| | | Be brave to stand for what you believe in. Pour la première fois depuis qu’elle s’était engagée dans la résistance, Josephine était réticente. Elle avait traîné chez elle, avait fait les cent pas, avait retardé au maximum la rencontre avec sa nouvelle référente. Rien que l’idée lui faisait l’effet d’un coup de poing dans la poitrine. Sa nouvelle référente. Pas l’ancienne. Pas celle à qui elle avait appris à faire confiance, celle qu’elle avait fini par apprécier et par considérer comme une véritable amie. Non, une nouvelle. Parce que l’ancienne, elle était partie, emportée par cette guerre, par cette lutte incessante dans laquelle le monde des sorciers était plongé. Jo avait d’abord refusé d’y croire, prise au dépourvu. C’était si brutal, si soudain, si douloureux. Voilà ce qu’elle ressentait plus que le reste, de la douleur. La déchirure de perdre une énième personne dans ce combat sans merci, la désillusion après une énième défaite. Est-ce que les choses allaient finir par s’arranger ? Est-ce que le vent allait enfin commencer à souffler du bon côté ? Combien de personnes devraient encore laisser leur vie pour que les autres réagissent ? La jeune femme soupira, tout ça n’avait aucun sens. L’inaction des sorciers trouvant leur compte dans cette situation, le désoeuvrement de certains sang-mêlés se croyant à l’abri, l’oisiveté ou la naïveté de ceux refusant de voir la vérité en face. C’était tellement plus simple d’attendre qu’il soit trop tard, apparemment. D’un geste de la main, elle vérifia que sa baguette était toujours dans sa poche, à l’abri des regards. Le Londres moldu, elle le connaissait par cœur, elle l’avait parcouru en long, en large, en travers. Tant pendant son enfance que pendant ses missions au ministère. Se faire passer pour un non-mage était loin d’être compliqué quand on avait l’habitude de le faire. Elle parcourut quelques rues, s’arrêtant de temps à autre, empruntant parfois le trajet le plus long, parfois le plus court. S’il y avait une chose qu’elle avait apprise durant ces dernières années, c’était de faire en sorte d’être imprévisible. Elle n’utilisait jamais deux fois le même chemin pour aller au même endroit, jamais à la même heure, jamais sans surveiller ses arrières. C’était devenu un réflexe, un instinct qu’elle avait développé à force d’expériences. Les siennes et celles des autres. Elle avait vu trop de personnes se faire attraper, avec une facilité déconcertante. Parce qu’ils avaient leur routine, leur petit quotidien et qu’ils n’avaient pas pensé à le changer. C’était probablement le plus compliqué, d’aller contre son mental. De faire taire son cerveau, ce besoin de régularité, d’aller à l’inverse de ce qu’on voudrait faire. C’était compliqué mais c’était nécessaire. Jo parcourut les derniers mètres qui la séparaient d’un vieux pub en plein Covent Garden. Elle ouvrit la porte et s’immisça à l’intérieur, prenant place à une table assez proche d’une fenêtre, d’une sortie, d’une quelconque échappatoire. Au cas où. Tout ce qu’on lui avait donné, c’était un nom de code : Scarlet. Une chanson des Stones, un personnage de comics ? Elle avait souri de la coïncidence : Scarlet witch, une héroïne de fiction pour les moldus, une héroïne bien réelle pour les sorciers. Parce que c’était ce qu’ils étaient tous, chacun des membres de la résistance, des héros. Avec les pouvoirs, la cape, les valeurs. Sans la combinaison moulante. Un coup d’oeil à l’horloge fit comprendre à la jeune femme qu’il était temps de découvrir à qui elle allait devoir rendre des comptes à partir de maintenant. Il n’était plus question d’attachement, ou d’amitié. Elle s’en tiendrait à un rapport par mois, peut-être deux dans l’absolu. Les conversations se limiteraient à l’essentiel, les vies personnelles ne seraient pas mentionnées. Elle avait fait l’erreur de s’attacher une fois, c’était déjà une fois de trop. Josephine tourna la tête vers l’entrée au moment même où une silhouette familière apparaissait dans l’encadrement. Les chances pour qu’une autre sorcière se présente dans ce pub précis, à cette heure précise étaient relativement faibles. Cela ne pouvait signifier qu’une chose. Jo fit un signe discret de la main à la nouvelle arrivante, oubliant presque ce qu’elle s’était promis quelques secondes auparavant. « Susan and Josephine in a pub. What happened to the library girls? » Un sourire passa sur ses lèvres, en souvenir de cette époque qui paraissait si lointaine à présent. Elles avaient grandi, elles avaient changé. Elles étaient devenues des personnes différentes et pourtant elles avaient un objectif identique. « It's nice to see you though, it's been a while. » |
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