'Abbas. "Cela répond à votre question?"

« Je suppose. » Le mince sourire d'Abbas s'étire - un vrai sourire, qui fait briller ses yeux sombres d'un éclat tendre et timide - d'un air fier... « Même si vous n’avez rien dit, en fait. » ...avant de se dégonfler comme un ballon de baudruche. C'en est presque comique: l'air s'extirpe de ses poumons dans un sifflement audible et ses épaules se renfrognent un peu minablement, donnant à sa poitrine un angle concave et à sa moue un air désespéré.

Ce serait si simple, de s'immiscer dans l'esprit du von Bäume et d'y dénicher les clefs à enfoncer dans les bonnes serrures pour qu'il arrête d'être si... horripilant, non, pas vraiment. Frustrant? Abbas lui envie secrètement sa confiance en lui et sa tranquilité manifeste; ce n'est pas à lui que la menace du Basilic va faire peur, et tant mieux sans doute. Markus est une énigme désagréable, un mystère que Abbas n'arrive pas à percer. Et si, d'ordinaire, il sait apprécier les casse-tête; celui-ci lui casse simplement les couilles. « C’est sûr que si tous les chercheurs de la Salle de l’Esprit sont comme vous, il n’y aura aucune réponse qui viendra de là. » Comme vous. Abbas se demande ce que ces deux petits mots veulent bien dire, à quoi Markus pense quand il le regarde, ce qu'il pense réellement de lui. Du mépris, certes, mais quoi d'autre?

Le sourire d'Abbas revient sur ses lèvres, après une hésitation et avec un air vaguement douloureux. Il hoche la tête, laisse l'insulte glisser sur lui avec plus de couardise que d'humilité. "Si c'est ce que vous pensez, alors vous connaissez l'étendue de votre importance entre ces murs," offre-t-il en réponse, ses yeux vissés sur l'épaule de Markus avant de rapidement revenir confronter les siens. "Merci pour votre temps, vous savez où me trouver en cas de besoin." Il ne se fait pas trop d'illusion, mais cette politesse empruntée et raide lui vient que trop facilement, tout comme ce sourire qui ne quitte pas ses lèvres, pincé et maladroit. "Je donnerai suite en fin de semaine prochaine. Merci, monsieur von Bäume." Il marmonne un petit "excusez-moi" et un autre "merci" en s'échappant à l'odeur nauséabonde de la clope et au regard pesant du sorcier; et c'est seulement quand il est de retour dans son bureau, quelques cinq minutes plus tard, qu'il se donne l'opportunité de respirer correctement.