- and my cold little heart -
cornelia & gregoryVincent.J'aimerai t'écrire plein de choses, te dire plein de choses en fait, j'aimerai essayer d'être un poète une fois dans ma vie, être romantique, même si tu te moquerais de moi, j'aimerai te dire que je tiens à toi de mille et une façon, j'aimerai te faire comprendre que tu n'étais pas juste un camarade de classe, pas juste un gars avec qui j'ai passé du bon temps, pas simplement un mouchoir que j'ai utilisé et que j'ai jeté. J'aimerai te dire que tu me manques un peu, beaucoup, cruellement. J'aimerai te dire que je suis désolé de t'avoir arraché quelque chose en toi, d'avoir eu ce pouvoir de te faire mal, d'avoir choisi de suivre mon père et ma famille plutôt que toi, d'avoir renoncé à nos rêves communs, d'avoir marché, écrasé, craché sur nos projets, sur notre avenir commun.
Vincent.Au final, j'aimerai te dire plein de choses futiles.
J'aimerai te dire une seule chose que je n'ai jamais réussi à te dire, à croire que ça m'écorche les lèvres, que ça te donne le pouvoir à ton tour, de me faire du mal, car toi, tu l'as déjà fait. Toi, tu l'as déjà dit. Mais pas moi, jamais, malgré tes regards insistants, malgré ton désir brûlant de l'entendre, je n'ai rien dit, j'ai laissé le bruit du silence régner entre toi et moi.
Vincent.J'aimerai simplement trouver le courage de te dire que
je t'aime, que je t'ai aimé.
Je pose ma plume et j'observe ma lettre. Elle ne me plaît pas, comme les précédentes. L'écriture est grossière et de nombreuses ratures sont visibles, certainement plusieurs fautes aussi. Et puis je crois que ce n'est pas quelque chose qui s'écrit, au contraire, c'est quelque chose que l'on doit dire en face, en tête à tête, mais je suis trop lâche pour le faire.
Lâche. T'es vraiment pathétique, mon vieux. Je laisse échapper un énième soupir d'exaspération tandis que je saisis ma baguette. La magie est utile. Elle peut effacer nos erreurs ou au contraire, nous permettre de les accumuler. J'enflamme une nouvelle fois la lettre qui se disloque pour finir en cendres. Des cendres partout sur mon bureau et cette odeur qui plane dans l'air. Je ne veux laisser aucune trace et si j'ai envie de dire à Vincent ce que j'ai sur le coeur, quelque chose m'en empêche, comme toujours.
Pourquoi ? Pourquoi cette raison soudaine ? Sans doute parce que ce matin, j'ai appris que je ne faisais plus partie du
club des célibataires, mais que j'avais apparemment, une
future fiancée. Ce n'est pas encore officiel, mais ce n'est qu'une question de jour pour que ça le soit, j'imagine. Et qui est l'heureuse élue ? Je ne la connais que trop bien, ou pas justement.
Cornelia Slughorn. Une ancienne camarade que je n'ai jamais apprécié. Trop en retrait, trop sincère, trop cinglante dans ses paroles, trop intelligente, trop vipère pour moi. Et pourtant, je n'ai pas mon mot à dire. Elle sera celle à qui je devrais dire oui et j'imagine, faire des enfants. Cette optique ne me réjouit pas. J'ai l'impression que le peu de liberté qui me reste vient de s'évaporer, de s'envoler pour ne devenir que poussière. Le vent souffle fort contre ma fenêtre, mais j'entends des voix qui s'élèvent. Je trouve le courage de me relever et j'approche de la vitre pour regarder en bas l'agitation présente. Elle se tient là.
La fiancée et sa famille. Un petit repas en famille ce soir, pour apprendre à se connaître, pour échanger quelques mondanités médiocres et louer la gloire du Seigneur des Ténèbres avant d'annoncer la nouvelle à tous.
Toi non plus, tu n'as pas l'air heureuse, Cornelia... je sais qu'elle ne peut pas entendre, mais je ne m'adresse pas à elle. Pas vraiment. J'observe silencieusement, le front posé contre ma vitre jusqu'à ce qu'ils entrent enfin dans la maison. J'imagine que c'est maintenant le moment où je dois descendre, sourire
ou pas et découvrir enfin ma fiancée.
Sans aucun entrain, je noue une cravate autour de mon cou. Je laisse ma baguette sur le bureau, près des cendres. Je n'aime pas ma chambre et je suis content de ne pas vivre ici, de ne la conserver que pour la forme. J'ai hâte de retrouver mon repaire au Chaudron Baveur et de quitter la scène qui va se jouer ce soir. Comédie ? Tragédie ? Un peu des deux ? J'opterai pour le burlesque à souhait. Pourquoi pas ? Après tout, si je le veux ce soir, j'arrête tout avant que cela ne commence. Je n'ai qu'à avouer à mon père, ma mère, à tous ceux présents ce soir - heureusement, le petit frère n'est pas là, merci car ça aurait été la cerise sur le gâteau - que je n'ai plus le sang pur, que je suis maudit et que bientôt, je me changerai en loup-garou.
Non, y a forcément un remède, Greg.Je n'accepte toujours pas la situation, une dizaine de jours plus tard, je cherche encore une solution, même si ma conscience sait que c'est inéluctable, définitif, ancré en moi comme une marque maudite, je veux croire que ce n'est pas le cas et je ne compte pas en parler, ni à ma famille, ni à ma fiancée.
Bonsoir. J'ai terminé de descendre les dernières marches qui me séparent du hall d'entrée à l'accès aux chambres. Mes salutations brèves se font pour les Slughorn. Mon père lui, tient déjà un verre de brandy à la main et en propose aux invités. Avec ma mère, ils sont sans doute les plus joyeux et ça parle de tout et de rien, tandis que ma mère saisit mon bras pour m'attirer vers
the chosen one. Cornelia. Je pose enfin mes pupilles sur elle. J'ai suivi les conseils de ma mère et j'ai opté pour un costume blanc, comme si j'étais pur.
C'est risible, mais je n'aime pas la décevoir, je crois. La seule note de couleur vient de ma cravate, verte émeraude, pour rappeler que j'étais un serpent. C'était presque le
dress code du jour pour les deux prisonniers, du vert émeraude.
Cornelia, je n'aurai jamais imaginé te revoir un jour dans de telles circonstances. C'est tout ce que je trouve à dire. J'articule difficilement, mais maman ne semble pas le remarquer. Elle sourit grandement avant de nous laisser. C'est certainement ainsi que cela va se passer, nous laisser parler, nous laisser nous
apprivoiser le temps d'une soirée avant de signer un quelconque contrat dont nous serons les jouets. Je prends à mon tour un verre posé sur la déserte pour savourer un brandy et je me rends compte que le feu qui crépite dans la cheminée fait ressortir la chevelure blonde de Cornelia. Nul doute qu'elle a un charme fou, mais elle ne m'aime pas et moi non plus.
Essai d'être poli, courtois, gentleman Greg. C'est mon verre que je lui tend avant dans saisir un autre.
Alors, qu'est ce que tu deviens, depuis tout ce temps ? J'imagine que tu as été surprise d'apprendre ça. Je marque une pause, je laisse le liquide chaud me brûler délicieusement la gorge le temps d'une gorgée.
Je n'étais pas au courant qu'il cherchait vraiment quelqu'un pour moi. Je veux dire... Mon cher père voulait que je me trouve quelqu'un bien sûr, mais je ne pensais pas qu'il allait concrétiser tout ça. Pardon Vincent.Ce soir, aucun hibou, aucune chouette, ne vole chez toi. Ce soir, je vais essayer de jouer la comédie et d'être le fils presque parfait.